Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5 février 2025, RG n° 23/01638
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 5 février 2025, RG n° 23/01638

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Responsabilité médicale et préjudice corporel : enjeux d’information et de technique chirurgicale

Résumé

Résumé des faits de l’affaire

Le 06 janvier 2017, une victime a subi un traumatisme au genou droit lors d’un match de football, entraînant une rupture complète du ligament croisé antérieur. Suite à cet incident, une intervention chirurgicale a été réalisée le 23 janvier 2017 par un médecin, consistant en une ligamentoplastie arthroscopique. Cependant, une reprise chirurgicale a été nécessaire le 25 janvier 2017 en raison d’une défaillance de la fixation fémorale.

Malgré ces interventions, la victime a continué à ressentir des douleurs persistantes, ce qui a conduit à des examens supplémentaires et à une nouvelle opération le 24 juillet 2018 pour traiter les séquelles. Face à la persistance de ses problèmes de santé, la victime a saisi le tribunal judiciaire de Bordeaux pour demander une expertise médicale.

Procédure judiciaire et demandes d’indemnisation

Le tribunal a ordonné une expertise médicale, dont le rapport a été déposé le 24 janvier 2022. En février 2023, la victime a assigné le médecin responsable de l’intervention pour obtenir une indemnisation de divers préjudices, incluant des pertes de gains professionnels, des souffrances endurées et des préjudices esthétiques. Le médecin a contesté ces demandes, demandant à son tour une condamnation pour procédure abusive.

Arguments des parties

La victime a soutenu que le médecin avait manqué à son devoir d’information concernant les risques de l’intervention chirurgicale, ce qui aurait pu l’amener à refuser l’opération. De plus, elle a invoqué une faute technique dans la réalisation de la chirurgie. En revanche, le médecin a affirmé avoir correctement informé la victime et a contesté toute responsabilité, arguant que la complexité de l’intervention justifiait les choix techniques effectués.

Décision du tribunal

Le tribunal a débouté la victime de sa demande d’indemnisation, concluant qu’il n’y avait pas de preuve d’un manquement fautif de la part du médecin. La demande de réparation pour procédure abusive a également été rejetée. En conséquence, la victime a été condamnée à verser des dépens au médecin, ainsi qu’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire de la décision a été maintenue.

6EME CHAMBRE CIVILE
SUR LE FOND

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 05 Février 2025
58G

RG n° N° RG 23/01638 – N° Portalis DBX6-W-B7H-XRFP

Minute n°

AFFAIRE :

[J] [Y]
C/
[H] [L], Caisse CPAM DE LA GIRONDE, S.A. AXA FRANCE VIE

Grosse Délivrée
le :
à Avocats : la SCP BAYLE – JOLY
Me Charlotte BOUYER

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Lors des débats en juge rapporteur :

Madame Louise LAGOUTTE, Vice-Président,
Madame Fanny CALES, juge,

Lors du délibéré et de la mise à disposition :

Madame Louise LAGOUTTE, Vice-Président,
Madame Fanny CALES, juge,
Madame Marie-Sylvie LHOMER, magistrat à titre temporaire,

greffier présente lors des débats et de la mise à disposition : Madame Elisabeth LAPORTE,

DEBATS :

A l’audience publique du 04 Décembre 2024,

JUGEMENT:

Réputé contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe

DEMANDEUR

Monsieur [J] [Y]
né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté par Me Charlotte BOUYER, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEURS

Monsieur [H] [L]
de nationalité Française
[Adresse 2]
[Localité 9]
représenté par Maître Paola JOLY de la SCP BAYLE – JOLY, avocats au barreau de BORDEAUX

CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur en exercice domicilié es qualités audit siège
[Adresse 11]
[Localité 4]

défaillant

S.A. AXA FRANCE VIE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]

défaillant

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 06 janvier 2017, Monsieur [Y] a été victime d’un traumatisme au genou droit lors d’un match de football.
Les examens réalisés postérieurement ont mis en évidence une rupture complète du ligament croisé antérieur.

Le 23 janvier 2017, il a bénéficié d’une intervention de ligamentoplastie arthroscopique avec reconstruction du ligament croisé antérieur et du poplité par technique de Laprade, réalisée par le Docteur [L] au sein de la Clinique du sport à [Localité 9].

Une reprise chirurgicale a été réalisée le 25 janvier 2017 en raison d’une faillite précoce de la fixation fémorale de la ligamentoplastie.

En raison d’une gêne persistante et douloureuse du genou droit, un arthroscanner a été réalisé le 24 mai 2017. Il a été hospitalisé le 22 juin 2017 à la Clinique du sport pour une intervention le même jour pour ablation du matériel.

Le 25 janvier 2018, une IRM a été réalisée, suggérant une nouvelle rupture du ligament croisé antérieur.

Le 24 juillet 2018, il a été de nouveau opéré aux fins de réalisation d’une plastie du ligament croisé antérieur de type Macintosh associée à une plastie complémentaire du point d’angle postérolatéral et à une plastie de reconstruction du ligament collatéral de type Werner Muller, réalisée au Centre Hospitalier de [Localité 8].

Invoquant des séquelles persistantes au niveau de son genou malgré la dernière intervention, il a saisi le juge des référés près le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins d’expertise.

Par ordonnance en date du 21 juin 2021, le Tribunal judiciaire de Bordeaux statuant en référé a ordonné une mesure d’expertise médicale de Monsieur [Y] confiée au Dr [X].

Le 24 janvier 2022, l’expert judiciaire a déposé son rapport d’expertise définitif.
Monsieur [Y] a, par actes délivrés les 21, 22 et 24 février 2023, fait assigner devant le présent tribunal le Docteur [L] pour voir indemniser son préjudice ainsi que, en qualité de tiers payeurs, la CPAM de la Gironde et la S.A. AXA FRANCE VIE.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 11 juin 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience du 04 décembre 2024 au cours de laquelle elle a été retenue puis mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date de ce jour, les parties en ayant été informées selon les modalités de l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

PRETENTIONS DES PARTIES

Par conclusions responsives et récapitulatives notifiées par voie électronique le 23 octobre 2023, Monsieur [Y] demande au tribunal de :
– déclarer le Docteur [L] responsable sur le fondement de l’article L1142-1 du Code de la santé publique ;
– Condamner le Docteur [L] à indemniser Monsieur [Y] comme suit :
– Déficit fonctionnel temporaire : 7.895,25 €
– Déficit fonctionnel permanent : 34.500 €
– Incidence professionnelle : 30.000 €
– Souffrances endurées : 8.000 €
– Préjudice sexuel : 3.000 €
– Préjudice esthétique temporaire : 1.500 €
– Préjudice esthétique permanent : 1.500 €
– Préjudice d’agrément : 15.000 €
– Assistance tierce personne temporaire : 13.177,29 €
– Frais divers : 7.743 €
– Dépenses de santé actuelles : mémoire
– Perte de gains professionnels actuelle : 28.692 €
– Préjudice d’impréparation : 5.000 €
– Dire et juger que les condamnations porteront intérêt au taux légal à compter du jugement à intervenir.
– Ordonner la capitalisation des intérêts,
– Condamner le Docteur [L] à verser à Monsieur [Y] la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
– Condamner le Docteur [L] aux entiers dépens.
– Dire n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Au terme des conclusions responsives notifiées par voie électronique le 18 mars 2024, Monsieur [L] demande au tribunal de :
– Débouter Monsieur [Y] de l’intégralité de ses demandes dirigées à son encontre,
– Condamner Monsieur [Y] à lui verser la somme de 3 000 € pour procédure abusive ,
– Condamner Monsieur [Y] à lui verser la somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner Monsieur [Y] aux entiers dépens de la procédure.
A titre subsidiaire,
– Débouter Monsieur [Y] de ses demandes formulées au titre des pertes de gains professionnels actuels, de l’incidence professionnelle, du préjudice sexuel, du préjudice d’agrément et du préjudice d’impréparation ;
– Réduire les demandes de Monsieur [Y] au titre des frais divers, de l’assistance par tierce personne temporaire, du déficit fonctionnel temporaire, du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire et du préjudice esthétique permanent à de plus justes proportions ;
– Réduire les sommes sollicitées au titre de l’article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions ;
– Débouter Monsieur [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts au taux légal ;
– Suspendre l’exécution provisoire ;
A titre infiniment subsidiaire,
– Débouter Monsieur [Y] de sa demande formulée au titre des pertes de gains professionnels actuels ;
– Réduire les demandes de Monsieur [Y] au titre de l’incidence professionnelle, du préjudice sexuel, du préjudice d’agrément, du préjudice d’impréparation, des frais divers, de l’assistance par tierce personne temporaire, du déficit fonctionnel temporaire, du déficit fonctionnel permanent, des souffrances endurées, du préjudice esthétique temporaire et du préjudice esthétique permanent à de plus justes proportions ;
– Réduire les sommes sollicitées au titre de l’article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions ;
– Débouter Monsieur [Y] de sa demande de capitalisation des intérêts au taux légal ;
– Suspendre l’exécution provisoire ;

Pour l’exposé des moyens venant au soutien de ces demandes, il est renvoyé aux conclusions écrites des parties.

La CPAM de la Gironde et la S.A. AXA FRANCE VIE n’ont pas constitué avocat. Il sera statué par jugement réputé contradictoire.

PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal,

DEBOUTE Monsieur [Y] de sa demande tendant à voir déclarer le Docteur [L] responsable et à l’indemniser du dommage résultant de l’intervention du 23 janvier 2017,

DEBOUTE Monsieur [L] de sa demande tendant à voir condamner Monsieur [Y] à lui verser lasomme de 3000 € en réparation de son préjudice moral pour procédure abusive,

CONDAMNE Monsieur [Y] à verser à Monsieur [L] la somme de 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile:

REJETTE la demande de Monsieur [Y] au titre des frais irrépétibles,

CONDAMNE Monsieur [Y] aux dépens, qui comprendront ceux de l’instance ayant donné lieu à l’ordonnance de référé du 21 juin 2021 ainsi que le coût de l’expertise judiciaire,

DIT n’y avoir lieu à écarter l’exécution provisoire de droit de la présente décision.

REJETTE les autres demandes des parties.

Le jugement a été signé par Louise LAGOUTTE, président et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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