Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Thématique : Urgence et consentement en soins psychiatriques : enjeux de la procédure d’admission
→ RésuméSur la régularité de la procédureLa décision d’admission de Madame [I] [G] en soins psychiatriques a été prise le 19 décembre 2024, sur la base d’un certificat médical daté du 18 décembre 2024 et d’une demande d’un tiers. Cette procédure respecte les exigences de l’article L.3212-3 du code de la santé publique, qui stipule qu’une admission en urgence peut être prononcée sur la base d’un seul certificat médical. Le certificat médical mentionne un état catatonique, une opposition aux soins et des comportements inadaptés, justifiant ainsi l’urgence de la situation. Les moyens d’irrégularité soulevés ont été rejetés. Sur le fondConformément à l’article L.3212-1 du code de la santé publique, l’hospitalisation complète de Madame [I] [G] est justifiée par l’impossibilité de son consentement en raison de ses troubles mentaux, ainsi que par la nécessité de soins immédiats. Les certificats médicaux requis ont été fournis dans les délais et contiennent les informations nécessaires. Un avis médical du 26 décembre 2024 confirme que l’état de Madame [I] [G] nécessite toujours une surveillance médicale constante, soulignant le risque de rupture thérapeutique si l’hospitalisation était levée. La décision de maintenir l’hospitalisation complète est donc justifiée pour garantir l’observance des soins et la stabilisation de son état. Par ces motifsLe tribunal a statué le 30 décembre 2024, accordant l’aide juridictionnelle provisoire à Madame [I] [G] et autorisant le maintien de son hospitalisation complète. Les moyens de nullité soulevés par son conseil ont été rejetés. La décision sera notifiée aux parties concernées, et les frais d’expertise seront pris en charge par le Trésor Public. Un appel peut être interjeté dans un délai de 10 jours suivant la notification de cette décision. |
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
N° RG 24/04100 – N° Portalis DBX6-W-B7I-Z5R6
N° Minute : 24/02441
ORDONNANCE DU 30 Décembre 2024
A l’audience publique du 30 Décembre 2024, devant Nous, Marie PESSIS, magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Bordeaux, assistée de Jennifer POUQUET,
siégeant au Centre Hospitalier Spécialisé Psychiatrique [1], dans une salle spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement et répondant aux exigences de l’article L 3211-12-2 du code de la santé publique,
DANS L’INSTANCE ENTRE :
REQUÉRANT :
M. Le directeur CENTRE HOSPITALIER [1]
régulièrement avisé, non comparant,
DÉFENDEUR :
Mme [I] [G]
née le 31 Octobre 1977
actuellement hospitalisée au Centre Hospitalier Spécialisé [1],
régulièrement convoquée,
comparante assistée de Me Manon RAVAT, avocat au barreau de BORDEAUX, avocat commis d’office,
PARTIE INTERVENANTE :
M. [S] [Y] régulièrement avisé, non comparant
MINISTÈRE PUBLIC :
Madame le Vice-Procureur de la République régulièrement avisée, non comparante,
****
Vu le code de santé publique, et notamment ses articles L. 3211-1, L. 3211-2-1, L. 3211-2-2, L. 3211-12-1, L. 3211-12-2, L. 3212-1 à L. 3212-12, R. 3211-7 à R. 3211-18, R. 3211-24 à R. 3211-26, R. 3212-1 et R. 3212-2 ;
Vu l’admission de Madame [I] [G] en hospitalisation complète, à la demande d’un tiers selon la procédure d’urgence, par décision du directeur du Centre Hospitalier Spécialisé de [1] prononcée le 19/12/2024 en application des dispositions de l’article L. 3212-3 du Code de la santé publique.
Vu la décision du directeur du Centre Hospitalier Spécialisé de [1] maintenant l’intéressée en hospitalisation complète à l’issue de la période d’observation de 3 jours instituée par les dispositions de l’article L.3211-2-2 du Code de la Santé Publique,
Vu la requête du Directeur du Centre Hospitalier Spécialisé de [1] reçue au greffe le 23/12/2024 et les pièces jointes,
Vu l’avis du Ministère public,
Vu le procès-verbal de l’audience du 30/12/2024,
Vu la comparution de Madame [I] [G] et ses explications à l’audience au terme desquelles elle sollicite la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète afin de reprendre son suivi addictologique à l’hôpital [1].
Vu les observations de son avocat qui soutient la demande de Madame [I] [G], soulevant l’irrégularité de la procédure pour les motifs suivants :
– *- le certificat médical d’admission date du 18/12/2024 à 18h alors que la décision d’admission n’a été prise que le lendemain à 18h55 ;
– *- le recours à une procédure d’urgence n’est pas justifié, le risque d’atteinte grave à l’intégrité du patient n’étant pas caractérisé dans le certificat médical d’admission ;
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la régularité de la procédure
-* Selon l’article L.3212-3 du code de la santé publique : «En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement mentionné à l’article L.3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement ».
Le texte impose que la décision du directeur d’établissement soit prise au vu de la demande d’un tiers et d’un seul certificat médical, sans toutefois imposer de chronologie entre eux. En l’espèce, Madame [I] [G] a fait l’objet d’une décision d’admission en hospitalisation complète le 19 décembre 2024 à 18h55, au vu d’un certificat médical du 18 décembre 2024 à 18h et de la demande du tiers du 19 décembre 2024 à 18h55 ; La procédure est donc conforme à l’article L3212-3 du code de la santé publique et n’a causé aucun grief à la patiente.
Par ailleurs, la Haute Autorité de Santé préconise, dans ses recommandations relatives aux hospitalisations contraintes prononcées à la demande d’un tiers et en urgence, de retenir entre autre critères un risque suicidaire, une atteinte potentielle à autrui, une prise d’alcool ou de toxiques, un délire, des troubles de l’humeur ou une incurie… Le certificat médical d’admission en date du 18/12/2024 fait clairement état chez Madame [I] [G] d’un état catatonique avec mutisme, d’une opposition aux soins, d’une instabilité psychomotrice et d’un comportement inadapté avec des éléments de persécution, de sorte que les conditions de l’urgence apparaissent dès lors réunies. Les moyens d’irrégularité soulevés seront donc rejetés.
Sur le fond
Aux termes des dispositions de l’article L.3212-1 du code de la santé publique : « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement (…) que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies:
1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement;
2° Son état mental impose des soins immédiats assortis (…) d »une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète (…)».
Selon l’article L.3212-3 du code de la santé publique : «En cas d’urgence, lorsqu’il existe un risque grave d’atteinte à l’intégrité du malade, le directeur d’un établissement mentionné à l’article L.3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d’un tiers l’admission en soins psychiatriques d’une personne malade au vu d’un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d’un médecin exerçant dans l’établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l’article L.3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.».
Enfin, en vertu de l’article L.3211-12-1 du code de la santé publique «I. L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement (…) ait statué sur cette mesure (…): 1° Avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission (…).
II. La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement d’accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.».
Il résulte des éléments figurant au dossier que Madame [I] [G] a été admise au Centre Hospitalier Spécialisé de [1], en provenance des urgences générales, alors qu’elle présentait des troubles du comportement, une rupture avec l’état antérieur et un état catatonique avec mutisme, dans un contexte de trouble psychiatrique chronique et addictologique en rupture de suivi depuis plusieurs mois.
Les certificats médicaux exigés par les textes figurent au dossier, ils ont été établis dans les délais requis et contiennent des indications propres à répondre aux prescriptions légales.
La régularité de la procédure n’est d’ailleurs pas discutée.
L’avis médical motivé prévu par l’article L3211-12-1 II du Code de la Santé Publique établi le 26/12/2024 relève que l’état mental de Madame [I] [G] nécessite toujours des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète et ce, afin de poursuivre l’adaptation thérapeutique en cours et de vérifier l’amélioration clinique constatée.
L’avis médical relève en outre que Madame [I] [G] a difficilement conscience des troubles dont elle est atteinte, ce qui laisse craindre un risque de rupture thérapeutique si la mesure d’hospitalisation complète venait à être levée.
En toute hypothèse, une sortie prématurée serait de nature à présenter des risques de rechute rapide.
Dans ces conditions, la prise en charge dans un cadre contenant et sécurisé s’impose encore, afin de garantir l’observance des soins, et le cas échéant la réadaptation du traitement, ce qui ne peut se faire qu’en milieu hospitalier. Le maintien de l’hospitalisation complète s’avère encore nécessaire à ce jour en raison de l’impossibilité pour l’intéressée de consentir aux soins de façon pérenne alors qu’ils sont indispensables pour stabiliser son état.
Dès lors, le maintien de l’hospitalisation complète de l’intéressée apparaît à ce jour justifié.
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