Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Marseille
Thématique : Indemnisation et droits des allocataires : Clarifications sur le calcul et la prise en compte des périodes d’emploi.
→ RésuméContexte de l’affaireMadame [I] [T] est assistante maternelle agréée et perçoit des indemnités de chômage via Pôle Emploi. Le 19 octobre 2020, Pôle Emploi PACA lui notifie une fin de droit à indemnisation, l’invitant à fournir des attestations d’emploi pour évaluer un éventuel rechargement de droits. Rechargements de droitsAprès avoir soumis plusieurs attestations, Madame [I] [T] reçoit cinq notifications de rechargement de droits à l’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) entre novembre 2020 et septembre 2021. En juin 2022, elle assigne Pôle Emploi PACA en justice, demandant des indemnités pour des droits non épuisés et des rappels d’allocations. Demandes de Madame [I] [T]Dans sa requête, Madame [I] [T] réclame un montant total de 35.675,52 € pour le reliquat de droits, ainsi que plusieurs sommes pour des périodes spécifiques d’indemnisation. Elle demande également des dommages pour résistance abusive et préjudice moral, ainsi que des frais de justice. Arguments de la demanderesseMadame [I] [T] soutient que Pôle Emploi n’a pas pris en compte toutes ses activités et que les notifications de rechargement de droits ne devraient pas annuler les précédentes. Elle affirme également qu’elle aurait dû bénéficier d’une indemnisation plus longue en raison de son âge. Réponse de Pôle Emploi PACAPôle Emploi PACA conteste les demandes de Madame [I] [T], arguant qu’elle ne prouve pas que la durée d’indemnisation de 687 jours est erronée. Ils soutiennent que les notifications de rechargement étaient rectificatives et que les calculs de la demanderesse sont incorrects. Décision du tribunalLe tribunal déboute Madame [I] [T] de toutes ses demandes, affirmant qu’elle n’a pas prouvé ses prétentions concernant le reliquat d’indemnisation et les rappels d’allocations. Il conclut que les calculs de la demanderesse sont erronés et qu’elle ne justifie pas ses demandes de dommages. Conséquences financièresMadame [I] [T] est condamnée à payer les dépens et à verser 3.500 € à Pôle Emploi PACA au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire à titre provisoire. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE
TROISIEME CHAMBRE CIVILE – SECTION B
JUGEMENT N°
Enrôlement : N° RG 22/07197 – N° Portalis DBW3-W-B7G-Z5KR
AFFAIRE :
Mme [I] [T] (Me Sophie SEMERIVA)
C/
Organisme POLE EMPLOI PACA (la SCP LINARES/ ROBLOT DE COULANGE)
Rapport oral préalablement fait
DÉBATS : A l’audience Publique du 24 Octobre 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré
Président : Monsieur Alexandre BERBIEC, Juge
Greffier : Madame Sylvie PLAZA, lors des débats
A l’issue de laquelle, la date du délibéré a été fixée au : 09 Janvier 2025, puis prorogée au 16 Janvier 2025
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 16 Janvier 2025
PRONONCE en audience publique par mise à disposition au greffe le 16 Janvier 2025
Par Monsieur Alexandre BERBIEC, Juge
Assisté de Madame Sylvie PLAZA, Greffier
NATURE DU JUGEMENT
contradictoire et en premier ressort
PARTIES
DEMANDERESSE
Madame [I] [T], assistante maternelle multi-employeurs
née le 27/09/1956 à [Localité 3], de nationalité française
demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Sophie SEMERIVA, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE
POLE EMPLOI Provence Alpes Côte d’Azur
Institution Nationale Publique
dont le siège social est sis [Adresse 2]
représenté par Maître Yves LINARES de la SCP LINARES/ ROBLOT DE COULANGE, avocats au barreau de MARSEILLE
EXPOSE DU LITIGE :
Madame [I] [T] exerce une activité salariée en qualité d’assistante maternelle agréée, en étant rémunérée par de multiples employeurs. Elle relève du POLE EMPLOI concernant l’assurance chômage.
Par courrier du 19 octobre 2020, le POLE EMPLOI PACA a notifié à Madame [I] [T] une fin de droit à indemnisation fixée au 27 octobre 2020. A cette occasion, le POLE EMPLOI a interrogé Madame [I] [T] sur la question de savoir si des emplois avaient été perdus. Le POLE EMPLOI a invité Madame [I] [T] à lui produire des attestations d’emploi, afin d’examiner la possibilité de poursuivre son indemnisation selon le dispositif dit de « rechargement de droit ».
Madame [I] [T] a produit, sur son espace en ligne POLE EMPLOI, diverses attestations. Le POLE EMPLOI PACA a successivement notifié à Madame [I] [T] cinq « rechargements de droit à l’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) » successifs par courriers des 3 novembre 2020, 12 novembre 2020, 17 novembre 2020, 23 décembre 2020 et 2 septembre 2021.
Par acte d’huissier en date du 16 juin 2022, Madame [I] [T] a assigné le POLE EMPLOI PACA devant le Tribunal judiciaire de MARSEILLE, au visa des articles 3, 9, 11, 13, 14, 33, 34 du règlement général annexé à la convention d’assurance chômage du 14 avril 2017 et des articles L5422-2-1 et R5422-2 du code du travail, aux fins de voir :
– condamner le POLE EMPLOI PACA, sous astreinte de 500 € par jour de retard, à compter de la signification du jugement, à indemniser Madame [I] [T] au titre de l’Aide au Retour à l’Emploi (ARE) pour le reliquat des droits non épuisés et résultant de la précédente période d’indemnisation à l’ARE au 6 août 2016, pour un montant global de 35.675,52 € ;
– condamner le POLE EMPLOI PACA, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la signification du jugement, à payer à Madame [I] [T] les sommes suivantes :
* 32.171,10 € à titre de rappel d’allocations du 1/05/2014 au 30/06/2016 et du 6/01/2016 au au 29 juillet 2016 ;
* 48.311,40 € à titre de rappel d’allocations du « 3/11/2014 au 30/07/2016 1/02/2014 au 1/07/2016 2/01/2017 au 28/08/2017 » (sic) ;
* 50.698,50 € « 5/07/2016 au 30/07/2017 19/03/2018 au 27/07/2018 1/10/2016 au 31/07/2018 » (sic) ;
* 50.698,50 € « 2/11/2018 au 17/07/2019 27/09/2018 au 19/07/2019 1/10/2016 au 31/07/2019 » (sic) ;
– condamner POLE EMPLOI à payer ces sommes avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;
– condamner POLE EMPLOI à payer la somme de 10.000 € pour résistance abusive et la somme de 5.000 € pour son préjudice moral ;
– condamner POLE EMPLOI à lui verser la somme de 2.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner POLE EMPLOI aux entiers dépens de l’instance.
Au soutien de ses prétentions, Madame [I] [T] affirme que l’indemnisation versée par le POLE EMPLOI PACA depuis le 30 octobre 2020 ne tient pas compte de toutes ses activités conservées et perdues du 30 juin 2016 au 30 septembre 2020, avec notamment les particuliers-employeurs suivants : [F], [A], [B], [H], [P], [R], [G], [Y], [V], [U], [N], [S].
Par ailleurs, le POLE EMPLOI n’a pas tenu compte du montant global du reliquat de droits résultant de la précédente admission au 6 août 2016, ce qui a impacté son indemnisation au titre de l’ARE.
La demanderesse fait valoir que c’est à tort que le défendeur affirme que chacune des cinq notifications de rechargement de droits à l’ARE annule la précédente.
Madame [I] [T] indique qu’à la fin de son indemnisation au 27 octobre 2020, elle aurait dû bénéficier d’un nouveau droit aux allocations chômages, dont le montant devait être calculé à partir de la totalité des périodes d’activités exercées pour lesquelles elle n’a pas été indemnisée, et en tenant compte du reliquat des droits résultant de la précédente période d’indemnisation.
D’une part, concernant la précédente indemnisation, au 6 août 2016, Madame [I] [T] était âgée de cinquante-cinq ans. A ce titre et par application de l’article 9 du règlement de l’assurance chômage, la demanderesse aurait dû être indemnisée pour une durée de 1095 jours calendaires. Or, elle ne l’a été que sur la base de 687 jours. Elle reste donc créancière d’un solde d’indemnisation de 408 jours, avec une valeur d’allocation journalière nette de 44 €. La demanderesse est donc créancière, au titre du reliquat d’indemnisation de la précédente période, de la somme de 35.675,52 €.
D’autre part, concernant la période postérieure, si le POLE EMPLOI a indemnisé Madame [I] [T] à compter du 30 octobre 2020 au titre des activités exercées entre septembre 2019 et octobre 2020 auprès des employeurs [L], [Y], [J], [E] et [N], elle a omis de prendre en compte certaines périodes travaillées auprès des employeurs listés plus haut.
Madame [I] [T] n’a pas conclu postérieurement à son assignation.
Par ordonnance sur incident du 23 novembre 2023, le juge de la mise en état a débouté le POLE EMPLOI PACA de sa prétention tendant à voir déclarer Madame [I] [T] irrecevable en ses « demandes de révision quant à leur durée », déclaré Madame [I] [T] recevable en toutes ses prétentions visées à l’assignation du 16 juin 2022, renvoyé l’affaire à l’audience de mise en état électronique du 20 juin 2024, enjoint au POLE EMPLOI PACA, pour cette date, d’avoir conclu au fond, sous peine de clôture partielle de l’instruction à son égard, réservé les autres demandes, dit que les dépens et les frais irrépétibles suivront le sort de la procédure au fond.
Aux termes de ses conclusions communiquées par le réseau privé virtuel des avocats le 19 juin 2024, au visa de l’article 1353 du code civil, le POLE EMPLOI PACA sollicite de voir :
– débouter Madame [I] [T] de ses demandes ;
– condamner Madame [I] [T] à lui verser la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Au soutien de ses prétentions, le POLE EMPLOI PACA fait valoir que, concernant le reliquat prétendu d’indemnisation au titre de la période ouverte le 30 juillet 2016, la demanderesse ne prouve pas que la durée d’indemnisation calculée à 687 jours était erroné. Les dispositions règlementaires prévoient que la durée d’indemnisation pour les personnes de plus de cinquante ans est comprise entre 122 et 1095 jours : la demanderesse n’établit pas qu’elle aurait dû bénéficier d’une indemnisation sur 1095 jours.
Concernant les autres rappels d’allocation, le défendeur fait valoir que la demanderesse entend, en réalité, cumuler les cinq notifications de rechargement de droits à l’ARE, alors que les cinq notifications étaient chacune rectificative de la précédente, au fur et à mesure de la transmission par la demanderesse des justificatifs correspondants. La demanderesse se borne, là encore, à énoncer les règles de calcul de l’allocation journalière sans justifier du calcul qu’elle fait en l’espèce. L’allocation journalière n’est pas calculée en fonction de tous les emplois exercés par l’allocataire pendant la période qui a précédé l’ouverture de droits : elle est calculée à partir d’un salaire journalier de référence. Celui-ci est constitué des rémunérations perçues dans les douze derniers mois avant l’ouverture de droit. Il est égal au quotient du salaire de référence par un diviseur correspondant au nombre de jours d’appartenance au titre desquels ces salaires ont été perçus, dans la limite de 365 jours, selon l’article 13 du règlement.
La demanderesse doit donc indiquer quels sont ses salaires entrant dans le champ de calcul du salaire de référence au 30 octobre 2020. Or, sa demande montre qu’elle inclut dans la période de détermination des salaires de référence des périodes allant de 2014 au 30 juillet 2016 déjà comprises dans l’ouverture de droit de 2016, et des périodes antérieures de plus de douze mois à la période débutant le 30 octobre 2020. Aussi, la demanderesse ne rapporte pas la preuve du bien fondé de ses prétentions, conformément à l’article 1353 du code civil.
Au-delà de ce qui a été repris pour les besoins de la discussion et faisant application en l’espèce des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le Tribunal entend se référer pour l’exposé plus ample des moyens et prétentions des parties aux dernières de leurs écritures visées ci-dessus.
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition de la décision au greffe après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort :
DEBOUTE Madame [I] [T] de sa prétention à la somme de 35.675,52 €, sous astreinte de 500 € par jour de retard, au titre du reliquat prétendu de droits résultant de la précédente période d’indemnisation à l’aide au retour à l’emploi au 6 août 2016 ;
DEBOUTE Madame [I] [T] de ses prétentions aux sommes de 32.171,10 €, 48.311,40 €, 50.698,50 € et 50.698,50 € sous astreinte de 500 € par jour de retard pour la période d’indemnisation courant à compter du 28 octobre 2020 ;
DEBOUTE Madame [I] [T] de ses prétentions aux intérêts au taux légal et à l’anatocisme ;
DEBOUTE Madame [I] [T] de sa prétention à la somme de 10.000 € au titre de la résistance abusive ;
DEBOUTE Madame [I] [T] de sa prétention à la somme de 5.000 € au titre du préjudice moral ;
CONDAMNE Madame [I] [T] aux entiers dépens ;
CONDAMNE Madame [I] [T] à verser au POLE EMPLOI PACA la somme de trois mille cinq cents euros (3.500 €) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;
REJETTE les prétentions pour le surplus.
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT
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