Tribunal judiciaire de Nantes, 31 janvier 2025, RG n° 21/01178
Tribunal judiciaire de Nantes, 31 janvier 2025, RG n° 21/01178

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nantes

Thématique : Évaluation du taux d’incapacité liée à une pathologie professionnelle

Résumé

Engagement de Mme [I]

Mme [V] [I], née le 12 janvier 1971, a été engagée le 8 janvier 2018 par la société [4] en tant que contrôleuse de gestion sous un contrat de travail à durée indéterminée.

Déclaration de maladie professionnelle

Le 16 mars 2020, Mme [I] a déclaré un « syndrome anxio-dépressif » comme maladie professionnelle. Cette pathologie n’étant pas répertoriée dans les tableaux de maladies professionnelles, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a sollicité l’avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire.

Licenciement de Mme [I]

Le 17 mars 2020, la société [4] a notifié à Mme [I] son licenciement, invoquant son absence prolongée depuis le 11 octobre 2019, qui perturbait le fonctionnement de l’entreprise et nécessitait son remplacement.

Reconnaissance de la maladie professionnelle

Le 28 octobre 2020, la caisse primaire d’assurance maladie a informé la société [4] que le comité régional avait donné un avis favorable à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la pathologie de Mme [I], prenant en charge cette affection au titre de la législation professionnelle. La date de consolidation a été fixée au 1er mars 2021.

Contestation par la société [4]

La société [4] a contesté cette décision en saisissant la commission de recours amiable et la commission médicale de recours amiable le 17 décembre 2020. Le 29 avril 2021, la caisse a notifié un taux d’incapacité permanente partielle de 30 % à Mme [I].

Révision du taux d’incapacité

Le 17 décembre 2021, la caisse a informé la société [4] que le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I] avait été révisé à 18 % par la commission médicale de recours amiable. La société [4] a alors saisi le Pôle social du tribunal judiciaire de Nantes le 23 décembre 2021.

Audience et demandes des parties

L’affaire a été plaidée le 25 septembre 2024. La société [4] a demandé au tribunal de ramener le taux d’incapacité à 0 % et de condamner la caisse à verser 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La caisse a demandé la confirmation du taux de 18 %.

Arguments des parties

La société [4] a soutenu que les documents médicaux n’avaient pas été communiqués à son médecin conseil, remettant en question l’évaluation du taux d’incapacité. La caisse a affirmé que l’absence d’antécédents avait été documentée et que le taux de 18 % était conforme aux rapports médicaux.

Décision du tribunal

Le tribunal a jugé recevable le recours de la société [4] et a fixé le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I] à 5 % à la date de sa consolidation. Les demandes d’indemnités et autres prétentions des parties ont été déboutées, et la caisse a été condamnée aux dépens.

Appel de la décision

Les parties disposent d’un délai d’un mois à compter de la notification de la décision pour interjeter appel.

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
PÔLE SOCIAL

Jugement du 31 Janvier 2025

N° RG 21/01178 – N° Portalis DBYS-W-B7F-LLVY
Code affaire : 89E

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : Hubert LIFFRAN
Assesseur : Franck MEYER
Assesseur : Dominique FABRICE
Greffier : Loïc TIGER

DÉBATS

Le tribunal judiciaire de Nantes, pôle social, réuni en audience publique au palais de justice à Nantes le 25 septembre 2024.

JUGEMENT

Prononcé par Monsieur Hubert LIFFRAN, par mise à disposition au Greffe le 31 Janvier 2025.

Demanderesse :

Société [4]
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Maître Matthieu BABIN et Maître Julien GOUWY, avocats au barreau de NANTES,

Défenderesse :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE de la LOIRE-ATLANTIQUE
[Adresse 3]
[Localité 1]
dispensée de comparution

Le Président et les assesseurs, après avoir entendu le VINGT CINQ SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE la partie présente en ses observations, l’ont avisée, de la date à laquelle le jugement serait prononcé, ont délibéré conformément à la loi et ont statué, après avoir avisé les parties que le délibéré initialement fixé au VINGT DEUX NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE était prorogé, tout d’abord, au DIX SEPT JANVIER DEUX MIL VINGT QUATRE puis au TRENTE ET UN JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ, dans les termes suivants :

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [V] [I], née le 12 janvier 1971, a été engagée le 8 janvier 2018 par la société [4] en qualité de contrôleuse de gestion dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée.

Le 16 mars 2020, Mme [I] a établi une déclaration de maladie professionnelle pour un «syndrome anxio-dépressif».

Cette maladie ne figurant pas dans l’un des tableaux de maladies professionnelles, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a saisi pour avis le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire.

Par lettre du 17 mars 2020, la société [4] a notifié à Mme [I] son licenciement en raison de son absence prolongée depuis le 11 octobre 2019 perturbant le fonctionnement de l’entreprise, et de la nécessité de pourvoir à son remplacement de façon durable.

Par lettre en date du 28 octobre 2020, reçue le 30 octobre 2020, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a informé la société [4] que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles des Pays de la Loire venait de lui transmettre son avis favorable à la reconnaissance de l’origine professionnelle de la pathologie déclarée par Mme [I] et lui a notifié, en conséquence, sa décision de prendre de prendre en charge cette affection au titre de la législation professionnelle.

La date de consolidation de Mme [I] a été fixée au 1er mars 2021.

Contestant le bien-fondé de cette décision, la société [4] a saisi, par lettres du 17 décembre 2020 la commission de recours amiable ainsi que la commission médicale de recours amiable.

Par lettre du 29 avril 2021, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a notifié à la société [4] sa décision d’attribuer à Mme [I] un taux d’incapacité permanente partielle de 30 %.

Les conclusions médicales reproduites dans cette lettre étaient rédigées dans les termes suivants :
‘‘MP HT sd dépressif reconnue au titre 7ème alinéa au 22 janvier 2019 – séquelles de type sd dépressif chronique avec anhédonie au 1er plan, troubles de la concentration, auto-culpabilisation et dévalorisation mais avec réinvestissement professionnel en cours ».

Par lettre du 17 décembre 2021, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a notifié à la société [4] l’avis de la commission médicale de recours amiable rendu le 19 novembre 2021 fixant le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I] à 18 %.

Contestant le bien-fondé de cette décision, la société [4], estimant que ce taux ne lui était pas opposable, a saisi le Pôle social du tribunal judiciaire de Nantes, le 23 décembre 2021.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 25 septembre 2024 à laquelle les parties ont été régulièrement convoquées. La société [4] y était représentée et la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique a été dispensée de comparaître. Le présent jugement est dès lors contradictoire.

Par conclusions écrites déposées à l’audience, la société [4] demande au tribunal de :
– Dire et juger que le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I] doit être ramené à 0 %;
– Condamner la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique à verser à la société [4] la somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, la société [4] fait notamment valour que ni le certificat médical initial, ni les arrêts de travail et/ou soins prescrits, ni le certificat médical final n’ont été portés à la connaissance de son propre médecin conseil, le docteur [E]; que ce praticien, dans un premier avis médico-légal du 15 juillet 2021, indique si le dossier médical qui lui a été transmis indique : ‘‘Etat antérieur: pas d’antécédent psychiatrique familial ni personnel déclaré’‘, une telle mention ne permet pas d’affirmer l’absence d’interférence psychique, psychiatrique ou somatique, ni l’absence d’éléments personnels dans la biographie du sujet pouvant potentiellement participer au tableau clinique décrit par le médecin conseil de la caisse; qu’en l’état du dossier, il est strictement impossible d’identifier une symptomatologie séquellaire précise et de proposer un taux d’incapacité permanente partielle; que le docteur [E], dans un second avis médico-légal du 10 janvier 2022, estime que l’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I] à 30 % est contestable et qu’en conséquence il confirme son appréciation figurant dans son précédent avis médico-légal du 15 juillet 2021, à savoir qu’en l’état du dossier, il est strictement impossible d’identifier une symptomatologie séquellaire précise et de proposer un taux d’incapacité permanente partielle.

Par conclusions écrites reçues le 10 septembre 2024 et transmises à l’audience, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique demande au tribunal de:

– Confirmer la décision de la commission médicale de recours amiable de fixer le taux d’incapacité permanente partielle opposable à la société [4] à 18 % au titre de la maladie professionnelle de Mme [I].

Au soutien de ses prétentions, la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique fait notamment valoir que le médecin conseil de la société [4] n’a pas mis en évidence d’état antérieur; que l’origine multifactorielle de la maladie de Mme [I], invoquée par ce praticien, est démentie par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles qui a relevé «l’absence dans le dossier d’éléments extra-professionnels pouvant expliquer l’apparition du syndrome dépressif»; qu’aucun symptôme constaté lors de la consolidation du 1er mars 2021 ne devra donc être exclu de l’indemnisation au titre du taux d’incapacité permanente partielle; que la caisse produit les pièces médico-administratives sollicitées par la société [4], à savoir le certificat médical initial et les certificats médicaux des 25 mars et 30 novembre 2020; que le médecin conseil de la caisse, dans un avis rendu le 14 août 2024, a considéré que l’absence d’état antérieur était documentée par le psychiatre et que selon les rapports médicaux précédents et en référence au chapitre 4.4.2 du barème de l’UCANSS, le taux d’incapacité permanente partielle de 18 % était conforme.

Le docteur [N], médecin-consultant, qui a pris connaissance à l’audience du 25 septembre 2024 du dossier de Mme [I] transmis par la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique ainsi que des pièces confidentielles communiquées par le service médical de la caisse, indique qu’en toute hypothèse, l’absence d’antécédents n’est pas la preuve d’un état non fragile précédemment; que l’on ne sait rien de l’intégrité mentale antérieure du sujet ; qu’il n’est pas fait état d’asthénie dans les pièces médicales; que l’on peut avoir des doutes quant à l’existence de troubles séquellaires, ainsi que sur le lien entre la pathologie et le travail.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le tribunal, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie expressément aux conclusions déposées au greffe du tribunal et soutenues à l’audience, ainsi qu’à l’ensemble des pièces communiquées et aux prétentions orales telles qu’elles sont rappelées ci-dessus.

La décision a été mise en délibéré au 22 novembre 2024.

Par ordonnance du 22 novembre 2024, cette date a été prorogée au 17 janvier 2025, puis prorogée au 31 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement et en premier ressort, par jugement contradictoire, mis à disposition au greffe :

– Dit recevable l’instance introduite par la société [4];
– Fixe à 5 % à la date du 1er mars 2021 le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [I], opposable à la société [4];
– Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires;
– Déboute la société [4] de sa demande d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
– Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire Atlantique aux dépens.

RAPPELLE que conformément aux dispositions des articles 34 et 538 du code de procédure civile et R. 211-3 du code de l’organisation judiciaire, les parties disposent d’un délai d’UN MOIS à compter de la notification de la présente décision pour en INTERJETER APPEL ;

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ par mise à disposition du jugement au greffe du tribunal le 31 janvier 2025, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, la minute étant signée par Monsieur Hubert LIFFRAN, Président, et par Loïc TIGER, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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