Tribunal judiciaire de Nice, 6 février 2025, RG n° 21/04046
Tribunal judiciaire de Nice, 6 février 2025, RG n° 21/04046

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nice

Thématique : Obligation d’information et de conseil en matière d’assurance : enjeux et responsabilités.

Résumé

Acquisition de la maison

Le 26 octobre 2012, Mme [Z] [X] née [T] et M. [B] [X] ont acquis une maison avec jardin située à [Localité 1].

Contrat d’assurance

Mme [X] a souscrit une police d’assurance multirisques habitation n°86680352 auprès de la société Sogessur, prenant effet le 6 mai 2018.

Événement de la tempête Amélie

Le 3 novembre 2019, la tempête Amélie a provoqué de fortes précipitations, entraînant un glissement de terrain qui a causé la mort de la propriétaire d’une maison située en contrebas, ensevelie par une coulée de boue provenant de leur terrain.

Reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle

La commune de [Localité 1] a été reconnue en état de catastrophe naturelle pour les inondations et coulées de boue par un arrêté du 12 décembre 2019, publié le 19 décembre 2019.

Déclaration de sinistre et refus d’indemnisation

M. et Mme [X] ont déclaré le sinistre à la société Sogessur, qui a refusé de les indemniser.

Assignation en justice

Le 28 octobre 2021, les époux [X] ont assigné la société Sogessur devant le tribunal judiciaire de Nice pour obtenir une indemnisation des travaux réalisés suite au sinistre.

Demandes des époux [X]

Dans leurs conclusions, les époux [X] demandent une indemnisation de 104.487,50 euros, ainsi que 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et le remboursement des dépens.

Arguments des époux [X]

Ils reprochent à Sogessur de se baser sur une proposition d’assurance non signée pour contester leur demande et affirment que la garantie « catastrophes naturelles » devrait couvrir leur maison et leur jardin.

Réponse de la société Sogessur

La société Sogessur a demandé le débouté des époux [X] et a réclamé 5.000 euros en application de l’article 700, arguant que le terrain n’était pas couvert par le contrat d’assurance.

Conditions du contrat d’assurance

Sogessur a précisé que le contrat ne couvrait que la maison et excluait les murs de soutènement et les terres, et que le « Pack Jardin » ne couvrait que certains équipements extérieurs.

Obligation de conseil de Sogessur

Le tribunal a noté que Sogessur avait une obligation de conseil envers M. et Mme [X], qui n’étaient pas des experts en assurance, et qu’elle n’avait pas suffisamment informé sur les risques liés à la topographie de leur terrain.

Responsabilité de Sogessur

La société Sogessur a été jugée responsable pour avoir manqué à son obligation d’information, entraînant une perte de chance pour les époux [X] de souscrire des garanties adaptées.

Indemnisation accordée

Le tribunal a condamné Sogessur à verser 31.346,25 euros aux époux [X] pour la perte de chance de couvrir les terres du jardin.

Décision finale

M. et Mme [X] ont été condamnés aux dépens, et leurs autres demandes ont été déboutées. La décision a été déclarée exécutoire à titre provisoire.

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NICE

GREFFE
M I N U T E
(Décision Civile)

JUGEMENT : [Z] [T] Epouse [X], [B] [X] c/ S.A. SOGESSUR

N° 25/
Du 6 février 2025

4ème Chambre civile
N° RG 21/04046 – N° Portalis DBWR-W-B7F-NZ2K

Grosse délivrée à

Me Patrice BIDAULT

Me Jérôme CULIOLI
Me Philippe VAQUIER

expédition délivrée à

le 06 Février 2025

mentions diverses
Par jugement de la 4ème Chambre civile en date du six février deux mil vingt cinq

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame VALAT, Présidente, assistée de Madame HAUSTANT Jennifer, Greffier,

Vu les Articles 812 à 816 du Code de procédure civile sans demande de renvoi à la formation collégiale ;

DÉBATS

A l’audience publique du 6 juin 2024 le prononcé du jugement étant fixé au 7 octobre 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction, les parties en ayant été préalablement avisées.

PRONONCÉ

Par mise à disposition au Greffe le 6 février 2025 après prorogation du délibéré, signé par Madame VALAT, Présidente, assistée de Madame Eliancia KALO, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DE LA DÉCISION : contradictoire, en premier ressort, au fond.

DEMANDEURS:

Mme [Z] [T] épouse [X]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représentée par Me Jérôme CULIOLI, avocat au barreau de NICE, avocat postulant, Me Philippe VAQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

M. [B] [X]
[Adresse 2]
[Localité 1]
représenté par Me Jérôme CULIOLI, avocat au barreau de NICE, avocat postulant, Me Philippe VAQUIER, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

DÉFENDERESSE:

S.A. SOGESSUR, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Me Patrice BIDAULT, avocat au barreau de MARSEILLE, avocat plaidant

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 26 octobre 2012, Mme [Z] [X] née [T] et M. [B] [X] ont acquis une maison avec jardin située [Adresse 2] à [Localité 1].

Mme [X] a souscrit une police d’assurance multirisques habitation n°86680352 auprès de la société Sogessur avec effet au 6 mai 2018.

Le 3 novembre 2019, le passage de la tempête Amélie a généré de fortes précipitations. Suite à un glissement de terrain, la propriétaire de l’habitation située en contrebas de leur maison a été ensevelie par une coulée de boue en provenance de leur fonds et elle est décédée.

L’état de catastrophe naturelle au titre du phénomène d’inondations et coulées de boue a été reconnu pour la commune de [Localité 1] par arrêté pris le 12 décembre 2019 et publié au Journal officiel le 19 décembre 2019.

M. et Mme [X] ont régularisé une déclaration de sinistre auprès de la société Sogessur et celle-ci a refusé de couvrir le sinistre.

Par acte d’huissier du 28 octobre 2021, les époux [X] ont fait assigner la société Sogessur devant le tribunal judiciaire de Nice afin d’obtenir sa condamnation à les indemniser pour les travaux réalisés suite au sinistre.

Par conclusions en réplique n°2 notifiées le 20 mars 2023, les époux [X] sollicitent la condamnation de la société Sogessur :
à les indemniser pour le préjudice subi et à leur payer la somme de 104.487,50 euros au titre de l’indemnité d’assurance leur revenant, avec intérêt de droit à compter de la demande en justice,à leur payer la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.Ils concluent en outre au débouté de la société Sogessur de ses demandes et sollicitent qu’il soit dit et jugé qu’à défaut de règlement spontané par la société Sogessur des condamnations prononcées à son encontre, l’exécution forcée devra être réalisée par le ministère d’un commissaire de justice, et que la débitrice devra donc supporter, en sus de l’application de l’article 700 du code de procédure civile, le montant des sommes retenues par l’huissier en application de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 n°96/1080.

M. et Mme [X] reprochent à la société Sogessur de produire une proposition d’assurance qu’ils n’ont pas signé en lieu et place des conditions particulières du contrat d’assurance dont elle se prévaut pour faire échec à leur demande. Ils estiment qu’elle ne rapporte ainsi pas la preuve que le terrain d’assise de leur maison ne serait pas couvert par la police d’assurance multirisque habitation.

Ils soutiennent ensuite que la société Sogessur leur doit garantie au titre de la garantie « catastrophes naturelles » couvrant les pertes pécuniaires et les frais complémentaires. Ils estiment que non seulement la maison, mais également le jardin formant avec la maison un tout indivisible et indissociable sont garantis, le jardin d’agrément se trouvant sur la même emprise immobilière que la maison.

En réplique aux conclusions adverses, ils font valoir que le contrat d’assurance que la société Sogessur leur a fait signer était manifestement inadapté à leurs besoins et aux caractéristiques intrinsèques du bien assuré en ce que les masses de terres en faisant partie ne sont pas garanties et qu’elle a donc manqué à son obligation de conseil en tant qu’assureur ce qui engage sa responsabilité contractuelle. Ils soutiennent également que les clauses d’exclusion de garantie n’étant pas rédigés en caractères « très apparents » ne leur sont pas opposables.

Ils affirment que le préjudice qu’ils ont subi ayant affecté leur jardin est établi et doit être pleinement indemnisé.

Par conclusions en réplique et récapitulatives notifiées le 8 septembre 2023, la société Sogessur conclut au débouté de M. et Mme [X] de l’ensemble de leurs demandes et sollicite reconventionnellement leur condamnation à lui payer la somme de 5.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. Elle demande également au tribunal de dire n’y avoir lieu à exécution provisoire de la décision à intervenir.

La société Sogessur fait valoir que le terrain ne fait pas partie du bien assuré par le contrat multirisques habitation et que les dommages dont ils sollicitent indemnisation n’entrent pas dans les prévisions contractuelles. Elle observe que le bien assuré défini en pages 12 et 14 des conditions générales du contrat d’assurance et dans le paragraphe intitulé « L’habitation assurée » des conditions particulières désigne uniquement la maison d’habitation stricto sensu, à l’exception du terrain qui l’entoure, et que les murs de soutènement non intégrés aux parties à usage d’habitation et servant à contenir la poussée de masses de terre, de roche ou d’eau sont expressément exclus du champ de la garantie en page 14 des conditions générales.

Elle ajoute que l’option « Pack Jardin » souscrit par Mme [X] ne couvre que les dommages occasionnés aux aménagements comprenant les marquises, les stores, les abris de jardin, les ameublements extérieurs, les installations maçonnées extérieurs et les serres, comme prévu en page 31 des conditions générales du contrat d’assurance.

Elle précise que le document intitulé « proposition d’assurance habitation – formule confort » a valeur de conditions particulières. Elle soutient que la garantie « catastrophes naturelles » ne s’applique qu’aux seuls biens mobiliers et immobiliers assurés par le contrat de base.

Elle souligne que la garantie « catastrophes naturelles » ne permet de couvrir autres biens immobiliers que ceux couverts par les biens couverts initialement par le contrat souscrit et donc la maison d’habitation.

La clôture de l’instruction est intervenue le 22 février 2024. L’affaire a été retenue à l’audience du 7 mars 2024 et le prononcé de la décision a été fixé au 7 octobre 2024 prorogé au 6 février 2025.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement contradictoire rendu en premier ressort,

CONDAMNE la SA Sogessur à payer à Mme [Z] [X] née [T] et à M. [B] [X], ensemble, la somme de 31.346,25 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la perte de chance de souscrire une garantie couvrant les terres du jardin ;

CONDAMNE Mme [Z] [X] née [T] et M. [B] [X] aux dépens ;

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes ;

RAPPELLE que la présente décision est de droit exécutoire à titre provisoire ;

Le présent jugement a été signé par le Président et le Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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