Tribunal judiciaire de Nanterre, 26 novembre 2024, RG n° 24/02260
Tribunal judiciaire de Nanterre, 26 novembre 2024, RG n° 24/02260

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nanterre

Thématique : Évaluation des responsabilités en matière de désordres de construction et nécessité d’expertise préalable.

Résumé

Contexte de l’affaire

La société [R], une chocolaterie traditionnelle fondée en 1852, a entrepris en mai 2023 des travaux pour créer une unité de production artisanale de chocolats et confiseries dans ses locaux. Ces travaux ont été confiés à la société TINE CONSTRUCTION, avec la société BTP Consultants en tant que bureau de contrôle et Monsieur [O] en tant qu’assistant à maîtrise d’ouvrage. Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 19 septembre 2023.

Problèmes rencontrés

Suite à la réception des travaux, la société [R] a constaté que certaines réserves n’avaient pas été levées, notamment des nuisances sonores causées par des groupes froids extérieurs, une humidité excessive dans certaines pièces, et des températures inappropriées pour la production de chocolats. En conséquence, la mairie de [Localité 18] a menacé la société de fermeture administrative.

Actions judiciaires

Le 22 décembre 2023, la société [R] a mis en demeure TINE CONSTRUCTION de remédier aux désordres. Par la suite, le 19 et 20 septembre 2024, elle a assigné les défendeurs pour demander la désignation d’un expert judiciaire afin d’évaluer les désordres, leurs causes, et les préjudices subis. À l’audience, la société [R] a maintenu sa demande et a suggéré un expert en architecture.

Réponse des défendeurs

Monsieur [O] a demandé à être mis hors de cause, affirmant qu’il n’avait intervenu qu’au stade de l’étude préliminaire et qu’il bénéficiait de l’aide juridictionnelle totale. Les autres défendeurs, TINE CONSTRUCTION et BTP Consultants, n’ont pas comparu à l’audience.

Décision du juge

Le juge a décidé de ne pas mettre hors de cause Monsieur [O] et a ordonné une expertise pour évaluer les désordres allégués. L’expert désigné devra examiner les désordres, déterminer leurs causes, et évaluer les solutions appropriées. La société [R] est tenue de consigner une provision de 6 500 euros pour la rémunération de l’expert dans un délai de huit semaines.

Modalités de l’expertise

L’expert devra convoquer les parties, recueillir leurs observations, et se rendre sur les lieux pour effectuer une description. Il devra également établir un calendrier prévisionnel de ses opérations et adresser un document de synthèse à l’issue de son expertise. En cas d’urgence, le demandeur pourra faire exécuter les travaux jugés indispensables par l’expert.

Conclusion

La décision a été rendue le 26 novembre 2024, avec une exécution provisoire de droit. La partie demanderesse est responsable des dépens, et l’expert devra rendre compte de l’avancement de ses travaux au juge du service du contrôle des expertises.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 26 NOVEMBRE 2024

N° RG 24/02260 – N° Portalis DB3R-W-B7I-Z2PN

N° de minute :

Société [R]

c/

Société TINE CONSTRUCTION,

Société BTP CONSULTANTS,

[D] [O]

DEMANDERESSE

Société [R]
[Adresse 8]
[Localité 14]

représentée par Maître Christofer CLAUDE de la SELAS REALYZE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R175

DEFENDEURS

Société TINE CONSTRUCTION
[Adresse 10]
[Localité 9]

Société BTP CONSULTANTS
[Adresse 4]
[Localité 15]

Toutes deux non comparantes

Monsieur [D] [O]
[Adresse 7]
[Localité 12]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 92050-2024-005767 du 09/10/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANTERRE)

représenté par Maître Fanny BOUKSON-GALERA, avocate au barreau de HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : PN 212

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président : Karine THOUATI, Vice-présidente, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,

Greffière : Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière,

Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 17 octobre 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société [R] est une chocolaterie traditionnelle créée en 1852, qui occupe actuellement des locaux situé [Adresse 13].

En mai 2023 elle a entrepris des travaux de création d’une unité de production artisanale de chocolats et confiseries dans ledit local, travaux confiés à la société TINE CONSTRUCTION, la société BTP Consultants étant bureau de contrôle et Monsieur [O] assistant à maitrise d’ouvrage.
Les travaux ont été réceptionnés avec réserves le 19 septembre 2023. Déplorant que la société TINE CONSTRUCTIONS n’ait pas levé certaines réserves, la société [R] a mis en demeure celle-ci par courrier du 22 décembre 2023 de remédier aux désordres et notamment :
-le bruit généré par les groupes froids extérieurs (CTA) qui a conduit la mairie de [Localité 18] à la menacer de fermeture administrative
-l’humidité excessive de certaines pièces néfaste aux produits chocolatiers
-des températures excessives incompatibles avec la production de chocolats

Par actes d’huissier des 19 et 20 septembre 2024 la société [R] a assigné les défendeurs à heure indiquée après y avoir été autorisée, aux fins de solliciter la désignation d’un expert judiciaire pour donner son avis sur les désordres, leurs causes, les travaux pour y remédier, et sur ses préjudices.

A l’audience, la société [R] a maintenu les demandes de son assignation et précisé qu’elle suggère un expert de spécialité architecture. Elle explique qu’elle a été contrainte de solliciter une assignation à heure indiquée car les désordres sont un obstacle à sa production de chocolats qui ne peuvent ni être produits convenablement ni être stockés et qu’elle a besoin de solutions immédiates.

Monsieur [O] sollicite sa mise hors de cause, indiquant qu’il n’est intervenu pour assistance à maitre d’ouvrage qu’au stade de l’étude préliminaire. Il précise qu’il bénéficie de l’aide juridictionnelle totale.

Les autres défenderesses, assignées régulièrement (à personne morale pour la société BTP Consultants et à étude pour la société TINE Construction), n’ont pas comparu.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation développée oralement à l’audience.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,
Rejetons la demande de mise hors de cause de Monsieur [O],
Ordonnons une expertise
Commettons pour y procéder :

Monsieur [N]-[M] [P]
[Adresse 5]
[Localité 16]
Tél : [XXXXXXXX02]
Port. : [XXXXXXXX03]
Mail : [Courriel 17]

lequel pourra prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne,

avec mission de :

➣ relever et décrire les désordres allégués expressément dans l’assignation et affectant l’immeuble litigieux et, le cas échéant, sans nécessité d’extension de mission, tous désordres connexes, ayant d’évidence la même cause mais révélés postérieurement à l’assignation, sans préjudice par ailleurs des dispositions de l’article 238 alinéa 2 du code de procédure civile ;

➣ en détailler l’origine, les causes et l’étendue, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres sont imputables, et dans quelles proportions ; dire si les ouvrages sont conformes au contrat;

➣ indiquer les conséquences de ces désordres quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination ;

➣ donner son avis sur les solutions appropriées pour y remédier, telles que proposées par les parties; évaluer le coût des travaux utiles à l’aide de devis d’entreprises fournis par les parties ;

➣ donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée ;

➣ donner tous éléments permettant de faire les comptes entre les parties ;

➣ rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties ;

En cas d’urgence ou de péril en la demeure reconnus par l’expert, autorisons le demandeur à faire exécuter, à ses frais avancés et pour le compte de qui il appartiendra, sous la direction du maître d’oeuvre et par des entreprises qualifiées de son choix, les travaux estimés indispensables par l’expert qui, dans ce cas, déposera un pré-rapport précisant la nature, l’importance et le coût de ces travaux ;

Disons que pour procéder à sa mission l’expert devra :

✏ convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise ;

✏ se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés ;

✏ se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis;

✏ à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations ; l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :

→ en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;

Page

→ en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;

→ en fixant aux parties un délai limite pour procéder aux interventions forcées , avec date limite de l’assignation

→ en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;

✏ au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par exemple : réunion de synthèse, communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations ;

→ fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse ;

→ rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du Code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai.

Disons à ce titre que le terme du délai fixé par l’expert pour le dépôt des dernières observations marquera la fin de l’instruction technique et interdira, à compter de la date à laquelle il est fixé, le dépôt de nouvelles observations, sauf les exceptions visées à l’article 276 du code de procédure civile ;

Fixons à la somme de 6 500 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert qui devra être consignée par la partie demanderesse entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 6] , dans le délai de huit (8) semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis ; en privilégiant le paiement par virement, la partie demanderesse devant solliciter les coordonnées de la régie par mail (avec une copie scannée de la décision) :[Courriel 19]
Disons que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;

Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du Code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d’un ficher PDF enregistré sur un CD-ROM , au greffe du tribunal judiciaire de Nanterre, service du contrôle des expertises, extension du palais de justice, [Adresse 11] ([XXXXXXXX01]), dans le délai de six (6) mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),

Disons que, dans le but de limiter le cout de l’expertise, favoriser l’instauration d’échanges dématérialisés et de limiter la durée de l’expertise, le technicien devra privilégier l’usage de la plateforme Opalexe et qu’il proposera en ce cas à chacune des parties, au plus tard lors de la première réunion d’expertise, de recourir à ce procédé pour communiquer tous documents et notes par la voie dématérialisée dans les conditions de l’article 748-1 du code de procédure civile et de l’arrêté du 14 juin 2017 validant de tels échanges ;

Disons qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,

Disons que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le juge du service du contrôle des expertises, spécialement désigné à cette fin en application des articles 155 et 155-1 du même code, qui statuera sur tous les incidents;

Disons que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;

Laissons à la partie demanderesse la charge des dépens ;

Rappelons que l’exécution provisoire est de droit.

FAIT À NANTERRE, le 26 novembre 2024.

LA GREFFIÈRE

Divine KAYOULOUD ROSE, Greffière
LE PRÉSIDENT

Karine THOUATI, Vice-présidente

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon