Tribunal judiciaire de Lyon, 16 janvier 2025, RG n° 22/04374
Tribunal judiciaire de Lyon, 16 janvier 2025, RG n° 22/04374

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Lyon

Thématique : Responsabilité de l’architecte dans la rénovation d’un appartement : enjeux et conséquences des désordres constatés.

Résumé

Contexte de l’affaire

Madame [Y] [F] est propriétaire d’un appartement situé à [Adresse 7] à [Localité 3]. Elle a décidé de rénover complètement son appartement et a engagé Madame [R] [E], architecte sous l’enseigne ARCHIFLOOR, pour superviser les travaux. Un contrat a été signé le 17 avril 2015, suivi d’un avenant le 4 septembre 2015. Les travaux ont commencé en septembre 2015, initialement prévus pour remplacer la menuiserie extérieure de la cuisine, mais ont finalement concerné toutes les menuiseries extérieures de l’appartement.

Réception des travaux et désordres constatés

La réception des travaux a eu lieu le 15 février 2016, avec des réserves, notamment sur le lot des menuiseries extérieures. En 2018, Madame [F] a constaté des désordres affectant ces menuiseries et a tenté de résoudre le problème par des échanges avec Madame [E] et des lettres recommandées. En mai 2019, elle a assigné Madame [E] et son assureur, la société MAF, devant le tribunal pour demander une expertise.

Expertise et actions judiciaires

Le juge des référés a ordonné une expertise, qui a été réalisée par Monsieur [T] [W] et dont le rapport a été déposé en mai 2021. En avril 2022, Madame [F] a assigné à nouveau Madame [E] et la société MAF pour obtenir des indemnités pour préjudices matériels, de jouissance et moral, ainsi que le remboursement des frais d’expertise. Les demandes ont été révisées en septembre 2023, avec des montants ajustés.

Arguments des défendeurs

Madame [E] et la société MAF ont contesté les demandes de Madame [F], arguant que les désordres relevaient de la garantie de parfait achèvement, qui incombait à la société CO CARRE, l’entrepreneur. Ils ont également demandé à être déboutés de toutes les demandes de Madame [F] et ont limité leur responsabilité à 20% des désordres.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué sur les demandes indemnitaires de Madame [F], en précisant que la garantie de parfait achèvement ne limitait pas la responsabilité de l’architecte. Il a retenu que Madame [E] avait manqué à ses obligations contractuelles, entraînant des désordres. Le tribunal a condamné Madame [E] et la société MAF à verser à Madame [F] 54 195,65 euros pour le préjudice matériel, tout en déboutant Madame [F] de ses demandes pour préjudice de jouissance et moral.

Conséquences financières et dépens

La société MAF, en tant qu’assureur de Madame [E], a été condamnée in solidum avec elle pour le paiement des indemnités. Les franchises et plafonds de garantie de l’assureur ont été jugés opposables. Les défendeurs ont également été condamnés aux dépens, y compris les frais d’expertise, et à verser 2 500 euros à Madame [F] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE LYON

Chambre 10 cab 10 H

N° RG 22/04374 – N° Portalis DB2H-W-B7G-WY7X

Jugement du 16 janvier 2025

Notifié le :

Grosse et copie à :

Maître Frédérique BARRE de la SELARL BARRE – LE GLEUT – 42
Maître Delphine POTUS – 191

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Le Tribunal judiciaire de LYON, statuant publiquement et en premier ressort, a rendu, le 16 janvier 2025 devant la Chambre 10 cab 10 H le jugement contradictoire suivant,

Après que l’instruction eut été clôturée le 02 octobre 2023, et que la cause eut été débattue à l’audience publique du 02 mai 2024 devant :

François LE CLEC’H, Président,
siégeant en formation Juge Unique,

Assisté de Jessica BOSCO BUFFART, Greffier,

Et après qu’il en eut été délibéré par le magistrat ayant assisté aux débats dans l’affaire opposant :

DEMANDERESSE

Madame [Y] [F]
née le 21 Septembre 1957 à [Localité 6]
demeurant [Adresse 7] – [Localité 4]

représentée par Maître Delphine POTUS, avocat au barreau de LYON

DEFENDERESSES

Madame [R] [E]
demeurant [Adresse 2] – [Localité 3]

représentée par Maître Frédérique BARRE de la SELARL BARRE – LE GLEUT, avocats au barreau de LYON

Compagnie d’assurance MUTUELLE ARCHITECTES FRANCAIS
Prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 5]

représentée par Maître Frédérique BARRE de la SELARL BARRE – LE GLEUT, avocats au barreau de LYON

EXPOSE DU LITIGE

Madame [Y] [F] est propriétaire d’un appartement sis [Adresse 7] à [Localité 3].

Madame [F] a souhaité procéder à la rénovation complète de son appartement.

Dans ce cadre, elle a fait appel à Madame [R] [E], architecte, exerçant sous l’enseigne ARCHIFLOOR, assurée auprès de la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS (ci-après la société MAF).

Un contrat d’architecte a été passé le 17 avril 2015 entre Madame [F] et Madame [E].

Un avenant à ce contrat a été signé le 4 septembre 2015.

Les travaux de rénovation ont débuté en septembre 2015.

Ces travaux comprenaient notamment initialement le remplacement de la menuiserie extérieure de la cuisine.

Les travaux de remplacement ont finalement porté sur l’ensemble des menuiseries extérieures de l’appartement.

Le lot menuiseries extérieures a été confié à la société CO CARRE par contrat du 26 octobre 2015 passé entre cette société et Madame [F].

La réception de l’ensemble des travaux de rénovation est intervenue par procès-verbal le 15 février 2016 avec réserves, dont certaines portant sur le lot menuiseries extérieures.

Estimant les menuiseries extérieures de son appartement affectées de différents désordres, Madame [F], après échanges d’emails au cours de l’année 2018 avec Madame [E] et deux lettres recommandées avec accusé de réception en date des 15 octobre 2018 et 28 janvier 2019 adressées à celle-ci, a, par actes d’huissier de justice en date du 16 mai 2019, assigné cette dernière et son assureur la société MAF devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon aux fins de voir ordonner une expertise.

Par ordonnance du 6 août 2019, le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon a fait droit à cette demande et désigné pour procéder à l’expertise Monsieur [T] [W].

Monsieur [W] a déposé son rapport le 18 mai 2021.

Par actes d’huissier en date des 22 et 26 avril 2022, Madame [F] a assigné Madame [E] et la société MAF, en sa qualité d’assureur de Madame [E], devant le tribunal judiciaire de Lyon aux fins de :
condamner solidairement Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 58 543,03 euros au titre de son préjudice matériel ; condamner solidairement Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 150 euros par mois au titre de son préjudice de jouissance, à compter de mars 2016 et jusqu’à réalisation des travaux de reprise des fenêtres ; condamner solidairement Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 2500 euros au titre de son préjudice moral ; condamner in solidum Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner in solidum Madame [E] et la société MAF aux dépens, incluant les frais de l’expertise judiciaire pour 5656,01 euros selon l’ordonnance de taxe du 26 août 2021.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 13 septembre 2023, Madame [F] demande au tribunal de :
condamner Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 68 337,98 euros au titre de son préjudice matériel ; condamner solidairement Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 150 euros par mois au titre de son préjudice de jouissance, à compter de mars 2016 et jusqu’à réalisation des travaux de reprise des fenêtres ; condamner solidairement Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 2500 euros au titre de son préjudice moral ; condamner in solidum Madame [E] et la société MAF à payer à Madame [F] une indemnité de 6000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner in solidum Madame [E] et la société MAF aux dépens, incluant les frais de l’expertise judiciaire pour 5656,01 euros selon l’ordonnance de taxe du 26 août 2021.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 1er février 2023, Madame [E] et la société MAF demandent au tribunal de :
à titre principal : juger que les désordres dont Madame [F] sollicite aujourd’hui réparation relevaient de la garantie de parfait achèvement dont seule la société CO CARRE était tenue et qu’elle s’est abstenue de mettre en œuvre dans le délai légal ; débouter Madame [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l’encontre de Madame [E] et de la société MAF ; à titre subsidiaire : juger que la responsabilité de Madame [E] dans la survenance des désordres dont Madame [F] sollicite l’indemnisation ne peut être que partielle ; limiter à 20% l’imputabilité des désordres et réparations associés à Madame [E] et la société MAF ; en tout état de cause : rejeter purement et simplement les demandes de Madame [F] au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral ; condamner Madame [F] à verser à Madame [E] et la société MAF la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner Madame [F] aux dépens, distraits au profit de Maître Frédérique BARRE, Avocat associé de la SELARL BARRE – LE GLEUT.
Par ordonnance du 2 octobre 2023, le juge de la mise en état a clôturé la procédure à cette date et fixé l’affaire à l’audience de plaidoiries du 2 mai 2024. Elle a été mise en délibéré au 24 octobre 2024. Le délibéré a été prorogé au 16 janvier 2025.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières écritures des parties visées ci-dessus pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant à juge unique, après audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

CONDAMNE in solidum Madame [R] [E], exerçant sous l’enseigne ARCHIFLOOR, et la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS à verser à Madame [Y] [F] la somme de 54 195,65 euros TTC au titre du préjudice matériel correspondant au coût des travaux de reprise des désordres ;

DEBOUTE Madame [Y] [F] de sa demande de condamnation au titre du préjudice de jouissance ;

DEBOUTE Madame [Y] [F] de sa demande de condamnation au titre du préjudice moral ;

DIT que les franchises et plafonds de garantie prévus dans le contrat du 13 janvier 2011 conclu entre la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS et [R] [E], exerçant sous l’enseigne ARCHIFLOOR, sont opposables tant aux tiers qu’à l’assurée ;

CONDAMNE in solidum Madame [R] [E], exerçant sous l’enseigne ARCHIFLOOR, et la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS aux dépens, en ce compris les frais de l’expertise judiciaire d’un montant de 5656,01 euros suivant l’ordonnance de taxe du 26 août 2021 ;

CONDAMNE in solidum Madame [R] [E], exerçant sous l’enseigne ARCHIFLOOR, et la société MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS à verser à Madame [Y] [F] la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

En foi de quoi le présent jugement a été signé par le Président, François LE CLEC’H, et la Greffière, Jessica BOSCO BUFFART.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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