Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6 janvier 2025, RG n° 22/05856
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 6 janvier 2025, RG n° 22/05856

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Responsabilité et prescription dans le recouvrement des créances subrogatoires

Résumé

Accident et Contamination

Le 7 janvier 1986, Mme [Y] [V] a subi des blessures dans un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré par la SA AXA FRANCE IARD. Lors de son hospitalisation, elle a reçu une transfusion sanguine, et en 1991, elle a été diagnostiquée avec une hépatite C, qui a évolué vers une cirrhose.

Expertise et Décès

Un rapport d’expertise du professeur [S], rendu le 28 septembre 2007, a établi une forte probabilité de contamination par transfusion. Mme [Y] [V] est décédée le 6 novembre 2007, ce qui a conduit ses ayants droit à assigner l’Etablissement Français du Sang (EFS) et la CPAM de la Gironde devant le tribunal de grande instance de Bordeaux pour obtenir réparation.

Jugement du Tribunal

Le 13 octobre 2010, le tribunal a déclaré l’EFS responsable de la contamination et a condamné l’ONIAM à indemniser les ayants droit de Mme [Y] [V] pour un total de 139.947,50 € pour les préjudices subis avant son décès, ainsi que d’autres sommes pour son époux et ses enfants. L’EFS a également été condamné à rembourser la CPAM de la Gironde.

Appel et Confirmation

Le 30 mai 2012, la cour d’appel de Bordeaux a confirmé le jugement, modifiant toutefois le montant des indemnités dues à Mme [Y] [V] et à ses ayants droit. L’ONIAM a été condamné à payer des sommes supplémentaires et à supporter les dépens de première instance.

Titre Exécutoire et Contestation

Le 17 mai 2022, l’ONIAM a émis un titre exécutoire pour 120.567,29 €, correspondant à 30% des condamnations. La SA AXA FRANCE IARD a contesté ce titre, demandant son annulation et arguant de la prescription de l’exécution de l’arrêt de la cour d’appel.

Arguments des Parties

La SA AXA FRANCE IARD a soutenu que l’ONIAM avait dépassé le délai de 10 ans pour exécuter l’arrêt, tandis que l’ONIAM a affirmé que l’émission du titre avait interrompu la prescription. Les deux parties ont présenté des arguments sur la légalité et le quantum du titre.

Décision du Tribunal

Le tribunal a jugé que l’ONIAM était fondé à émettre le titre exécutoire et a rejeté la demande d’annulation. Cependant, il a réduit le montant dû à 78.638,38 € en raison d’une contestation sur les intérêts de retard. La SA AXA FRANCE IARD a été condamnée à payer des intérêts de retard et aux dépens.

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 06 Janvier 2025
66B

RG n° N° RG 22/05856 – N° Portalis DBX6-W-B7G-W4YJ

Minute n°

AFFAIRE :

S.A. AXA FRANCE IARD
C/
OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BIROT – RAVAUT ET ASSOCIES
la SELARL RACINE BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Lors des débats et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
statuant en juge unique.
Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition.

DÉBATS :

à l’audience publique du 04 Novembre 2024

JUGEMENT :

Contradictoire
en premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDERESSE

S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son responsable légal domicilié es qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 1]

représentée par Maître Annie BERLAND de la SELARL RACINE BORDEAUX, avocats au barreau de BORDEAUX

DEFENDERESSE

OFFICE NATIONAL D’INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX pris en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualité audit siège
[Adresse 4]
[Localité 2]

représentée par Maître Pierre RAVAUT de la SELARL BIROT – RAVAUT ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 7 janvier 1986, Mme [Y] [V] a été blessée dans un accident de la circulation impliquant un véhicule automobile assuré auprès de la SA AXA FRANCE IARD. Elle a été hospitalisée et a reçu une transfusion sanguine lors de sa prise en charge. En 1991, il lui a été diagnostiqué une hépatite C qui s’est rapidement transformée en cirrhose.

Le professeur [S], désigné expert par le tribunal administratif de Bordeaux, a conclu dans un rapport du 28 septembre 2007 qu’il existait une très forte probabilité de contamination par transfusion.

Mme [Y] [V] est décédée le 6 novembre 2007. Ses ayants droit ont assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux l’Etablissement Français du Sang (l’EFS) et la CPAM de la Gironde afin d’obtenir la liquidation de leur préjudice. L’ONIAM est intervenue volontairement à la procédure.

Par jugement du 13 octobre 2010, le tribunal a notamment :
– déclaré l’EFS Aquitaine Limousin responsable de la contamination de Mme [Y] [V] par le virus de l’hépatite C
– constaté que par application de l’article 67 de la loi du 17 décembre 2008 et depuis le 1er juin 2010, l’ONIAM se substitue à l’EFS pour indemniser les victimes dans les procédures en cours
– condamné L’ONIAM au paiement des sommes suivantes :
– 139.947,50 € au titre des préjudices subis par Mme [Y] [V] avant son décès
– 40.000 € à l’époux de la victime
– 15.000 € à chacun des enfants de la victime
– 5.000 € à chacun des petits-enfants de la victime
– 2.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné l’EFS à payer à la CPAM de la Gironde la somme de 45.826,35 € au titre des prestations versées pour le compte de son assurée sociale et 955 € au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion et 300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné la SA AXA FRANCE IARD à relever l’ONIAM et l’EFS Aquitain Limousin à hauteur de 30% des condamnations prononcées par le jugement.

Par arrêt du 30 mai 2012, la cour d’appel de Bordeaux a :
– confirmé le jugement entrepris sauf en ce qu’il a
*fixé le préjudice de Mme [Y] [V] avant décès à la somme de 139.947,50 euros et, statuant de nouveau, condamné l’ONIAM au versement de la somme de 100.267,50 € ;
* condamné l’EFS à payer à la CPAM de la Gironde les sommes de 45.826,35 € au titre des prestations versées à son assurée sociale, outre 955 € au titre de l’indemnité forfaitaire de gestion et 300 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et, statuant de nouveau, condamné l’ONIAM au versement de ces sommes
– dit que la charge des dépens de première instance sera supportée par l’ONIAM
– condamné l’ONIAM à payer aux consorts [V] une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné l’ONIAM aux dépens d’appel.

L’ONIAM s’est acquitté de ces condamnations pour un montant total de 262.127,92 € le 14 août 2012.

Le 17 mai 2022, il a émis un titre exécutoire n°2022-640 pour un montant de 120.567,29 euros, correspondant à 30% des condamnations dont il s’est acquitté outre les intérêts de retard, titre qui a été notifié à la SA AXA FRANCE IARD le 10 juin 2022.

Par acte d’huissier délivré le 5 août 2022, la SA AXA FRANCE IARD a fait assigner l’ONIAM devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour voir prononcer l’annulation du titre de recettes.

Par conclusions responsives notifiées par voie électronique le 27 février 2024, la SA AXA FRANCE IARD demande au tribunal de :
Vu les articles 504 du CPC et L111- 3 et L111-4 du CPCE
– juger que le titre de recettes n°2022-640 est entaché d’illégalité,
– juger que l’ONIAM est prescrite à poursuivre l’exécution de l’arrêt du 30 mai 2012.
– prononcer l’annulation du titre de recettes n°2022-640,
– débouter l’ONIAM de toutes demandes à l’encontre de la compagnie AXA France.
– condamner l’ONIAM à verser aux requérants la somme de 2500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

En défense, dans ses conclusions n°2 notifiées par voie électronique le 12 février 2024, l’ONIAM demande au tribunal de :
A TITRE PRINCIPAL :
– Débouter la compagnie AXA FRANCE IARD de l’ensemble de ses demandes d’annulation du titre n° 2022-640.
– Constater que l’ONIAM est compétent pour émettre des titres exécutoires en recouvrement de ses créances subrogatoires.
– Constater le bien-fondé de la créance de l’ONIAM objet du titre n° 2022-640.
– Constater la régularité formelle du titre n° 2022-640 émis par l’ONIAM.
Par conséquent,
– Juger que l’ONIAM est parfaitement fondé à solliciter la somme de 83.930,02 € au titre
des indemnités versées par l’ONIAM aux Consorts [V].
A TITRE SUBSIDIAIRE :
– Condamner la compagnie AXA FRANCE IARD au paiement de la somme de 83.930,02 € au titre des indemnités versées par l’ONIAM aux Consorts [V]
EN TOUTE HYPOTHESE :
– Condamner à titre reconventionnel la compagnie AXA FRANCE IARD aux intérêts au taux légal à compter du 5 août 2022 avec capitalisation de ces intérêts à compter du 6 août 2023.
– Condamner la compagnie AXA FRANCE IARD au paiement d’une indemnité de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 juin 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 4 novembre 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour.

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Dit n’y avoir lieu à annulation de l’ordre à recouvrer exécutoire émis par l’ONIAM en exécution du jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 13 octobre 2010 et de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 17 mai 2022 ;

Ramène le montant des sommes dues par la SA AXA FRANCE IARD à la somme de 78.638,38 euros ;

Condamne la SA AXA FRANCE IARD à payer à l’ONIAM des intérêts de retard au taux légal sur la somme de 78.638,38 € à compter du 5 août 2022 avec capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l’article 1343-2 du code civil ;

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA AXA FRANCE IARD aux dépens.

Ainsi fait et jugé les an, mois et jour susdits.

Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon