Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6 mai 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6 mai 2024

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : La contrefaçon de marque par enseigne : l’affaire Big Smash

Résumé

L’affaire Big Smash illustre la problématique de la contrefaçon de marque par enseigne. La S.A.R.L. BIG SMASH a été assignée en justice pour avoir utilisé une enseigne et une dénomination sociale contenant des marques déposées par des tiers. Malgré l’absence d’autorisation, elle a continué à exploiter ces marques après l’expiration d’un contrat de licence. Le tribunal a ordonné la cessation de l’utilisation des marques, la modification de la dénomination sociale et la destruction des supports portant ces marques, tout en condamnant la S.A.R.L. BIG SMASH à verser des dommages-intérêts aux demandeurs pour préjudice subi.

Avant d’apposer une enseigne ou d’exploiter une dénomination sociale attention à vérifier l’existence d’une antériorité.

En la cause, il ressort d’un procès-verbal de constat dressé par commissaire de justice que le point de vente de restauration rapide de la S.A.R.L. BIG SMASH comporte une enseigne BIG SMASH déposée antérieurement au titre du droit des marques par un tiers. La S.A.R.L. BIG SMASH a inséré la marque dans sa dénomination sociale et l’utilise pour identifier son point de vente par l’enseigne et sur les plates-formes de livraison de repas. Elle ne justifie pas de l’autorisation des titulaires et de l’exploitant des marques.

La contrefaçon par reproduction des marques était donc établie.

Pour rappel, selon l’article L. 716-6-4 du code de la propriété intellectuelle :

“Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon.

Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente.

La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d’un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux.”

Résumé de l’affaire : Monsieur [I] [X], Monsieur [O] [D], et la S.A.S. SMASH N SHAKE ont assigné la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux le 6 mai 2024. Ils demandent l’interdiction de l’utilisation et de la reproduction des marques Big Smash n°4 790 396 et BIG SMASH n°4 796 964 par la S.A.R.L. BIG SMASH, ainsi que la cessation de l’utilisation de l’enseigne et la modification de sa dénomination sociale. Ils réclament également la suppression de tout nom de domaine et de toute appellation incluant ces marques, le retrait et la destruction de divers supports utilisés dans le point de vente, ainsi que des dommages-intérêts pour contrefaçon. Les demandeurs affirment être titulaires des marques et que la S.A.R.L. BIG SMASH a continué à les exploiter sans droit après l’expiration d’un contrat de licence. La S.A.R.L. BIG SMASH n’a pas constitué avocat malgré une assignation régulière.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

7 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Bordeaux
RG n°
24/01156
TRIBUNAL JUDICIAIRE

DE BORDEAUX

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

3CB

Minute n° 24/775

N° RG 24/01156 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZB56

2 copies

GROSSE délivrée
le 07/10/2024
à la SELARL ALPHA CONSEILS

Rendue le SEPT OCTOBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

Après débats à l’audience publique du 02 septembre 2024

Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Par Eric RUELLE, Président du tribunal judiciaire de BORDEAUX, assisté de Karine PAPPAKOSTAS, Greffière.

DEMANDEURS

Monsieur [I] [X]
[Adresse 5]
[Localité 3]
représenté par Maître Benjamin ECHALIER de la SELARL ALPHA CONSEILS, avocats au barreau de BORDEAUX

Monsieur [O] [D]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Maître Benjamin ECHALIER de la SELARL ALPHA CONSEILS, avocats au barreau de BORDEAUX

S.A.S. SMASH N SHAKE, prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Benjamin ECHALIER de la SELARL ALPHA CONSEILS, avocats au barreau de BORDEAUX

DÉFENDERESSE

S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7], prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 7]
défaillante

I – FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES

Par acte du 6 mai 2024, auquel il convient de se référer pour l’exposé de leurs moyens, Monsieur [I] [X], Monsieur [O] [D], et la S.A.S. SMASH N SHAKE ont assigné la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, afin, au visa des articles L.713-2, L 713-3-1, L716-4, L.716-4-2-et suivants du Code de la propriété intellectuelle, de voir :

– enjoíndre à LA S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] de cesser toute utilisation et reproduction de la marque française Big Smash n°4 790 396 et de la marque française BIG SMASH n°4 796 964 sur tous supports notamment commercial, publicitaire et sur le réseau Internet dès la signification de la décision à intervenir et ce, sous astreinte de 500 €uros par jour de retard passé un délai de huit jours,

– enjoindre à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] de procéder à la dépose de l’enseigne reproduisant la marque BIG SMASH telle qu’apposée sur le point de vente situé à [Adresse 8], sous astreinte de 500 €uros par jour de retard passé un délai de huit jours,

– enjoindre à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] de modifier sa dénomination sociale pour supprimer tout mention des marques Big Smash n°4 790 396 et BIG SMASH n°4 796 964 sous astreinte de 500 €uros par jour de retard passé un délai de huit jours,

– enjoindre à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] de modifier, et/ou supprimer tout nom de domaine, toute appellation, toute dénomination incluant les marques Big Smash n°4 790 396 et BIG SMASH n°4 796 964 identifiant la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] sur le réseau Internet, sur les plates-formes de livraison tels que Uber Eats et Deliveroo, sans que cette liste soit limitative, et sur les réseaux sociaux, sous astreinte de 500 €uros par jour de retard passé un délai de huit jours,

– enjoindre à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] de retirer des réseaux commerciaux, et de détruire à ses frais, devant commissaire de justice, tout menu, emballage, conditionnement, linge de table, serviette de table jetable, uniformes, produits dérivés utilisés pour les besoins de l’exploitation du point de vente de restauration litigieux, sous astreinte de 500 €uros par jour de retard passé un délai de huit jours,

– condamner la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] à verser à Monsieur [X] et Monsieur [D] chacun la somme de 5.000 €uros à parfaire par provision à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi au titre des actes de contrefaçon des marques Big Smash et BIG SMASH,

– condamner la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] à verser à la société SMASH N SHAKE la somme de 30.000 €uros à parfaire par provision à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi au titre des actes de contrefaçon, des marques Big Smash et BIG SMASH,

– se réserver le pouvoir de liquider l’astreinte,

– condanmer la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] à payer à chacun des demandeurs une somme de 2000 €uros sur le fondement de l’article 700 du Code procédure civile, et aux entiers dépens.

Ils exposent qu’ils sont titulaires et exploitant en ce qui concerne la S.A.S. SMASH N SHAKE des marques Big Smash n°4 790 396 et BIG SMASH n°4 796 964, que la société SMASH N SHAKE, titulaire d’un contrat de licence, a consenti à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7], à titre gratuit et exceptionnel, la formation nécessaire au sein de son point de vente et le droit d’exploitation des marques sous l’enseigne BIG SMASH pendant une durée d’un an, période au terme de laquelle les parties devaient signer un contrat de licence de marque, mais que le contrat de licence n’a pas été signé à l’issue de la période convenue, la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7], continuant cependant d’exploiter en violation des droits de propriété intellectuelle le point de vente de [Localité 7] sous l’enseigne et la marque, sans aucun droit ni titre depuis le 1er septembre 2023, ce qui est constitutif d’actes de contrefaçon.

Bien que régulièrement assignée par acte remis à une personne habilitée à le recevoir, la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] n’a pas constitué avocat. La procédure est régulière et elle a disposé d’un délai suffisant pour préparer sa défense. Il sera statué par décision réputée contradictoire.

II – MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article L. 716-6-4 du code de la propriété intellectuelle :

“Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l’encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d’actes argués de contrefaçon. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu’il est porté atteinte à ses droits ou qu’une telle atteinte est imminente.
La juridiction peut interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, la subordonner à la constitution de garanties destinées à assurer l’indemnisation éventuelle du demandeur ou ordonner la saisie ou la remise entre les mains d’un tiers des produits soupçonnés de porter atteinte aux droits conférés par le titre, pour empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux.”

Monsieur [X] a déposé le 3 août août 2021 la marque verbale “Big Smash” afin de désigner des produits et services en classe 16 et 43 et notamment services de restauration et de bar, marque enregistrée le 10 décembre 2021.
Monsieur [D] a déposé le 3 septembre 2021 la marque figurative “BIG SMASH” dans les mêmes classes de produits, marque enregistrée le 25 février 2022.
La société SMASH N SHAKE exploite ces marques selon contrats de licence en date du 1er mai 2024.

Il ressort d’un procès-verbal de constat dressé par commissaire de justice le 20 février 2024 que le point de vente de restauration rapide de la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] situé à [Localité 7] [Adresse 1], comporte une enseigne BIG SMASH.
La S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] a inséré la marque dans sa dénomination sociale et l’utilise pour identifier son point de vente par l’enseigne et sur les plates-formes de livraison de repas.
Elle ne justifie pas de l’autorisation des titulaires et de l’exploitant des marques.
La contrefaçon par reproduction des marques est établie.

L’utilisation des termes “Big Smash” et “BIG SMASH” doit être interdite, selon les modalités précisées au dispositif.

Le préjudice subi par les demandeurs n’est pas sérieusement contestable.

L’atteinte aux droits à la marque de Monsieur [X] et Monsieur [D] sera réparé par l’allocation à chacun d’une somme provisionnelle de 3.000 €uros.

La société SMASH N SHAKE se voit privée de la rémunération attendue au titre des investissements de présentation et de promotion du réseau en l’absence de signature d’un contrat de licence, préjudice qui sera réparé par l’allocation d’une somme provisionnelle de 10.000 €uros.

Il y a lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile à hauteur de de 2000 €uros .

III – DÉCISION

Le Juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, statuant par décision réputée contradictoire, prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, et à charge d’appel;

Fait injonction à la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] :

– de cesser toute utilisation et reproduction de la marque française Big Smash n°4 790 396 et de la marque française BIG SMASH n°4 796 964 sur tous supports notamment commercial, publicitaire et sur le réseau Internet,

– de procéder à la dépose de l’enseigne reproduisant la marque BIG SMASH telle qu’apposée sur le point de vente situé à [Adresse 8],

– de modifier sa dénomination sociale pour supprimer tout mention des marques Big Smash n°4 790 396 et de la marque française BIG SMASH n°4 796 964,

– de modifier, et/ou supprimer tout nom de domaine, toute appellation, toute dénomination incluant les marques Big Smash n°4 790 396 et BIG SMASH n°4 796 964 permettant d’identifier la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] sur le réseau Internet, sur toutes plates-formes de livraison, et sur les réseaux sociaux,

– de retirer des réseaux commerciaux, et de détruire à ses frais, devant commissaire de justice, tout menu, emballage, conditionnement, linge de table, serviette de table jetable, uniformes, produits dérivés utilisés pour les besoins de l’exploitation du point de vente de restauration litigieux.

Dit que, faute de satisfaire à cette injonction, il courra contre la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] une astreinte provisoire de 500 €uros par jour de retard ou par infraction constatée, passé un délai de huit jours après signification de la présente décision.

Dit que l’astreinte courra pendant un délai de trois mois, passé lequel il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir à nouveau la juridiction compétente ;

Dit n’y avoir lieu de réserver au juge des référés la liquidation de l’astreinte ;

Condamne la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] à payer à Monsieur [X] et Monsieur [D] la somme provisionnelle de 3.000 €uros chacun à valoir sur la réparation de leur prèjudice.

La condamne à payer à la société SMASH N SHAKE la somme provisionnelle de 10.000 €uros à valoir sur la réparation de son préjudice.

Condamne la S.A.R.L. BIG SMASH [Localité 7] aux dépens et à payer aux demandeurs la somme de 2.000 €uros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

La présente décision a été signée par Eric RUELLE, Président, et par Karine PAPPAKOSTAS, Greffière.

Le Greffier, Le Président,

 

 


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