Tribunal judiciaire de Paris, 16 septembre 2016
Tribunal judiciaire de Paris, 16 septembre 2016

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Campagne publicitaire sur un produit contrefaisant

Résumé

La diffusion d’une campagne publicitaire pour un produit contrefaisant constitue une concurrence déloyale, car elle engendre un risque de confusion sur l’origine du produit. Cette médiatisation intense peut laisser penser à une association de marque, banalisant ainsi le produit contrefait, notamment s’il s’agit d’un article de luxe. En outre, la commercialisation d’un produit contrefait à bas prix nuit à l’image de rareté et de qualité, essentielles pour les articles de luxe, et dévalorise la réputation de la marque. Les préjudices économiques et moraux résultant de ces agissements sont significatifs et doivent être évalués distinctement.

Faits distincts de la contrefaçon

En matière de contrefaçon, il est difficile d’obtenir en sus, une condamnation pour concurrence déloyale, cette dernière supposant des faits distincts de la contrefaçon. La différence de qualité et/ou le vil prix auquel est commercialisé l’article contrefaisant sont des éléments susceptibles d’être pris en compte dans le préjudice de la contrefaçon mais ne constituent pas des faits distincts.

Concurrence déloyale par publicité

En revanche, est constitutive de concurrence déloyale, la diffusion d’une campagne de publicité portant sur un produit contrefaisant, en ce qu’elle crée auprès du public un risque spécifique de confusion sur l’origine du produit dû à cette médiatisation intense et pouvant laisser penser à une association de marque / cobranding.  La publicité a en outre pour effet de banaliser le produit contrefait, de surcroît lorsqu’il s’agit d’un produit de luxe et de grande qualité, et se trouve ainsi assimilé à un produit bon marché de grande consommation. Ces agissements contraires à la loyauté du commerce sont constitutifs de concurrence déloyale.

Calcul du préjudice de concurrence déloyale

Le préjudice de concurrence déloyale ne se calcule pas comme celui de la contrefaçon. Pour fixer les dommages et intérêts en matière de contrefaçon de droit d’auteur ou de dessins et modèles, la juridiction prend en considération distinctement i) les conséquences économiques négatives de la contrefaçon dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; ii) le préjudice moral causé à cette dernière, iii) et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui a retirées de l’atteinte aux droits. A titre alternatif et sur demande de la partie lésée, le juge peut allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte.

A noter que s’agissant de la contrefaçon d’un produit haut de gamme, la commercialisation en quantité importante d’un produit bon marché contrefaisant porte atteinte à l’image de rareté et de qualité qui s’attache à ce type de produit, qui constituent des motivations essentielles d’achat des articles de luxe, et par ricochet à la réputation de maison de luxe.

L’atteinte aux droits de propriété intellectuelle peut aussi causer en elle-même un préjudice moral. Le préjudice résultant de la concurrence déloyale qui tient à l’aggravation des conséquences économiques négatives due à l’importante campagne de promotion du produit contrefaisant qui  dévalorise l’image du produit premier est, de façon générale, évalué forfaitairement.

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