Tribunal judiciaire de Marseille, 19 mars 2024
Tribunal judiciaire de Marseille, 19 mars 2024

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille

Thématique : Preuve de l’originalité : dès l’assignation ?

Résumé

L’affaire concerne un litige de contrefaçon de droits d’auteur entre mesdames [N] et [B] [O] et monsieur [U] [C]. Les demanderesses allèguent que ce dernier a reproduit sans autorisation une grille qu’elles ont conçue. En réponse, monsieur [C] conteste l’assignation, arguant que l’œuvre n’est pas clairement identifiée et que son originalité n’est pas prouvée. Les demanderesses soutiennent que la grille a été divulguée sous leur nom et qu’elles ont déposé le dessin à l’INPI. Le tribunal a finalement jugé que les preuves fournies étaient insuffisantes pour établir la qualité d’auteur, déclarant l’action irrecevable.

Si l’appréciation du caractère original de l’œuvre relève de la compétence du juge du fond, il appartient à l’auteur de l’œuvre opposée dans le cadre d’une action en contrefaçon, de définir, dès son acte introductif d’instance, le périmètre de protection revendiquée, de caractériser précisément les éléments originaux de cette œuvre qui, selon lui, sont repris par le contrefacteur.

Résumé de l’affaire

L’affaire concerne un litige de contrefaçon de droits d’auteur entre les parties impliquées. Mesdames [N] et [B] [O] ont assigné monsieur [U] [C] en justice pour lui demander de retirer des grilles situées sur sa propriété à [Localité 4], ainsi que pour réclamer des dommages et intérêts. En réponse, monsieur [C] a contesté l’assignation et a demandé le rejet de l’action intentée par les demanderesses.

Les arguments avancés par monsieur [C] incluent le fait que l’œuvre en question n’est pas clairement identifiée ni démontrée comme étant originale. Il remet en question la qualité des demanderesses en tant qu’auteurs de l’œuvre, soulignant l’absence de signature, de nom ou de date sur le dessin produit. De plus, il conteste la validité du dépôt du dessin à l’INPI en raison de l’absence de mention de l’auteur sur la facture du ferronnier.

De leur côté, mesdames [O] ont argumenté que la grille en question a été divulguée sous leur nom lors de son installation et qu’elles ont déposé le dessin à l’INPI. Elles affirment que la grille est une œuvre de collaboration à laquelle chacune a contribué, et qu’elle se distingue des autres modèles existants par son caractère unique et original.

En résumé, l’affaire porte sur la question de la validité des droits d’auteur revendiqués par les demanderesses sur la grille en question, ainsi que sur la qualité d’auteur et l’originalité de l’œuvre contestées par le défendeur.

Les points essentiels

Introduction de l’affaire

Cette affaire concerne une action en contrefaçon initiée par mesdames [O] contre monsieur [C]. Les demanderesses allèguent que monsieur [C] a reproduit sans autorisation une grille qu’elles ont conçue, et elles cherchent à faire valoir leurs droits d’auteur sur cette œuvre. Le tribunal doit examiner la régularité de l’assignation ainsi que la qualité pour agir des demanderesses.

Régularité de l’assignation

L’article 56 du code de procédure civile exige que l’assignation contienne un exposé des moyens en fait et en droit, permettant au défendeur d’identifier les œuvres protégées et celles prétendument contrefaites. Mesdames [O] ont inclus dans leur assignation des photographies et une description détaillée de la grille en question, soulignant son originalité et les éléments distinctifs de leur création. Le tribunal a jugé que cette description était suffisante pour satisfaire aux exigences légales, rejetant ainsi le grief de nullité de l’assignation.

Qualité pour agir

L’article 789 du code de procédure civile stipule que le juge de la mise en état est compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, y compris le défaut de qualité pour agir en contrefaçon. Mesdames [O] doivent prouver qu’elles sont les auteurs de la grille pour avoir qualité pour agir. Elles ont produit une facture et une attestation d’un ferronnier, mais ces documents ne contiennent pas de dessins ou de photographies permettant de relier ces preuves à l’œuvre en question.

Preuves insuffisantes

Les photographies et les descriptions fournies par mesdames [O] ne permettent pas de démontrer que la grille a été divulguée sous leur nom. Les attestations de témoins sont également jugées imprécises et insuffisantes pour établir un lien clair avec l’œuvre revendiquée. En l’absence de preuves convaincantes, le tribunal ne peut conclure que mesdames [O] sont les auteurs de la grille.

Dépôt auprès de l’INPI

Madame [B] [O] a déposé un dessin de la grille auprès de l’INPI le 16 juin 2021, publié au BOPI le 10 décembre 2021. Cependant, ce dépôt ne procure qu’une protection au titre des dessins et modèles, non revendiquée en l’espèce. De plus, la publication est postérieure aux faits de contrefaçon allégués, rendant cette preuve insuffisante pour établir la divulgation antérieure de l’œuvre sous le nom des demanderesses.

Absence de divulgation antérieure

Le tribunal a conclu qu’il n’était pas établi que le dessin de la grille avait été divulgué sous le nom de mesdames [O] avant la pose des grilles par monsieur [C]. En conséquence, les demanderesses n’ont pas qualité pour agir en contrefaçon, et leur action doit être déclarée irrecevable.

Conséquences de la décision

Mesdames [O], ayant échoué à prouver leur qualité pour agir, sont condamnées à supporter les dépens de l’instance. De plus, elles doivent payer à monsieur [C] la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile, couvrant les frais de justice engagés par le défendeur.

Conclusion

Cette affaire illustre l’importance de fournir des preuves claires et convaincantes pour établir la qualité d’auteur dans une action en contrefaçon. En l’absence de telles preuves, les demanderesses ne peuvent faire valoir leurs droits d’auteur, et leur action est jugée irrecevable. Le tribunal a ainsi rejeté les prétentions de mesdames [O] et a statué en faveur de monsieur [C].

Les montants alloués dans cette affaire: – Mesdames [N] et [B] [O] condamnées à payer à monsieur [U] [C] la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
– Mesdames [N] et [B] [O] condamnées aux dépens.

Réglementation applicable

Articles des Codes cités

– Article 56 du Code de procédure civile
« L’assignation contient, à peine de nullité, l’indication :
1° De la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L’objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° Les modalités de comparution.
Elle vaut conclusions. »

– Article 789 du Code de procédure civile
« Le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l’instance ;
2° Accorder des provisions au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable ;
3° Ordonner les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires ;
4° Statuer sur les fins de non-recevoir. »

– Article 125 du Code de procédure civile
« Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

– Article L113-1 du Code de la propriété intellectuelle
« La qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée. »

– Article 700 du Code de procédure civile
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Reproduction du texte de chaque article de Code cité

1. Article 56 du Code de procédure civile
« L’assignation contient, à peine de nullité, l’indication :
1° De la juridiction devant laquelle la demande est portée ;
2° L’objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;
3° Les modalités de comparution.
Elle vaut conclusions. »

2. Article 789 du Code de procédure civile
« Le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour :
1° Statuer sur les exceptions de procédure et les incidents mettant fin à l’instance ;
2° Accorder des provisions au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable ;
3° Ordonner les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires ;
4° Statuer sur les fins de non-recevoir. »

3. Article 125 du Code de procédure civile
« Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

4. Article L113-1 du Code de la propriété intellectuelle
« La qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée. »

5. Article 700 du Code de procédure civile
« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier: – Maître Lidia BIZON-FRANCESCONI, avocat postulant au barreau de MARSEILLE
– Maître Mathieu PETER, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
– Maître Charlotte BALDASSARI, avocat au barreau de MARSEILLE
– Maître Julie GAUTIER

Mots clefs associés & définitions

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 mars 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG n°
23/00207
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE

——-
1ère Chambre Cab1
——–

ORDONNANCE D’INCIDENT
AUDIENCE DE PLAIDOIRIE DU 06 Février 2024
DÉLIBÉRÉ DU 19 Mars 2024

N° RG 23/00207 – N° Portalis DBW3-W-B7G-2X46

AFFAIRE : [N] [O], [B] [O]/[U] [C]

Nous, Thomas SPATERI, Vice-Président chargé de la Mise en Etat de la procédure suivie devant le Tribunal judiciaire de Marseille, assisté de Bernadette ALLIONE, greffier dans l’affaire entre :

DEMANDERESSES AU PRINCIPAL ET DEFENDERESSES A L’INCIDENT

Madame [N] [O]
née le 09 Mars 1950 à [Localité 6] (31)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

Madame [B] [O]
née le 13 Juin 1985 à [Localité 6] (31)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]

représentées par Maître Lidia BIZON-FRANCESCONI, avocat postulant au barreau de MARSEILLE et par Maître Mathieu PETER, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE

DEFENDEUR AU PRINCIPAL ET DEMANDEUR A L’INCIDENT

Monsieur [U] [C]
né le 27 Mars 1968 à [Localité 5] (57)
de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représenté par Maître Charlotte BALDASSARI, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Maître Julie GAUTIER

A l’issue de l’audience, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 19 Mars 2024

Ordonnance signée par SPATERI Thomas, Vice-Président et par ALLIONE Bernadette, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte de commissaire de justice du 21 décembre 2022 mesdames [N] et [B] [O] ont fait assigner monsieur [U] [C] devant ce tribunal en contrefaçon de droits d’auteur afin qu’il soit condamné à retirer sous astreinte les grilles situées au rez de chaussée de sa propriété à [Localité 4], et à leur payer les sommes de 2.000 € de dommages et intérêts et 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions d’incident du 6 septembre 2023, monsieur [C] a saisi le juge de la mise en état d’une demande tendant à l’annulation de l’assignation et de fins de non recevoir.
Aux termes de ses dernières écritures du 5 février 2024, il demande au juge de la mise en état de déclarer l’assignation nulle, de déclarer mesdames [O] irrecevables en leur action et de les condamner à lui payer la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes monsieur [C] fait valoir que l’œuvre dont la protection est revendiquée n’est pas identifiée, l’exploit introductif d’instance faisant référence à la foi à une grille, un dessin ou une porte, sans aucune description, que son originalité n’est pas plus démontrée, la négation de contraintes techniques ou l’usage d’expressions vagues ne pouvant en tenir lieu. Il soutient encore que les demanderesses n’ont pas de qualité pour agir faute d’établir leur qualité d’auteur, le dessin produit aux débats ne portant aucune signature, nom ou date et l’assignation évoquant tantôt comme auteurs les deux défenderesses ou madame [B] [O]. Il ajoute qu’il n’est pas plus possible de qualifier cette œuvre d’œuvre de collaboration en l’absence d’éléments permettant d’identifier les apports de chacune, que la facture du ferronnier du 20 juin 2018 ne fait pas état du nom d’un auteur et rend nul le dépôt du dessin à l’INPI du 16 juin 2021.

Mesdames [O] ont conclu en dernier lieu le 5 février 2024 au rejet des demandes de monsieur [C] et à sa condamnation à leur payer la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile aux motifs que la grille dont la protection est revendiquée a été divulguée sous leur nom lors de sa pose sur leur immeuble et par la revendication de sa paternité auprès du voisinage. Elles ajoutent qu’elles ont déposé le dessin de cette grille à l’INPI le 16 juin 2021 et que cette date doit être retenue comme une seconde divulgation, précisant toutefois qu’elles agissent bien en contrefaçon de droits d’auteur, que la grille en cause doit être qualifiée d’œuvre de collaboration dès lors que chacune d’elle a contribué à son dessin, qu’en tout état de cause la preuve de la qualité d’auteur est une question de fond relevant de l’appréciation du tribunal et qu’il a déjà été statué sur ce point lors d’une précédente instance ayant donné lieu à l’annulation de l’assignation.
Mesdames [O] soutiennent également que leur exploit introductif d’instance contient de manière exhaustive la description de la forme de l’œuvre et la reproduction du dessin de celle-ci, que son originalité résulte de son absence de banalité par rapport aux autres modèles de grilles existantes s’agissant d’un modèle unique composé de formes arrondies sans champ plein entre elles créant un rendu léger.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la régularité de l’assignation :

L’article 56 du code de procédure civile dispose que l’assignation doit contenir, à peine de nullité, un exposé des moyens en fait et en droit.

Il en résulte que le défendeur à l’action doit pouvoir être en mesure d’identifier les œuvres dont la protection est revendiquée et celles qui seraient contrefaisantes.

Si l’appréciation du caractère original de l’œuvre relève de la compétence du juge du fond, il appartient à l’auteur de l’œuvre opposée dans le cadre d’une action en contrefaçon, de définir, dès son acte introductif d’instance, le périmètre de protection revendiquée, de caractériser précisément les éléments originaux de cette œuvre qui, selon lui, sont repris par le contrefacteur.

L’assignation délivrée par mesdames [O] contient deux photographies et un dessin d’une grille. Celle-ci est décrite de la manière suivante :
« Mais l’originalité de notre projet a été d’occulter toute représentation ou référence végétale, animale ou féminine comme ces formes et univers sont très souvent présents dans les œuvres de ce courant artistique. Nous n’avons pas voulu ainsi représenter des motifs figuratifs, mais plutôt créer un univers informel, au sens où la forme visible n’évoque pas immédiatement une image connue. Nous avons favorisé l’épure graphique et une légèreté visuelle non figurative. D’aucun, voyant cette grille et cette porte, peuvent y trouver des formes connues, tant il est vrai que le lecteur d’une œuvre est aussi un créateur. Nous répétons que le fil conducteur dans la conception et la réalisation originales de cette grille est la création de motifs ondoyants et légers visuellement. L’originalité vient aussi de cette irrégularité rythmique des motifs. Ainsi nous avons voulu créer une œuvre aux motifs mouvants, réalisant de légères ombres portées par les jeux de la lumière ».

Elles ajoutent dans leur conclusions d’incident que «Ici, les formes sont de tailles et de formes très différentes, il y a une partie supérieure comportant de larges espaces et une partie inférieure avec des arrondis et des formes davantage anguleuses plus petites. La matière en fonte a fait l’objet d’un travail particulier, les champs pleins sont imposants, soulignés par des reliefs qui accompagnent les courbes. Le parti pris esthétique des consorts [O] a été de créer des formes arrondies fines, sans répétition, mais de dimensions similaires, partant dans différentes directions, et reliés les unes aux autres par de fins points de jonction, pour un rendu léger ».

Les écritures de mesdames [O] contiennent donc une description graphique et littérale de l’œuvre et de son originalité. L’assignation n’encourt donc pas le grief de nullité.

Sur la qualité pour agir :

L’article 789 du code de procédure civile dispose que le juge de la mise en état est, jusqu’à son dessaisissement, seul compétent pour statuer sur les fins de non recevoir.

Le défaut de qualité pour agir en contrefaçon tiré du défaut de la qualité d’auteur constitue bien une fin de non recevoir au sens de l’article 125 du même code, de sorte que le juge de la mise en état est compétent pour en connaître.

L’ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 28 juin 2022 dans une précédente instance n’a statué que sur la régularité de l’assignation et ne comporte dans son dispositif aucune mention relative à la qualité pour agir ou à la preuve de la qualité d’auteur, de sorte que les contestations de monsieur [C] sur ce point ne se heurtent pas à l’autorité de la chose jugée.

La qualité d’auteur appartient, aux termes de l’article L113-1 du code de la propriété intellectuelle, et sauf preuve contraire, à celui ou ceux sous le nom de qui l’œuvre est divulguée.

Pour justifier de leur qualité d’auteur mesdames [O] produisent la facture de monsieur [H] [V], ferronnier, datée du 20 juin 2018, relative à la réalisation d’une porte grille à deux vantaux, remplissage avec motifs selon modèle fourni, et d’une porte avec pattes en fer plat, ainsi qu’une attestation du même du 21 octobre 2021 selon laquelle il a réalisé une grille à deux vantaux avec motifs selon dessin fourni par madame [N] [O] et réalisé par sa fille.

Aucun dessin ou photographie n’accompagne cette facture et cette attestation, de sorte qu’il est impossible de dire si elles se rapportent bien au dessin produit par mesdames [O] en pièce n°2 de leur bordereau, lequel pour sa part ne comporte ni nom ni signature.

Les photographies produites aux débats ou reproduites dans le corps de l’assignation et des conclusions de mesdames [O] ne permettent pas plus de démontrer que cette grille ou son dessin ou été divulguées sous leur nom en l’absence de localisation de ces photographies et d’élément permettant de les rattacher effectivement à un bien immobilier leur appartenant. Les attestations de mesdames [F] et [I] sont pour leur part rédigées en termes particulièrement imprécis et ne permettent pas d’identifier les grilles auxquelles elles font référence.

Madame [B] [O] a déposé le dessin d’une grille auprès de l’INPI le 16 juin 2021. Ce dessin a été publié au BOPI le 10 décembre 2021. Or ce dépôt et cette publication ne sont susceptibles que de procurer une protection au titre des dessins et modèles, laquelle n’est pas revendiquée en l’espèce puisque les demanderesses indiquent expressément agir sur le fondement du droit d’auteur (pages 7 et 8 de leurs conclusions d’incident).

En outre et même à considérer que la publication du 10 décembre 2021 ait pu emporter divulgation d’une œuvre, elle demeure postérieure aux faits de contrefaçon allégués et qui datent, selon l’assignation et la lettre de mise en demeure du 17 juillet 2021, de la fin du mois de juin de cette année.

Il n’est donc pas établi que le dessin de la grille dont la protection est revendiquée a été divulgué sous le nom de mesdames [O] antérieurement à la pose, par monsieur [C], de ses propres grilles. Celles-ci n’ont donc pas qualité pour agir et devront être déclarées irrecevables en leur action.

Mesdames [O], qui succombent à l’instance, en supporteront les dépens. Elles seront en outre condamnées à payer à monsieur [C] la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant par ordonnance contradictoire et en premier ressort :

Rejetons l’exception de nullité de l’assignation ;

Déclarons mesdames [N] et [B] [O] irrecevables en leur action ;

Condamnons mesdames [N] et [B] [O] à payer à monsieur [U] [C] la somme de 3.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons mesdames [N] et [B] [O] aux dépens.

AINSI PRONONCÉ ET MIS À DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE.

LE GREFFIER, LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT,

Me Charlotte BALDASSARI
Me Lidia BIZON-FRANCESCONI

 

 


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