Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nîmes
Thématique : Prescription et effets des actes interruptifs dans le cadre d’un prêt immobilier
→ RésuméExposé du litigeLa société CIC LYONNAISE DE BANQUE a accordé un prêt immobilier de 93 700,73 euros à Messieurs [G] [O] et [S] [J] le 12 juillet 2006, remboursable en 360 mensualités à un taux d’intérêt de 4,15%. En mai 2015, la banque a prononcé la déchéance du terme. Le 21 novembre 2023, une saisie-attribution a été effectuée sur les comptes de M. [S] [J] pour un montant de 102 006,27 euros, dont 94 831,69 euros ont été récupérés. M. [S] [J] a assigné la banque pour faire constater la prescription de l’acte authentique et demander la mainlevée de la saisie. Procédure judiciaireL’affaire a été renvoyée plusieurs fois avant d’être finalement retenue pour audience le 8 novembre 2024. M. [S] [J] a demandé au juge de constater la prescription de l’acte authentique et d’ordonner la mainlevée de la saisie, tout en réclamant des dommages-intérêts. La banque, de son côté, a contesté la prescription, arguant que des actions interruptives avaient été entreprises et que des paiements avaient été effectués. Arguments des partiesM. [S] [J] a soutenu que la banque n’avait pas prouvé l’existence de diligences interruptives de prescription et que la prescription était acquise depuis 2017. Il a également affirmé que les paiements effectués ne pouvaient pas être considérés comme une renonciation à la prescription. La banque a rétorqué que les demandes en justice et les paiements effectués avaient interrompu le délai de prescription, et que la reconnaissance de la dette par les co-emprunteurs s’appliquait à tous. Décision du jugeLe juge a rappelé que le délai de prescription applicable était de deux ans selon le code de la consommation. Il a constaté que la banque n’avait pas démontré d’actes interruptifs de prescription dans le délai requis. En conséquence, la prescription était acquise au moment de la saisie-attribution, entraînant la mainlevée de cette saisie. La demande d’astreinte a été rejetée. Conséquences financièresLa SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE a été condamnée à payer 1 500 euros à M. [S] [J] au titre des frais de justice, ainsi qu’à supporter les dépens. La décision a été assortie de l’exécution provisoire de plein droit. |
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NÎMES
LE JUGE DE L’EXECUTION
JUGEMENT du 10 Janvier 2025
DOSSIER N° : N° RG 24/00331 – N° Portalis DBX2-W-B7I-KKPC
AFFAIRE : [S] [J] / S.A. CIC-LYONNAISE DE BANQUE
Exp : la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES
la SELARL SARLIN-CHABAUD-MARCHAL & ASSOCIES
Me Axel SAINT MARTIN
DEMANDEUR
M. [S] [J]
né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Axel SAINT MARTIN, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant, et par la SARL SALVIGNOL & ASSOCIES, avocats au barreau de NIMES
DEFENDERESSE
S.A. CIC-LYONNAISE DE BANQUE
dont le siège social est sis [Adresse 3], immatriculée au RCS de LYON sous le n°954 507 976, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège
représentée par la SELARL SARLIN-CHABAUD-MARCHAL & ASSOCIES, avocats au barreau de NIMES
jugement contradictoire, en premier ressort, prononcé par Emmanuelle MONTEIL, juge de l’exécution, assistée de Julie CROS, Greffier présent lors des débats et du prononcé du délibéré, après que la cause a été débattue à l’audience publique du 08 novembre 2024 où l’affaire a été mise en délibéré au 10 janvier 2025, les parties ayant été avisées que le jugement serait prononcé par sa mise à disposition au greffe du tribunal judiciaire.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte authentique de prêt immobilier daté du 12 juillet 2006, la société CIC LYONNAISE DE BANQUE a consenti à Messieurs [G] [O] et [S] [J], co-emprunteurs solidaires, un « prêt première habitation » pour un montant de 93 700,73 euros remboursable en 360 mensualités, le taux d’intérêts étant de 4,15%.
Selon courrier du 22 mai 2015, l’établissement bancaire a prononcé la déchéance du terme.
Par procès-verbal du 21 novembre 2023 dénoncé à M. [S] [J] le 28 novembre 2023, la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE a fait pratiquer une saisie-attribution sur les comptes ouverts par M. [S] [J] dans les livres du CREDIT AGRICOLE DES SAVOIES pour la somme globale de 102 006,27 euros. La saisie a été fructueuse à hauteur de 94 831,69 euros.
Par acte de commissaire de justice du 27 décembre 2023, Monsieur [S] [J] a assigné à comparaitre la SA LYONNAISE DE BANQUE devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nîmes à l’audience du 9 février 2024 aux fins principales de voir constater la prescription de l’acte authentique fondant la saisie et ordonner la mainlevée de la saisie.
L’affaire appelée à l’audience du 9 février 2024 a été retenue, après six renvois contradictoires, à l’audience du 8 novembre 2024, à laquelle les parties ont été valablement présentes ou représentées.
Dans le dernier état de la procédure (conclusions), Monsieur [S] [J] demande au juge de l’exécution, au visa des articles L 111-3, L 111-4, L 211-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, 2241 du code civil et L 218-2 du code de la consommation, de :
CONSTATER la prescription de l’acte authentique du 12 juillet 2006 fondant la saisie conservatoire ; ORDONNER la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée à la demande de la LYONNAISE DE BANQUE le 21 octobre 2023 entre les mains du CREDIT AGRICOLE DE SAVOIE ; ORDONNER à LA LYONNAISE DE BANQUE de donner mainlevée de la saisie pratiquée le 21 novembre 2023 entre les mains du CREDIT AGRICOLE DES SAVOIES au préjudice de M. [S] [J], cela sous astreinte de 500 euros par jour de retard courant 72 heures après la signification du jugement à intervenir ;CONDAMNER LA LYONNAISE DE BANQUE à payer à Monsieur [J] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, il expose essentiellement :
– que la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE ne rapporte pas la preuve de diligences interruptives de prescription ;
– que l’interruption de prescription par une demande en justice ne vaut que si cette demande est dirigée contre celui que l’on veut empêcher de prescrire et si elle émane de celui qui veut se prévaloir de l’interruption ;
– que la prescription est acquise le 13 octobre 2017 ;
– que même à imaginer une interruption de prescription jusqu’au 26 avril 2017, la prescription serait acquise le 26 avril 2019 ;
– que la banque ne peut se constituer une preuve à elle-même.
Dans le dernier état de la procédure (conclusions en réponse), la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE demande au juge de l’exécution, au visa des articles L 111-3, L 211-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, 1312, 2224, 2240, 2241, 2244 et 2245 du code civil, de :
DEBOUTER Monsieur [S] [J] de ses prétentions tenant à la prescription de créance de la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUEVALIDER la présente saisie-attribution, sur la forme et ses effets ; CONDAMNER Monsieur [S] [J] à payer au CIC-LYONNAISE DE BANQUE la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens.
La SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE soutient essentiellement :
– que la demande en justice qu’elle soit dirigée contre M. [O] ou M. [J], dès lors qu’elle poursuit le paiement de leur crédit contracté solidairement, vaut interruption du délai de prescription pour l’un comme pour l’autre ;
– que les paiements effectués pendant tout délai de prescription ont pour effet de l’interrompre et qu’un nouveau délai commence à courir à compter de la date du dernier paiement ;
– que les paiements effectués par le débiteur sont également considérés comme renonciation tacite à la prescription en raison de leur fréquence, alors même que la prescription de la créance était acquise ;
– que la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE a déclaré sa créance dans la procédure de saisie immobilière initiée par la société SOLEIL LEVANT contre M. [O] ;
– que l’ordonnance d’homologation rendue par le juge de l’exécution statuant en matière immobilière le 13 mars 2020 est versée aux débats ;
– que la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE liste les diligences qui ont sans conteste fait échec à toute prescription depuis et après cette procédure de saisie immobilière ;
– que le cadre légal et jurisprudentiel est clair : les actions interruptives de prescription adressées ou entreprises par un co-emprunteur s’appliquent à l’ensemble des autres co-emprunteurs.
L’affaire a été mise en délibéré au 10 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution, statuant après débats publics, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,
ORDONNE la mainlevée de la saisie-attribution pratiquée par la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE le 21 novembre 2023 sur les comptes ouverts au sein du CREDIT AGRICOLE DES SAVOIES par M. [S] [J], tenant l’acquisition de la prescription ;
REJETTE la demande d’astreinte ;
CONDAMNE la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE à payer à M. [S] [J] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNE la SA CIC-LYONNAISE DE BANQUE aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est assortie de l’exécution provisoire de plein droit.
La greffière La juge de l’exécution
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