Tribunal judiciaire de Paris, 14 octobre 2011
Tribunal judiciaire de Paris, 14 octobre 2011

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris

Thématique : Responsabilité des FAI : Blocage du site Copwatch

Résumé

Le Tribunal de Grande Instance de Paris a statué sur la demande de blocage du site Copwatch, dénonçant les violences policières. Bien que le Ministre de l’intérieur ait obtenu une suspension d’accès, la mesure de blocage URL a été jugée inadaptée et disproportionnée. Le Tribunal a souligné l’inefficacité des blocages sur Internet, tout en ordonnant aux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) de prendre des mesures alternatives pour bloquer le site. De plus, le coût de cette mesure, justifiée par l’intérêt général, a été remboursé par le Ministre aux FAI, respectant ainsi le principe d’égalité devant les charges publiques.

Suite à une saisine en référé des tribunaux, le Ministre de l’intérieur a obtenu des principaux FAI français, la suspension de l’accès au site Internet Copwatch. Ce dernier se proposait de dénoncer les violences policières.
Le délit d’injure public envers une administration publique réprimé par les articles 29 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse (1) et la violation de la loi du 6 janvier 1978 « Informatique et libertés » ont été retenus : le site procédait à une opération de collecte de données à caractère personnel en diffusant des photographies, noms et affectations de fonctionnaires de police.
Aux termes de l’article 6-I-8 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004, l’autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête, aux fournisseurs d’hébergement ou, à défaut, aux fournisseurs d’accès, toutes mesures propres à prévenir un dommage ou à faire cesser un dommage occasionné par le contenu d’un site internet. Dans tous les cas, la mesure judiciaire ordonnée doit être adaptée et proportionnée à la préservation des droits en cause.
La mesure de blocage URL demandée par le ministre de l’intérieur n’a pas été jugée comme adaptée ni proportionnée et impropre à mettre fin au dommage. Pour rejeter l’opportunité de ce blocage d’URL, le Tribunal s’est basé sur un rapport intitulé « inefficacité, risques et contraintes des blocages sur internet » élaboré à la demande de la Fédération Française des Télécoms (2). En revanche, il a été fait injonction aux FAI d’adopter toute mesure en leur pouvoir pour bloquer l’accès au site (blocage par IP ou blocage par DNS, opération distincte du blocage d’URL. La mesure a été ordonnée seulement à titre provisoire, le temps d’identifier les responsables du site Copwatch.
A noter que le principe d’égalité devant les charges publiques interdit de faire supporter aux fournisseurs d’accès -qui ne sont en rien responsables et auxquels il est demandé de prêter leur concours au respect de la loi- le coût généré par la mise en oeuvre d’une mesure justifiée par l’intérêt général. Le Ministre de l’intérieur a donc du rembourser aux principaux FAI les coûts afférents à la mesure de blocage du site.

(1) Le site Copwatch avait notamment publié les propose suivants : « Nous n’hésiterons pas à user de termes sévères à l’égard de la Police et de la Gendarmerie, car nous considérons ces institutions comme la fosse commune de l’humanité, le charnier de l’évolution, la mise à mort quotidienne de la déontologie et de l’éthique. Nous serons sans équivoque »
(2) Le système de blocage d’URL nécessiterait l’acquisition d’ordinateurs “ Deep Packet Inspectors” destinés à analyser toutes les requêtes d’abonnés afin de déterminer si le fournisseur d’accès peut ou non les transmettre vers le site. Les experts avaient conclu que chaque fournisseur au réseau internet français se trouverait contraint de faire l’acquisition de “20 à 30 systèmes de ce type” auxquels il faudrait ajouter “au moins un site web de détournement des requêtes” ainsi que “plusieurs ordinateurs de supervision et de maintenance de ces équipements” le tout pour un coût de 10 000 euros auquel s’ajouterait le coût de la maintenance et de la surveillance de ces matériels soit 20 % de l’investissement initial. La mise en place d’une telle mesure serait de l’ordre de six mois à un an.

Mots clés : FAI

Thème : Responsabilite des FAI

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Tribunal de Grande instance de Paris | 14 octobre 2011 | Pays : France

 


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