Tribunal judiciaire de Nantes, 7 janvier 2025, RG n° 24/01317
Tribunal judiciaire de Nantes, 7 janvier 2025, RG n° 24/01317

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nantes

Thématique : Conflit de voisinage et droits de propriété : enjeux d’élagage et de représentation légale.

Résumé

Contexte de l’affaire

Le litige concerne un bien immobilier acquis par [F] [L] et [O] [X] en avril 2017, situé à [Localité 6]. Ce bien est adjacent à une propriété appartenant à [V] [M] et [S] [J] épouse [M]. Le conflit a émergé à propos des arbres sur la parcelle de [F] [L] et [O] [X], dont certaines branches empiètent sur la propriété de [V] et [S] [M].

Jugements antérieurs

Le tribunal judiciaire de Nantes a rendu un jugement le 13 décembre 2022, ordonnant l’élagage des arbres en question pour respecter les limites de propriété. Ce jugement a été suivi d’une décision le 16 octobre 2023, qui a imposé une astreinte de 20 euros par jour de retard pour l’exécution de l’élagage, à compter de deux mois après la signification du jugement.

Demande de tierce opposition

Le 19 avril 2024, [O] [X] a assigné [V] et [S] [M] en tierce opposition, arguant qu’elle n’avait pas été représentée lors des jugements précédents et que ceux-ci lui causaient un préjudice. Elle a demandé la rétractation du jugement du 13 décembre 2022, la suspension de son exécution, et la condamnation des époux [M] aux dépens.

Arguments des parties

[O] [X] a soutenu que le règlement du lotissement permettait de conserver les arbres et a évoqué la prescription trentenaire. En revanche, [V] et [S] [M] ont contesté la recevabilité de la tierce opposition, affirmant que [O] [X] avait été représentée par son époux lors des jugements. Ils ont également demandé la condamnation de [O] [X] pour recours abusif.

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré la tierce opposition de [O] [X] recevable, mais a rejeté sa demande de rétractation du jugement du 13 décembre 2022. Il a estimé que l’élagage ordonné ne causait pas de conséquences irréparables pour [O] [X]. En outre, le tribunal a condamné [O] [X] à une amende civile de 500 euros pour recours abusif et a ordonné qu’elle paie 1 000 euros à [V] et [S] [M] pour les frais irrépétibles.

Conclusion

Le tribunal a confirmé que le jugement du 13 décembre 2022 était exécutoire de droit à titre provisoire, et a statué sur les dépens, déboutant [O] [X] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Minute n° 25/23

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES – PALAIS DE JUSTICE
============

JUGEMENT du 07 Janvier 2025
__________________________________________

ENTRE :

Madame [O] [X]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Demanderesse représentée par Me Christophe LHERMITTE, avocat au barreau de RENNES

D’une part,

ET:

Monsieur [V] [M]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Madame [S] [M]
[Adresse 3]
[Localité 6]

Défendeurs représentés par Me Yannic FLYNN, avocat au barreau de NANTES

D’autre part,

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

PRÉSIDENT : Constance DESMORAT
GREFFIER : Nathalie DEPIERROIS

PROCEDURE :

date de la première évocation : 14 Juin 2024
date des débats : 14 Juin 2024
délibéré au : 20 Septembre 2024 par mise à disposition au greffe
prorogé au : 07 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe

N° RG 24/01317 – N° Portalis DBYS-W-B7I-M6RB
COPIES AUX PARTIES LE :
EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique en date du 29 avril 2017, [F] [L] et [O] [X] ont acquis un bien immobilier situé [Adresse 1] sur la commune de [Localité 6] constituant la parcelle cadastrée section ZO n°[Cadastre 2] et le lot n°23 du lotissement dénommé Les [Adresse 5] ou Le [Adresse 4].

Ce bien immobilier est contigu à celui situé [Adresse 3] appartenant à [V] [M] et [S] [J] épouse [M].

Un litige est survenu entre les parties relativement aux arbres situés sur la parcelle de [F] [L] et [O] [X] dont certaines branches dépassaient sur la parcelle de [V] et [S] [M].

Par jugement en date du 13 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Nantes a :
Ordonné l’élagage des chêne et hêtre situés sur la parcelle appartenant à [X] [L] constituant le [Adresse 1] à [Localité 6] situés en limite de propriété et surplombant la parcelle appartenant à [V] [M] et [S] [J] épouse [M] formant le [Adresse 3] afin de les ramener dans les limites légalement fixées ;Dit n’y avoir lieu à condamnation sous astreinte ;Déboute [V] [M] et [S] [J] épouse [M] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile Déboute [X] [L] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Condamne [V] [M] et [S] [J] épouse [M] d’une part et [X] [L] d’autre part aux dépens divisés par moitié entre eux ;Rappelle que le présent jugement est exécutoire de droit par provision.
Par jugement en date du 16 octobre 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Nantes a assorti la disposition du jugement du 13 décembre 2022 selon laquelle il a ordonné « l’élagage des chêne et hêtre situés sur la parcelle appartenant à [X] [L] constituant le [Adresse 1] à [Localité 6] situés en limite de propriété et surplombant la parcelle appartenant à [V] [M] et [S] [J] épouse [M] formant le [Adresse 3] afin de les ramener dans les limites légalement fixées » d’une astreinte de 20 euros par jour de retard passé un délai de deux mois à compter de la signification du jugement pour une durée de trois mois à l’issue duquel il pourra de nouveau être statué.

Par acte de commissaire de justice délivré le 19 avril 2024, [O] [X] a fait assigner [V] et [S] [M] devant le tribunal judiciaire de Nantes.

Suivant ses dernières conclusions, [O] [X] demande au tribunal de la recevoir en sa tierce opposition à l’encontre du jugement rendu le 13 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Nantes rendu entre « [X] [L] » et les époux [M], rétracter l’intégralité des chefs du dispositif dudit jugement, débouter les époux [M] de l’intégralité de leurs demandes, fins et conclusions, suspendre l’exécution du jugement précité, condamner les époux [M] aux dépens et condamner ceux-ci à payer à [O] [X] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, [O] [X] fait valoir que les jugements du 13 décembre 2022 et du 16 octobre 2023 auxquels elle n’était ni présente ni représentée lui portent préjudice de sorte qu’elle est fondée à former tierce opposition à ceux-ci.
Sur le fond, elle s’appuie sur l’article 672 du code de procédure civile et soutient que le règlement du lotissement permet de conserver les arbres à proximité de la limite de propriété. Elle se prévaut également de la destination du père de famille en soulignant que l’implantation des arbres a été faite avant la division de la parcelle et la vente en différents lots. Elle conclut également à la prescription trentenaire acquise par les arbres.

De manière plus factuelle, [O] [X] fait valoir que les arbres sont régulièrement élagués mais que cet entretien ne peut avoir lieu plus d’une fois par an sans mettre en péril la végétation.

[O] [X] demande que l’exécution provisoire des jugements soit suspendue.

Par ailleurs, elle souligne sa lassitude face à la situation de conflit de voisinage.

Suivant leurs écritures, [V] et [S] [M] demandent au tribunal de déclarer irrecevable la tierce opposition de [O] [X] à titre principal, de rejeter l’intégralité des demandes de [O] [X] à titre subsidiaire et, en tout état de cause, de déclarer [O] [X] au paiement de la somme de 5 000 euros pour recours abusif et de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

En réplique, [V] et [S] [M] soutiennent que [O] [X] n’est pas recevable en sa tierce opposition dès lors qu’elle a été valablement représentée par son époux avec lequel elle est copropriétaire indivise de la parcelle lors du jugement attaqué.

Sur le fond, [V] et [S] [M] font valoir que le jugement attaqué n’ordonne pas la réduction ni l’arrachage des arbres litigieux mais seulement leur élagage de sorte que les dispositions de l’article 672 du code civil ne trouvent pas à s’appliquer. Ils estiment également que les éléments probatoires apportés par [O] [X] à l’appui de ses moyens tirés de l’existence d’un titre, de la destination du père de famille et de la prescription trentenaire sont insuffisants.
[V] et [S] [M] soutiennent que [F] [L] et [O] [X] n’ont pas effectué d’élagage depuis l’année 2022, les éléments qu’ils produisent étant insuffisants ou irrecevables à prouver l’inverse. Ils ajoutent que l’astreinte se justifie pleinement au regard de ce que leurs voisins ne respectent pas le jugement rendu le 13 décembre 2022.

[V] et [S] [M] rappellent qu’il est constant que la suspension de l’exécution provisoire du jugement ne peut être ordonnée que l’exécution induit des conséquences irréparables pour le tiers opposant.

A titre reconventionnel, [V] et [S] [M] sollicitent la condamnation de [O] [X] au paiement d’une somme à titre d’amende pour recours abusif fondée sur l’article 581 du code de procédure civile. Ils considèrent que [O] [X] ne peut ignorer le litige qui existe entre eux et son conjoint depuis plus de deux ans et sans qu’elle n’intervienne volontairement dans aucune instance.

L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 14 juin 2024.

Lors des débats, les parties ont comparu représentées par leur conseil respectif.

La présente décision, susceptible d’appel, sera contradictoire en application de l’article 467 du code de procédure civile.

A l’issue de l’audience, la Présidente a avisé les parties que le prononcé du jugement aura lieu le 20 septembre 2024 prorogé au 7 janvier 2025, par mise à disposition au greffe du tribunal.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au Greffe,

DECLARE RECEVABLE [O] [X] épouse [L] en sa tierce opposition au jugement du tribunal judiciaire de Nantes du 13 décembre 2022 ;

DEBOUTE [O] [X] épouse [L] de rétractation de l’intégralité des chefs du dispositif du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nantes le 13 décembre 2022 ;

CONDAMNE [O] [X] épouse [L] à payer la somme de 500 euros à titre d’amende civile ;

CONDAMNE [O] [X] épouse [L] à payer à [V] [M] et [S] [J] épouse [M] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE [O] [X] épouse [L] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [O] [X] épouse [L] aux dépens ;

RAPPELLE que le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire.

Ainsi, jugé et prononcé les jour, mois et an susdits, le présent jugement a été signé par Constance DESMORAT, Vice-président et Nathalie DEPIERROIS, Greffier.

Le Greffier, La Présidente,
N. DEPIERROIS C. DESMORAT

 


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