Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille
Thématique : Responsabilité notariale et gestion successorale : enjeux et conséquences
→ RésuméExposé du litigeMadame [H] [M] a intenté une action contre Maître [E] [S], notaire, et la société [5] [S], en raison de manquements dans le règlement de la succession de Madame [O] [M]. Elle réclame 110 250 euros pour préjudice financier, 20 000 euros pour préjudice moral, ainsi que 5 000 euros pour frais irrépétibles. Elle soutient avoir été légataire universelle et dénonce un manque de communication et de transparence dans la gestion de la succession. Arguments de Madame [H] [M]Madame [H] [M] affirme qu’elle n’a été contactée que deux mois après le décès et que l’inventaire des biens a été réalisé sans sa présence. Elle souligne que sa qualité de légataire universelle était reconnue dans l’inventaire, mais qu’elle n’a pas été informée des démarches. Elle accuse également la sœur de la défunte, Madame [V] [J], d’avoir eu accès aux biens et de les avoir subtilisés avant l’inventaire. Arguments de Maître [S] et de la société [5] [S]En défense, Maître [S] et la société [5] [S] contestent les accusations et demandent le rejet des demandes de Madame [H] [M]. Ils soutiennent avoir agi avec diligence en cherchant à la contacter, mais qu’elle était difficile à localiser. Ils affirment que l’inventaire a été réalisé pour protéger les droits des héritiers et que le notaire ne peut être tenu responsable des disparitions de biens, étant donné que d’autres personnes avaient accès au logement. Décision du tribunalLe tribunal a jugé que Madame [H] [M] ne prouvait pas que le notaire avait commis une faute dans le règlement de la succession. Il a noté que le notaire avait agi pour préserver les droits des héritiers et que la responsabilité du notaire ne pouvait être engagée pour des actes de tiers. Par conséquent, Madame [H] [M] a été déboutée de ses demandes. Frais irrépétibles et dépensLe tribunal a également statué sur les frais irrépétibles, en condamnant Madame [H] [M] à verser 1 000 euros à chacune des défenderesses. Elle a été condamnée aux dépens, étant la partie perdante dans cette instance. Exécution provisoireEnfin, le tribunal a ordonné l’exécution provisoire de la décision, conformément aux dispositions légales en vigueur. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE [Localité 9]
PREMIERE CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT N°25/ DU 09 Janvier 2025
Enrôlement : N° RG 23/02486 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3BW7
AFFAIRE : Mme [H], [D] [M]( Me Dylan FERRARO ROGHI)
C/ S.E.L.A.R.L. [5] [S] et Me [E] [S] (Me Thomas D’JOURNO)
DÉBATS : A l’audience Publique du 07 Novembre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente
Assesseur : BERTHELOT Stéphanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette
Vu le rapport fait à l’audience
A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 09 Janvier 2025
Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BERARD [E], Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDERESSE
Madame [H], [D] [M]
née le [Date naissance 3] 1978 à [Localité 9]
de nationalité Française, domiciliée : chez M.[X] [F], [Adresse 1]
représentée par Me Dylan FERRARO ROGHI, avocat au barreau de MARSEILLE,
C O N T R E
DEFENDERESSES
S.E.L.A.R.L. [5] [S],
immatriculée au RCS de Marseille sous le n° [Numéro identifiant 4], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domicilié en cette qualité audit siège, dont le siège social est sis [Adresse 8]
Madame [E] [L] épouse [S]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 7]
représentées toutes deux par Me Thomas D’JOURNO, de la SELARL PROVANSAL AVOCATS ASSOCIES, substitué à l’audience par Me Sacha PRIAMI, avocats au barreau de MARSEILLE,
EXPOSE DU LITIGE
Reprochant à Maître [E] [S], notaire à [Localité 6] (13), des manquements dans le règlement de la succession de Madame [O] [M], Madame [H] [M] l’a fait citer, ainsi que la société [5] [S], par acte d’huissier de justice du 3 mars 2023, sollicitant au visa de l’article 1240 du code civil, leur condamnation in solidum à lui payer les sommes de 110 250 euros au titre du préjudice financier et 20 000 euros au titre du préjudice moral, au bénéfice de l’exécution provisoire, outre la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles et les dépens.
Par conclusions signifiées le 24 juin 2024, Madame [H] [M] maintient ses demandes initiales, faisant valoir que :
– elle avait été instituée légataire universelle par la défunte.
– le règlement de la succession avait été confié à Maître [S] par la sœur de la défunte.
– elle n’a été contactée par l’étude notariale que plus de deux mois après le décès.
– un inventaire des meubles dépendant de la succession avait d’ores et déjà été réalisé, hors sa présence, alors que sa qualité de légataire universelle est notée dans cet inventaire.
– Madame [V] [J], sœur de la défunte, disposait des clefs de l’appartement et avait la garde des meubles.
– lorsqu’elle a pu se rendre dans l’appartement, les biens de valeur avaient disparu.
– alors que l’inventaire du 23 février 2021 la mentionne comme légataire universelle, Maître [S] n’a pris contact avec elle que le 8 mars 2021.
– contrairement à ce qu’affirme le notaire, il était aisé de la retrouver par les services des impôts.
– elle est également gérante d’une association dont le siège est situé sur la commune d’[Localité 6].
– les clefs du logement de la défunte ont été remis par les voisins à Madame [V] [J].
– Il est reproché à Maître [S] une opacité dans la gestion des opérations successorales.
– la défunte avait assuré son mobilier pour une valeur de 110.250 euros dont 33.075 euros pour le vol d’objets de valeur.
– les voisins ont constaté que Madame [V] [J] accompagnée d’autres personnes se sont rendus à l’appartement de la défunte et sont repartis avec des multiples sacs.
– l’absence de Madame [H] [M] aux étapes essentielles de la succession lui a causé des préjudices.
– Madame [J] s’est appuyée sur un premier rapport d’expertise et une revalorisation de celui-ci eu égard à la prise de valeur des biens, afin de souscrire une assurance.
– divers biens ont été subtilisés avant l’inventaire ne permettant pas de connaitre la véritable valeur de ce qui pouvait être présent.
En défense et par conclusions signifiées le 11 mars 2024, Maître [S] et la société [5] [S] demandent au tribunal de rejeter les demandes adverses et de leur allouer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Elles font valoir que :
– le décès est survenu le [Date décès 2] 2021, et l’étude a été saisie par la sœur de la défunte le 7 janvier 2021.
– l’interrogation du fichier des dernières volontés lui a appris l’existence d’un testament, qu’elle a reçu le 12 février 2021.
– Maître [S] a effectué différentes recherches afin de retrouver Madame [H] [M] notamment en interrogeant le Trésor Public ou encore les services de Mairie de la ville d’[Localité 6] ; Madame [H] [M] étant inconnue du service des impôts ainsi que des fichiers électoraux, ces démarches sont restées vaines.
– Par l’intermédiaire des services de police, la notaire a pu obtenir des informations au sujet de Madame [H] [M] et ainsi contacter la Caisse Primaire d’Assurance Maladie ce qui lui a permis d’obtenir la communication de l’adresse de Madame [H] [M].
– la notaire a contacté Madame [H] [M] le 3 mars 2021.
– le logement de la défunte ayant été vendu en viager, les lieux devaient être libérés dans les deux mois du décès ; c’est pourquoi elle a fait dresser un inventaire des meubles meublants, estimés à 2 549 euros.
– Si dans l’intervalle entre l’ouverture de la succession et la prise de contact avec Madame [H] [M] la notaire a pris le soin d’organiser un inventaire des biens de la défunte le 23 février 2021, c’était uniquement pour éviter la disparition des meubles meublants et dans le but de préserver les intérêts de la légataire universelle.
– différentes personnes détenaient les trois trousseaux de clefs du bien immobilier cédé en viager.
– Maître [S] ne saurait répondre des affirmations et actes de Madame [V] [J].
– un délai très court de moins de deux mois a pu être observé entre la rédaction de l’acte de réquisition d’instrumenter daté du 7 janvier 2021 et la prise de contact avec Madame [M] datée du 3 mars 2021, qui a été suivie le 7 mars 2021, d’un acte de réquisition d’instrumenter signé par Madame [H] [M].
– ces délais apparaissent parfaitement raisonnables et permettent une nouvelle fois d’attester de la diligence de Maître [S].
– il n’appartient pas au notaire de conserver les biens du défunt et de les protéger de toute soustraction frauduleuse par un tiers.
– le devis d’assurance daté de 2015 ne saurait avoir une quelconque valeur probante quant à l’existence et au contenu du contrat éventuellement souscrit, et la valeur des biens, telle qu’avancée auprès des compagnies d’assurance, est nécessairement teintée de subjectivité dans la mesure où elle résulte de déclarations de l’assuré.
– le rapport d’expertise établi il y a plus de quarante ans dans un logement au domicile de Monsieur [M] ne saurait permettre d’établir la valeur et la consistance des biens de feu Madame [O] [J] épouse [M].
– les témoignages versés au débat ainsi que le devis d’assurance multirisque habitation produits par [H] [M] ne permettent pas de rapporter la preuve de l’existence de biens appartenant à la défunte et non compris dans sa succession et par conséquent d’un quelconque préjudice financier subi par celle-ci.
La clôture a été prononcée le 24 septembre 2024.
Lors de l’audience du 7 novembre 2024, les conseils des parties entendus en leurs observations, l’affaire a été mise en délibéré au 9 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
Déboute Madame [H] [M] de ses demandes formées à l’encontre de la société [5] et de Maître [E] [S].
Déboute Madame [H] [M] de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.
Condamne Madame [H] [M] à payer la somme de 1 000 euros chacune au titre des frais irrépétibles à la société [5] et Maître [E] [S].
Condamne Madame [H] [M] aux dépens.
Juge ne pas avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit.
AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 09 Janvier 2025
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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