Tribunal judiciaire de Nanterre, 7 janvier 2025, RG n° 22/00334
Tribunal judiciaire de Nanterre, 7 janvier 2025, RG n° 22/00334

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nanterre

Thématique : Compétence et régularité dans le recouvrement des aides exceptionnelles en période de crise sanitaire

Résumé

Contexte de l’affaire

Monsieur [I] [O], masseur-kinésithérapeute, a reçu une aide financière de 2.636 € dans le cadre du dispositif d’aide à la perte d’activité (DIPA) en raison des impacts économiques du confinement lié à la pandémie de COVID-19. Cette aide a été versée par la CPAM des Hauts-de-Seine le 11 juin 2020.

Notification de trop-perçu

La CPAM des Hauts-de-Seine a informé Monsieur [O] d’un trop-perçu de 2.636 € par courrier daté du 15 septembre 2021, que ce dernier conteste n’avoir jamais reçu. En réponse, la CPAM a émis une mise en demeure le 30 novembre 2021, que Monsieur [O] a accusé réception le 8 décembre 2021.

Recours et contestations

Monsieur [O] a contesté la mise en demeure en saisissant la commission de recours amiable le 27 janvier 2022. N’ayant pas reçu de réponse dans le délai imparti, il a saisi le tribunal judiciaire de Nanterre le 31 mai 2022. Parallèlement, la CPAM a notifié une contrainte de 2.457,17 € le 21 février 2022, à laquelle Monsieur [O] a également formé opposition.

Audiences et demandes des parties

L’affaire a été entendue le 18 novembre 2024, où Monsieur [O] a formulé plusieurs demandes, notamment l’annulation de la procédure de recouvrement et la reconnaissance de l’irrégularité des notifications de la CPAM. De son côté, la CPAM a demandé le débouté de toutes les demandes de Monsieur [O] et la confirmation du montant de l’indu.

Arguments juridiques

Monsieur [O] a soutenu que la CPAM n’avait pas qualité pour procéder au recouvrement, arguant que seule la CNAM pouvait le faire. La CPAM a rétorqué que, selon le code de la sécurité sociale, elle avait compétence pour recouvrer les indus. Le tribunal a examiné les dispositions légales pertinentes, notamment celles relatives à la notification d’indu et à la mise en demeure.

Motivation des décisions

Le tribunal a constaté que la contrainte émise par la CPAM était suffisamment motivée, malgré certaines erreurs dans la mise en demeure. Cependant, il a jugé que la mise en demeure était entachée d’insuffisance de motivation, entraînant l’annulation de la contrainte et de la mise en demeure.

Conclusion du tribunal

Le tribunal a annulé la mise en demeure et la contrainte, débouté Monsieur [O] de sa demande d’indemnisation, ainsi que la CPAM de sa demande reconventionnelle. La CPAM a été condamnée aux dépens de l’instance, et l’exécution provisoire du jugement a été ordonnée.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NANTERRE

PÔLE SOCIAL

Affaires de sécurité sociale et aide sociale

JUGEMENT RENDU LE
07 Janvier 2025

N° RG 22/00334 – N° Portalis DB3R-W-B7G-XKX7

N° Minute : 24/01786

AFFAIRE

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES HAUTS-DE-SEINE

C/

[I] [O]

Copies délivrées le :

DEMANDERESSE

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES HAUTS-DE-SEINE
Division du Contentieux
[Localité 2]

Représentée par Mme [N] [D], muni d’un pouvoir régulier,

DEFENDEUR

Monsieur [I] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par AARPI CHOLEY & VIDAL Avocats, avocat au barreau de AIX EN PROVENCE,

Substitué par Me Elie LELLOUCHE, avocat au barreau de PARIS,

***

L’affaire a été débattue le 18 Novembre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :

Matthieu DANGLA, Vice-Président
Jean-Marie JOYEUX, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Hanene ARBAOUI, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats et du prononcé : Gaëlle PUTHIER, Greffière.

JUGEMENT

Prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [I] [O], exerçant la profession de masseur-kinésithérapeute, a bénéficié du dispositif d’aide à la perte d’activité (DIPA) mis en place par le gouvernement, en compensation des conséquences sur son chiffre d’affaires de la mesure de confinement intervenue entre le 16 mars 2020 et le 30 juin 2020, pour un montant de 2.636 reçu par virement du 11 juin 2020.

La CPAM des Hauts-de-Seine indique avoir notifié un trop-perçu de 2.636 € à Monsieur [O] par courrier du 15 septembre 2021 que Monsieur [O] conteste avoir reçu.

Par lettre recommandée du 30 novembre 2021, dont Monsieur [O] a accusé réception le 8 décembre 2021, la CPAM des Hauts-de-Seine lui a notifié une mise en demeure de régler la somme de 2.636 €.

Monsieur [O] a contesté cette mise en demeure en saisissant la commission de recours amiable de l’organisme social par courrier du 27 janvier 2022.

Faute de réponse de la CPAM des Hauts-de-Seine dans le délai imparti, Monsieur [O] a saisi de son recours le tribunal judiciaire de Nanterre par courrier recommandé avec demande d’avis de réception en date du 31 mai 2022 (procédure RG n°22/00970).

La CPAM des Hauts-de-Seine a concomitamment notifié une contrainte émise pour un montant de 2.457,17 €, solde de l’indu initial après récupération sur prestations, par courrier recommandé du 21 février 2022.

Monsieur [O] a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal judiciaire de Nanterre par courrier recommandé avec demande d’avis de réception en date du 28 février 2022 (procédure RG n°22/00334).

Par ordonnance du 6 novembre 2023, cette juridiction a ordonné la jonction de ces deux recours.

L’affaire a été appelée à l’audience du 18 novembre 2024 à laquelle les parties, représentées, ont comparu et ont été entendues en leurs observations.

Monsieur [I] [O] demande au tribunal de :

sur le fond, à titre principal,
– juger que la procédure de recouvrement de l’indu est irrégulière ;
– juger que la CPAM des Hauts-de-Seine a irrégulièrement procédé à la compensation de l’indu par retenues sur prestation à hauteur de 178,49 € ;
– juger que la notification de payer du 15 septembre 2021 n’a jamais été notifiée à Monsieur [O] et est en tout état de cause irrégulière ;
– juger que la contrainte en date du 11 février 2022 est irrégulière ;
– juger que la notification de payer, la mise en demeure et la contrainte sont entachées d’incompétence ;
– juger que la CPAM des Hauts-de-Seine n’a pas qualité pour agir aux fins de recouvrement de l’indu litigieux en lieu et place de la CNAM ;
– juger que l’indu réclamé par la CPAM des Hauts-de-Seine à Monsieur [O] n’est pas fondé ;
– annuler la procédure de recouvrement de l’indu ;
– annuler la notification d’indu non-notifiée en date du 30 novembre 2021 par laquelle la CPAM des Hauts-de-Seine réclame à Monsieur [O] la somme de 2.636 € ;
– annuler la mise en demeure de payer en date du 30 novembre 2021 par laquelle la CPAM des Hauts-de-Seine réclame à Monsieur [O] le paiement de la somme de 2.636€;
– annuler la contrainte en date du 11 février 2022 par laquelle la CPAM des Hauts-de-Seine entend procéder au recouvrement de la somme de 2.457,51 € ;

– condamner la CPAM à payer à Monsieur [O] la somme de 178,49 € irrégulièrement recouvrée par la CPAM en compensation de l’indu malgré sa contestation ;

à titre subsidiaire, à supposer l’indu réclamé par la CPAM fondé,

– juger que la CPAM des Hauts-de-Seine a commis une série de fautes ayant conduit au versement d’un trop-perçu à Monsieur [O] et à l’établissement tardif du montant définitif de l’aide aux professionnels de santé à laquelle peut prétendre le praticien ;
– juger que ces agissements causent préjudice à Monsieur [O] ;
– condamner la CPAM des Hauts-de-Seine à verser à Monsieur [O] la somme de 2.636 € de dommages-intérêts pour l’indemnisation de son préjudice ;
en tout état de cause,
– condamner la CPAM des Hauts-de-Seine à verser à Monsieur [O] la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice moral ;
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la CPAM des Hauts-de-Seine ;
– condamner la CPAM des Hauts-de-Seine à verser à Monsieur [O] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La caisse primaire d’assurance-maladie des Hauts-de-Seine demande au tribunal de :
– débouter Monsieur [O] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
– confirmer le montant de l’indu de 2.636 € notifié le 15 septembre 2021 ;
– condamner Monsieur [O] à lui payer la somme de 2.636 € ;
– condamner Monsieur [O] aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, le tribunal, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions et aux pièces déposées à l’audience.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 7 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.

PAR CES MOTIFS,

LE TRIBUNAL, statuant par jugement contradictoire rendu en premier ressort ;

ANNULE la mise en demeure émise par la CPAM des Hauts-de-Seine à l’encontre de Monsieur [I] [O] le 30 novembre 2021 ;

ANNULE la contrainte émise par la CPAM des Hauts-de-Seine à l’encontre de Monsieur [I] [O] le 11 février 2022, et notifiée le 15 février 2022 ;

DÉBOUTE Monsieur [I] [O] de sa demande indemnitaire ;

DÉBOUTE la CPAM des Hauts-de-Seine de sa demande reconventionnelle ;

DÉBOUTE Monsieur [I] [O] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de toutes demandes plus amples ou contraires ;

ORDONNE l’exécution provisoire du présent jugement ;

CONDAMNE la CPAM des Hauts-de-Seine aux dépens de l’instance.

Et le présent jugement est signé par Matthieu DANGLA, Vice-Président et par Gaëlle PUTHIER, Greffière, présents lors du prononcé.

LA GREFFIERE, LE PRÉSIDENT,

 


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