Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Lille
Thématique : Transmission des éléments médicaux et contestation de l’imputabilité : enjeux de la procédure de recours en matière d’accidents du travail.
→ RésuméContexte de l’accidentLe 18 juillet 2019, la société [8] a déclaré un accident du travail survenu à Madame [C] [L] le 16 juillet 2019, alors qu’elle chargeait des palettes et a trébuché. Le certificat médical initial a mentionné des contusions à la cheville droite et à l’épaule gauche. Décision de la CPAMLe 25 juillet 2019, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du Rhône a décidé de prendre en charge l’accident au titre de la législation professionnelle. Contestation de la société [8]Le 2 mai 2023, la société [8] a contesté l’imputabilité de la durée des soins et des arrêts de travail liés à l’accident. Par la suite, elle a saisi le tribunal d’un recours contre la décision implicite de rejet de la commission médicale de recours amiable. Demandes de la société [8]La société [8] a demandé au tribunal d’enjoindre à la CPAM de transmettre le dossier médical de Madame [L] à son médecin désigné, de surseoir à statuer, et d’ordonner une expertise médicale judiciaire pour vérifier la justification des arrêts de travail. Réponse de la CPAMLa CPAM a demandé le rejet des demandes de la société [8], affirmant que la transmission des éléments médicaux ne pouvait se faire que par la commission médicale de recours amiable et que les soins et arrêts de travail étaient opposables à la société. Indépendance des rapportsLe tribunal a souligné que les rapports entre la CPAM et l’employeur sont indépendants, et que la décision de la CPAM ne porte pas atteinte aux droits de l’assuré. Transmission du dossier médicalLe tribunal a précisé que la transmission du dossier médical à l’employeur ne peut se faire que dans le cadre d’une expertise médicale judiciaire, et a rejeté la demande de la société [8] à cet égard. Imputabilité des soins et arrêts de travailLa société [8] a soutenu qu’il existait un doute sur l’imputabilité des arrêts de travail, invoquant des éléments médicaux et des antécédents de santé de Madame [L]. La CPAM a rétorqué que la société n’avait pas renversé la présomption d’imputabilité. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces pour déterminer si les arrêts de travail étaient directement imputables à l’accident du 16 juillet 2019, tout en réservant les dépens et en sursis à statuer sur les demandes jusqu’à la réception du rapport de consultation médicale. |
1/9 Tribunal judiciaire de Lille N° RG 23/01939 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XTCO
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
PÔLE SOCIAL
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JUGEMENT DU 07 JANVIER 2025
N° RG 23/01939 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XTCO
DEMANDERESSE :
Société [8]
[Adresse 10]
[Localité 5]
représentée par Me Michaël RUIMY, avocat au barreau de LYON substitué par Me SANCHEZ
DEFENDERESSE :
CPAM DU RHONE
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Localité 6]
dispensée de comparaître
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Fanny WACRENIER, Vice-Présidente
Assesseur : Anne JALILOSSOLTAN, Assesseur du pôle social collège employeur
Assesseur : Samuel GAILLARD, Assesseur du pôle social collège salarié
Greffier
Christian TUY,
DÉBATS :
A l’audience publique du 12 novembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 07 Janvier 2025.
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 18 juillet 2019, la société [8] a adressé à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) du RHONE une déclaration d’accident du travail survenu à Madame [C] [L] le 16 juillet 2019 dans les circonstances suivantes : » le collaborateur chargeait des palettes, il a trébuché entre deux palettes au sol « .
Le certificat médical initial du 16 juillet 2019 mentionne : » contusion cheville droite et épaule gauche « .
Le 25 juillet 2019, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du RHONE a notifié à la société [8] une décision de prise en charge de l’accident du 16 juillet 2019 de Madame [C] [L] au titre de la législation professionnelle.
Le 2 mai 2023, la société [8] a saisi la commission médicale de recours amiable aux fins de contester l’imputabilité à l’accident du travail de la durée des soins et arrêts de travail pris en charge au titre de la législation professionnelle.
Par courrier recommandé expédié le 5 octobre 2023, la société [8] a saisi le tribunal d’un recours à l’encontre de la décision implicite de rejet de la commission médicale de recours amiable.
L’affaire, appelée à l’audience de mise en état du 7 mars 2024, a été entendue à l’audience de renvoi fixée pour plaidoirie du 12 novembre 2024.
Lors de celle-ci, la société [8], par l’intermédiaire de son conseil, a déposé des conclusions, auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses demandes, moyens et prétentions soutenus oralement.
Elle demande au Tribunal de :
A titre liminaire,
– Enjoindre à la CPAM et à son service médical de transmettre l’entier dossier médical de Madame [L] visé à l’article R142-1-A du code de la sécurité sociale au médecin désigné par la société, le Docteur [R],
– Surseoir à statuer,
– Rouvrir les débats dès réception effective du dossier médical par le médecin consultant désigné par la société,
A titre principal et avant dire droit,
– Ordonner une expertise médicale judiciaire sur pièces afin de vérifier la justification des arrêts de travail pris en charge en relation directe avec l’accident du travail du 16 juillet 2019,
– Ordonner la communication de l’entier dossier médical de Madame [L] au Docteur [R],
– Juger que les frais d’expertise seront mis à la charge entière de la CPAM,
– Juger, dans l’hypothèse où les arrêts de travail ne seraient pas en lien de causalité direct et certain avec la lésion initiale, ces arrêts inopposables à la société,
A titre subsidiaire,
– Constater que son médecin consultant n’a pas été destinataire du dossier médical complet de Madame [L],
– Juger que par sa carence la CPAM a fait obstacle à la procédure d’échanges contradictoires du dossier médical de Madame [L],
– Constater la violation des articles 6 et 13 de la convention européenne des droits de l’homme et des principes directeurs du procès,
– Ordonner l’inopposabilité à la société de l’ensemble des soins et arrêts de travail prescrits à Madame [L] au titre de l’accident du travail du 16 juillet 2019.
En réponse, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du RHONE a sollicité une dispense de comparution et a déposé des écritures auxquelles il convient de se reporter pour le détail de ses demandes, moyens et prétentions.
Elle demande au Tribunal de :
– Rejeter la demande de transmission des éléments médicaux à l’employeur,
– Rejeter la demande d’expertise médicale,
– Confirmer l’opposabilité à la société [8] de l’ensemble des soins et arrêts de travail pris en charge au titre de l’accident du travail du 16 juillet 2019 et ses conséquences pécuniaires,
– Débouter la société [8] de l’ensemble ses demandes.
PAR CES MOTIFS
Le Tribunal statuant, après débats en audience publique, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe,
DIT la société [8] recevable en son recours,
DÉBOUTE la société [8] de sa demande tenant à ce que le tribunal fasse injonction à la CPAM et à son service médical de transmettre l’entier dossier médical de Madame [L] au médecin désigné par la société, le Docteur [R], et de surseoir à statuer dans cette attente,
AVANT DIRE DROIT sur la demande d’inopposabilité des soins et arrêts de travail prescrits à Madame [C] [L] postérieurement au 16 juillet 2019,
ORDONNE une Consultation médicale sur pièces au titre de l’article R142-16 et suivants du code de la sécurité sociale,
DÉSIGNE pour y procéder le Docteur [E] [T] – [Adresse 3] [Localité 4], avec pour mission, de :
1) Prendre connaissance de l’intégralité du dossier médical de l’assuré, dont le rapport médical mentionné à l’article R 142-16-3, que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du RHONE et/ou son service médical, devra transmettre dans un délai de 2 mois à compter de la notification du présent jugement,
2) Prendre connaissance des observations éventuelles du médecin conseil de la société [8] qui devront être transmises dans un délai de 2 mois à compter de la notification du présent jugement,
3) Dire si les arrêts de travail prescrits postérieurement au certificat médical initial sont directement et exclusivement imputables à l’accident du travail du 16 juillet 2019,
4) Dans la négative, dire dans quelle proportion ils sont rattachables à une pathologie intercurrente ou à une pathologie antérieure non révélée ou aggravée par l’accident du travail et la décrire,
5) Déterminer la date à partir de laquelle les arrêts de travail ont une cause totalement étrangère à l’accident du travail,
RAPPELLE à la société [8] qu’elle dispose d’un délai de dix jours à compter de la notification de la présente décision pour demander, par tous moyens conférant date certaine, à l’organisme de sécurité sociale, de notifier au médecin qu’il mandate à cet effet, l’intégralité des rapports précités, qui lui seront transmis, si cela n’a pas déjà été fait, dans le délai de vingt jours à compter de la réception de la demande de l’employeur ;
DÉSIGNE le magistrat ayant ordonné la mesure pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents ;
DIT que le médecin consultant désigné devra adresser un rapport écrit en 4 exemplaires au greffe du Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lille, [Adresse 2], [Localité 9], dans un délai de 6 mois à compter de la date à laquelle il aura été avisé de sa mission ;
DIT qu’une copie du rapport écrit de la consultation médicale sur pièces dès réception sera adressée aux parties par le greffe du Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lille par lettre simple,
RENVOIE l’affaire après consultation à l’audience de Mise en Etat dématérialisée du :
JEUDI 3 JUILLET 2025 à 09 heures
Devant la chambre du POLE SOCIAL
Du TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE,
[Adresse 1] à [Localité 9].
DIT que le présent jugement notifié vaut convocation des parties à l’audience de Mise en Etat du Jeudi 3 JUILLET 2025 à 09 heures ;
SURSOIT à statuer sur les demandes dans l’attente de la réception du rapport de consultation médicale ;
RÉSERVE les dépens ;
RAPPELLE qu’en vertu de l’article L142-11 du code de la sécurité sociale, les frais de consultation médicale seront pris en charge par la caisse nationale d’assurance maladie;
DIT que le présent jugement sera notifié à chacune des parties conformément à l’article R.142-10-7 du Code de la Sécurité Sociale par le greffe du Tribunal.
Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe du Tribunal les jours, mois et an sus-dit.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
Christian TUY Fanny WACRENIER
Expédié aux parties le :
– 1 CCC à Me RUIMY, à [8], à la CPAM du Rhône et au docteur [T]
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