Tribunal judiciaire de Marseille, 5 février 2025, RG n° 24/01114
Tribunal judiciaire de Marseille, 5 février 2025, RG n° 24/01114

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille

Thématique : Reconnaissance de la faute inexcusable : conditions et enjeux d’un recours en révision

Résumé

Contexte de l’Accident

Le 16 décembre 2016, un salarié de la société [7], en qualité de magasinier, a été victime d’un accident de travail. Cet accident a été pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var, qui a déclaré l’état de l’assuré consolidé le 30 novembre 2023.

Jugement Initial

Par un jugement rendu le 19 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a débouté le salarié de sa demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur. Le tribunal a estimé que les circonstances de l’accident étaient indéterminées et que les conditions nécessaires pour établir la faute inexcusable n’étaient pas prouvées.

Recours en Révision

Le salarié, par l’intermédiaire de son conseil, a formé un recours en révision le 22 février 2024, contestant le jugement précédent. Il a assigné la société [7] ainsi que la CPAM du Var, dénonçant cette action au procureur de la République. L’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 23 octobre 2024.

Demandes du Salarié

Le salarié a demandé au tribunal de juger recevable et fondé son recours en révision, de reconnaître la faute inexcusable de son employeur, et d’ordonner la majoration de sa rente. Il a également sollicité la désignation d’un médecin-expert pour évaluer ses préjudices, une provision de 10.000 € pour son préjudice corporel, et la condamnation de l’employeur à payer 2.000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile.

Arguments de l’Employeur

La société [7] a contesté la recevabilité du recours, arguant que les conditions n’étaient pas remplies et a demandé la condamnation du salarié à lui verser une indemnité de 2.000 €. Sur le fond, elle a soutenu que le salarié ne prouvait pas l’existence d’une faute inexcusable et a demandé à être déboutée de toutes les demandes.

Position de la CPAM

La CPAM du Var, dispensée de comparaître, a communiqué ses écritures en se rapportant à l’appréciation du tribunal sur la recevabilité de l’action en révision et la reconnaissance de la faute inexcusable. Elle a également demandé que la mission d’expertise soit limitée et a sollicité le remboursement des sommes avancées si la faute inexcusable était reconnue.

Décision du Tribunal

Le tribunal a déclaré le recours en révision irrecevable, estimant que le salarié n’avait pas prouvé que son employeur avait retenu de mauvaise foi un document décisif. En outre, le tribunal a condamné le salarié à payer 1.500 € à la société [7] en application de l’article 700 du code de procédure civile et a ordonné qu’il supporte les dépens.

Conclusion

Ainsi, le tribunal a statué en faveur de l’employeur, rejetant les demandes du salarié et confirmant l’irrecevabilité de son recours en révision.

REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 1]

JUGEMENT N°25/00126 du 05 Février 2025

Numéro de recours: N° RG 24/01114 – N° Portalis DBW3-W-B7I-4TY4

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [P] [R]
né le 05 Août 1984 à [Localité 5] (BOUCHES-DU-RHONE)
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Talissa FERRER BARBIERI, avocat au barreau d’AIX-EN- PROVENCE

c/ DEFENDERESSE
S.A.S. [7]
[9]
[Adresse 10]
[Localité 5]
représentée par Me Denis FERRE, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par
Me Myriam BENDAFI, avocat au barreau de MARSEILLE

Appelée en la cause:
Organisme CPAM DU VAR
[Adresse 2]
[Localité 3]
dispensée de comparaître

DÉBATS : À l’audience publique du 23 Octobre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : MEO Hélène, Première Vice-Présidente

Assesseurs : PESCE-CASTELLA Catherine
TOMAO Jean-Claude

L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy

À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 08 Janvier 2025, prorogé au 05 Février 2025

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 16 décembre 2016, [P] [R], salarié de la société [7] en qualité de magasinier, a été victime d’un accident de travail qui a été pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) du Var, laquelle a déclaré l’état de l’assuré consolidé le 30 novembre 2023.

Par jugement du 19 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille a débouté [P] [R] de son action tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l’origine dudit accident du travail aux motifs que les circonstances de l’accident sont indéterminées et que les conditions de la faute inexcusable (conscience du danger par l’employeur et absence de mesures adaptées pour prévenir le risque) ne sont pas établies.

Suivant requête remise en propre au greffe le 22 février 2024, [P] [R], par l’intermédiaire de son conseil, a formé un recours en révision à l’égard du jugement susvisé puis a assigné la société [7] ainsi que la CPAM du Var à l’audience de mise en état dématérialisée su 29 mai 2024, en dénonçant cette action au procureur de la République.

Après établissement d’un calendrier de procédure, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 23 octobre 2024.

[P] [R], représenté par son conseil qui reprend oralement ses dernières conclusions en réplique n° 2, demande au tribunal de :
juger recevable et bien-fondé le recours en révision ;dire et juger que l’accident dont il a été victime est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société [7] ;En conséquence :
ordonner la majoration de la rente à son taux maximum ;désigner un médecin-expert pour l’examiner et évaluer les préjudices qu’il a subis avec la mission détaillée dans ses conclusions aux frais de l’employeur ;lui allouer une provision de 10.000 € à valoir sur l’indemnisation de son préjudice corporel ;condamner l’employeur au paiement de la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Au soutien de sa demande de révision, [P] [R] rappelle qu’il a, au cours de l’instance initiale, sollicité en vain de son employeur la production du compte-rendu de l’accident établi par son chef d’agence, la société [7] ayant indiqué dans un premier temps qu’elle n’entendait pas le produire avant de préciser qu’elle ne disposait pas de ce document alors que postérieurement au jugement du 19 octobre 2022, [D] [Z], membre du CSE, lui a volontairement transmis ce compte-rendu. En réponse aux arguments de la société [7], il fait valoir que l’accident est survenu 10 jours après son embauche et que son employeur ne l’avait pas informé d’un site intranet ni communiqué les codes d’accès lui permettant d’avoir connaissance des documents internes à la société. Sur le fond, il estime qu’il ressort du compte-rendu ainsi que de celui de la réunion du CHSCT du 23 décembre 2016 que l’accident a été causé par un état défectueux du sol, plus précisément par un trou dont l’existence a été constatée le jour de l’accident.

La société [7], représentée à l’audience par son conseil, soutient oralement ses dernières écritures récapitulatives et responsives en sollicitant du tribunal de :
In limine litis et à titre principal :
juger que les conditions du recours en révision ne sont pas remplies et déclarer irrecevable le recours ;condamner [P] [R] à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;Sur le fond, à titre subsidiaire :
dire et juger que [P] [R] ne rapporte pas la preuve de l’existence d’une faute inexcusable ;le débouter purement et simplement de l’ensemble de ses demandes ;le condamner à lui verser une indemnité de 2.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civileÀ titre encore plus subsidiaire :
limiter la mission d’expertise aux seuls postes de préjudices non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, et dont le détail figure dans ses conclusions auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des demandes ;débouter [P] [R] de ses autres demandes ;dire et juger qu’en tout état de cause la CPAM du Var fera l’avance de l’ensemble des indemnités et provisions allouées au salarié.
S’agissant de la recevabilité du recours, la société [7] rappelle le libellé de l’article 593 du code de procédure civile et soutient, d’une part, que son intention frauduleuse n’est pas établie puisqu’elle n’a jamais indiqué que le compte-rendu n’existait pas et, d’autre part, que la pièce recouvrée n’a pas de caractère décisif et enfin, que [P] [R] ne démontre pas s’être trouvé durant la procédure antérieure dans l’impossibilité d’obtenir ce compte-rendu.
Sur le fond, elle estime que les conditions de la faute inexcusable ne sont toujours pas remplies en l’absence de certitude sur les circonstances exactes de l’accident et d’établissement de sa conscience du danger puisque la nouvelle pièce ne permet aucunement d’établir qu’elle avait connaissance de l’existence d’une irrégularité du sol avant l’accident.

La CPAM du Var, dispensée de comparaître, a communiqué des écritures aux termes desquelles elle s’en rapporte à l’appréciation du tribunal quant à la recevabilité de l’action en révision, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, la majoration de l’indemnité en capital et la demande de provision en sollicitant toutefois qu’elle soit ramenée à de plus justes proportions au regard du taux d’incapacité retenu à hauteur de 5 %. S’agissant de l’expertise, la caisse sollicite que la mission de l’expert soit limitée aux chefs repris dans ses écritures auxquelles il est renvoyé. En dernier lieu, elle réclame la condamnation de la société [7], dans l’hypothèse où sa faute inexcusable est reconnue, à lui rembourser l’intégralité des sommes dont elle serait tenue de faire l’avance.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.

L’affaire a été mise en délibéré au 8 janvier 2025, prorogée au 5 février 2025.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats publics, par mise à disposition au greffe après en avoir délibéré, par jugement contradictoire et en premier ressort:

DÉCLARE irrecevable le recours en révision formé par [P] [R] ;

CONDAMNE [P] [R] à payer à la société [7] la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE [P] [R] aux dépens ;

DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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