Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Lille
Thématique : Conflit autour de l’authenticité des documents d’état civil et de la nationalité française
→ RésuméRefus d’enregistrement de la déclaration de nationalitéLe 22 septembre 2021, le directeur de greffe du tribunal judiciaire d’Amiens a notifié à M. [S] [H] le refus d’enregistrement de sa déclaration de nationalité française, soumise le 28 avril 2021. Ce refus était motivé par une incohérence entre l’acte de naissance fourni et les décisions de justice présentées. Assignation du Procureur de la RépubliqueEn réponse à ce refus, M. [S] [H] a assigné le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lille le 21 mars 2022, demandant l’enregistrement de sa déclaration de nationalité. Un récépissé a été délivré par le ministère de la justice, et les parties ont échangé leurs écritures. L’instruction a été clôturée le 9 novembre 2023, avec une audience fixée au 8 octobre 2024. Demandes de M. [S] [H]Dans ses dernières écritures, M. [S] [H] a demandé au tribunal de juger son recours recevable et fondé, d’octroyer la nationalité française, d’ordonner l’enregistrement de sa déclaration, et de condamner l’État à lui verser 2000 € pour ses frais de justice. Il a soutenu que le refus initial était basé sur une erreur matérielle et a produit des documents qu’il estime conformes aux exigences légales. Position du ministère publicLe ministère public a, quant à lui, demandé au tribunal de débouter M. [S] [H] de ses demandes, affirmant qu’il n’est pas français. Il a souligné que le requérant n’avait pas fourni la taskera en langue originale et que les documents présentés ne constituaient pas des preuves suffisantes de son identité. Le ministère public a également noté que la carte d’enregistrement de naissance n’était pas un document d’état civil. Décision du tribunalLe tribunal a statué en faveur du ministère public, déboutant M. [S] [H] de sa demande d’enregistrement de nationalité française. Il a déclaré que M. [S] [H] n’était pas français et a ordonné les mentions nécessaires selon l’article 28 du Code civil. Les dépens ont été laissés à sa charge, et toutes ses demandes ont été rejetées. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 01
N° RG 22/02334 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WAVI
JUGEMENT DU 10 JANVIER 2025
DEMANDEUR:
M. [S] [H]
se disant né le 24 juin 2003 à [Localité 4] en Afghanistan
[Adresse 1]
représenté par Me Raphaël EKWALLA-MATHIEU, avocat au barreau de LILLE, postulant et Me Antoine TOURBIER, avocat au barreau d’AMIENS, plaidant
DÉFENDERESSE:
Mme LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
[Adresse 2]
[Localité 3]
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Marie TERRIER,
Assesseur : Juliette BEUSCHAERT,
Assesseur : Nicolas VERMEULEN,
Greffier : Benjamin LAPLUME,
DÉBATS
Vu l’ordonnance de clôture en date du 09 Novembre 2023.
A l’audience en chambre du conseil du 08 Octobre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 10 Janvier 2025.
Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Juliette BEUSCHAERT, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.
JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 10 Janvier 2025 par Marie TERRIER, Présidente, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE
Le 22 septembre 2021, le directeur de greffe du tribunal judiciaire d’Amiens a notifié un refus d’enregistrement de la déclaration souscrite le 28 avril 2021 sur le fondement de l’article 21-12 du Code civil par M. [S] [H] se disant né le 24 juin 2003 à [Localité 4] en Afghanistan, au motif que « l’acte de naissance produit par l’intéressé à l’appui de sa demande et les copies de décisions de justice produites ne coïncident pas ».
Par acte du 21 mars 2022, M. [S] [H] a fait assigner le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Lille aux fins de voir ordonner l’enregistrement de sa déclaration de nationalité française.
Récépissé en a été délivré par le ministère de la justice.
Les parties ont échangé leurs écritures. La clôture de l’instruction a été ordonnée à la date du 9 novembre 2023 et l’affaire fixée à plaider à l’audience du 8 octobre 2024 prise à juge rapporteur. Elle a été mise en délibéré au 10 janvier 2025.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées par la voie électronique le 13 septembre 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé plus complet de ses moyens, M. [H] demande au tribunal de :
Vu les dispositions des articles 26-12 et 47 du code civil,
Vu les articles 696 et 700 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées aux débats,
DIRE ET JUGER le recours de Monsieur [H] recevable et bien-fondé,
OCTROYER la nationalité française à Monsieur [H] [S] et par voie de conséquence ORDONNER au MINISTERE PUBLIC de délivrer à Monsieur [H] [S] un certificat de nationalité française.
ORDONNER l’enregistrement de la déclaration de nationalité française souscrite par Monsieur [H] sur les registres d’état civil français,
ORDONNER la mention prévue à l’article 28 du code civil,
CONDAMNER l’Etat au paiement de la somme de 2000 € au Conseil de Monsieur [H] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique.
CONDAMNER le trésor public aux entiers dépens de l’instance.
Il fait essentiellement valoir que le motif à l’origine du refus est infondé, s’agissant d’une erreur matérielle actuellement en cours de rectification ; puis qu’il a produit à la procédure un acte régulier au sens de l’article 47 du code civil, précisant que la légalisation n’est pas exigée par cet article. S’agissant des motifs soulevés par le ministère public, il fait valoir qu’il produit les traductions de la taskera accompagnées du document en langue étrangère correspondant, porteur de la formalité de la légalisation et qu’il produira la décision l’ayant confié à l’aide sociale à l’enfance.
Aux termes de ses dernières écritures signifiées par la voie électronique le 23 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé plus complet de ses moyens, le ministère public demande au tribunal de :
débouter M. [S] [H] de ses demandes ;
juger que M. [S] [H] se disant né le 24 juin 2003 à [Localité 4] en Afghanistan, n’est pas français ;
ordonner la mention prévue par les articles 28 du code civil, 1059 du code de procédure civile et le décret n°65-422 du 1er juin 1965 portant création d’un service central au ministère des affaires étrangères.
Le ministère public souligne que bien qu’il le soutienne, le requérant ne produit toujours pas la taskera en langue originale, mais seulement la traduction anglaise et la traduction française de la version anglaise ; qu’il produit encore une traduction en anglais d’une carte d’enregistrement de naissance émise le 1er juillet 2020 accompagnée de la traduction en français de cette traduction en anglais effectuée le 21septembre 2020 par [M] [X] ; que les originaux légalisés ne sont pas produits. Il rappelle aussi que la carte d’enregistrement de naissance, qui est établie à des fins statistiques, n’est pas un document d’état civil.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal, statuant publiquement, après débats en chambre du conseil, par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,
DÉBOUTE M. [S] [H] se disant né le 24 juin 2003 à [Localité 4] en Afghanistan de sa demande d’enregistrement de sa demande de nationalité française ;
DIT que M. [S] [H] se disant né le 24 juin 2003 à [Localité 4] en Afghanistan n’est pas français ;
ORDONNE en tant que de besoin les mentions prévues à l’article 28 du Code civil ;
LAISSE les dépens à la charge de M. [S] [H] ;
DEBOUTE M. [S] [H] de toutes ses demandes.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE
Benjamin LAPLUME Marie TERRIER
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