Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille
Thématique : Perturbations nocturnes et responsabilités partagées dans un quartier résidentiel
→ RésuméPropriétaire et OccupantsLa SCI VATHEMA est propriétaire d’une maison d’habitation depuis 1992, située à [Adresse 9]. Les occupants de cette maison sont Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W]. La maison est mitoyenne aux locaux de la ville de [Localité 8], qui sont mis à disposition de l’association [7], fondée en 1867. Conflit de VoisinageDepuis 2008, les occupants et la SCI VATHEMA affirment que l’association [7] mène des activités perturbant la tranquillité du quartier. En conséquence, ils ont assigné l’association et la ville de [Localité 8] devant le tribunal pour troubles anormaux du voisinage, invoquant plusieurs articles du Code civil et du code de la santé publique. Décisions du TribunalLe juge de la mise en état a déclaré recevables les demandes de dommages et intérêts des plaignants, tout en précisant que certaines argumentations relèvent de la compétence du juge du fond. Les plaignants demandent notamment la cessation des activités de l’association en dehors des horaires d’ouverture, ainsi que des dommages et intérêts pour préjudices subis. Réponses de l’Association et de la VilleL’association [7] conteste les demandes, arguant qu’elle respecte l’article L113-8 du code de la construction et de l’habitation, tandis que la ville de [Localité 8] demande le rejet des demandes des plaignants, tout en sollicitant une garantie contre l’association pour d’éventuelles condamnations. Éléments de PreuveLes plaignants ont produit divers éléments, tels que des courriers et des attestations, pour prouver les nuisances sonores et olfactives causées par l’association. Des constatations ont été réalisées, montrant des événements festifs se prolongeant tard dans la nuit, ainsi que des propositions de location des locaux pour des événements privés. Analyse des Activités de l’AssociationLe tribunal a noté que l’association [7] a modifié ses activités depuis 2008, en organisant des événements privés en dehors des horaires officiels. Les statuts de l’association ne prévoient pas de telles activités, ce qui a conduit à la conclusion que l’association ne peut pas se prévaloir d’une exonération de responsabilité. Responsabilité de la VilleLa ville de [Localité 8] est également jugée responsable pour ne pas avoir mis fin aux troubles, malgré les plaintes des riverains. Le tribunal a retenu que la ville avait connaissance des nuisances et n’a pas agi pour les faire cesser. Condamnations et IndemnitésLe tribunal a interdit à l’association [7] d’organiser des événements privés non conformes à ses statuts et a fixé une astreinte en cas de violation. Les plaignants ont été indemnisés pour préjudice moral, tandis que d’autres demandes, comme celle de perte de valeur vénale, ont été rejetées. Décision FinaleLe tribunal a condamné in solidum l’association [7] et la ville de [Localité 8] aux dépens et a ordonné le paiement d’une somme pour couvrir les frais des plaignants. La décision est exécutoire de droit, permettant ainsi une mise en œuvre rapide des mesures ordonnées. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION A
JUGEMENT N°25/
du 28 JANVIER 2025
Enrôlement : N° RG 21/08611 – N° Portalis DBW3-W-B7F-ZEQW
AFFAIRE : M. [R] [Z], M. [J] [W], S.C.I. VATHEMA (Me DUBARRY)
C/ Association [7] (Me SALAVERT-BULLOT) ; VILLE DE [Localité 8] (la SELURL PHELIP)
DÉBATS : A l’audience Publique du 08 octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Présidente : Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Greffière : Madame Pauline ESPAZE
A l’issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au 14 janvier 2025 puis prorogée au 28 janvier 2025
PRONONCÉ : Par mise à disposition au greffe le 28 janvier 2025
Par Madame Nathalie YON-BORRIONE, Vice-présidente
Assistée de Madame Pauline ESPAZE, Greffière
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
NOM DES PARTIES
DEMANDEURS
Monsieur [R] [Z]
né le [Date naissance 1] 1957 à [Localité 6] (SUISSE)
de nationalité Française
demeurant [Adresse 9]
Monsieur [J] [W]
né le [Date naissance 2] 1957 à [Localité 8]
de nationalité Française
demeurant [Adresse 9]
S.C.I. VATHEMA
dont le siège social est sis [Adresse 9]
prise en la personne de son gérant en exercice
tous représentés par Maître Alexa DUBARRY, avocate au barreau de MARSEILLE
C O N T R E
DÉFENDERESSES
Association [7]
dont le N° SIRET 782 943 906 00019
dont le siège social est sis [Adresse 3]
prise en la personne de son Président en exercice
représentée par Maître Caroline SALAVERT-BULLOT, avocate au barreau de MARSEILLE
VILLE DE [Localité 8]
dont le siège social est sis [Adresse 5] et encore [Adresse 4]
prise en la personne de son Maire en exercice
ayant pour avocat plaidant Maître PHELIP de la SELURL PHELIP, avocats au barreau de PARIS,
et pour avocat postulant Maître Alexis REYNE de la SELARL AVOCATIA, avocats au barreau de MARSEILLE
EXPOSE DU LITIGE
La SCI VATHEMA est propriétaire depuis 1992 d’une maison d’habitation sise [Adresse 9].
Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] sont occupants de cette maison.
La maison est mitoyenne aux locaux de la ville de [Localité 8], mis à la disposition de l’association [7] sis [Adresse 3].
L’association [7] a été créée en 1867.
Monsieur [R] [Z], Monsieur [J] [W] et la SCI VATHEMA font valoir que depuis 2008 l’association [7] développe des activités qui perturbent la tranquillité du quartier.
*
Suivant exploits des 8 et 13 septembre 2021, Monsieur [R] [Z], Monsieur [J] [W] et la SCI VATHEMA ont fait assigner devant le présent tribunal l’association [7] et la ville de [Localité 8] sur le fondement des troubles anormaux du voisinage ainsi que les articles 544 et 651 du Code civil, outre les articles L1311-1 et R1334-31 et R1334-32 du code de la santé publique.
Par ordonnance d’incident du 25 juin 2024, le juge de la mise en état a :
– dit que les argumentations relatives à l’article L113-8 du code de la construction et de l’habitation, recodifié à l’article 1253 du code civil, sont des pures argumentations de fond qui relèvent de la compétence exclusive du juge du fond,
– déclaré recevables les demandes de dommages et intérêts de Monsieur [R] [Z], Monsieur [J] [W] et la SCI VATHEMA comme non prescrites.
Par conclusions notifiées par RPVA le 6 octobre 2024, la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] demandent au tribunal de :
– à titre principal,
– constater que l’association [7] ne peut pas se prévaloir de l’exonération pour troubles anormaux du voisinage prévue à l’article L113-8 du code de la construction et de l’habitation en ce qu’elle ne remplit pas les conditions cumulatives que prévoit cet article,
– déclarer l’action de la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] recevable,
– ordonner à l’association [7] la cessation définitive de toute activité exercée en dehors des horaires officiels d’ouverture en semaine et les week-end, pour des événements privés sans lien avec l’objet de l’association, e
– faire interdiction définitive à l’association [7] de mettre à disposition ou sous-louer les locaux appartenant à la ville de [Localité 8] sis [Adresse 3] à des particuliers pour des événements privés sans lien avec l’objet de l’association et a fortiori en dehors des horaires officiels d’ouverture en semaine et les week-end,
– fixer à 5.000 euros l’astreinte afférente à ces deux condamnations par infraction constatée à compter du jugement à intervenir,
– à titre subsidiaire,
– ordonner à l’association [7] et à la ville de [Localité 8] de réaliser les travaux nécessaires à l’insonorisation des locaux et à la mise en conformité des équipements de cuisine (tels que le renouvellement de la hotte) afin de mettre en conformité l’activité de restauration et de salle des fêtes pour les rassemblements privés et associatifs organisés en semaine et les week-end et mettre un terme aux nuisances sonores et olfactives constatées,
– faire interdiction à l’association [7] et à la ville de [Localité 8] d’utiliser les locaux dans l’attente de la réalisation des travaux,
– fixer à 2.000 euros l’astreinte provisoire afférente à ces deux condamnations par infraction constatée à compter du jugement à intervenir,
– condamner solidairement l’association [7] et la ville de [Localité 8] à payer à Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] la somme de 25.000 euros par année de préjudice subi, somme à parfaire, à titre de dommages et intérêts pour les inconvénients anormaux du voisinage subis pour la période de janvier 2017 à ce jour en raison de l’activité dénoncée,
– condamner solidairement l’association [7] à payer à Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] chacun la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi pour la période de janvier 2017 à ce jour,
– condamner solidairement l’association [7] et la ville de [Localité 8] à payer à la SCI VATHEMA la somme de 50.000 euros, somme à parfaire, à titre de déperdition de valeur vénale de son bien sis [Adresse 9],
– condamner solidairement l’association [7] et la ville de [Localité 8] à payer à chacun des requérants la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens, comprenant les frais d’expertise judiciaire éventuels, lesquels seront recouvrés selon les dispositions de l’article 696 du code de procédure civile,
– prononcer l’exécution provisoire du jugement à intervenir.
Par conclusions notifiées par RPVA le 30 septembre 2024, l’association [7] demande au tribunal de :
– à titre principal, débouter la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de l’ensemble de leurs demandes comme irrecevables en application de l’article L113-8 du code de la construction et de l’habitation,
– à titre subsidiaire, débouter la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de l’ensemble de leurs demandes sur le fondement de la théorie des troubles anormaux du voisinage,
– débouter la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de l’ensemble de leurs demandes, y compris indemnitaires,
– débouter la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de leur demande d’expertise,
– la déclarer irrecevable,
– débouter la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Par conclusions notifiées par RPVA le 16 septembre 2024, la ville de [Localité 8] demande au tribunal de :
– dire la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] mal fondés en leurs demandes et les en débouter,
– rejeter les demandes indemnitaires et d’injonction,
– subsidiairement, ramener à de plus justes proportions les demandes indemnitaires,
– rejeter les demandes de travaux et d’injonction, à tout le moins en ce qu’elles sont dirigées à l’encontre de la ville de [Localité 8],
– condamner l’association [7] à garantir la ville de [Localité 8] de toute éventuelle condamnation,
– condamner solidairement la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il sera renvoyé aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions des parties.
La clôture, prononcée par ordonnance du 17 septembre 2024, a été révoquée pour admission des dernières écritures et pièces, et prononcée à nouveau le 8 octobre 2024 avant ouverture des débats.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal, statuant après débats en audience publique par jugement mis à la disposition des parties au greffe, contradictoire et en premier ressort,
Interdit à l’association [7] de mettre à disposition ses locaux sis [Adresse 3], à titre gratuit ou onéreux, à des tiers ou des membres de l’association pour l’organisation d’événements privés non ouverts à l’ensemble de ses membres ou non conformes aux statuts,
Assortit cette interdiction d’une astreinte de 5.000 euros par constat de violation de cette interdiction à compter de la signification du présent jugement,
Constate l’absence d’horaires officiels d’ouverture de l’association [7],
Rappelle à l’association [7] que les événements nocturnes de l’association générateurs de nuisances sonores ou olfactives ne peuvent avoir qu’un caractère exceptionnel compte tenu des termes de ses statuts,
Déboute la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de leurs demandes de travaux,
Condamne in solidum l’association [7] et la ville de [Localité 8] à payer à Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] la somme de 2.500 euros chacun au titre de leur préjudice moral respectif,
Déboute la SCI VATHEMA de sa demande au titre de la perte de valeur vénale,
Déboute Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] de leur demande de dommages et intérêts complémentaire,
Dit que dans leurs rapports entre elles, l’association [7] et la ville de [Localité 8] resteront tenues chacune à hauteur de 50 % des condamnations prononcées au titre du préjudice moral au bénéfice de Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W],
Condamne en conséquence l’association [7] à garantir la ville de [Localité 8] à hauteur de 50 % de la condamnation au titre du préjudice moral de Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W],
Condamne in solidum l’association [7] et la ville de [Localité 8] aux dépens,
Condamne in solidum l’association [7] et la ville de [Localité 8] à payer à la SCI VATHEMA, Monsieur [R] [Z] et Monsieur [J] [W] la somme de 1.000 euros chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Rappelle que la présente décision est revêtue de l’exécution provisoire de droit.
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE DE LA TROISIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE VINGT-HUIT JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
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