Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand
→ RésuméLe G.A.E.C. DU PRE, fondé le 28 septembre 2021 par Madame [M] et Monsieur [D], a vu ses relations se détériorer rapidement. Le 19 décembre 2022, Madame [M] a notifié son intention de se retirer, mais les tensions sont restées vives malgré des tentatives de médiation. Le 23 novembre 2023, elle a assigné Monsieur [D] pour obtenir son retrait et le paiement de 201.163 €. Lors de l’audience du 21 mai 2024, la demande de médiation de Monsieur [D] a été formulée, tandis que le Tribunal a soulevé une question d’incompétence, entraînant la réouverture des débats.
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Madame [B] [M] et Monsieur [C] [D] ont constitué le G.A.E.C. DU PRE le 28 septembre 2021. Les relations entre les associés se sont détériorées, conduisant Madame [M] à notifier son intention de se retirer du G.A.E.C. par lettre recommandée le 19 décembre 2022. Plusieurs réunions ont eu lieu pour tenter de résoudre le conflit, et un expert a été mandaté pour évaluer la valeur de l’exploitation et les droits des associés, rapport remis le 22 septembre 2023. Madame [M] a signalé l’absence de réponse de Monsieur [D] concernant son retrait. Elle a ensuite assigné Monsieur [D] et le G.A.E.C. devant le Tribunal le 23 novembre 2023, demandant son retrait et le paiement de 201.163 € pour ses droits dans le G.A.E.C. L’affaire a été retirée du rôle à la demande de Madame [M] pour solliciter un conciliateur, mais a été réinscrite le 18 avril 2024. Lors de l’audience du 21 mai 2024, l’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises, jusqu’à l’audience du 16 juillet 2024 où les débats ont eu lieu. Monsieur [D] a demandé une médiation et, à titre subsidiaire, une audience de règlement amiable, tout en contestant la demande de retrait de Madame [M]. Madame [M] a réitéré ses demandes lors de cette audience.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand
RG n°
24/00385
Ordonnance N°
du 24 SEPTEMBRE 2024
Chambre 6
N° RG 24/00385 – N° Portalis DBZ5-W-B7I-JQND
du rôle général
[B] [M]
c/
G.A.E.C. DU PRE [Adresse 4]
[C] [D]
la SCP MOINS
la SCP TEILLOT & ASSOCIES
GROSSES le
– la SCP MOINS
, la SCP TEILLOT & ASSOCIES
Copies électroniques :
– la SCP MOINS
, la SCP TEILLOT & ASSOCIES
Copies :
– Dossier
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE CLERMONT-FERRAND
JUGEMENT
rendue le VINGT QUATRE SEPTEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE,
par Madame Catherine GROSJEAN, Présidente du Tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND
assistée lors des débats de Madame Amandine CHAMBON, greffier et lors du délibéré de Madame Laetitia JOLY, greffier
dans le litige opposant :
DEMANDERESSE
Madame [B] [M]
domiciliée : chez M. [W] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par la SCP TEILLOT & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND
ET :
DEFENDEURS
G.A.E.C. DU PRE [Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par la SCP MOINS, avocats au barreau d’AURILLAC
Monsieur [C] [D]
[Adresse 4]
[Localité 3]
représenté par la SCP MOINS, avocats au barreau d’AURILLAC
Après débats à l’audience publique du 16 Juillet 2024, l’affaire a été mise en délibéré à ce jour, la décision étant rendue par mise à disposition au greffe.
Suivant Assemblée générale extraordinaire en date du 28 septembre 2021, Madame [B] [M] et Monsieur [C] [D] ont constitué le G.A.E.C. DU PRE [Adresse 4].
Les relations entre les associés se sont dégradées.
Suivant lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 décembre 2022, Madame [M] a notifié à Monsieur [D] son intention de se retirer du G.A.E.C. en application de l’article 21 des statuts.
Plusieurs réunions se sont tenues à l’initiative du CEFRANCE PUY DE DOME AVENIR les 3 novembre 2022, 24 mars 2023 et 12 juin 2023.
Madame [M] et Monsieur [D] ont mandaté Monsieur [E] [L], expert agricole et foncier, aux fins de déterminer la valeur vénale de l’exploitation du G.A.E.C. et les droits des associés.
Monsieur [L] a établi un rapport le 22 septembre 2023.
Madame [M] a déploré l’absence de réponse de Monsieur [D] quant à sa demande de retrait du G.A.E.C.
Par acte d’assignation en date du 23 novembre 2023, Madame [B] [M] a assigné Monsieur [C] [D] et le G.A.E.C. DU PRE [Adresse 4] devant la Présidente du Tribunal statuant selon la procédure accélérée au fond aux fins suivantes :
Vu les dispositions des articles 1869 et 1843-4 du code civil,
Vu les statuts de la Société GAEC DU PRE [Adresse 4],
– Déclarer les demandes de [B] [M] recevables et bien fondées,
– Déclarer les demandes de [B] [M] recevables et bien fondées,
Y faisant droit,
– Autoriser le retrait de [B] [M] de la société « GAEC DU PRE [Adresse 4] »,
– Condamner d’ores et déjà la société GAEC DU PRE [Adresse 4] et [C] [D] à payer et porter à [B] [M] la somme de 201.163,00 € au titre de ses droits dans le GAEC DU PRE [Adresse 4] (compte courant associé),
– Condamner [C] [D] et le GAEC DU PRE [Adresse 4] au paiement de la somme de 1.500,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner solidairement les mêmes aux entiers dépens.
L’affaire a été enrôlée sous le numéro RG 23/00986.
Par message RPVA en date du 5 février 2024, le conseil de Madame [M] a sollicité le retrait du rôle afin de solliciter l’intervention du conciliateur désigné par les associés dans les statuts du G.A.E.C.
Par message RPVA en date du 19 février 2024, le conseil de Monsieur [D] a indiqué ne pas s’opposer à la demande de retrait.
Suivant ordonnance en date du 20 février 2024, le retrait du rôle de l’affaire a été ordonné.
Par conclusions notifiées par RPVA le 18 avril 2024, Madame [M] a sollicité la réinscription de l’affaire au rôle et a saisi la Présidente du Tribunal statuant selon la procédure accélérée au fond aux fins suivantes :
Vu les dispositions des articles 1869 et 1843-4 du code civil,
Vu les statuts de la Société GAEC DU PRE [Adresse 4],
– Déclarer les demandes de [B] [M] recevables et bien fondées,
– Déclarer les demandes de [B] [M] recevables et bien fondées,
Y faisant droit,
– Autoriser le retrait de [B] [M] de la société « GAEC DU PRE [Adresse 4] »,
– Condamner d’ores et déjà la société GAEC DU PRE [Adresse 4] et [C] [D] à payer et porter à [B] [M] la somme de 201.163,00 € au titre de ses droits dans le GAEC DU PRE [Adresse 4] (compte courant associé),
– Débouter Monsieur [D] et le G.A.E.C. DU PRE [Adresse 4] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire sur les droits de [B] [M],
– Ordonner une mesure d’expertise afin de :
Examiner l’ensemble des opérations intervenues depuis le 19 décembre 2022 et notamment les factures émises par l’ETA [D], Déterminer la valeur des droits sociaux détenus par [B] [M] en application de l’article 1843-4 du code civil,
En tout état de cause,
– Condamner [C] [D] et le GAEC DU PRE [Adresse 4] au paiement de la somme de 1.500,00 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner solidairement les mêmes aux entiers dépens.
L’affaire a été réinscrite au rôle sous le numéro RG 24/00385.
Appelée à l’audience du 21 mai 2024, l’affaire a été renvoyée sur demande des parties à l’audience du 18 juin 2024, puis à l’audience du 9 juillet 2024, puis à l’audience du 16 juillet 2024 à laquelle les débats se sont tenus.
Par dernières conclusions reprises oralement à l’audience, Monsieur [D] a conclu aux fins suivantes :
A titre principal
Vu les dispositions de l’article 131-1 et suivants du Code de Procédure Civile,
– Ordonner une mesure de médiation qui sera confiée à tel conciliateur qu’il plaira à Madame le Président de désigner avec pour mission :
Prendre connaissance du dossier des parties, Rechercher un éventuel accord entre Madame [B] [M] et Monsieur [C] [D] concernant la demande de retrait de Madame [B] [M] du GAEC DU PRE [Adresse 4], l’évaluation et les modalités de remboursement des droits détenus par Madame [B] [M] au sein du GAEC DU PRE [Adresse 4],
A titre subsidiaire
Vu les dispositions des articles 754-1 et suivants du Code de Procédure Civile,
– Ordonner une audience de règlement amiable en vue de rechercher un accord amiable au présent contentieux opposant Madame [B] [M] d’une part, Monsieur [C] [D] et le GAEC DU PRE [Adresse 4] d’autre part,
A titre encore plus subsidiaire
– Débouter Madame [B] [M] de sa demande de retrait sous le visa des dispositions de l’article 1869 du Code Civil,
A titre encore plus subsidiaire et dans l’hypothèse où le Tribunal ferait droit à la demande de retrait,
– Ordonner une mesure d’expertise afin de déterminer la valeur des droits sociaux détenus par Madame [B] [M] et Monsieur [C] [D] dans le GAEC DU PRE [Adresse 4] en application de l’article 1843-4 du Code Civil,
– Dire n’y avoir lieu à donner mission à l’expert « d’examiner l’ensemble des opérations intervenues depuis le 19 décembre 2022 et notamment les factures émises par l’ETA [D] » tel que sollicité par Madame [B] [M],
– Constater que Madame [B] [M] sollicite la condamnation de Monsieur [C] [D] au paiement de la somme de 201.163 € à titre de remboursement de son compte courant d’associé,
– Concernant la demande de remboursement du compte courant d’associé détenu par Madame [B] [M] au sein du GAEC DU PRE [Adresse 4], Dire et juger que le GAEC DU PRE [Adresse 4] disposera d’un délai de 2 ans pour s’acquitter du remboursement de ce compte courant d’associé, en application des dispositions de l’article 1343-5 du Code civil,
– Condamner Madame [B] [M] à payer à Monsieur [C] [D] la somme de 1.500 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– Condamner Madame [B] [M] aux entiers dépens,
– Et dire que, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile, Maître Jean-Antoine MOINS pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l’avance sans en avoir reçu provision.
Par dernières conclusions reprises oralement à l’audience, Madame [M] a réitéré ses demandes.
Pour le surplus, il est renvoyé à l’assignation et aux conclusions régulièrement déposées.
En application de l’article 76 du Code de procédure civile, l’incompétence peut être prononcée d’office par le juge en cas de violation d’une règle de compétence d’attribution lorsque cette règle est d’ordre public.
L’article L.211-3 du Code de l’organisation judiciaire dispose que : « Le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction ».
Aux termes de l’article L.213-2 du même Code, la Présidente du Tribunal judiciaire statue selon la procédure accélérée au fond dans les cas prévus par la loi ou le règlement.
L’article 1869 du Code civil prévoit que : « Sans préjudice des droits des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice.
A moins qu’il ne soit fait application de l’article 1844-9 (3ème alinéa), l’associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d’accord amiable, conformément à l’article 1843-4 ».
L’article 1843-4 du même Code dispose que : « I. — Dans les cas où la loi renvoie au présent article pour fixer les conditions de prix d’une cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles, par jugement du président du tribunal judiciaire ou du tribunal de commerce compétent, statuant selon la procédure accélérée au fond et sans recours possible.
L’expert ainsi désigné est tenu d’appliquer, lorsqu’elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par les statuts de la société ou par toute convention liant les parties.
II. — Dans les cas où les statuts prévoient la cession des droits sociaux d’un associé ou le rachat de ces droits par la société sans que leur valeur ne soit ni déterminée ni déterminable, celle-ci est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné dans les conditions du premier alinéa.
L’expert ainsi désigné est tenu d’appliquer, lorsqu’elles existent, les règles et modalités de détermination de la valeur prévues par toute convention liant les parties ».
Les demandeurs fondent leur demande d’autorisation de retrait, leur demande de paiement au titre des droits sociaux et, à titre subsidiaire, d’expertise sur la valeur desdits droits, sur les articles 1869 et 1843-4 du Code civil.
L’article 1843-4 du Code civil attribue certes compétence au Président du Tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond pour désigner un expert aux fins de déterminer la valeur des droits sociaux.
Cependant, l’article 1869 du Code civil, applicable à toutes les sociétés civiles, ne prévoit pas expressément cette compétence spéciale pour autoriser le retrait d’un groupement. Il prévoit seulement que ledit retrait peut être autorisé « pour justes motifs par décision de justice ».
Ainsi, à défaut de prévision expresse, la Présidente du Tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond n’est pas compétente pour statuer sur une demande d’autorisation de retrait, ni, a fortiori, sur une demande en paiement au titre des droits sociaux.
Il s’ensuit que le Tribunal judiciaire, juge de droit commun, est seul compétent pour statuer sur la demande principale, étant précisé que la jurisprudence a exclu la compétence du juge des référés.
Il y a ainsi lieu d’ordonner la réouverture des débats et d’inviter les parties à fournir toutes explications sur cette exception d’incompétence.
Toutes les demandes, ainsi que les dépens, seront réservés.
La Présidente du Tribunal, statuant selon la procédure accélérée au fond après débats en audience publique et en premier ressort, par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,
ORDONNE LA REOUVERTURE DES DEBATS,
INVITE les parties à fournir toutes explications sur le moyen tiré de l’incompétence de la Présidente du Tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond pour connaître des demandes principales, et le cas échéant à modifier leurs demandes en conséquence,
RENVOIE l’affaire à l’audience du 15 octobre 2024 à 10h30 en salle A du Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand,
DIT que la notification de la présente décision par greffe vaudra convocation à l’audience,
RESERVE toutes les demandes, ainsi que les dépens.
La Greffière, La Présidente,
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