Monsieur [U], architecte, a intenté une action en justice contre les sociétés EASY et AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION, les accusant de contrefaçon de ses plans de villa. Selon l’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle, une œuvre est protégée si elle est originale et reflète la personnalité de son auteur. Le tribunal a constaté l’absence de similitude entre les plans présentés par Monsieur [U] et ceux réalisés par les défenderesses, concluant que les éléments architecturaux invoqués ne suffisaient pas à établir une contrefaçon. Monsieur [U] a donc été débouté de ses demandes et condamné aux dépens.
Des plans de Villas sont protégés dès lors qu’ils sont originaux, des ressemblances ne suffisent pas à elles seules à établir la contrefaçon.
L’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
Cependant, une création intellectuelle n’est protégeable que si elle reflète la personnalité de son auteur, autrement dit si elle est originale, ce quels que soient son genre, ses mérites ou sa destination.
Il faut, mais il suffit, que l’oeuvre dont la protection est revendiquée porte une empreinte réellement personnelle et traduise un travail et un effort créateur exprimant la personnalité de son auteur pour que celui-ci puisse se revendiquer de la protection organisée par le code de la propriété intellectuelle.
Il appartient donc au tribunal, en procédant à des constatations de fait, de vérifier si le modèle revendiqué est protégeable, c’est à dire de rechercher en quoi il résulte d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur, seul de nature à leur conférer le caractère d’une oeuvre originale protégée, comme telle, par le droit d’auteur, avant, le cas échéant, de rechercher en quoi le modèle est contrefait.
Il incombe à celui qui prétend se prévaloir des droits d’auteur de caractériser l’originalité de l’oeuvre revendiquée, c’est-à-dire de justifier que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Nos conseils :
1. Attention à bien caractériser l’originalité de l’oeuvre revendiquée pour pouvoir se prévaloir des droits d’auteur, en justifiant que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
2. Il est recommandé de vérifier si le modèle revendiqué est protégeable en procédant à des constatations de fait, afin de déterminer en quoi il résulte d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur, seul de nature à leur conférer le caractère d’une oeuvre originale protégée par le droit d’auteur.
3. Il est conseillé de démontrer de manière claire et précise les faits de contrefaçon, en mettant en évidence les similarités entre les oeuvres en cause et en prouvant que l’imitation ou la reproduction est avérée, pour pouvoir obtenir gain de cause dans une action en justice.
Résumé de l’affaire
Monsieur [U], architecte DPLG, a conclu un contrat d’architecte de construction de maison individuelle avec monsieur [K] en août 2017. Après le rejet de sa demande de permis de construire, il a constaté que la société EASY, avec l’architecte monsieur [O] et la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION comme maître d’ouvrage, avait réalisé une construction similaire à la sienne. Il a donc assigné ces deux sociétés en justice, demandant des dommages et intérêts pour contrefaçon ou parasitisme. En réponse, les sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY ont nié toute contrefaçon, affirmant que les caractéristiques de la construction étaient communes au style californien. Elles ont également accusé monsieur [U] de procédure abusive. L’affaire a été clôturée en décembre 2023.
Les points essentiels
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les demandes principales :
L’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. » Cependant, une création intellectuelle n’est protégeable que si elle reflète la personnalité de son auteur, autrement dit si elle est originale, ce quels que soient son genre, ses mérites ou sa destination. Il faut, mais il suffit, que l’oeuvre dont la protection est revendiquée porte une empreinte réellement personnelle et traduise un travail et un effort créateur exprimant la personnalité de son auteur pour que celui-ci puisse se revendiquer de la protection organisée par le code de la propriété intellectuelle. Il appartient donc au tribunal, en procédant à des constatations de fait, de vérifier si le modèle revendiqué est protégeable, c’est à dire de rechercher en quoi il résulte d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur, seul de nature à leur conférer le caractère d’une oeuvre originale protégée, comme telle, par le droit d’auteur, avant, le cas échéant, de rechercher en quoi le modèle est contrefait. Il incombe à celui qui prétend se prévaloir des droits d’auteur de caractériser l’originalité de l’oeuvre revendiquée, c’est-à-dire de justifier que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Monsieur [U] produit à l’appui de ses demandes les plans et croquis de la villa construite au profit de monsieur [K] (plan daté du 24 novembre 2017) et ceux de la villa construite au profit de monsieur [E] datées du 23 mai 2016. L’examen de ces deux plans met en évidence l’absence de similitude entre ces deux plans, dès lors que la villa [K] est élevée d’un étage sur rez de chaussée et présente un toit plat, alors que la villa [E] est de plain-pied et présente un toit en tuile à quatre pentes. Les plans de ces deux édifices et les croquis des façades montrent en outre deux oeuvres parfaitement distinctes. Or aux termes de ses conclusions monsieur [U] se contente d’énumérer un certain nombre d’éléments d’architecture employés pour l’élaboration de ses deux plans, mais sans indiquer s’ils sont le fruit d’une réflexion personnelle ou s’ils sont la reprise d’éléments communs à l’architecture contemporaine. En outre, pour démontrer les faits de contrefaçon, est produit le plan élaboré le 20 avril 2018 par monsieur [O] au profit de la société EASY. Outre le fait que l’auteur de ce plan allégué de contrefaçon n’est pas partie à l’instance, il ne se déduit pas de l’examen de celui-ci qu’il constituerait une imitation ou la reproduction de celui réalisé par monsieur [U] pour monsieur [K]. En effet si la façade sud de la maison dessinée par monsieur [O] reprend deux éléments (la présence de fenêtres en meurtrières et le bardage en bois) du plan de monsieur [U], cette simple reprise est insuffisante à caractériser la contrefaçon, dès lors qu’aucune autre similarité ne peut être relevée dans l’ensemble des plans et dessins de ces deux édifices, que ce soit relativement à l’aspect général des autres façades ou la distribution intérieure des pièces. Il ne peut par ailleurs être tiré aucune conséquence de la déclaration de monsieur [O] selon laquelle il a accepté de partager ses honoraires avec monsieur [U] dès lors que cette déclaration en comprend aucune reconnaissance de ce qu’il se serait inspiré ou aurait imité les plans de monsieur [U]. Monsieur [U] produit encore des photocopies de clichés tirés d’une capture d’écran d’une page Facebook « avenir.concept.construction », non datées faisant apparaître un modèle de villa identique à celui dessiné par monsieur [O] et dont il a été dit qu’il ne constituait pas la copie ou l’imitation d’un plan dessiné par monsieur [U]. S’agissant des faits de parasitisme, ils n’apparaissent pas constitués dès lors qu’il n’est pas démontré que l’offre, faite sur la page Facebook de la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION, de construire la même villa que celle présentée en modèle, a été suivie d’une commande effective. Monsieur [U] sera donc débouté de ses demandes.
Sur les demandes reconventionnelles :
Aucun argument n’est invoqué par les sociétés défenderesses à l’appui de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts. Il n’est en particulier pas indiqué en quoi l’action intentée par monsieur [U] procèderait d’une intention spéciale de nuire ou avec une témérité blâmable. Les sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY seront donc déboutées de ce chef de demande. Il a déjà été satisfait à la demande tendant à la production de l’acte de saisine de l’Ordre des architectes par monsieur [U] et la décision intervenue par ordonnance du juge de la mise en état du 10 octobre 2022. Ce chef de demande est donc sans objet.
Sur les autres demandes :
Monsieur [U], qui succombe à l’instance, en supportera les dépens. Il sera encore condamné à payer aux sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY la somme totale de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Les montants alloués dans cette affaire:
Réglementation applicable
– Code de la propriété intellectuelle
Article L111-1: « L’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
– Code de procédure civile
Article 700: « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, l’une des parties, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Bernard KUCHUKIAN
– Maître Laëtitia ALESANCO
– Maître Jean-Baptiste ROYER
– Maître Philippe ANAHORY
Mots clefs associés & définitions
– Droit de propriété intellectuelle
– Originalité de l’oeuvre
– Effort créatif
– Personnalité de l’auteur
– Protection des droits d’auteur
– Modèle protégeable
– Contrefaçon
– Similitude
– Architecture
– Faits de parasitisme
– Dommages et intérêts
– Intentions spéciales
– Dépens
– Article 700 du code de procédure civile
– Droit de propriété intellectuelle: ensemble des droits exclusifs accordés sur des créations intellectuelles, telles que les œuvres littéraires, artistiques, musicales, les inventions, les dessins et modèles industriels, les marques, etc.
– Originalité de l’oeuvre: caractère unique et distinctif d’une création intellectuelle, qui la différencie des autres œuvres existantes.
– Effort créatif: travail et investissement personnel réalisés par l’auteur pour créer une œuvre originale.
– Personnalité de l’auteur: lien étroit entre l’œuvre créée et son créateur, qui confère à ce dernier des droits moraux sur son œuvre.
– Protection des droits d’auteur: ensemble des mesures juridiques visant à protéger les droits de l’auteur sur son œuvre contre toute utilisation non autorisée.
– Modèle protégeable: création originale pouvant faire l’objet d’une protection par le droit d’auteur ou le droit des dessins et modèles.
– Contrefaçon: reproduction non autorisée d’une œuvre protégée par le droit d’auteur ou tout autre droit de propriété intellectuelle.
– Similitude: ressemblance entre deux œuvres pouvant donner lieu à une accusation de contrefaçon.
– Architecture: art et technique de concevoir et de construire des bâtiments et des espaces urbains.
– Faits de parasitisme: actes de concurrence déloyale consistant à profiter de la notoriété ou de l’investissement d’un concurrent sans en assumer les coûts.
– Dommages et intérêts: réparation financière accordée à la victime d’un préjudice pour compenser le dommage subi.
– Intentions spéciales: élément de preuve permettant de démontrer la mauvaise foi ou l’intention frauduleuse d’une partie dans un litige.
– Dépens: frais engagés par les parties dans le cadre d’une procédure judiciaire.
– Article 700 du code de procédure civile: disposition légale permettant au juge de condamner la partie perdante à verser une somme d’argent à l’autre partie pour compenser ses frais de justice.
REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
6 juin 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG n° 21/06005
A l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 06 Juin 2024
Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDEUR
Monsieur [R] [U]
de nationalité Française, architecte DPLG, domicilié [Adresse 2]
représenté par Maître Bernard KUCHUKIAN, avocat postulant au barreau de MARSEILLE et par Maître Jean-Baptiste ROYER de la SARL ROYER AVOCAT, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER
C O N T R E
DEFENDERESSES
Société EASY
dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
Société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION
dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
représentées par Maître Laëtitia ALESANCO, avocat postulant au barreau de MARSEILLE et par Maître Philippe ANAHORY, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER
EXPOSÉ DU LITIGE :
Monsieur [R] [U] est architecte DPLG.
Le 12 août 2017 il a conclu avec monsieur [F] [K] un contrat d’architecte de construction de maison individuelle. Il a déposé une demande de permis de construire le 4 décembre 2017, rejetée le 10 avril 2018, puis une seconde demande de permis de construire le 23 avril 2018. La construction a été réalisée par la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION.
Le 24 avril 2018 une demande de permis de construire a été déposée au profit de la société EASY, ayant pour architecte monsieur [O] et pour maître d’ouvrage la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION.
Soutenant que la construction réalisée au profit de la société EASY constituait une contrefaçon de sa propre réalisation, monsieur [U] l’a mise en demeure, par lettre recommandée du 14 mars 2019, de cesser toute utilisation de son œuvre.
Par acte de commissaire de justice du 18 juin 2021 monsieur [U] a fait assigner la société EASY et la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 9 juin 2023 il demande au tribunal de condamner ces deux sociétés in solidum à lui payer les sommes de 22.000 € de dommages et intérêts, et 6.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes monsieur [U] fait valoir que son œuvre présente un caractère original en ce sens qu’elle réunit un ensemble d’éléments décrits comme l’utilisation des meurtrières pour préserver l’intimité de certaines pièces, des zones abritées du soleil avec débords de toitures important, l’utilisation pour les balcons, des brises soleil en béton avec retombée en retour, la position de la piscine dans le prolongement de la pièce de vie et d’un salon extérieur abrité du soleil, la présence d’un bardage de bois sur la façade, l’intégration d’une pergola bioclimatique pour aménager un coin repas extérieur distinct du coin salon et un corps en verre sur le balcon. Il ajoute que monsieur [O] a lui-même proposé de lui reverser la moitié de ses honoraires, reconnaissant ainsi sa faute, et que le caractère original de sa création est démontré par le fait qu’aucune des autres constructions réalisées par les défenderesses ne réunit l’ensemble des éléments qu’il invoque.
Il soutient que ces éléments sont repris dans la maison construite au bénéfice de la société EASY.
Subsidiairement, si la contrefaçon n’est pas retenue, monsieur [U] soutient que les sociétés AVENIR CONSTRUCTION et EASY ont commis des faits de parasitisme consistant dans le détournement des plans obtenu dans le cadre de la construction de deux maisons ([K] et [E]) afin de proposer à la construction des maisons identiques comme indiqué sur le site internet de la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION.
Sur son préjudice monsieur [U] expose qu’il facture ses prestations pour une moyenne de 12.000 €, constituant son manque à gagner, et qu’il subi un préjudice moral qu’il évalue à 10.000 €.
La société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et la société EASY ont conclu le 11 janvier 2023 au rejet des demandes formées à leur encontre, et à la condamnation de monsieur [U] à payer à la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION les sommes de 5.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et à payer à la société EASY les sommes de 1.000 € de dommages et intérêts pour procédure abusive et 1.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile. Elles demandent encore la condamnation de monsieur [U] à produire son acte de saisine de l’Ordre et la décision intervenue sous astreinte de 100 € par jour de retard.
Elles font valoir que l’œuvre revendiquée ne présente pas de caractère original en ce qu’elle ne fait que s’inspirer du style dit « californien », les éléments cités comme originaux ne reprenant que les caractéristiques propres à ce style et n’ayant qu’un caractère utilitaire pour s’abriter du soleil. Elles ajoutent que les ressemblances entre les villas dessinées par monsieur [U] et celles construites par la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION se limitent aux caractéristiques classiques du style californien.
Sur le parasitisme, elles indiquent que les contrats conclus entre monsieur [U] et ses client ne comprennent aucune convention de suivi, que ces constructions ont été réalisées par la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION, que la société EASY est ensuite intervenue sur la construction de trois lots dont les plans et les maquettes ont été élaborées par monsieur [O], que celui-ci a indiqué lors de son audition devant l’ordre des architectes dessiner des villas californiennes semblables depuis plusieurs années et n’a pas détourné les plans de monsieur [U].
L’ordonnance de clôture a été rendue le 19 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les demandes principales :
L’article L111-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. »
Cependant, une création intellectuelle n’est protégeable que si elle reflète la personnalité de son auteur, autrement dit si elle est originale, ce quels que soient son genre, ses mérites ou sa destination.
Il faut, mais il suffit, que l’oeuvre dont la protection est revendiquée porte une empreinte réellement personnelle et traduise un travail et un effort créateur exprimant la personnalité de son auteur pour que celui-ci puisse se revendiquer de la protection organisée par le code de la propriété intellectuelle.
Il appartient donc au tribunal, en procédant à des constatations de fait, de vérifier si le modèle revendiqué est protégeable, c’est à dire de rechercher en quoi il résulte d’un effort créatif portant l’empreinte de la personnalité de l’auteur, seul de nature à leur conférer le caractère d’une oeuvre originale protégée, comme telle, par le droit d’auteur, avant, le cas échéant, de rechercher en quoi le modèle est contrefait.
Il incombe à celui qui prétend se prévaloir des droits d’auteur de caractériser l’originalité de l’oeuvre revendiquée, c’est-à-dire de justifier que cette oeuvre présente une physionomie propre traduisant un parti pris esthétique et reflétant l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Monsieur [U] produit à l’appui de ses demandes les plans et croquis de la villa construite au profit de monsieur [K] (plan daté du 24 novembre 2017) et ceux de la villa construite au profit de monsieur [E] datées du 23 mai 2016.
L’examen de ces deux plans met en évidence l’absence de similitude entre ces deux plans, dès lors que la villa [K] est élevée d’un étage sur rez de chaussée et présente un toit plat, alors que la villa [E] est de plain-pied et présente un toit en tuile à quatre pentes. Les plans de ces deux édifices et les croquis des façades montrent en outre deux oeuvres parfaitement distinctes.
Or aux termes de ses conclusions monsieur [U] se contente d’énumérer un certain nombre d’éléments d’architecture employés pour l’élaboration de ses deux plans, mais sans indiquer s’ils sont le fruit d’une réflexion personnelle ou s’ils sont la reprise d’éléments communs à l’architecture contemporaine.
En outre, pour démontrer les faits de contrefaçon, est produit le plan élaboré le 20 avril 2018 par monsieur [O] au profit de la société EASY. Outre le fait que l’auteur de ce plan allégué de contrefaçon n’est pas partie à l’instance, il ne se déduit pas de l’examen de celui-ci qu’il constituerait une imitation ou la reproduction de celui réalisé par monsieur [U] pour monsieur [K]. En effet si la façade sud de la maison dessinée par monsieur [O] reprend deux éléments (la présence de fenêtres en meurtrières et le bardage en bois) du plan de monsieur [U], cette simple reprise est insuffisante à caractériser la contrefaçon, dès lors qu’aucune autre similarité ne peut être relevée dans l’ensemble des plans et dessins de ces deux édifices, que ce soit relativement à l’aspect général des autres façades ou la distribution intérieure des pièces.
Il ne peut par ailleurs être tiré aucune conséquence de la déclaration de monsieur [O] selon laquelle il a accepté de partager ses honoraires avec monsieur [U] dès lors que cette déclaration en comprend aucune reconnaissance de ce qu’il se serait inspiré ou aurait imité les plans de monsieur [U].
Monsieur [U] produit encore des photocopies de clichés tirés d’une capture d’écran d’une page Facebook « avenir.concept.construction », non datées faisant apparaître un modèle de villa identique à celui dessiné par monsieur [O] et dont il a été dit qu’il ne constituait pas la copie ou l’imitation d’un plan dessiné par monsieur [U].
S’agissant des faits de parasitisme, ils n’apparaissent pas constitués dès lors qu’il n’est pas démontré que l’offre, faite sur la page Facebook de la société AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION, de construire la même villa que celle présentée en modèle, a été suivie d’une commande effective.
Monsieur [U] sera donc débouté de ses demandes.
Sur les demandes reconventionnelles :
Aucun argument n’est invoqué par les sociétés défenderesses à l’appui de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts. Il n’est en particulier pas indiqué en quoi l’action intentée par monsieur [U] procèderait d’une intention spéciale de nuire ou avec une témérité blâmable.
Les sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY seront donc déboutées de ce chef de demande.
Il a déjà été satisfait à la demande tendant à la production de l’acte de saisine de l’Ordre des architectes par monsieur [U] et la décision intervenue par ordonnance du juge de la mise en état du 10 octobre 2022. Ce chef de demande est donc sans objet.
Sur les autres demandes :
Monsieur [U], qui succombe à l’instance, en supportera les dépens. Il sera encore condamné à payer aux sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY la somme totale de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort :
Déboute monsieur [R] [U] de ses demandes ;
Déboute les sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY de leur demande reconventionnelle de dommages et intérêts, et déclare sans objet leur demande de communication de pièces ;
Condamne monsieur [R] [U] aux dépens ;
Condamne monsieur [R] [U] à payer aux sociétés AVENIR CONCEPT CONSTRUCTION et EASY la somme totale de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
AINSI JUGÉ, PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE SIX JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE.
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