Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Nantes
Thématique : Conflit de voisinage : obligations d’entretien et responsabilités en matière de végétation.
→ RésuméContexte de l’affaireLa SCEA DES CAVALIERS est propriétaire de deux parcelles, tandis que la SCEA DES COTEAUX possède une parcelle voisine. Des tensions entre les gérants de ces sociétés ont déjà conduit à un précédent contentieux concernant un arbre tombé sur la parcelle de la SCEA DES CAVALIERS. Après l’enlèvement de cet arbre, la SCEA DES CAVALIERS a signalé des dommages à sa clôture et des végétaux débordant de la limite séparative. Procédure judiciaireSuite à l’échec d’une tentative de conciliation, la SCEA DES CAVALIERS a assigné la SCEA DES COTEAUX devant le tribunal judiciaire de Nantes, demandant des réparations pour l’enlèvement de l’arbre, l’élagage des végétaux menaçants et la réparation de la clôture. Elle a également demandé des dommages et intérêts pour résistance abusive et d’autres préjudices. Réponses de la SCEA DES COTEAUXEn réponse, la SCEA DES COTEAUX a contesté les demandes, affirmant avoir déjà effectué les travaux d’élagage et de réparation. Elle a également nié tout lien entre la chute de l’arbre et les dommages subis par la SCEA DES CAVALIERS, soutenant que la clôture avait été endommagée par des animaux. Constatations du tribunalLe tribunal a examiné les preuves, y compris un constat d’huissier qui a relevé la présence d’arbres et de végétaux débordant sur la propriété de la SCEA DES CAVALIERS. Il a conclu que la SCEA DES COTEAUX devait respecter les distances légales pour les plantations et procéder à l’enlèvement des arbres tombés et à la réparation de la clôture. Décisions du tribunalLe tribunal a condamné la SCEA DES COTEAUX à respecter les distances légales pour les arbres et à réparer la clôture dans un délai de deux mois, sous peine d’astreinte. En revanche, il a débouté la SCEA DES CAVALIERS de ses demandes de dommages et intérêts pour préjudices divers, y compris le préjudice moral et les troubles liés à la procédure. ConclusionLa SCEA DES COTEAUX a été condamnée aux dépens et à verser une somme à la SCEA DES CAVALIERS au titre des frais irrépétibles. L’exécution provisoire de la décision a été ordonnée, confirmant ainsi les obligations de la SCEA DES COTEAUX envers la SCEA DES CAVALIERS. |
SG
LE 06 FEVRIER 2025
Minute n°
N° RG 22/00635 – N° Portalis DBYS-W-B7G-LMWI
S.C.E.A. DES CAVALIERS
C/
S.C.E.A. DES COTEAUX
Demande relative à une servitude de distance pour les plantations et constructions
1 copie exécutoire et certifiée conforme à :
la SELARL AVOLITIS – RENNES
la SCP JOYEUX-GUEGUEN-CHAUMETTE – C 35
délivrées le
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTES
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QUATRIEME CHAMBRE
JUGEMENT
du SIX FEVRIER DEUX MIL VINGT CINQ
Composition du Tribunal lors du délibéré :
Président : Stéphanie LAPORTE, Juge,
Assesseur : Nathalie CLAVIER, Vice Présidente,
Assesseur : Laëtitia FENART, Vice-Présidente,
GREFFIER : Sandrine GASNIER
Débats à l’audience publique du 05 NOVEMBRE 2024 devant Stéphanie LAPORTE, siégeant en Juge Rapporteur, sans opposition des avocats, qui a rendu compte au Tribunal dans son délibéré.
Prononcé du jugement fixé au 22 JANVIER 2025 prorogé au 06 FEVRIER 2025.
Jugement Contradictoire rédigé par Stéphanie LAPORTE, prononcé par mise à disposition au greffe.
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ENTRE :
S.C.E.A. DES CAVALIERS, dont le siège social est sis [Adresse 5]
Rep/assistant : Maître Christophe BAILLY de la SELARL AVOLITIS, avocats au barreau de RENNES
DEMANDERESSE.
D’UNE PART
ET :
S.C.E.A. DES COTEAUX, dont le siège social est sis [Adresse 7]
Rep/assistant : Maître Yann CHAUMETTE de la SCP JOYEUX-GUEGUEN-CHAUMETTE, avocats au barreau de NANTES
DEFENDERESSE.
D’AUTRE PART
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EXPOSE DU LITIGE
La SCEA DES CAVALIERS est propriétaire de deux parcelles cadastrées [Cadastre 2] et [Cadastre 3], au lieu-dit [Adresse 6], à [Localité 8] et la SCEA DES COTEAUX est propriétaire d’une parcelle voisine cadastrée [Cadastre 1].
Les tensions entre les gérants de ces sociétés ont déjà donné lieu à un précédent contentieux concernant la présence d’un arbre appartenant à la SCEA DES COTEAUX, tombé sur la parcelle de la SCEA DES CAVALIERS.
Suite à l’enlèvement de l’arbre litigieux, la SCEA DES CAVALIERS a signalé que la clôture sur laquelle l’arbre était tombé restait endommagée et que des végétaux dépassaient de la limite séparative.
Après l’échec d’une tentative de conciliation initiée sur requête, par la SCEA DES CAVALIERS, le 02 avril 2021, devant le tribunal judiciaire de Nantes, la SCEA DES CAVALIERS a par acte du 02 février 2022 fait assigner la SCEA DES COTEAUX devant le tribunal judiciaire de Nantes, aux fins de condamner ladite société, sous astreinte, à enlever l’arbre litigieux, élaguer les végétaux et les branches qui menacent de tomber et réparer la clôture en remplaçant les trois piquets endommagés, à titre subsidiaire à l’autoriser à y procéder elle-même.
Par dernières conclusions notifiées le 05 décembre 2023, la SCEA DES CAVALIERS a sollicité du tribunal, au visa des articles 761 alinéa 2 du code de procédure civile, 544, 673, 1240 et 1242 du code civil, de :
A titre principal,
Condamner la société DES COTEAUX, sous astreinte de 350 euros par jour de retard à compter du prononcé de l’ordonnance à intervenir, d’avoir à procéder :
– à l’enlèvement des arbres tombés sur la propriété de la SCEA DES CAVALIERS (suivant Procès-verbal du commissaire de justice dressé le 4 octobre 2023);
– à l’élagage des végétaux et des branches qui menacent de tomber (suivant Procès-verbal du commissaire de justice dressé le 4 octobre 2023);
– à la réparation de la clôture et au remplacement des trois piquets endommagés.
Rejeter l’ensemble des demandes, fins et conclusions de la société DES COTEAUX,
A titre subsidiaire,
Sauf pour la SCEA DES COTEAUX à avoir enlevé l’arbre dans le délai de 15 jours suivant le prononcé du jugement à intervenir, AUTORISER la SCEA DES CAVALIERS à procéder elle-même à l’enlèvement de l’arbre tombé et des rémanents, à l’élagage des végétaux et des branches qui menacent de tomber, ainsi qu’à la réparation de sa clôture et des piquets aux frais et risques de la SCEA DES COTEAUX,
En tout état de cause,
Condamner la SCEA DES COTEAUX à payer à la SCEA DES CAVALIERS la somme de 5 000 euros pour résistance abusive,
Condamner la SCEA DES COTEAUX à payer à la SCEA DES CAVALIERS la somme de 9 040 euros à titre de dommages et intérêts,
Condamner la SCEA DES COTEAUX à payer à la SCEA DES CAVALIERS une juste indemnité de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamner la SCEA DES COTEAUX aux entiers dépens,
Condamner la SCEA DES COTEAUX au paiement des éventuels frais d’exécution forcée et de recouvrement non compris dans les dépens.
A l’appui de ses conclusions, la SCEA DES CAVALIERS se fonde sur l’article 673 du code civil pour solliciter l’élagage des végétaux plantés sur la propriété de la SCEA DES COTEAUX et débordant sur sa propriété. Elle se fonde sur des photographies qu’elle date du 21 janvier 2021 et un constat d’huissier dressé le 20 octobre 2023. Elle sollicite le prononcé d’une astreinte, du fait de l’attitude passive du défendeur et d’un précédent contentieux.
Elle se fonde également sur les articles 1240 et 1242 du code civil pour solliciter le remplacement de trois piquets de la clôture, dès lors qu’ils ont été endommagés suite à la chute d’un arbre appartenant à la SCEA DES COTEAUX, ainsi que le déblaiement d’arbres nouvellement tombés.
A titre subsidiaire, si la SCEA DES COTEAUX ne fait pas les travaux sollicités, elle demande à être autorisée à y procéder elle-même.
Elle conteste le fait que la SCEA DES COTEAUX est procédé à ces réparations.
Elle sollicite également l’indemnisation du préjudice financier lié à la circulation des animaux sur d’autres parcelles non destinées à la pâture, mais à la récolte de foin, du fait de la chute de l’arbre sur la clôture.
Elle demande à ce que son gérant soit indemnisé pour la préjudice moral lié à la peur de voir chuter les branches sur sa propriété et aux déplacements des animaux, ainsi que pour les tracas liés à la procédure.
Elle demande, enfin, la condamnation du défendeur pour résistance abusive, ainsi qu’au paiement des dépens et frais irrépétibles.
Par dernières conclusions du 13 février 2024, la SCEA DES COTEAUX a sollicité du tribunal de :
Débouter la SCEA des CAVALIERS a l’ensemble des demandes, fins et conclusions;
La Condamner à verser à la SCEA des COTEAUX la somme de 2000 € au titre de l’article 700 du CPC.
La Condamner aux entiers dépens.
A l’appui de ses conclusions, la SCEA DES COTEAUX conteste les demandes de son voisin, dès lors qu’il indique avoir procédé le 06 janvier 2022, à l’élagage des végétaux, au déblaiement de l’arbre tombé et à la réparation de la clôture. Elle conteste le lien entre la chute de l’arbre et l’état des piquets de la clôture et refuse de les remplacer.
Elle fait valoir que la condamnation sous astreinte n’a donc pas lieu d’être prononcée et que les préjudices financiers et moraux ne sont pas liés à une faute imputable à la SCEA DES COTEAUX. Elle souligne que la clôture avait été détruite par les animaux eux-mêmes et qu’elle n’est donc nullement responsable de la perte de production de foin invoquée. Elle relève que la demanderesse ne démontre pas davantage la réalité du préjudice financier subi.
Elle conteste sur la même base, le préjudice moral sollicité, en lien avec une angoisse permanente du gérant.
Quant aux tracas de la procédure, elle rappelle avoir procédé à l’enlèvement de l’arbre le 06 janvier 2022, ce qui exclut toute indemnisation pour le préjudice prétendument subi et sur la base d’une résistance abusive.
Elle sollicite la condamnation de la SCEA DES CAVALIERS aux dépens et à lui verser une somme au titre des frais irrépétibles.
Une ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2024 et l’audience des plaidoiries a eu lieu le 05 novembre 2024.
L’affaire a été mise en délibéré au 22 janvier 2025, prorogé au 06 février 2025.
PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au Greffe, contradictoire et en premier ressort,
CONDAMNE la SCEA DES COTEAUX, sur la base des constatations faites par le commissaire de justice, le 04 octobre 2023, à respecter les distances légales pour les arbres et les végétaux implantés à moins de deux mètres de la limite séparative en procédant soit à leur arrachage, soit à la réduction de leur hauteur en dessous des deux mètres imposés, à évacuer les arbres tombés sur les clôtures séparatives, à couper les branches et les végétaux qui dépassent de la limite séparative, à réparer la clôture endommagée suite à la chute des arbres, dans un délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision ;
DIT que faute pour la SCEA DES COTEAUX de procéder à l’arrachage ou à la réduction des arbres et des végétaux implantés à moins de deux mètres de la limite séparative, à l’enlèvement des arbres tombés sur les clôtures séparatives, à la taille des branches et des végétaux qui dépassent de la limite séparative, à réparer la clôture endommagée suite à la chute des arbres, elle sera redevable, passé le délai de deux mois, d’une astreinte dont le montant sera provisoirement fixé à 50 euros par jour de retard, pendant un délai maximum de quatre mois;
DEBOUTE la SCEA DES CAVALIERS de sa demande de dommages et intérêts pour des préjudices en lien avec la divagation des animaux sur les parcelles cultivées ;
DEBOUTE la SCEA DES CAVALIERS de sa demande d’indemnisation au titre du préjudice moral subi ;
DEBOUTE la SCEA DES CAVALIERS de sa demande de dommages et intérêts pour le préjudice en lien avec les troubles et tracas de la procédure ;
DEBOUTE la SCEA DES CAVALIERS de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
CONDAMNE la SCEA DES COTEAUX aux entiers dépens ;
CONDAMNE la SCEA DES COTEAUX à verser à la SCEA DES CAVALIERS la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire de l’ensemble des dispositions qui précèdent est de droit.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Sandrine GASNIER Stéphanie LAPORTE
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