Tribunal judiciaire de Bordeaux, 30 janvier 2025, RG n° 24/00068
Tribunal judiciaire de Bordeaux, 30 janvier 2025, RG n° 24/00068

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux

Thématique : Indemnisation liée à l’expropriation d’une parcelle en zone urbaine

Résumé

Propriétaires et Parcelle Expropriée

Monsieur [G] [I] et Madame [P] [D] épouse [I] possèdent une parcelle cadastrée section AS n°[Cadastre 7] d’une superficie de 527 m², située à [Adresse 3] dans la commune de [Localité 12].

Déclaration d’Utilité Publique

Le 24 février 2020, la préfète de la Gironde a déclaré d’utilité publique les travaux d’aménagement de la voirie « Liaison centre-ville/[Adresse 16] » sur le territoire de [Localité 12].

Arrêtés de Cessibilité

Le 6 mars 2023, un arrêté de cessibilité a été pris par le préfet de la Gironde, suivi d’un arrêté modificatif le 10 mai 2023.

Ordonnance d’Expropriation

Le 27 juillet 2023, le juge de l’expropriation de la Gironde a déclaré la parcelle expropriée au profit de [Localité 10] Métropole.

Demande d’Indemnisation

Bordeaux Métropole a saisi la juridiction de l’expropriation le 15 avril 2024 pour fixer l’indemnisation à 217 440 euros pour la dépossession du bien aux époux [I].

Transport sur les Lieux

Le transport sur les lieux a eu lieu le 3 juin 2024, en présence des époux [I], de leur conseil, ainsi que des représentants de [Localité 10] Métropole et du commissaire du gouvernement.

Audiences et Renvois

L’affaire a été fixée à l’audience du 11 juillet 2024, puis renvoyée aux 19 septembre, 28 novembre et 19 décembre 2024.

Conclusions de [Localité 10] Métropole

Dans ses conclusions du 12 novembre 2024, [Localité 10] Métropole demande de fixer l’indemnité de dépossession à 211 889 euros, de prendre en charge les démolitions et arrachages, et de rejeter toute autre demande.

Arguments sur la Date de Référence

[Localité 10] Métropole fixe la date de référence au 24 février 2017, date à laquelle le PLU est devenu opposable, et souligne que la parcelle est classée en zone UM 36 *4L30.

Montant de l’Indemnité Offerte

Elle propose un montant de 280 euros le m², fondé sur 15 termes de comparaison de biens similaires, et demande d’écarter les termes de comparaison des expropriés pour manque de pertinence.

Conclusions des Époux [I]

Les époux [I] demandent une indemnité de 602 581,90 euros, soulignant que la parcelle expropriée constitue une unité foncière avec leur maison, et qu’elle bénéficie d’un emplacement de choix.

Critique de l’Offre de [Localité 10] Métropole

Ils estiment que l’offre de [Localité 10] Métropole est fondée sur des termes de comparaison issus d’un marché captif et demandent l’écartement de ces références.

Indemnités Accessoires Demandées

Les époux [I] demandent également des indemnités pour les travaux de démolition et de replantation de végétaux, ainsi qu’une indemnité pour dépréciation du surplus.

Proposition du Commissaire du Gouvernement

Le commissaire du gouvernement propose une indemnité de 314 038 euros pour la dépossession, sans se prononcer sur les indemnités accessoires.

Fixation de l’Indemnité de Dépossession

Le juge fixe l’indemnité de dépossession à 265 608 euros, tenant compte de la consistance du bien et de sa qualification de terrain à bâtir.

Indemnités Accessoires et Remploi

L’indemnité de remploi est fixée à 27 561 euros, et les indemnités pour la reconstitution du portail, de la clôture et de la haie sont également allouées.

Rejet de la Demande de Dépréciation du Surplus

La demande d’indemnité pour dépréciation du surplus est rejetée, le juge considérant que le préjudice allégué ne résulte pas directement de l’expropriation.

Décision Finale

Le juge condamne [Localité 10] Métropole aux dépens et alloue aux époux [I] une somme de 1300 euros au titre des frais irrépétibles.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION DE LA GIRONDE

JUGEMENT FIXANT INDEMNITES D’EXPROPRIATION.

le JEUDI TRENTE JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ

N° RG 24/00068 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZAQS
NUMERO MIN: 25/00011

Nous, Madame [R] [J], Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BORDEAUX, désignée spécialement en qualité de juge de l’Expropriation par ordonnance de Madame la Première Présidente de la Cour d’appel de BORDEAUX en date du 31 août 2023, pour exercer dans le département de la Gironde les fonctions prévues aux articles L.211 et R 211-1 et suivants du Code de l’expropriation, assistée de Mme Dorine LEE-AH-NAYE, Greffier

A l’audience publique tenue le 19 Décembre 2024 les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 30 Janvier 2025, et la décision prononcée par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile

ENTRE :

[Localité 10] MÉTROPOLE
[Adresse 13]
[Localité 10]
représentée par Maître Clotilde GAUCI de la SCP COULOMBIE – GRAS – CRETIN – BECQUEVORT – ROSIER, avocats au barreau de BORDEAUX

ET

Madame [P] [D] épouse [I]
[Adresse 3]
[Localité 12]

représentée par Me Lionel BERNADOU, avocat au barreau de BORDEAUX
Monsieur [G] [I]
[Adresse 3]
[Localité 12]
représentés par Maître Lionel BERNADOU, avocat au barreau de BORDEAUX

En présence de Madame Elizabeth LAGARDE, Commissaire du Gouvernement

——————————————-
Grosse délivrée le: 30/01/2025
à : avocats
Expédition le : 30/01/2025
à : expropriant, exproprié, CG

FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [G] [I] et Madame [P] [D] épouse [I] sont propriétaires de la parcelle cadastrée section AS n°[Cadastre 7] d’une contenance de 527 m², sise [Adresse 3], sur le territoire de la commune de [Localité 12].

Par arrêté du 24 février 2020, la préfète de la Gironde a déclaré d’utilité publique au bénéfice de [Localité 10] Métropole les travaux d’aménagement de la voirie « Liaison centre-ville/[Adresse 16] », sur le territoire de la commune de [Localité 12].

Le 6 mars 2023, un arrêté de cessibilité a été pris par le préfet de la Gironde, suivi d’un arrêté modificatif du 10 mai 2023.

Par ordonnance du 27 juillet 2023, le juge de l’expropriation de la Gironde a déclaré immédiatement expropriée la parcelle précitée au profit de [Localité 10] Métropole.

Bordeaux Métropole a saisi la juridiction de l’expropriation de la Gironde en adressant un mémoire par lettre recommandée avec accusé de réception reçue au greffe le 15 avril 2024 aux fins de voir fixer l’indemnisation pour la dépossession du bien aux époux [I] à 217 440 euros.

Le transport sur les lieux fixé par ordonnance du juge de l’expropriation du 19 avril 2024 s’est déroulé le 3 juin 2024, en présence de monsieur et madame [I], de leur conseil, du conseil et des représentants de [Localité 10] Métropole et du commissaire du gouvernement.

L’affaire a été fixée à l’audience du 11 juillet 2024, renvoyée aux 19 septembre, 28 novembre et 19 décembre 2024.

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au greffe du juge de l’expropriation le 12 novembre 2024, [Localité 10] Métropole demande au juge de l’expropriation de :
-fixer à la somme de 211 889 euros les indemnités de dépossession, toutes causes confondues, pour un bien libre de toute occupation,
-dire que [Localité 10] Métropole prendra en charge les démolitions et arrachages ainsi que les éventuels déplacements de compteurs,
-rejeter toute autre demande,
-statuer ce que de droit sur les dépens.

Concernant la date de référence, [Localité 10] Métropole souligne que la parcelle est classée en zone UM 36 *4L30 ; elle est située dans le périmètre du droit de préemption urbain et grevée d’un emplacement réservé Voirie Tertiaire T413 visant à la création d’une voie nouvelle entre l’[Adresse 9] et la [Adresse 15]. Elle retient comme date de référence le 24 février 2017, date à laquelle le PLU de [Localité 10] Métropole délimitant cette zone, adopté le 16 décembre 2016, est devenu opposable aux tiers.
La zone UM 36 *4L30 correspond aux tissus à dominante de maisons individuelles récentes. La parcelle est desservie par les réseaux publics. [Localité 10] Métropole ne discute pas la qualification de terrain à bâtir de l’emprise.

Concernant le montant de l’indemnité offerte, elle souligne que l’article L 322-4 du code de l’expropriation prévoit que l’évaluation des terrains à bâtir tient compte des possibilités légales et effectives de construction qui existaient à la date de référence et que la juridiction de l’expropriation admet de procéder à des abattements pour encombrement des terrains par des constructions existantes, le pourcentage différant selon le taux d’encombrement du terrain. Elle souligne néanmoins que sont disponibles, dans le secteur géographique en cause, des termes de comparaison portant sur des emprises similaires (détachement de terrain) de sorte qu’il n’y a pas lieu de rechercher des termes de comparaison issus de terrains à bâtir avec application d’un abattement.
Elle fonde son offre sur 15 termes de comparaison de biens comparables correspondant à des emprises de terrain détachées pour alignement de voirie, situés dans un secteur géographique proche et classés en zonage identique, justifiant son offre à 280 euros le m².
Elle ajoute qu’en application de l’article L. 322-8 du code de l’expropriation, le juge doit tenir compte des accords intervenus entre l’expropriant et divers titulaires de droit à l’intérieur du périmètre des opérations faisant l’objet d’une DUP, même s’il n’a pas à les prendre pour base lorsque ces accords concernent moins de 2/3 des propriétaires de superficies représentant moins des 2/3 de celles concernées.
Elle ajoute que les traités d’adhésion à l’ordonnance d’expropriation constituent des accords amiables après ordonnance d’expropriation et constituent des termes de comparaison.
Concernant les termes de comparaison produits par les expropriés, [Localité 10] Metropole demande de les écarter des débats car ni les références de publication des actes ni les actes ne sont produits, empêchant toute prise de connaissance des données des cessions. Elle ajoute que les termes proposés ne sont pas similaires au bien à évaluer, soit que la parcelle est trop petite, soit qu’elle est bâtie. Si ces termes devaient être admis, il conviendrait de pratiquer un abattement de 40% pour encombrement au regard des possibilités de construction. Elle propose également d’allouer une indemnité de remploi calculée selon les modalités habituelles.
En ce qui concerne les termes de référence du commissaire du gouvernement, elle relève que sont produits 20 termes de référence de terrains à bâtir cédés à [Localité 12] ; elle constate néanmoins que l’essentiel des termes de comparaison proposés ne portent pas sur des emprises détachées pour créer une voirie. Elle ne retient que trois des termes de comparaison proposés comme pertinents, dans la fourchette basse (parcelles AY [Cadastre 2], 2156 euros le m², AX [Cadastre 5], 309 euros et AV [Cadastre 4], 250 euros).

En ce qui concerne les demandes d’indemnités accessoires, [Localité 10] Métropole constate qu’une demande est faite au titre des travaux et de l’indemnité de végétaux. Elle ne conteste pas que l’expropriation implique le déplacement du grillage, des murets, du portail, de deux arrêtoirs et d’une boîte aux lettres. Elle implique également la repise en état de la haie. ; Elle propose à cette fin une indemnité de 4554 euros pour les travaux et de 3390 euros pour les végétaux et précise que les démolitions et arrachages ainsi que les éventuels déplacements de compteurs seront pris en charge par [Localité 10] Métropole. Elle s’oppose aux sommes demandées par les époux [I] qu’elle estime excessives, rappelant que l’indemnité a pour objet de remplacer les éléments détruits à l’identique, sans amélioration. Elle ajoute avoir calculé l’indemnisation au titre des végétaux en fonction du nombre de sujets à replanter sur 25 mètres, à l’identique. Elle conteste une dépréciation du surplus, celle-ci ne pouvant être allouée que si elle est la conséquence directe de l’expropriation et que si elle présente un caractère certain. Elle souligne que si la présence d’une voie créée à la suite d’une expropriation crée des nuisances, celles-ci constituent des dommages de travaux publiques qui ne peuvent qu’être réparés par le juge administratif, non par le juge de l’expropriation. Etant actuellement une bande d’accès, l’expropriation ne prive pas la propriété d’un élément de commodité ou de sécurité, son accès étant maintenu, et l’indemnité principale répare la privation des 527 m². Elle ajoute que l’indemnité accessoire permettra de recréer un écran végétal. Elle ajoute que la maison d’habitation sera au plus proche à 17.25 m² de l’emprise publique et ne perdra pas d’intimité, d’autant que la haie existante va être reculée et que la configuration des lieux sera inchangée ; la maison d’habitation conservera son emplacement privilégié. Elle ajoute que la maison n’a pas été visitée lors du transport, empêchant d’en estimer la valeur. En tout état de cause, elle estime le taux de 10% surévalué, un pourcentage de 5% maximum pouvant être appliqué. [Localité 10] Métropole demande à ce que soit écarté le rapport de l’expert immobilier produit par les époux [I] qui se fonde sur des termes de comparaison sans produire les références ni les actes. Elle ajoute que les références retenues se situent au [Localité 11] non à [Localité 12] et que le prix moyen au m² de 5000 euros sur le secteur est surévalué.

Aux termes de leurs dernières conclusions du 9 décembre 2024, monsieur et madame [I] demandent au juge de l’expropriation de fixer l’indemnité de dépossession à la somme de 602 581,90 euros, toutes indemnités comprises, de dire que [Localité 10] Métropole prendra à sa charge les démolitions, les arrachages et les éventuels travaux de réseaux et d’électricité, de condamner l’expropriant aux dépens et à leur verser 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure pénale.
Ils soulignent que la parcelle AS [Cadastre 7] dont l’expropriation est en cours constitue une unité foncière avec la parcelle AS [Cadastre 6], sur laquelle se situe leur maison d’habitation. Ils soulignent que l’emprise expropriée bénéficie d’un emplacement de choix, pour se situer dans un quartier résidentiel et attractif, à seulement 2km du centre ville de [Localité 12], 800 mètres du lac et à 1 km de la rocade. La station de tramway [14] permet de relier le centre ville de [Localité 10] en 15 minutes, et des arrêts de bus sont accessibles à proximité. Cette emprise permet la desserte de la maison d’habitation située jusqu’à présent en seconde ligne et un important retrait par rapport à l’[Adresse 9]. Sur la date de référence, ils rejoignent l’analyse de [Localité 10] Métropole, qui la fixe au 24 février 2017. Ils exposent qu’à cette date, le terrain était un terrain à bâtir à usage de jardin d’agrément.
Concernant l’offre de [Localité 10] Métropole, ils lui reprochent d’être fondée sur des termes de comparaison issus d’un marché captif, l’ensemble des mutations étant issues de mutations contraintes réalisées par [Localité 10] Métropole et invite le juge à tenir compte du fait qu’il s’agit de valeurs basses dans un marché captif. Ils considèrent que c’est particulièrement le cas des références 14 et 15 de l’expropriant qui concernent la même opération d’expropriation et dont les indemnités ont été fixées par accord amiable par traité d’adhésion après l’ordonnance d’expropriation. Dès lors qu’elles sont largement en dessous du prix du marché, ils estiment que ces références ne doivent pas être prises en compte, en dépit de l’article L. 322-8 du code de l’expropriation, qui ne commande au juge de tenir compte de ces cessions que pour autant que les prix pratiqués sont représentatifs du prix du marché libre. Ils ajoutent que les termes de comparaison de l’expropriant ne sont pas comparables, ne se situant pas dans un secteur comparable ou trop éloigné ou portent sur des parcelles de surface non comparable. Ils ajoutent que la référence 13 doit être écartée car une promesse de vente ne vaut pas vente. Ils en déduisent que l’ensemble de ses termes de comparaison doivent être écartés. Concernant leurs propres termes de comparaison, ils retiennent des termes de comparaison provenant du site DVF qu’ils estiment pertinents ;
Ils prennent acte du fait que l’expropriant ne propose pas d’appliquer un abattement pour encombrement dans le cas où ses termes de comparaison seraient retenus, mais estiment excessif l’abattement proposé pour encombrement dans le cas où d’autres termes de comparaison seraient retenus, dès lors que la propriété supporterait une « artificialisation importante » et que les possibilités supplémentaires de construction seraient « mesurées ». Ils soulignent que ce taux serait excessif au regard de la superficie restante de 2465 m² et de l’encombrement réel du terrain de 8.68% et de la possibilité d’édifier une construction en fond de parcelle. S’il devait être retenu, l’encombrement ne pourrait être retenu à plus de 10%, non à 20% comme le suggère finalement le commissaire du gouvernement.

Concernant les indemnités accessoires, ils demandent, outre une indemnité de remploi calculée selon les modalités habituelles, une indemnité de travaux sur la base de devis produits, dès lors que l’expropriation conduira à la démolition de la clôture, du portail, des murets, de deux arrêtoirs et de la boîte aux lettres. Ils contestent la pertinence du devis produit par [Localité 10] Métropole, qui bénéficie de tarifs établis dans le cadre d’un marché public et ne sauraient servir de base pour un particulier. Ils soulignent qu’avec l’expropriation, leur maison d’habitation va se trouver en première ligne, en bordure immédiate de la nouvelle voie avec une nouvelle limite de propriété et qu’il faudra un nouveau portail et une nouvelle clôture à l’alignement. Ils insistent sur la nécessité de sécuriser et protéger leur parcelle dans ce nouveau contexte, justifiant d’avoir recours à d’autres matériaux que ceux d’origine.

En ce qui concerne l’indemnité au titre des végétaux, il soulignent que pour des raisons d’homogénéité et d’esthétique, il est nécessaire de replanter la haie non sur 25 mètres linéaires mais sur 36 mètres linéaires et que le devis produit, même si contesté par [Localité 10] Métropole quant au nombre de plants, a été établi par un professionnel, étant souligné que la nouvelle haie devra être suffisamment dense pour reconstituer une barrière végétale. Concernant l’arbre situé en fond de parcelle, ils ne demandent pas d’indemnité mais que [Localité 10] Métropole prenne en charge son arrachage.

Ils demandent une indemnité pour dépréciation du surplus, s’appuyant sur plusieurs décisions de juridictions l’expropriation et de cour d’appel qu’ils estiment similaires. Il soulignent que leur demande ne tend pas à indemniser des dommages de travaux publics engendrés par la présence de l’ouvrage mais bien à indemniser la moins value immobilière subie par leur propriété du fait du rapprochement significatif de la voie publique qui va se retrouver à moins de 15 mètres de la maison alors que celle-ci était auparavant située en second rang et de l’amputation d’une superficie de 527 m² de la surface de l’unité foncière, ce qui va diminuer le jardin d’agrément de la propriété.

Dans ses dernières conclusions du 18 septembre 2024, le commissaire du gouvernement propose de fixer à 314 038 euros l’indemnité de dépossession (indemnité principale et indemnité de remploi) et ne se prononce pas sur les indemnités de travaux et de végétaux. Il souligne que l’emprise est un terrain en forme de bande étroite encombrée d’un portail, d’un retour de clôture et en nature actuelle de terrain d’agrément d’une habitation principale. Le terrain étant situé en zone UM36, il répond aux critères des terrains à bâtir et sera traité comme terrain à bâtir encombré ; Il s’accorde avec l’expropriant concernant la date de référence à fixer au 24 février 2017. Il relève que la plupart des termes de comparaison de l’expropriant sont anciens et antérieurs à 2020. Il suggère ainsi de les écarter d’autant que les termes de comparaison postérieurs sont nombreux. Il constate également que sur les autres termes, certains concernent des parcelles de surfaces très petites, non comparables, ou très grandes, également non comparables. Il souligne que le bien à évaluer est détaché d’une unité foncière composée de 2 parcelles, dont une supporte un bâti : il considère en conséquence que le terrain doit être évalué comme un terrain à bâtir encombré de constructions, limitant son potentiel de constructibilité, ce qui justifie l’application d’un taux d’encombrement de 20%, justifié par la surface habitable de la maison, des surfaces des dépendances, des marges de recul et de la réglementation sur l’emprise bâtie fixée au PLU pour le zonage UM36. Le terme de référence 1 des expropriés est retenu par ses soins. Il écarte en revanche les deux autres termes non pertinents, dès lors que l’un porte sur une vente de maison individuelle mitoyenne et que l’acte n’a pu être retrouvé pour le 3e.
Sa recherche a donc porté sur des ventes de parcelles de terrain non bâties, sur la commune de [Localité 12], d’une superficie allant de 300 à 800 m², situées en zone UM36 ou dans un zonage approchant, dans un périmètre de un km. L’étude a porté sur des transactions entre janvier 2022 et août 2024. Il a recensé 12 termes de comparaison, aboutissant à une valeur unitaire moyenne de 670 euros, soit 540 euros le m² après abattement de 20%.

PAR CES MOTIFS

Le juge de l’expropriation statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
FIXE la date de référence au 24 février 2017,
FIXE les indemnités de dépossession revenant à monsieur et madame [I] pour l’expropriation de la parcelle cadastrée section AS n°[Cadastre 7] d’une contenance de 527 m², sise [Adresse 3], sur le territoire de la commune de [Localité 12] aux sommes suivantes :
Indemnité principale : 265 608 euros pour un bien libre d’occupation
Indemnité de remploi : 27 561 euros
indemnité au titre de la reconstitution du portail, de la clôture : 14 357 euros TTC.
indemnité au titre de la reconstitution de la haie: 5 898 euros TTC

Rejette la demande d’indemnité au titre de la dépréciation du surplus,

Donne acte aux parties de leur accord sur la prise en charge par [Localité 10] Métropole des démolitions et arrachages ainsi que des éventuels déplacements de compteurs,

Condamne [Localité 10] Métropole aux dépens,
Condamne [Localité 10] Métropole à payer à monsieur et madame [I] la somme de 1300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision a été signée par, Madame Marie WALAZYC Juge de l’Expropriation, et par Mme Dorine LEE-AH-NAYE, greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier Le Juge de l’Expropriation

 


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