Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Metz
Thématique : Réexamen des droits aux prestations familiales et respect du principe de contradiction
→ RésuméContexte familial et divorceMadame [E] [U], divorcée de Monsieur [V] [P], vit en France avec leurs trois enfants. Le divorce a été prononcé par le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de Sarreguemines le 26 octobre 2017, établissant une autorité parentale conjointe et fixant la résidence des enfants chez Madame [E] [U]. Monsieur [P] a été condamné à verser une contribution mensuelle de 300 euros pour l’entretien et l’éducation des enfants. Situation professionnelle de Madame [E] [U]Depuis leur séparation en 2013, Madame [E] [U] a perçu des allocations de la Caisse d’Allocations Familiales de la Moselle (CAF), y compris l’allocation de soutien familial. En 2017, elle a trouvé un emploi à temps partiel en Allemagne, mais ce salaire n’ouvrait pas de droits sociaux. En 2018, elle a été embauchée en CDI, ce qui lui a permis de bénéficier d’allocations familiales allemandes, tout en continuant à recevoir des prestations de la CAF. Contrôle et régularisation des droits par la CAFEn octobre 2021, la CAF a informé Madame [E] [U] qu’elle ne pouvait plus maintenir la priorité des versements des prestations familiales françaises en raison de la réglementation européenne. La CAF a suspendu les versements français à partir de novembre 2020 et a demandé le remboursement d’un trop-perçu totalisant 13 211,50 euros pour les périodes concernées. Recours de Madame [E] [U]Madame [E] [U] a contesté cette demande de remboursement par courrier en avril 2022. N’ayant pas reçu de réponse, elle a saisi le Pôle social du Tribunal judiciaire de Metz en août 2022 pour annuler les trop-perçus et réclamer les allocations dues. L’affaire a été mise en état et plusieurs audiences ont été programmées, avec une fixation pour janvier 2024. Débats et demandes des partiesLors de l’audience, Madame [E] [U] a demandé la reconnaissance de son recours, la condamnation de la CAF à justifier ses droits et à lui verser des dommages et intérêts. La CAF a reconnu la recevabilité du recours mais a demandé son rejet, affirmant avoir justifié les droits de Madame [E] [U] et contestant les demandes de dommages et intérêts. Réouverture des débatsLe tribunal a constaté que la CAF avait produit de nouvelles écritures et pièces en cours de délibéré, ce qui n’avait pas permis un débat contradictoire. En conséquence, il a ordonné la réouverture des débats pour permettre à Madame [E] [U] de prendre connaissance des nouvelles pièces et a fixé une nouvelle audience pour mars 2025. |
Minute n°
ctx protection sociale
N° RG 22/00817 – N° Portalis DBZJ-W-B7G-JUJE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ
_____________________________
[Adresse 2]
[Adresse 6]
☎ [XXXXXXXX01]
___________________________
Pôle social
JUGEMENT DU 31 JANVIER 2025
DEMANDERESSE :
Madame [E] [U] divorcée [P]
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Marie-anne BURON, avocat au barreau de SARREGUEMINES, substitué par Me Audrey FOURNIER, avocat au barreau de METZ, vestiaire : C300
DEFENDERESSE :
CAF DE LA MOSELLE
Service Recours
[Adresse 7]
[Localité 4]
représentée par M. [N] [T] muni d’un pouvoir régulier
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : M. MALENGE Grégory
Assesseur représentant des employeurs : M. Daniel CARDOT
Assesseur représentant des salariés : M. Marc OPILLARD
Assistés de Madame CARBONI Laura, Greffière,
a rendu, à la suite du débat oral du 22 Novembre 2024, le jugement dont la teneur suit :
Expéditions – Pièces (1) – Exécutoire (2)
à
Me Marie-anne BURON
[E] [U] divorcée [P]
CAF DE LA MOSELLE
le
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Madame [E] [U] divorcée [P], réside en France avec ses trois enfants issus de son mariage contracté avec Monsieur [V] [P].
Madame [E] [U] a initié une procédure de divorce devant le Juge aux affaires familiales du Tribunal de grande instance de SARREGUEMINES qui, suivant jugement en date du 26 octobre 2017, a entre autres dispositions :
– prononcé le divorce des époux,
– dit que Madame [E] [U] et Monsieur [V] [P] exercent en commun l’autorité parentale sur les trois enfants communs,
– fixé la résidence des enfants au domicile de Madame [E] [U],
– fixé à 100 euros par mois et par enfant, soit 300 euros par mois au total la contribution à l’entretien et l’éducation des enfants mise à la charge de Monsieur [P].
Depuis la séparation des époux intervenue en 2013, Madame [E] [U] a perçu des allocations versées par la CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA MOSELLE (CAF) et notamment l’allocation de soutien familial et le complément familial.
En 2017, Madame [E] [U] a trouvé un emploi à temps partiel en Allemagne dont le montant mensuel n’ouvre droit à aucun droit social en Allemagne, la CAF ayant néanmoins modifié ses droits d’allocataire au titre de ce salaire mensuel perçu.
En fin d’année 2018, Madame [E] [U] a été embauchée en Allemagne sous couvert d’un CDD de 30 heures par semaine transformé en CDI au 01 juin 2020.
Cet emploi ouvrant droit au versement des prestations familiales allemandes a donné lieu à l’attribution à Madame [E] [U] par le service des allocations familiales allemand, la « Familienkasse », d’un complément différentiel, le versement des allocations familiales restant à la charge de la CAF de la Moselle.
Suite à une opération de contrôle réalisée par la CAF, par courrier du 28 octobre 2021, l’organisme social a informé Madame [E] [U] de l’impossibilité de maintenir la priorité des versements des prestations familiales françaises pour les périodes de novembre 2019 au 30 juin 2020 et à compter du 01 novembre 2020 au regard de la situation professionnelle de l’ex-conjoint, les allocations familiales du régime allemand étant dues en priorité en application de la réglementation de l’Union Européenne. La CAF informait par ailleurs Madame [E] [U] de son droit à l’attribution d’une allocation différentielle si elle en remplissait les conditions et de la suspension du versement des prestations au titre du régime français qui ne sont pas cumulables avec celles attribuées par le régime allemand, et ce avec effet au 01 novembre 2020.
Cette régularisation des droits de Madame [E] [U] par la CAF a conduit cette dernière à solliciter de l’allocataire le remboursement d’un indu de 6 254,90 euros au titre d’un trop-perçu de prestations familiales pour la période de novembre 2019 à octobre 2021 ainsi que d’un indu de 6 956,60 euros au titre d’un trop-perçu d’allocation de soutien familial sur la période de novembre 2019 à octobre 2021.
Madame [E] [U] a contesté cet indu auprès de la CAF notamment par courrier en date du 19 avril 2022, recours dont la CAF a accusé réception à la date du 20 avril 2022 suivant courrier notifié à Madame [E] [U] le 31 mai 2022.
En l’absence de décision rendue à la suite de son recours administratif formé le 20 avril 2022, par courrier recommandé expédié au greffe le 01 août 2022, Madame [E] [U] a saisi le Pôle social du Tribunal judiciaire de METZ d’un recours contentieux aux fins d’annulation de la totalité des trop-perçus réclamés par la CAF, de condamnation de la CAF à lui verser les allocations dues de novembre 2021 à avril 2022 au titre de l’allocation de soutien familial, des allocations familiales et du complément familial, et de condamnation de la CAF à lui rembourser les prélèvements effectués à tort.
L’affaire a été appelée à la première audience de mise en état du 02 février 2023 et après plusieurs renvois en mise en état à la demande des parties, elle a reçu fixation à l’audience publique du 26 janvier 2024. Après trois renvois elle a été retenue et examinée à l’audience publique du 22 novembre 2024.
A l’issue des débats la décision a été mise en délibéré au 31 janvier 2025.
PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
A l’audience Madame [E] [U], représentée par son Avocat, s’en rapporte à ses dernières écritures et au dernier état récapitulatif de ses pièces communiquées sous bordereau reçus au greffe le 30 octobre 2024.
Suivant ses dernières conclusions Madame [E] [U] demande au tribunal de :
déclarer son recours recevable,prendre acte de la reconnaissance par la CAF de son traitement erroné du dossier de Madame [E] [U],prendre acte de la reconnaissance par la CAF de l’absence d’indus dus par Madame [E] [U],condamner la CAF à justifier de la régularisation de tous les droits dus à Madame [E] [U] de novembre 2019 à juin 2024,condamner la CAF à lui verser les sommes de 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice personnel et 5 000 euros de dommages et intérêts au titre du préjudice financier,condamner la CAF au versement d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,statuer ce que de droit quant aux frais et dépens.
La CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA MOSELLE, régulièrement représentée à l’audience par Monsieur [T] muni d’un pouvoir à cet effet, s’en rapporte à ses dernières écritures reçues au greffe le 22 novembre 2024.
Suivant ses dernières conclusions la CAF demande au tribunal de :
déclarer Madame [E] [U] recevable en son recours,déclarer son recours sans objet,prendre acte de la justification de la totalité des droits de Madame [E] [U] de novembre 2019 à juin 2024,rejeter la demande formulée au titre des dommages et intérêts,rejeter la demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal se réfère expressément aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits, des moyens invoqués et des prétentions émises.
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, après débats en audience publique, statuant publiquement par décision contradictoire, mise à disposition au greffe, et avant dire droit :
ORDONNE la réouverture des débats ;
RENVOIE l’affaire à l’audience publique du Pôle social du Tribunal judiciaire de METZ qui se tiendra le vendredi 28 mars 2025 à 14 heures Salle 227 ;
DIT que la notification du présent jugement vaut convocation des parties à l’audience ;
ENJOINT à la CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA MOSELLE de communiquer contradictoirement à Madame [E] [U] divorcée [P] ses conclusions datées du 13 novembre 2024 et ses pièces numérotées 17 à 20 ;
INVITE la CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA MOSELLE à établir et à communiquer contradictoirement un bordereau récapitulatif de l’ensemble des pièces numérotées qu’elle entend soumettre à l’appréciation du tribunal ;
RÉSERVE pour le surplus les droits et demandes des parties ;
RÉSERVE les dépens.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 31 janvier 2025 par Grégory MALENGE, assisté de Laura CARBONI Greffière.
Le Greffier Le Président
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