Tribunal judiciaire de Marseille, 19 novembre 2024, RG n° 24/01697
Tribunal judiciaire de Marseille, 19 novembre 2024, RG n° 24/01697

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille

Thématique : Conditions de rétention et droits des étrangers face à l’éloignement administratif

Résumé

Présentation de la requête

La requête a été déposée au greffe le 15 novembre 2024 par Monsieur [E] [B], un ressortissant tunisien, avec l’assistance de Forum Réfugiés. Une autre requête a été reçue le 18 novembre 2024, présentée par le Préfet des Bouches-du-Rhône, représenté par [T] [K].

Assistance juridique

Monsieur [E] [B] a choisi d’être assisté par Me Clara MERIENNE, avocat commis d’office, qui a pris connaissance de la procédure et a discuté librement avec son client. L’intéressé a été entendu avec l’aide d’un interprète en arabe, Mme [S] [U], qui a prêté serment.

Contexte de la rétention

Monsieur [E] [B] a été condamné à une interdiction temporaire du territoire français pour une infraction liée aux stupéfiants, prononcée le 2 avril 2024. Il a été placé en rétention le 14 novembre 2024, après avoir purgé une peine de prison.

Déclarations de l’intéressé

Lors des débats, Monsieur [E] [B] a exprimé son désir de quitter la France, mentionnant qu’il avait de la famille en Italie et souhaitait retourner en Tunisie. Il a également évoqué son suivi psychiatrique en prison et son besoin de médicaments.

Observations de l’avocat

L’avocat a contesté la légalité de la rétention, soulignant un défaut de diligence de la préfecture concernant la transmission de documents au consulat tunisien. Il a également mis en avant la vulnérabilité de son client, qui avait besoin d’un suivi médical.

Réponse du Préfet

Le représentant du Préfet a défendu la légalité du placement en rétention, arguant que Monsieur [E] [B] ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et qu’il n’avait pas fourni d’informations sur sa situation personnelle ou familiale.

Motifs de la décision

La décision de placement en rétention a été jugée suffisamment motivée, tenant compte de l’absence de passeport valide et de lieu de résidence. Les arguments concernant la vulnérabilité de Monsieur [E] [B] ont été rejetés, car il n’a pas démontré que son état de santé était incompatible avec la rétention.

Conclusion de la procédure

La requête de Monsieur [E] [B] a été déclarée recevable mais rejetée. La demande de prolongation de la rétention a été acceptée pour une durée maximale de 26 jours, avec des rappels sur ses droits pendant la rétention, y compris la possibilité de demander l’assistance d’un interprète et de déposer une demande d’asile.

COUR D’APPEL D’AIX EN PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
[Adresse 2]

ORDONNANCE N° RC 24/01697

SUR REQUÊTE EN CONTESTATION DE L’ARRÊTÉ DE PLACEMENT EN RÉTENTION
et
SUR DEMANDE DE PROLONGATION DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

(art L. 742-1 à L. 742-3, L. 743-4, L. 743-6, L. 743-7, L. 743-9, L. 743-13 à L. 743-15, L. 743-17, L. 743-19, L. 743-20, L. 743-24, L. 743-25 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile modifié par la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024)

Nous, Alexandra YTHIER, Magistrat du siège du Tribunal Judiciaire de Marseille, assistée de Anaïs MARSOT, Greffier,
siégeant publiquement, dans la salle d’audience aménagée au [Adresse 4] à proximité du Centre de Rétention administrative du [Localité 5] en application des articles L. 742-1, L. 743-4, L 743-6, L. 743-7, L. 743-20 et L. 743-24 du CESEDA

Vu les articles L. 742-1 à L. 742-3, L. 743-4, L. 743-6, L. 743-7, L. 743-9, L. 743-13 à L. 743-15, L. 743-17, L. 743-19, L. 743-20 à L. 743-25 et R. 742-1, R. 743-1 à R. 743-8, R. 743-21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Les avis prévus par l’article R 743-3 du CESEDA ayant été donnés par le Greffier ;

Vu la requête reçue au greffe le vendredi 15 novembre 2024 à 17 heures 24, présentée par Monsieur [E] [B], né le 26/11/2002 à [Localité 9] (TUNISIE), étranger de nationalité tunisienne, par l’intermédiaire de Forum Réfugiés

Vu la requête reçue au greffe le 18 Novembre 2024 à 14 heures 03, présentée par Monsieur le Préfet du département du PREFET DES BOUCHES DU RHONE,

Attendu que Monsieur le Préfet régulièrement avisé, est représenté par [T] [K] , dûment assermenté ,

Attendu que la personne concernée par la requête, avisée de la possibilité de faire choix d’un avocat ou de solliciter la désignation d’un avocat commis d’office , déclare vouloir l’assistance d’un Conseil ;

Attendu que la personne concernée par la requête est assistée de Me Clara MERIENNE, avocat commis d’office,
qui a pris connaissance de la procédure et s’est entretenu librement avec son client ;

Attendu qu’en application de l’article L. 141-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile la personne étrangère présentée a déclaré au début de la procédure comprendre et savoir lire la langue arabe et a donc été entendue avec l’assistance d’un interprète en cette langue en la personne de Mme [S] [U], serment préalablement prêté d’apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ;

Attendu qu’il est constant que Monsieur [E] [B], né le 26/11/2002 à [Localité 9] (TUNISIE), étranger de nationalité tunisienne

A fait l’objet d’une des sept mesures prévues aux articles L. 722-2, L. 731-1, L. 731-2, L. 732-3,
L. 733-8 à L. 733-12, 741-1, L. 741-4; L. 741-5, L. 741-7, L. 743-16, L. 744-1, L. 751-2 à L. 751-4, L. 751-9 et L. 751-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile , et en l’espèce:

a fait l’objet d’une condamnation portant interdiction temporaire du territoire français pendant 3 ans prononcée le 02/04/2024 par le tribunal judiciaire de Marseille; pour infraction à la législation sur les stupéfiants

édicté moins de trois ans avant la décision de placement en rétention en date du 14/11/2024 notifiée le 15/11/2024 à 11 heures 31,

Attendu qu’il est rappelé à la personne intéressée , ainsi que dit au dispositif , les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention ;

DEROULEMENT DES DEBATS :

SUR LA CONTESTATION DE L’ARRÊTÉ DE PLACEMENT EN RÉTENTION

La personne étrangère requérante déclare : Je sors de prison, j’étais suivi par un psy, et là y’a pas de psychologue, je me sens pas bien, enfermé, je sais, j’assume ce que j’ai fais, mais en prison j’étais suivi on s’occupait de moi. Je ne voulais pas rester sur le territoire français, je veux juste partir d’ici; si je pars sois je vais en Italie où j’ai de la famille, ou je vais en Tunisie. Oui j’avais des médicaments par le psychiatre en prison; on ne m’a pas dit quelle maladie j’avais, je prenais des documents; je ne sais pas le nom des médicaments. Oui je veux retourner en Tunisie mais tout seul, je veux partir seul. Cela faisait 3 mois que j’étais incarcéré.

L’avocat de la personne étrangère requérante entendu en ses observations : Il y a eu une requête faite par monsieur. La requête a été transmise le 15/11 et qui transmet un récépissé du consulat tunisien, qu’il a retiré le 15/02/2024, où il demande un passeport et une CNI tunisienne. Ici, pourtant dans la demande de prolongation de la préfecture,on a un courrier au consul tunisien. On a un courrier disant que monsieur est démuni de documents d’identité. La préfecture aurait pu adresser ce récépissé de demande de passeport et de carte d’identité; on a un défaut de diligence du préfet faisant grief à monsieur, car sa rétention sera beaucoup plus longue que si le préfet avait transmis cela au consul tunisien. On a une insuffisance de motivation sur la vulnérabilité, car monsieur était suivi en détention.
Sur l’identité, il démontre qu’il a souhaité récupérer des documents tunisiens, je vous demande de déclarer cette mesure irrégulière.

Le représentant du Préfet entendu en ses observations : Je vous demande de constater que le placement est motivé tant en fait qu’en droit. Il faut se positiionner au 14/11, et non à la date de la requête. Les pièces évoquées l’ont été à l’appui de la rrequête. Le 14/11; le prefet a le contradictoire du 14/10, monsieur était invité à faire des observations, il a signé le contradictoire, mais n’a apporté aucun élément sur ce point; on nous dit que monsieur n’avait pas d’interprète, je vous demande de rejeter ce moyen car une requête doit être motivée et écrite.
Le contradictoire n’est pas renseigné, sur la date d’entrée, la situation familiale, ou sur la vulnérabilité; on ne peut reprocher un défaut d’appréciation car on en avait aucune informltion.
Sur la fiche pénale, il n’y a aucun élément sur la situation familiale. On était donc face à quelqu’un où on a aucun passeport en cours de validité, aucune adresse, ou information sur où il va et d’où il vient.
Monsieur a été dans le refus total tout au long de la procédure.
Les éléments du dossier justifient le placement.
Sur la vulnérabilité, aucun élément n’a été porté à notre connaissance, on a pris connaissance des difficultés lors de la requête, monsieur dit ne pas supporter l’enfermement mais il sort quand même de prison.
On voit du flector, du letoprofène et du paracétamol; aucune pièce actuelle ne permet de considérer qu’il y a une incompatibilité de son état de santé avec son placement en rétention.
Je vous demande de déclarer le placement régulier.

SUR LA DEMANDE DE PROLONGATION DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

Attendu qu’il résulte de l’examen des pièces de la procédure soumise à appréciation qu’un moyen de transport disponible à destination du pays d’origine de la personne intéressée doit être trouvé avant l’expiration du délai de prolongation sollicité ;

SUR LE FOND :

Observations de l’avocat : le préfet lui a demandé de faire des observations sans interprète; il a de la famille à [Localité 7], il n’a pas pu avoir d’attestation d’hébergelent. Il a fait les démarches pour avoir des papiers et retrouver sa famille en Italie, ou retourner en Tunisie.

Le représentant du Préfet : Je vous demande de faire droit à la requête du préfet. Il y a un risque de soustraction avéré, pas de lieu de résidence effective. On nous parle de ce récépissé; mais on ne sait pas de quoi; cela ne présage de rien, cela est joint à la requête en contestation et ne figurait pas au dossier de monsieur. On ne peut nous reprocher un défaut de diligences.J’en prends acte et cela sera joint au dossier transmis au consulat. Cela viendra faciliter l’identification de monsieur, mais cela ne vient pas suppléer la remise d’un passeport préalable à l’audience. Sur le défaut de diligences, je vous fournis une jurisprudence, que les diligences s’apprécient au premier jour ouvrable. Il a été placé le vendredi 15/11; le 1er jour ouvrable est donc le 18/11, date à laquelle les documents ont été transmis. Il n’y a aucun défaut de diligences.

Observations de l’avocat : je contestais surtout la demande de maintien malgré la production de ces pièces. La requête qui joint ce récépissé, a bien été transmis le 15/11/24; et a transmis le 18/11 les documents du préfet.
La préfecture avait connaissance de ces documents. Je vous demande de retenir une insuffisance des diligences en ce que la préfecture n’a pas transmis.

Représentant du préfet : la requête est adressée au greffe et non à la préfecture. Nous n’en avons pas eu connaissance avant hier

Observations de l’avocat : donc potentiellement avant le mail au consulat.

Représentante du préfet : monsieur aurait pu joindre ce document au moment du contradictoire, il ne l’a pas fait.

La personne étrangère présentée déclare : moi j’ai payé ma dette, tout ce que je demande c’est de quitter le territoire français.

PAR CES MOTIFS

Vu les articles L. 614-1, L. 614- 3 à L. 614-15, L. 732-8, L. 741-10, L. 743-5 et L. 743-20 du Code de l’entrée de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile modifié par la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie, statuant par ordonnance unique ;

SUR LA CONTESTATION DE L’ARRÊTÉ DE PLACEMENT EN RÉTENTION

DÉCLARONS la requête de M. [B] [E] recevable ;

REJETONS la requête de M. [B] [E] ;

SUR LA DEMANDE DE PROLONGATION DE RÉTENTION ADMINISTRATIVE

FAISONS DROIT A LA REQUÊTE de Monsieur le Préfet

ORDONNONS , pour une durée maximale de 26 jours commençant quatre vingt seize heures après la décision de placement en rétention , le maintien dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, de M. [B] [E]

et DISONS que la mesure de rétention prendra fin au plus tard le 15 décembre 2024 à 11 heures 31 ;

RAPPELONS à la personne étrangère que, pendant toute la période de la rétention, elle peut demander l’assistance d’un interprète, d’un conseil ainsi que d’un médecin, et communiquer avec son consulat et avec une personne de son choix et qu’un espace permettant aux avocats de s’entretenir confidentiellement avec les étrangers retenus est prévu au Centre de Rétention du [Localité 5] ;

LUI RAPPELONS qu’il peut déposer une demande d’asile durant tout le temps de sa rétention administrative ;

INFORMONS l’intéressé verbalement de la possibilité d’interjeter appel à l’encontre de la présente ordonnance dans les 24 heures suivant la notification de cette décision, par déclaration motivée transmise par tout moyen (article R.743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile) au greffe du service des rétentions administratives de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, [Adresse 3], et notamment par télécopie au [XXXXXXXX01] ou par voie électronique à l’adresse structurelle suivante : [Courriel 6], ainsi que la possibilité offerte au Préfet et au Ministère public d’interjeter appel sauf pour le Procureur de la République, dans les 24 heures de la notification, à saisir Madame la Première Présidente de la Cour d’appel ou son délégué d’une demande tendant à faire déclarer son recours suspensif ;

FAIT A MARSEILLE

En audience publique, le 19 Novembre 2024 À 10 h 55

Le Greffier Le Magistrat du siège du tribunal judiciaire

L’interprète Reçu notification le 19/11/2024
L’intéressé

 


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