Tribunal judiciaire de Mulhouse, 26 novembre 2024, RG n° 23/00048
Tribunal judiciaire de Mulhouse, 26 novembre 2024, RG n° 23/00048

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Mulhouse

Thématique : Obligation d’information et nullité contractuelle : enjeux de la vente d’un véhicule mal décrit.

Résumé

Acquisition du véhicule

M. [P] [F] a acheté un véhicule de la Sas Optim 67, au prix de 10 999 euros, avec un kilométrage de 127 000 kilomètres, le 14 février 2022. Le véhicule était censé fonctionner au gaz de pétrole liquéfié (GPL).

Problèmes rencontrés

Après la livraison, M. [F] a constaté qu’il ne pouvait pas alimenter le véhicule en GPL et a donc restitué le véhicule à la Sas Optim 67 le 19 mars 2022. Une expertise a été réalisée, révélant que le véhicule était en réalité équipé pour fonctionner au gaz naturel pour véhicules (GNV).

Actions en justice

Le 27 janvier 2023, M. [F] a engagé une procédure judiciaire contre la Sas Optim 67, demandant la remise en état du véhicule ou, à titre subsidiaire, la résolution de la vente et le remboursement du prix. Il a également demandé des dommages-intérêts pour préjudice de jouissance.

Arguments de M. [F]

M. [F] a soutenu que la Sas Optim 67 avait manqué à ses obligations contractuelles en lui faisant croire que le véhicule fonctionnait au GPL, ce qui constituait une pratique commerciale trompeuse. Il a également souligné que le véhicule livré n’était pas conforme à celui commandé.

Réponse de la Sas Optim 67

La Sas Optim 67 a contesté les demandes de M. [F], arguant qu’il avait été informé des caractéristiques du véhicule et qu’il avait utilisé le véhicule sans réserve pendant un certain temps. Elle a également formulé des demandes reconventionnelles, demandant à M. [F] de récupérer le véhicule et de payer des frais de gardiennage.

Décision du tribunal

Le tribunal a prononcé la nullité de la vente, considérant que la Sas Optim 67 n’avait pas respecté son obligation d’information précontractuelle. Il a ordonné la restitution du prix de vente à M. [F] et a rejeté les demandes de la Sas Optim 67.

Conséquences financières

La Sas Optim 67 a été condamnée à verser à M. [F] 10 999 euros pour la restitution du prix de vente et 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Les demandes de M. [F] au-delà de ces montants ont été rejetées, tout comme les demandes reconventionnelles de la Sas Optim 67.

Exécution du jugement

Le jugement a été déclaré exécutoire de plein droit, et la Sas Optim 67 a été condamnée aux dépens de la procédure.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MULHOUSE
———————————
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
—————————-
Première Chambre Civile

MINUTE n°
N° RG 23/00048 – N° Portalis DB2G-W-B7H-IDS2

KG/BD
République Française

Au Nom du Peuple Français

JUGEMENT

DU 26 novembre 2024
Dans la procédure introduite par :

Monsieur [P] [F]
demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Jean-luc ROSSELOT de l’ASSOCIATION MOSER ROSSELOT SCHULTZ, avocats au barreau de MULHOUSE, vestiaire : 24

– partie demanderesse –

A l’encontre de :

S.A.S. OPTIM 67
dont le siège social est sis [Adresse 1]

représentée par Maître Sophie PUJOL-BAINIER de la SCP BSP² AVOCATS ASSOCIES, avocat postulant, avocats au barreau de MULHOUSE, vestiaire : 41 et Maître Arnaud HOUSSAIN de la SCP CABINET RACINE, avocat plaidant, avocats au barreau de STRASBOURG, vestiaire : 18

– partie défenderesse –

CONCERNE : Demande en garantie des vices cachés ou tendant à faire sanctionner un défaut de conformité

Le Tribunal composé de Blandine DITSCH, Juge au Tribunal de céans, statuant à Juge unique, et de Thomas SINT, Greffier

Jugement contradictoire en premier ressort

Après avoir à l’audience publique du 15 octobre 2024, entendu les avocats des parties en leurs conclusions et plaidoiries, et en avoir délibéré conformément à la loi, statuant comme suit, par jugement mis à disposition au greffe ce jour :

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant bon de commande non daté, M. [P] [F] a acquis auprès de la Sas Optim 67 un véhicule de marque […], présentant un kilométrage de 127 000 kilomètres et fonctionnant au gaz de pétrole liquéfié (dit GPL) au prix de 10 999 euros.

La livraison du véhicule est intervenue le 14 février 2022.

Déplorant l’impossibilité d’alimenter le véhicule en GPL, M. [F] a remis le véhicule à la Sas Optim 67 le 19 mars 2022.

La Macif, assureur protection juridique de M. [F], a diligenté une expertise amiable contradictoire confiée au cabinet Créativ’ qui a établi un rapport le 19 octobre 2022, lequel a constaté que le véhicule était équipé pour recevoir du gaz naturel pour véhicules (GNV).

Par acte introductif d’instance, déposé par voie électronique le 27 janvier 2023, signifié le 21 février 2023, M. [F] a attrait la Sas Optim 67 devant le tribunal judiciaire de Mulhouse aux fins de voir ordonner la remise en état du véhicule et, à titre subsidiaire, la résolution de la vente et la restitution de la somme versée.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 28 mai 2024, M. [F] demande au tribunal de :

A titre principal,
– prononcer la résolution de la vente intervenue entre les parties le 14 février 2022 concernant le véhicule […] immatriculé [Immatriculation 5],
– condamner la société Optim 67 à lui payer la somme de 11.083,76 € au titre de la restitution du prix de vente,
– condamner la société Optim 67 à lui payer la somme de 300 € par mois au titre du préjudice de jouissance à compter du 29 mars 2023, date de la restitution du véhicule de prêt, jusqu’au jour du prononcé du jugement,

A titre subsidiaire,
– ordonner la remise en état du véhicule aux frais du garage Optim 67 par le biais du remplacement du moteur GNV par un moteur GPL,
– à défaut de remise en état du véhicule dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir, dire que le jugement à intervenir opèrera résolution du contrat de vente entre les parties,

En tout état de cause,
– condamner la société Optim 67 à lui payer la somme de 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Optim 67 aux entiers frais et dépens.
– constater l’exécution de plein droit du jugement à intervenir sur le fondement de l’article 514 du code de procédure civile,
– débouter la société Optim 67 de l’intégralité de ses fins et conclusions et de l’entièreté de sa demande reconventionnelle.

A l’appui de ses demandes, M. [F] soutient, au visa des articles L121-2 et L.217-4 du code de la consommation, L1112-1, 1130, 1641 et suivants du code civil, pour l’essentiel :
– que la Sas Optim 67 a gravement manqué à ses obligations contractuelles en lui faisant croire que le véhicule fonctionnait au GPL, caractéristique essentielle du véhicule déterminante de son consentement, ce qui constitue une pratique commerciale trompeuse et un comportement dolosif justifiant l’annulation de la vente,
– qu’un véhicule fonctionnant au GNV est beaucoup plus contraignant de sorte qu’il n’aurait pas acquis le véhicule s’il en avait eu connaissance,
– que si la carte grise supporte la mention GNV, le carnet d’entretien supporte la mention EDG et le bon de commande supporte la mention GPL, ce qui entretient la confusion, étant précisé que le carnet d’entretien ne lui a pas été remis lors de l’achat,
– que le défaut de conformité ne peut pas être qualifié d’apparent puisque, n’étant pas spécialiste, il ne pouvait pas distinguer un véhicule GNV d’un véhicule GPL,
– que, subsidiairement, le véhicule livré n’est pas conforme au véhicule commandé, ce qu’il ne pouvait pas déceler en sa qualité de profane, étant précisé que la mention “EDG” figurant au carnet d’entretien, qui ne lui a d’ailleurs pas été remis, abréviation du mot allemand Erdgasfahrzeug, n’était pas davantage éclairante,
– qu’il est donc en droit de solliciter la mise en conformité du bien dans un délai raisonnable de trente jours,
– qu’il a subi un préjudice de jouissance puisqu’il a été contraint de restituer le véhicule de prêt que lui avait confié le garage le 29 mars 2023 et ne pouvait pas récupérer le véhicule litigieux sans être assuré de son fonctionnement compte tenu de l’éloignement des stations équipées.

Par conclusions signifiées par Rpva le 10 juin 2024, la Sas Optim 67 sollicite du tribunal de :
– débouter M. [F] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

A titre reconventionnel,
– condamner M. [F] à récupérer le véhicule sous astreinte dans un délai de quinze jours suivant la décision définitive à intervenir,
– condamner M. [F] au paiement des frais de gardiennage à hauteur de 25 € Ttc
par jour, à compter du 8 décembre 2023 jusqu’à remise effective du véhicule entre les mains de M. [F],
– condamner M. [F] à lui payer la somme de 1.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner M. [F] aux entiers frais et dépens de la procédure.

Au soutien de ses prétentions, la Sas Optim 67 fait valoir, en substance :
– que M. [F] a pu faire un tour complet du véhicule le jour de sa livraison et s’est vu remettre le carnet d’entretien, qui mentionne l’énergie EDG et la carte grise qui mentionne l’énergie GNV, l’acceptation sans réserves interdisant à l’acheteur de se prévaloir des défauts de conformité apparents, comme tel est le cas en l’espèce puisqu’un acquéreur, même profane, a pu avoir connaissance de l’existence d’un moteur GNV,
– que M. [F], chauffeur de profession, a démontré sa connaissance de la motorisation du véhicule et de lecture de la carte grise et du carnet d’entretien de sorte qu’il n’y a eu aucune pratique commerciale trompeuse, étant précisé qu’il s’est accomodé du véhicule en l’utilisant pendant 1 576 kilomètres entre le 14 février et le 22 mars 2022,
– que M. [F] ne saurait se prévaloir d’aucun vice caché, le défaut de construction n’étant pas imputable au vendeur, étant précisé que le vice a été réparé et qu’il ne justifie d’aucun dommage puisqu’elle a mis un véhicule gratuitement à sa disposition et qu’il l’a restitué le 29 mars 2023 de sa seule initiative,
– que, reconventionnellement, M. [F] a été informé dès le 7 décembre 2023 de la mise à disposition de son véhicule après réparation et a été mis en demeure de le récupérer par courrier du 18 décembre 2023 de sorte qu’il convient de le condamner à récupérer le véhicule sous astreinte.

Une ordonnance de clôture a été rendue le 12 septembre 2024.

Il est, en application de l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, renvoyé au dossier de la procédure, aux pièces versées aux débats et aux conclusions des parties ci-dessus visées.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe,

PRONONCE la nullité de la vente du véhicule de marque […] immatriculé [Immatriculation 5] conclue entre M. [P] [F] et la Sas Optim 67 ;

CONDAMNE la Sas Optim 67 à verser à M. [P] [F] les sommes suivantes :

– 10.999,00 € (DIX MILLE NEUF CENT QUATRE-VINGT-DIX-NEUF EUROS) au titre de la restitution du prix de vente,

– 1.500,00 € (MILLE CINQ CENTS EUROS) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE, pour le surplus, les demandes formées par M. [P] [F] ;

REJETTE les demandes formées par la Sas Optim 67 ;

CONDAMNE la Sas Optim 67 aux dépens ;

CONSTATE l’exécution provisoire du présent jugement.

Et ce jugement a été signé par le Président et le Greffier.

Le Greffier, Le Président,

 


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