Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Metz
Thématique : Hospitalisation sous contrainte : irrégularités et droits du patient en question
→ RésuméContexte de l’hospitalisationMadame [E] [D] a été hospitalisée sans son consentement à l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3] le 17 janvier 2025, suite à une tentative de suicide grave. Les certificats médicaux initiaux ont révélé des troubles mentaux, notamment une détresse émotionnelle liée à des conflits conjugaux et une absence d’adhésion à un projet de soin. L’hospitalisation a été jugée nécessaire pour prévenir un nouveau passage à l’acte. Évaluation médicale et suiviLes certificats médicaux postérieurs ont confirmé la persistance des troubles mentaux, indiquant que la patiente parlait de son geste de manière détachée. Un avis motivé du 21 janvier 2025 a noté des troubles mnésiques liés à l’intoxication médicamenteuse et a recommandé la poursuite des soins en hospitalisation complète, avec l’introduction d’un traitement par lithium. Réactions de la familleMonsieur [L] [D], en tant que tiers demandeur, a exprimé ses préoccupations concernant l’hospitalisation de sa femme, soulignant qu’il n’avait pas été informé qu’il s’agissait d’un internement. Il a craint que cette situation n’aggrave la santé de Madame [E] [D], tout en souhaitant qu’elle puisse bénéficier d’un suivi à sa sortie. Déclarations de la patienteLors de l’audience, Madame [E] [D] a exprimé son désir de quitter l’hôpital, évoquant des difficultés conjugales et la maladie de sa fille. Elle a mentionné le soutien de ses amis et de sa famille, tout en se montrant préoccupée par sa recherche d’un psychiatre pour un suivi extérieur. Arguments de la défenseLe conseil de Madame [E] [D] a soulevé des points concernant la notification tardive de la décision d’admission et l’absence de motivation de la requête du Directeur de l’hôpital. Il a demandé la main-levée de la mesure d’hospitalisation, arguant que les droits de la patiente n’avaient pas été respectés. Considérations juridiquesL’hospitalisation sans consentement doit respecter le principe de la liberté individuelle, et les décisions d’hospitalisation doivent être justifiées par l’état de santé du patient. Le juge des libertés doit s’assurer que les restrictions à la liberté sont adaptées et proportionnées. La notification tardive de la décision d’admission a été jugée irrégulière, car la patiente n’a pas été informée de son hospitalisation pendant quatre jours. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré recevable la requête du Directeur de l’EPSM et a ordonné la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète de Madame [E] [D], avec effet dans un délai de vingt-quatre heures pour permettre l’établissement d’un programme de soins. Les parties ont été informées de la possibilité d’appel de cette décision. |
N° RG 25/00160 – N° Portalis DBZJ-W-B7J-LEES
N° MINUTE : 25/00077
COUR D’APPEL DE METZ
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ
SERVICE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DETENTION
ORDONNANCE DU 28 Janvier 2025
HOSPITALISATION SOUS CONTRAINTE
Devant nous, Madame Caroline CORDIER, Vice-Président au tribunal judiciaire de Metz, assistée de Madame Agathe LEFEVRE, Greffier, après débats au sein des locaux judiciaires du Centre Hospitalier de [Localité 3] ;
Vu la procédure opposant :
DEMANDEUR
CHS [Localité 3]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
non comparante, ni représentée
DÉFENDEUR
[E] [D]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
née le 27 Novembre 1955 à [Localité 5]
comparante en personne assistée de Me Marie-dominique MOUSTARD, avocat au barreau de METZ
Le Ministère Public, régulièrement avisé, n’a pas fait valoir d’observations par écrit ;
Monsieur [L] [D], tiers demandeur, convoqué à l’audience, n’a pas comparu et a fait valoir son avis le 27 janvier 2025.
Vu la requête reçue au greffe le 22 janvier 2025, par laquelle le directeur de l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3] a saisi le Magistrat du siège du tribunal judiciaire de Metz aux fins de contrôle de plein droit de la nécessité d’une mesure de soins sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète dont fait l’objet Madame [E] [D], depuis le 17 janvier 2025 (contrôle à 12 jours) ;
Vu la demande d’admission en hospitalisation complète de Madame [E] [D] présentée par Monsieur [L] [D] le 17 janvier 2025 en qualité de conjoint de l’intéressée ;
Vu les deux certificats médicaux initiaux établis le 17 janvier 2025 par le Dr [X] [S] et par le Dr [A] [J] en vue d’une admission en soins psychiatriques de l’intéressée sans son consentement ;
Vu la décision du directeur de l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3] en date du 17 janvier 2025 prononçant l’admission de Madame [E] [D] en hospitalisation complète et la notification de cette décision ou l’information de la personne hospitalisée, en date du 20 janvier 2025 ;
Vu le certificat médical dit des 24 heures établi le 18 janvier 2025 par le Dr [N] [U] ;
Vu le certificat médical dit des 72 heures établi le 20 janvier 2025 par le Dr [P] [Z] ;
Vu la décision du directeur de l’établissement en date du 20 janvier 2025 maintenant pour un mois les soins sous le régime de l’hospitalisation complète de Madame [E] [D] et la notification de cette décision ou l’information de la personne hospitalisée, en date du 20 janvier 2025;
Vu l’avis motivé établi le 21 janvier 2025 par le Dr [P] [Z] ;
Vu l’avis adressé au ministère public par mail du 24 janvier 2025 ;
Vu le débat contradictoire en date du 28 janvier 2025 ;
Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants du code de la santé publique ;
FAITS ET MOYENS DES PARTIES
Madame [E] [D] était hospitalisée à l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3] sans son consentement le 17 janvier 2025 dans les conditions rappelées dans l’en-tête de la présente ordonnance.
Les certificats médicaux initiaux établis le 17 janvier 2025 par le Dr [X] [S] et le Dr [A] [J] décrivaient en ces termes l’existence de troubles mentaux :
patiente qui a fait une tentative de suicide grave en prenant des feuilles de laurier dans un contexte de conflit de couple. Parle avec froideur et détachement de son geste qu’elle ne critique pas vraiment. Déjà prise en charge par le passé pour des tentatives de suicide antérieures. Pas de véritable adhésion à un projet de soin. Une hospitalisation est nécessaire pour prévenir un nouveau passage à l’acte
tentative de suicide par intoxication médicamenteuse volontaire et ingestion de feuilles de laurier .
Les certificats médicaux postérieurs établissaient pendant la période d’observation que les troubles mentaux initialement décrits étaient toujours d’actualité, notamment que la patiente évoquait son geste de façon détachée et sans le critiquer et que la prise en charge de Madame [E] [D] devait se poursuivre sous le mode de l’hospitalisation complète.
L’avis motivé daté du 21 janvier 2025 constatait que les propos étaient cohérents mais relevait des troubles mnésiques très probablement imputables à l’intoxication médicamenteuse volontaire par des benzodiazépines. La thymie était sub exaltée et le discours logorrhéique. La patiente était informée de l’instauration du traitement par lithium. Le médecin estimait nécessaire la poursuite des soins à temps complet.
Par mail du 27 janvier 2025, Monsieur [L] [D], en sa qualité de tiers demandeur, relatait que le médecin psychiatre des urgences lui avait indiqué que l’état de santé de sa femme nécessitait une prise en charge à l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3] . Il soulignait qu’il ne lui avait pas été expliqué qu’il s’agirait d’un « internement » et qu’elle ne pourrait pas sortir dans le parc. Il craignait qu’un tel enfermement ne détériore sa santé , « mais qu’elle poursuive ses soins et qu’elle puisse bénéficier d’un suivi à sa sortie ».
A l’audience, Madame [E] [D] déclarait qu’elle aimerait sortir de l’hôpital . Elle relatait les circonstances de son passage à l’acte, et évoquait une situation conjugale difficile, ainsi que la maladie de sa fille. Elle disait s’être sentie très seule, mais ressentir à présent le soutien de ses amis et de son frère. Elle ajoutait avoir pris la décision de se séparer de son mari. Elle précisait être prête à poursuivre des soins à l’extérieur mais s’inquiétait de ne pas avoir trouvé de psychiatre pouvant la prendre en charge malgré ses recherches .
Le conseil de Madame [E] [D] était entendu en ses observations. Il faisait valoir d’une part le caractère tardif de la notification de la décision d’admission et d’autre part l’absence de motivation de la requête du Directeur de l’hôpital, en l’absence d’élément actualisé depuis le 21 janvier 2025. Il sollicitait la main-levée de la mesure.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire, en premier ressort,
DECLARE recevable la requête présentée par le Directeur de l’EPSM de [Localité 4]-[Localité 3];
ORDONNE la main levée de la mesure d’hospitalisation complète à la demande d’un tiers dont fait l’objet Madame [E] [D] ;
DIT que cette mainlevée prendra effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures afin qu’un programme de soins puisse être éventuellement établi en application des dispositions de l’article L. 3211-2-1 du code de la santé publique ;
RAPPELLE aux parties que :
– la présente ordonnance peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la Cour d’Appel et ce, dans un délai de 10 jours à compter de sa notification (articles R. 3211-18 et R. 3211-33 du code de la santé publique) ;
– cet appel doit être formé par déclaration transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’appel de Metz ;
– l’appel interjeté par la personne hospitalisée ou son avocat n’est pas suspensif en application de l’article L.3211-12-4 alinéa 2 du code de la santé publique ;
LAISSONS les éventuels dépens de la présente procédure à la charge du Trésor Public ;
Ainsi rédigé au Tribunal Judiciaire de METZ, le 28 janvier 2025, par Caroline CORDIER, Vice-Présidente, et signé par elle et le Greffier.
Le greffier La Vice-Présidente
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