Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille
Thématique : Responsabilité de l’employeur en matière de sécurité au travail
→ RésuméContexte de l’accidentLe 15 octobre 2020, une société a enregistré une déclaration d’accident du travail pour son salarié, un manutentionnaire-vendeur, qui a subi une chute lors de la manipulation d’une palette de lait avec un transpalette. L’accident a entraîné une fracture de la cheville gauche, nécessitant un arrêt de travail jusqu’au 1er décembre 2020. Le salarié a été transporté à l’hôpital pour recevoir des soins. Prise en charge et reconnaissance de la faute inexcusableL’accident a été pris en charge par la caisse primaire centrale d’assurance maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône, qui a reçu une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par le salarié en mars 2021. Face à l’absence de réponse de l’employeur, la CPCAM a dressé un procès-verbal de carence en septembre 2021. En parallèle, la société a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Marseille. Procédures judiciaires engagéesLe salarié a saisi le tribunal judiciaire de Marseille pour obtenir la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, en lien avec l’accident survenu en octobre 2020. En janvier 2023, la CPCAM a notifié au salarié la guérison de ses lésions, mais ce dernier a contesté cette décision. Le recours a été enregistré et a été appelé à l’audience de plaidoirie en décembre 2024. Arguments du salarié et défense de l’employeurLe salarié a soutenu qu’il n’avait pas reçu de formation adéquate pour manipuler le transpalette et qu’il n’était pas équipé de chaussures de sécurité. Deux collègues ont témoigné en sa faveur, confirmant qu’il n’était pas formé pour décharger des camions et qu’il avait été contraint d’effectuer cette tâche. En revanche, l’employeur, représenté par un mandataire judiciaire, n’a pas comparu ni fourni d’explications. Analyse de la faute inexcusableLe tribunal a examiné si l’employeur avait conscience du danger lié à la manipulation du transpalette. Il a conclu que l’employeur aurait dû être conscient des risques encourus par le salarié et n’avait pas pris les mesures nécessaires pour assurer sa sécurité. En conséquence, la faute inexcusable de l’employeur a été retenue. Conséquences et décisions du tribunalLe tribunal a décidé de surseoir à statuer sur les conséquences de la faute inexcusable, en attendant la résolution du litige concernant la guérison des lésions du salarié. Il a déclaré irrecevables certaines demandes du salarié et de la CPCAM, tout en reconnaissant la faute inexcusable de l’employeur dans l’accident. Les dépens de l’instance ont été réservés, et le tribunal a précisé les modalités d’appel de sa décision. |
REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
POLE SOCIAL
[Adresse 8]
[Adresse 8]
[Localité 3]
JUGEMENT N°25/00648 du 05 Février 2025
Numéro de recours: N° RG 21/02584 – N° Portalis DBW3-W-B7F-ZJOQ
AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [X] [O]
né le 30 Août 1983 à [Localité 7] (ALGERIE)
[Adresse 5]
[Localité 1]
représenté par Me Charlotte BOTTAI, avocat au barreau de MARSEILLE
c/ DEFENDERESSE
S.A.S. [9], représentée par Me [K] [S], mandataire judiciaire de la société [10]
[Adresse 6]
[Localité 2]
non comparante, ni représentée
Appelée en la cause:
Organisme CPCAM DES BOUCHES-DU-RHONE
[Localité 4]
dispensée de comparaître
DÉBATS : À l’audience publique du 04 Décembre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :
Président : MEO Hélène, Première Vice-Présidente
Assesseurs : JAUBERT Caroline
ZERGUA Malek
L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy
À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 05 Février 2025
NATURE DU JUGEMENT
réputé contradictoire et en premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 15 octobre 2020, la société [10] a régularisé une déclaration d’accident du travail pour le compte de son salarié, M. [X] [O], embauché en qualité de manutentionnaire-vendeur depuis le 17 juillet 2020 par contrat à durée déterminée, mentionnant les circonstances suivantes : » Date : 15.10.2020; Heure : [non indiquée] ; Activité de la victime lors de l’accident : vendeur manutentionnaire ; Nature de l’accident : chute avec une palette de lait avec le transpalette ; Objet dont le contact a blessé la victime : transpalette ; Siège des lésions : chevilles ; Nature des lésions : fracture ; la victime a été transportée à: hôpital par les sapeurs « .
Le certificat médical initial établi le 17 octobre 2020 par le Docteur [F], chirurgien orthopédique et traumatologique, mentionne une « fracture cheville gauche » justifiant un arrêt de travail jusqu’au 1er décembre 2020.
Cet accident a été pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels par la caisse primaire centrale d’assurance maladie (ci-après la CPCAM) des Bouches-du-Rhône par décision du 2 décembre 2020.
Par courrier du 16 mars 2021, M. [X] [O] a soulevé, par l’intermédiaire de son conseil, le principe de la faute inexcusable de son employeur devant la CPCAM des Bouches-du-Rhône.
La société [10] n’ayant pas donné suite, la caisse a dressé un procès-verbal de carence le 24 septembre 2021.
Par jugement du 30 août 2021, le tribunal de commerce de Marseille a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société [10] et désigné la SAS [9] en qualité de mandataire judiciaire.
Par requête expédiée le 15 octobre 2021, M. [X] [O] a saisi, par l’intermédiaire de son conseil, le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la société [10] dans la survenance de son accident du 15 octobre 2020.
Le recours a été enregistré sous le numéro RG 21/02584.
Par courrier du 5 janvier 2023, la CPCAM des Bouches-du-Rhône a notifié à M. [X] [O] la guérison des lésions consécutives à cet accident au 23 décembre 2022.
Après saisine infructueuse de la commission médicale de recours amiable, M. [X] [O] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille d’un recours à l’encontre de cette décision de guérison.
Le recours a été enregistré sous le numéro RG 23/02486.
Après une phase de mise en état, le recours en faute inexcusable a été appelé et retenu à l’audience de plaidoirie du 4 décembre 2024.
En demande, M. [X] [O], aux termes de ses dernières écritures déposées par l’intermédiaire de son conseil à l’audience, sollicite le tribunal aux fins de :
Déclarer le jugement à intervenir opposable et commun à la CPCAM des Bouches-du-Rhône ;Surseoir à statuer dans l’attente de l’issue définitive du litige relatif à la guérison pendant devant la juridiction de céans sous les références RG 23/02486 ; En tous les cas :
Dire et juger que l’accident du travail dont il a été victime le 15 octobre 2020 est dû à la faute inexcusable de son employeur, la société [10] ; Constater l’absence de formation ; Constater l’absence de fourniture de matériel adapté et sécurisé pour ce salarié ; Dire et juger que la société [10] a commis une faute inexcusable à l’origine de l’accident de travail dont il a été victime ; Ordonner la majoration de la rente à venir au maximum du capital à attribuer et dire qu’elle suivra l’évolution du taux d’IPP ; Dire et juger qu’au besoin la CPCAM des Bouches-du-Rhône fera l’avance de cette majoration et recouvrera son montant auprès de la société [10] ; Ordonner une expertise judiciaire telle que décrite dans ses conclusions aux fins de déterminer les préjudices subis ; Dire et juger que les frais d’expertise seront avancés par la CPCAM des Bouches-du-Rhône ; Ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir ; Fixer à la somme de 5.000 euros la provision qui lui sera versée par la CPCAM des Bouches-du-Rhône ; Dire que la CPCAM récupèrera auprès de la société [10] les sommes qui lui seront allouées en réparation de son préjudice ; Condamner la société [10] à lui verser la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, M. [X] [O] fait essentiellement valoir qu’il a été contraint par son responsable sur site de décharger une palette d’un camion avec un transpalette alors qu’il n’était pas formé à la manipulation d’engins de levage et qu’il ne portait pas de chaussures de sécurité.
En défense, la société [10], représentée par la SAS [9], régulièrement convoquée par lettre recommandée avec accusé de réception, n’est ni présente, ni représentée et n’a pas fait parvenir au tribunal les motifs de son absence.
Aux termes de ses dernières écritures, la CPCAM des Bouches-du-Rhône, dispensée de comparaître à l’audience, demande au tribunal de bien vouloir :
Prendre acte de ce que la caisse primaire s’en rapporte quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société [10] ;En cas de reconnaissance de la faute inexcusable :
Surseoir à statuer quant à l’indemnisation des préjudices de M. [X] [O] dans l’attente de l’issue de la procédure enrôlée sous le RG 23/02486 relative à la date de guérison de l’accident du travail du 15 octobre 2020.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un exposé plus ample de leurs moyens et prétentions.
L’affaire a été mise en délibéré au 5 février 2025.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant après débats publics, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort mis à disposition au greffe :
DÉCLARE irrecevable la demande de M. [X] [O] en condamnation de la société [10] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DÉCLARE irrecevable la demande de la CCPAM des Bouches-du-Rhône en condamnation de la société [10] au remboursement des sommes dont elle serait tenue d’assurer par avance le paiement ;
DÉBOUTE M. [X] [O] de sa demande de sursis à statuer sur l’entier litige ;
DIT que l’accident du travail dont a été victime M. [X] [O] le 15 octobre 2020 est dû à la faute inexcusable de la société [10] ;
SURSOIT à statuer s’agissant des conséquences de la reconnaissance de la faute inexcusable de la société [10] dans l’attente de la solution définitive du litige relatif à la guérison des lésions consécutives à l’accident du travail enregistrée sous le numéro RG 23/02486 ;
DIT qu’il appartiendra à la partie la plus diligente de solliciter le réenrôlement de l’affaire à une audience de mise en état une fois ladite solution obtenue ;
RAPPELLE qu’en application de l’article R. 142-10-10 du code de la sécurité sociale, l’instance est périmée lorsque les parties s’abstiennent d’accomplir, dans le délai de deux ans mentionné à l’article 386 du code de procédure civile, les diligences qui ont été expressément mises à leur charge par la juridiction ;
RÉSERVE les dépens de l’instance ;
DIT que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être formé dans le mois de la réception de sa notification.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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