Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, 17 janvier 2025, RG n° 24/01323
Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand, 17 janvier 2025, RG n° 24/01323

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand

Thématique : Fixation du loyer commercial : enjeux de la valeur locative et des prolongations tacites

Résumé

Contexte du Bail Commercial

Par acte notarié en décembre 2006, la SCI [Adresse 9] a conclu un bail commercial de 9 ans avec la société MATMUT, débutant le 1er août 2007. Ce bail a été tacitement reconduit, sans congé ni demande de renouvellement.

Notification de Congé et Offre de Renouvellement

Le 18 octobre 2021, la SCI [Adresse 9] a signifié un congé à la MATMUT pour le 30 juin 2022, tout en proposant un renouvellement à partir du 1er juillet 2022, avec un loyer annuel de 56 000 euros. La MATMUT a accepté le principe du renouvellement, mais a contesté le montant du loyer.

Demande de Fixation du Loyer

Le 26 décembre 2023, la SCI [Adresse 9] a déposé un mémoire demandant la fixation du loyer à 56 000 euros par an, en se basant sur l’article L.145-34 du code de commerce, en raison de la durée du bail dépassant 12 ans.

Assignation en Justice

Le 11 mars 2024, la SCI [Adresse 9] a assigné la MATMUT devant le juge des loyers, maintenant sa demande de fixation du loyer à 56 000 euros par an.

Réponse de la MATMUT

Le 2 décembre 2024, la MATMUT a demandé au juge de fixer le loyer à 25 500 euros par an, tout en sollicitant une expertise si nécessaire. Elle a également demandé des intérêts sur les trop-perçus de loyer.

Analyse des Demandes

Le juge a constaté que le bail avait été renouvelé à compter du 1er juillet 2022 et a ordonné une expertise pour évaluer la valeur locative des locaux, en tenant compte des caractéristiques des lieux et des prix du marché.

Décision du Juge

Le juge a désigné un expert pour évaluer la valeur locative des locaux et a fixé un loyer provisionnel égal au montant du loyer contractuel pendant la durée de l’instance. Les dépens ont été réservés, et le surplus des demandes a été rejeté.

VD-T/CB

Jugement N°
du 17 JANVIER 2025

Chambre 1 Cabinet 3

RG N° N° RG 24/01323 – N° Portalis DBZ5-W-B7I-JPWJ
du rôle général

S.C.I. DU [Adresse 9]

c/

LA MUTUELLE ASSURANCE DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES – MATMUT

la SCP BOISSIER
la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES

GROSSE le

la SCP BOISSIER
la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES

Copies à :

– la SCP BOISSIER
– la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES

+CCC :
-Dossier
-Expert
-Régie

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE CLERMONT-FERRAND

LOYER COMMERCIAL

Le DIX SEPT JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ,

LE TRIBUNAL

Composé de Madame Virginie THEUIL-DIF, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND statuant comme Juge des Loyers Commerciaux,

assistée lors des débats et du délibéré de Madame Céline BOSSY, Greffière.

ENTRE

S.C.I. [Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 4]

Représentée par la SCP COLLET DE ROCQUIGNY CHANTELOT BRODIEZ GOURDOU & ASSOCIES, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND

DEMANDERESSE

D’UNE PART

ET :

LA MUTUELLE ASSURANCE DES TRAVAILLEURS MUTUALISTES – MATMUT
[Adresse 5]
[Localité 6]

Représentée par Me Philippe BOISSIER de la SCP BOISSIER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND, avocat postulant
et par Me Nicole M. POIRIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

DEFENDERESSE

D’AUTRE PART

Après débats à l’audience publique du 06 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré à ce jour, la décision étant rendue par mise à disposition au greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique des 21 et 22 décembre 2006 reçu par Maître [O], notaire associé à [Localité 4], avec la participation de Maître [B], notaire à [Localité 10], la SCI [Adresse 9] a donné à bail des locaux à usage commercial sis dans un ensemble immobilier à [Localité 4] donnant sur les [Adresse 7], ainsi que sur le [Adresse 12], à la société Mutuelle Assurance des Travailleurs Mutualiste – MATMUT, bail conclu pour une durée de 9 années à compter du 1er août 2007.

Le bail s’est prorogé tacitement, aucun congé n’ayant été délivré et aucune demande de renouvellement n’ayant été formulée.

Par acte extrajudiciaire signifié le 18 octobre 2021, la SCI [Adresse 9] a fait signifier à la MATMUT un congé pour le 30 juin 2022 comportant offre de renouvellement à effet du 1er juillet 2022, moyennant un loyer fixé à la somme annuelle en principal hors charges et taxes de 56 000 euros, le transfert de la charge de la taxe foncière au preneur et la substitution du forfait de charges par une facturation en considération des charges réelles.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception (LRAR) du 14 juillet 2022 faisant suite au congé délivré, la MATMUT a donné à la SCI [Adresse 9] son accord sur le principe du renouvellement offert, mais a refusé le montant du loyer proposé.

Par LRAR en date du 26 décembre 2023, la SCI [Adresse 9] a notifié un mémoire préalable en demande aux termes duquel elle a sollicité la fixation du loyer à la somme de 56 000 euros par an HT et HC à effet du 1er juillet 2022, sur le fondement de l’article L.145-34 avant dernier alinéa du code de commerce compte tenu de la durée du bail expiré supérieure à 12 ans révolus.

Par acte signifié le 11 mars 2024, la SCI [Adresse 9] a assigné la MATMUT devant le juge des loyers du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand aux termes duquel elle a maintenu sa demande tendant à la fixation du loyer à compter rétroactivement du 1er juillet 2022 à la somme de 56 000 euros par an HT et HC.

Par mémoire déposé au greffe par RPVA le 28 novembre 2024, la SCI [Adresse 9] demande, au visa des dispositions des articles L.145-33 et suivants du code de commerce, de :
– fixer le montant du loyer annuel des locaux loués à la société MATMUT à la somme de 56 000 euros HT et HC, et ce à compter rétroactivement du 1er juillet 2022 ;
– condamner la société MATMUT à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;
– à titre subsidiaire, dans le cas où le juge des loyers commerciaux s’estimerait insuffisamment informé pour statuer sur le montant du loyer des locaux ci-dessus à compter du 1er juillet 2022 et accéderait à la demande d’expertise sollicitée par la société MATMUT, dire que cette mesure sera faite aux frais avancés de la société preneuse, qui l’a sollicitée à titre subsidiaire ;
– fixer le montant du loyer provisionnel à la somme actuellement versée par la MATMUT soit 46 229,76 euros HT et HC par an.

Par mémoire déposé au greffe le 2 décembre 2024, la société Mutuelle Assurance des Travailleurs Mutualiste – MATMUT demande au juge des loyers commerciaux de :
à titre principal :- fixer le loyer de renouvellement au 1er juillet 2022 à la somme annuelle en principal de 25 500 euros HT et HC ;
– dans cette hypothèse, juger que les intérêts sur les trop-perçus de loyer ont couru à compter du 1er juillet 2022 par application de l’article 1231-6 du code civil ;
– ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière selon la règle de l’anatocisme par application de l’article 1343-2 du code civil ;
– juger qu’à défaut d’exercice par les parties de leur droit d’option prévu par l’article L.145-57 du code de commerce et qu’à défaut d’appel, la décision à intervenir constituera un titre exécutoire conforme aux dispositions des articles L.111-2, L.111-3 et L. 111-6 du code des procédures civiles d’exécution ;
à défaut :- désigner par application de l’article R.145-30 du code de commerce, un expert avec pour mission de rechercher la valeur locative des lieux loués au 1er juillet 2022 ;
– fixer le montant du loyer provisionnel à la somme annuelle en principal de 25 500 euros HT HC, et à défaut, à la somme de 56 000 euros, et à défaut encore au montant du loyer en cours ;
à titre subsidiaire, si le juge des loyers commerciaux fixait le loyer de renouvellement à une somme annuelle en principal, supérieure à 56 000 euros :- juger que ce loyer ne pourrait prendre effet qu’à compter du 27 septembre 2024, et non à compter du 1er juillet 2022 ;
en tout état de cause :- débouter la SCI [Adresse 9] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions;
– condamner la SCI [Adresse 9] à payer à la MATMUT une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les entiers dépens, en ce compris les frais afférents à l’éventuelle mesure d’expertise.

Il sera renvoyé pour l’exposé complet des demandes et moyens des parties à leurs derniers mémoires.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des loyers commerciaux, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire,
en premier ressort,

Constate que le bail commercial liant la SCI [Adresse 9] à la MATMUT portant sur les locaux à usage commercial dépendant d’un immeuble sis [Adresse 3], a été renouvelé à compter du 1er juillet 2022;

Pour le surplus, avant dire droit au fond, tous droits et moyens des parties demeurant réservés à cet égard, ordonne une mesure d’expertise d’estimation de la valeur locative des locaux commerciaux susmentionnés ;

Désigne pour y procéder :

Mme [Y] [S]
[Adresse 11]”
[Adresse 11]
Tél : [XXXXXXXX01]
Port. : [XXXXXXXX02] Mèl : [Courriel 8]

expert en estimation de biens et de loyers commerciaux près la cour d’appel de Riom, avec pour mission de :

– effectuer préalablement une visite ou plusieurs visites des lieux litigieux, en la présence contradictoire des parties et de leurs conseils juridiques ou techniques ou ceux-ci ayant été dûment convoqués ;
– examiner l’ensemble des pièces produites par les parties ou leurs conseils, notamment les rapports d’expertises précédents, ;
– entendre contradictoirement les parties et leurs conseils en leurs dires et explications ;
– effectuer d’initiative et d’office toutes investigations, diligences ou vérifications lui paraissant utiles à l’échange contradictoire entre les parties et à la solution du litige ;
– procéder à l’examen des faits qu’allèguent les parties ;
– rechercher la valeur locative des lieux loués à la date du 1er juillet 2022, au regard :
– des caractéristiques des locaux,
– de la destination du bail,
– des obligations respectives des parties,
– des facteurs locaux de commercialité,
– des prix pratiqués dans le voisinage, en retenant tant les valeurs de marché que les valeurs fixées judiciairement et les renouvellements amiables, en application des dispositions des articles L.145-33 et R.145-3 à R.145-8 du code de commerce ;
– rendre compte du tout et donner son avis motivé ;
– dresser un rapport de ses constatations et conclusions ;

Autorise l’expert :
– à s’adjoindre tout technicien de son choix dans une spécialité autre que la sienne;
– à se faire assister dans l’accomplissement de sa mission par la personne de son choix qui intervient sous son contrôle et sa responsabilité ;

Dit que l’expert commis pourra sur simple présentation de la présente ordonnance requérir la communication, soit par les parties, soit par des tiers de tous documents relatifs à cette affaire;

Dit que l’expert commis, saisi par le greffe, devra accomplir sa mission en présence des parties ou elles dûment convoquées, les entendre en leurs dires et explications, en leur impartissant un délai de rigueur pour déposer leurs dires écrits et fournir leurs pièces justificatives ;

Dit qu’en application de l’article 38 du décret n° 2005-1678 du 28 décembre 2005, les dernières observations ou réclamations des parties doivent rappeler sommairement le contenu de celles qu’elles ont présentées antérieurement ; qu’à défaut, elles sont réputées abandonnées par elles ;

Dit que l’expert judiciaire commis devra communiquer aux parties et à leur conseil respectif un PRÉ-RAPPORT D’EXPERTISE contenant l’ensemble de ses appréciations littérales et chiffrées, ainsi que l’ensemble de ses conclusions, au moins un mois avant la date de dépôt du rapport d’expertise ;

Dit que l’expert devra déposer le rapport de ses opérations avant le 30 septembre 2025 date de rigueur, sauf prorogation des opérations dûment autorisée par le juge sur demande de l’expert ;

Dit que la MATMUT fera l’avance des frais d’expertise et devra consigner au greffe une provision de la somme de deux mille euros (
2 000 € T.T.C) avant le 28 février 2025 ;

Dit qu’à défaut de consignation dans le délai et selon les modalités imparties, la désignation de l’expert sera CADUQUE à moins que le juge, à la demande d’une des parties se prévalant d’un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de la caducité ;

Dit qu’en cas de demande de consignation complémentaire, l’expert devra en aviser les parties dans les meilleurs délais dans la mesure du possible dès la première réunion d’expertise et sur la base d’un devis estimatif et chiffré, et qu’il devra par ailleurs nous justifier avoir lui-même préalablement circularisé cette demande de provision supplémentaire auprès des parties et de leurs conseils ;

Dit qu’il appartiendra à l’expert de suspendre ses opérations tant qu’il n’aura pas été avisé du versement effectif de ce complément.;

Désigne le juge en charge des expertises pour effectuer le contrôle de l’expertise;

Fixe le loyer provisionnel pour la durée de l’instance à la somme correspondant au montant du loyer contractuel en principal, outre les charges ;

Dit qu’il convient de surseoir à statuer sur les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Rejette le surplus des demandes;

Réserve les dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

 


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