Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Metz
Thématique : Résolution contractuelle et restitution d’acompte en raison d’inexécution des obligations.
→ Résumé1. Les faits constantsLa commune d'[Localité 3] a passé commande auprès de la société SL SOLUTIONS GMBH pour la fabrication et la pose d’une bibliothèque pour enfants, pour un montant de 13 400 euros, le 08 juin 2022. Un bon de commande a été émis le 31 août 2022, et un acompte de 10 000 euros a été payé le 06 septembre 2022. Face à l’absence de livraison, la commune a mis en demeure la société de réaliser les travaux avant le 24 février 2023, puis a demandé le remboursement de l’acompte le 13 mars 2023. Un contrat antérieur avait également été signé pour la remise en état d’un portail. Ne recevant pas de réponse, la commune a engagé une procédure judiciaire. 2. La procédureLa commune d'[Localité 2] a assigné la société SL SOLUTIONS GMBH devant le Tribunal judiciaire de METZ par acte d’huissier daté du 22 mai 2023. La société a constitué avocat le 14 septembre 2023. L’affaire a été mise en délibéré le 6 février 2025 après une audience le 21 novembre 2024. 3. Prétentions et moyens des partiesLa commune d'[Localité 2] demande la résolution du contrat et le remboursement de l’acompte de 10 000 euros, ainsi que des dommages et intérêts de 3 000 euros. Elle soutient que la société n’a pas respecté ses obligations contractuelles. En réponse, la société SL SOLUTIONS GMBH ne conteste pas la résolution du contrat ni le remboursement de l’acompte, mais réclame le paiement de 4 752 euros pour des travaux sur le portail du boulodrome, tout en demandant la compensation des sommes dues. Elle conteste également la demande de dommages et intérêts de la commune. 4. Motivation du jugementLe tribunal a constaté que la société SL SOLUTIONS GMBH n’a pas exécuté les travaux de la bibliothèque, ce qui justifie la résolution du contrat. La commune a droit au remboursement de l’acompte de 10 000 euros, avec intérêts à partir du 13 mars 2023. Concernant la demande reconventionnelle de la société, le tribunal a jugé qu’elle n’a pas prouvé l’exécution des travaux pour le portail, et a donc débouté cette demande. 5. Dommages et intérêtsLe tribunal a reconnu que la non-exécution des travaux a causé un préjudice à la commune, évalué à 500 euros, et a condamné la société SL SOLUTIONS GMBH à verser cette somme à la commune. 6. Dépens et article 700 du Code de procédure civileLa société SL SOLUTIONS GMBH, perdante, a été condamnée aux dépens et à verser 1 500 euros à la commune au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. 7. Exécution provisoireLe tribunal a ordonné que l’exécution du jugement soit de droit, conformément aux dispositions en vigueur. |
Minute n° 2025/101
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ
1ère CHAMBRE CIVILE
N° de RG : 2023/01585
N° Portalis DBZJ-W-B7H-KBGQ
JUGEMENT DU 06 FEVRIER 2025
I PARTIES
DEMANDERESSE :
LA COMMUNE D’[Localité 2], prise en la personne de son Maire en exercice, dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Maître Antoine PAVEAU de l’ASSOCIATION LOMOVTZEFF-PAVEAU-VELER, avocat au barreau de METZ, vestiaire : C403
DÉFENDERESSE :
La Société SL SOLUTIONS GMBH, société de droit allemand, prise en la personne de son représentant légal, dont le siège social est sis [Adresse 1] (ALLEMAGNE)
représentée par Maître Marlène SCHOTT de la SCP SCHOTT, avocat au barreau de METZ, vestiaire : B102
II COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Cécile GASNIER, Juge, statuant à Juge Unique sans opposition des avocats
Greffier : Caroline LOMONT
Après audition le 21 novembre 2024 des avocats des parties
III EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, « Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d’un visa des conclusions des parties avec l’indication de leur date. Le jugement doit être motivé. Il énonce la décision sous forme de dispositif. » Selon les dispositions de l’article 768 alinéa 3 « Les parties doivent reprendre dans leurs dernières conclusions les prétentions et moyens présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et le tribunal ne statue que sur les dernières conclusions déposées. »
1°) LES FAITS CONSTANTS
Selon devis accepté le 08 juin 2022, la commune d’ [Localité 3] a passé commande auprès de la société SL SOLUTIONS GMBH d’une prestation de fabrication et pose d’une bibliothèque pour enfants faite sur mesure pour garnir la bibliothèque municipale. Le prix de la prestation était fixé à 13 400 euros.
Un bon de commande a été émis le 31 août 2022 puis un acompte de 10 000 euros a été payé par mandat de paiement en date du 06 septembre 2022.
Aucune livraison n’étant intervenue, la Commune a, par courrier, mis en demeure la société SL SOLUTIONS GMBH de réaliser les travaux avant le 24 février 2023.
Une seconde mise en demeure est intervenue le 13 mars 2023 aux fins d’obtenir le remboursement de l’acompte.
Un précédent contrat avait par ailleurs été conclu entre les deux parties, le 25 août 2022, pour la remise en état du portail du boulodrome de la commune.
A défaut de réponse à ses mises en demeure, la Commune d'[Localité 2] a introduit la présente procédure.
2°) LA PROCEDURE
Par acte d’huissier de justice daté du 22 mai 2023 transmis en Allemagne pour signification dans un état membre en application du règlement (CE) 2020/1784 du 25 novembre 2020 (signification en date du 30 mai 2023) et déposé au greffe de la juridiction par voie électronique le 22 juin 2023, la Commune d'[Localité 2] a constitué avocat et a assigné la société SL SOLUTIONS GMBH devant la Première chambre civile du Tribunal judiciaire de METZ.
La société SL SOLUTIONS GMBH a constitué avocat par acte notifié par RPVA le 14 septembre 2023.
La présente décision est contradictoire.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 octobre 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience du 21 novembre 2024 lors de laquelle elle a été mise en délibéré au 6 février 2025 par mise à disposition au greffe.
3°) PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Selon les termes de ses dernières conclusions, notifiées par RPVA le 28 mars 2024, la Commune d'[Localité 2] demande au tribunal au visa des articles 1217 et 1227 du code civil, de :
– PRONONCER la résolution du contrat liant les parties ;
EN CONSEQUENCE,
– CONDAMNER la société SL SOLUTIONS GMBH à verser à la commune de [Localité 2] la somme de 10 000€ en remboursement des sommes perçues ;
– DIRE que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 13 mars 2023 ;
– CONDAMNER la société SL SOLUTIONS GMBH à verser à la commune de [Localité 2] la somme de 3000€ à titre de dommages et intérêts ;
– DEBOUTER la société SL SOLUTIONS GMBH de sa demande reconventionnelle ;
– CONDAMNER la société SL SOLUTIONS GMBH à verser à la commune de [Localité 2] la somme de 1500€ en application des dispositions de l’article 700 du CPC ;
– LA CONDAMNER aux entiers frais et dépens
Au soutien de sa demande en résolution du contrat, la commune d’[Localité 3] fait valoir, sur le fondement des dispositions des articles 1217 et 1227 du code civil, que la société SL SOLUTIONS GMBH n’a pas respecté ses obligations contractuelles puisqu’elle n’a pas réalisé la prestation à laquelle elle s’était engagée. La commune précise que si le contrat ne prévoyait pas de délai d’exécution de la prestation, celle-ci devait nécessairement être exécutée dans un délai raisonnable, inférieur à un an, ce qui n’a pas été le cas.
En réponse à la demande de paiement et de compensation formée par la société défenderesse, la commune d’[Localité 3] soutient que si un second contrat, relatif au portail du boulodrome de la ville, a bien été conclu avec la société SL SOLUTIONS GMBH, aucun paiement n’est du puisque la prestation en question n’a jamais été fournie par la société SL SOLUTIONS GMBH. Elle désigne le bon de livraison versé en défense comme étant un faux et justifie avoir déposé plainte en ce sens.
S’agissant de sa demande de dommages et intérêts, la commune d’[Localité 3] indique que le retard dans l’exécution de la prestation a privé la bibliothèque de la réalisation d’un meuble pour enfants pendant un an et que les fonds de la commune ont été ainsi mobilisés inutilement, ce qui est de fait, selon elle, générateur d’un préjudice.
Par des conclusions notifiées au RPVA le 9 septembre 2024, qui sont ses dernières conclusions, la société SL SOLUTIONS GMBH demande au tribunal au visa des articles 1103, 1194 et 1347 et suivants du code civil, de :
– CONSTATER que la société SL SOLUTIONS GMBH ne s’oppose pas à ce que soit prononcée la résolution du contrat conclu avec la commune de [Localité 2] concernant la réalisation d’une bibliothèque pour enfants ;
– CONSTATER que la société SL SOLUTIONS GMBH ne conteste pas être redevable de la somme de 10000 euros au titre de l’acompte versé par la commune de [Localité 2] ;
– CONDAMNER la commune de [Localité 2] à verser à la société SL SOLUTIONS GMBH la somme de 4752 euros au titre du contrat relatif au portail du boulodrome ;
– ORDONNER la compensation des sommes dues par chacune des parties ;
– DEBOUTER la commune de [Localité 2] de sa demande de dommages et intérêt ;
– DEBOUTER la commune de [Localité 2] de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– STATUER ce que de droit quant aux frais et dépens.
En défense, la société SL SOLUTIONS GMBH indique qu’elle ne conteste pas la réalité des faits tels que décrits par la Commune d'[Localité 2] et qu’elle ne s’oppose donc pas à la résolution du contrat concernant la bibliothèque pour enfants ou à la restitution de l’acompte de 10 000 euros puisque, effectivement, les travaux n’ont jamais été exécutés par ses soins.
En revanche, elle forme une demande reconventionnelle en paiement et en compensation. Au soutien de cette demande formée au visa des articles 1103, 1194 et 1347, la société SL SOLUTIONS GMBH fait valoir qu’avant d’entamer les discussions concernant la bibliothèque, les parties s’étaient mises d’accord pour que des travaux de remise en état du portail du boulodrome soient confiés à la défenderesse et, ce pour un montant de 5 372 euros. La société SL SOLUTIONS GMBH affirme que cette somme ne lui a jamais été payée par la Commune malgré la livraison des travaux. Elle admet néanmoins ne pas avoir effectué le montage du portail, et accepte à cet égard de déduire 620 euros au prix de la prestation dont le paiement est sollicité. Elle demande en conséquence la compensation des sommes dues.
S’agissant de la demande de dommages et intérêts formée par la Commune, la société SL SOLUTIONS GMBH considère que celle-ci doit en être déboutée puisqu’elle n’a, elle-même, pas respecté son obligation de paiement dans le cadre du contrat relatif au portail du boulodrome.
IV MOTIVATION DU JUGEMENT
1°) SUR LA DEMANDE DE RESOLUTION FORMEE PAR LA COMMUNE D'[Localité 2]
– Sur la résolution
Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Il résulte de l’article 1217 du code civil que : « La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :
– refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
– poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
– obtenir une réduction du prix ;
– provoquer la résolution du contrat ;
– demander réparation des conséquences de l’inexécution.
Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter ».
Conformément à l’article 1224 du code civil, « la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice ». L’article 1227 du même code indique à cet égard que « la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice ».
En l’espèce, la commune demanderesse verse au débat le devis relatif à la fabrication et à la pose de la bibliothèque par la société SL SOLUTIONS GMBH, en date du 08 juin 2022. Il ressort de ce dernier que la société SL SOLUTIONS GMBH s’engageait à réaliser la bibliothèque dans un délai d’un mois à compter de la commande, et à en assurer son installation en deux jours. Pourtant, si le bon de commande a été signé et accepté par la commune d’[Localité 3] le 31 août 2022, force est de constater que le contrat n’a pas été respecté par la société défenderesse, et ce, malgré mise en demeure. Le non-respect du contrat n’est par ailleurs pas contesté par la société SL SOLUTIONS GMBH qui confirme ne pas avoir réalisé les travaux auxquels elle s’était engagée.
Cette inexécution apparaît suffisamment grave au sens de l’article 1224 du code civil pour qu’il soit fait droit à la demande de résolution judiciaire formée par la demanderesse.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal judiciaire, Première Chambre civile, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
PRONONCE la résolution du contrat conclu entre la société SL SOLUTIONS GMBH et la commune d’[Localité 3], prise en la personne de son maire en exercice, le 08 juin 2022, concernant la fabrication et la pose d’une bibliothèque enfant sur mesure par la société SL SOLUTIONS GMBH ;
CONDAMNE la société SL SOLUTIONS GMBH à restituer à la commune d’ [Localité 3], prise en la personne de son maire en exercice, la somme de 10 000 euros au titre de l’acompte versé le 06 septembre 2022, avec intérêts au taux légal à compter du 13 mars 2023 ;
DEBOUTE la société SL SOLUTIONS GMBH de sa demande en paiement de la somme de 4 752 euros formée à l’encontre de la commune d’[Localité 3], prise en la personne de son maire en exercice ;
DEBOUTE la société SL SOLUTIONS GMBH de sa demande de compensation ;
CONDAMNE la société SL SOLUTIONS GMBH à payer à la commune d’[Localité 3], prise en la personne de son maire en exercice, la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
CONDAMNE la société SL SOLUTIONS GMBH aux dépens ;
CONDAMNE la société SL SOLUTIONS GMBH à régler à la Commune d'[Localité 2] la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire du présent jugement est de droit.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 6 février 2025 par Madame Cécile GASNIER, juge, assistée de Madame Caroline LOMONT, Greffier.
Le Greffier Le Président
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