Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bobigny
Thématique : Indemnisation locative et relogement dans le cadre d’un projet d’aménagement urbain
→ RésuméContexte de l’affaireM. [D] [R] est locataire d’un appartement à [Adresse 1] depuis le 22 janvier 2002, où il vit avec sa famille. En mars 2014, une convention a été signée pour un projet d’aménagement urbain à [Adresse 9], impliquant la SOREQA comme aménageur. Un arrêté préfectoral en mai 2019 a déclaré l’utilité publique de l’acquisition des parcelles nécessaires, suivie d’une ordonnance d’expropriation en septembre 2020 concernant le bien de M. [D] [R]. Propositions d’indemnisationLa SOREQA a proposé à M. [D] [R] une indemnité de 3 645 € pour l’éviction et le déménagement, ainsi qu’un relogement. Après un échange de mémoires, M. [D] [R] a demandé une indemnité d’éviction de 6 000 €, une indemnité de déménagement de 3 426 €, et 3 000 € pour les frais irrépétibles. La SOREQA a maintenu son offre initiale, contestant les montants demandés par M. [D] [R]. Développements lors des audiencesLors de l’audience du 24 septembre 2024, un renvoi a été accordé pour permettre aux parties de préparer leurs mémoires. M. [D] [R] a ensuite rectifié sa demande d’indemnité de déménagement, fournissant un nouveau devis pour un logement de 48,76 m². La SOREQA a reconnu avoir globalisé son offre d’indemnisation, détaillant les montants proposés pour l’éviction et le déménagement. Arguments des partiesM. [D] [R] a souligné l’importance de sa longue occupation du logement et sa situation géographique avantageuse. En revanche, la SOREQA a argumenté que l’appartement était en état d’entretien moyen et que l’indemnité proposée était suffisante. Elle a également confirmé son engagement à reloger M. [D] [R] et sa famille. Décision du juge de l’expropriationLe juge a statué sur les obligations de la SOREQA, confirmant le droit de relogement de M. [D] [R] et de sa famille. L’indemnité d’éviction a été fixée à 2 835 €, jugée suffisante pour compenser la perte de jouissance, tandis que l’indemnité de déménagement a été accordée à 2 525 €, en raison de la justification apportée par M. [D] [R]. De plus, la SOREQA a été condamnée à verser 3 000 € pour les frais irrépétibles, et les dépens ont été mis à sa charge. |
Décision du 22 Janvier 2025
Minute n° 24/00001
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
JURIDICTION DE L’EXPROPRIATION
DE LA SEINE-SAINT-DENIS
JUGEMENT FIXANT INDEMNITÉS
du 22 Janvier 2025
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Rôle N° RG 24/00014 – N° Portalis DB3S-W-B7I-Y7UO
Le juge de l’expropriation du département de la SEINE-SAINT-DENIS
DEMANDEUR :
S.A. SOREQA
[Adresse 3]
[Localité 2]
représentée par Me Florence BOURDON, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
Monsieur [D] [R]
[Adresse 1]
[Localité 5]
représenté par Me Abdoulaye CISSE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Anne-Claire GATTO-DUBOS,Vice-Présidente, désignée par ordonnance de monsieur le Premier Président de la cour d’appel de Paris
Maxime-Aurélien JOURDE, Greffier des services judiciaires présent lors de la mise à disposition
PROCÉDURE :
Date de la visite des lieux : 04 juin 2024
Date des débats : 24 septembre 2024 ; 20 novembre 2024 ;
Date de la mise à disposition : 22 Janvier 2025
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [D] [R] est locataire d’un appartement situé dans un immeuble sis, [Adresse 1], sur la commune de [Localité 5], en vertu d’un bail établi le 22 janvier 2002. Le locataire vit avec son épouse et leurs trois enfants.
Le 20 mars 2014, une convention a été signée entre la commune de [Localité 5], la communauté d’agglomération Est Ensemble et la Société de Requalification des Quartiers Anciens (ci-après, la SOREQA) dans le cadre de la mise en place d’un programme d’aménagement urbain de la [Adresse 9], située au sud-ouest de [Localité 5], le long de la [Adresse 7], couplé d’un programme de traitement de l’habitat dégradé.
Par traité de concession du 31 mars 2014, la SOREQA a été désignée aménageur de la [Adresse 9].
Par arrêté préfectoral n° 2019-1308 du 27 mai 2019, l’acquisition des parcelles nécessaires à la réalisation du projet d’aménagement du [Adresse 8] de la [Adresse 9] par voie amiable ou par voie d’expropriation a été déclarée d’utilité publique au profit de la SOREQA.
Une ordonnance d’expropriation pour cause d’utilité publique a été rendue le 24 septembre 2020, par le juge de l’expropriation du tribunal judiciaire de céans portant notamment sur le bien immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 5].
La SOREQA a fait signifier son mémoire d’éviction locative à M. [D] [R] par exploit de commissaire de justice du 21 décembre 2023 délivré à sa personne, proposant de lui verser une indemnité totale de 3 645 € (éviction et déménagement) et de reloger le locataire, son épouse et leurs trois enfants.
Aucun accord n’est intervenu entre les parties.
Par requête du 11 mars 2024, reçue au greffe de la juridiction le 13 mars 2024, la SOREQA demande au juge de l’expropriation de Seine-Saint-Denis de fixer une date de transport en vue de la fixation d’une indemnité d’éviction locative à hauteur de l’offre initiale.
L’acte de saisine a été signifié par la SOREQA M. [D] [R].
Par ordonnance rendue le 4 avril 2024, le juge de l’expropriation a fixé le transport judiciaire sur les lieux et l’audition des parties au 4 juin 2024.
A l’issue du transport, les parties ont été convoquées contradictoirement à l’audience du 24 septembre 2024.
A l’audience du 24 septembre 2024, un renvoi a été autorisé aux parties afin de permettre au conseil de M. [D] [R] de préparer son mémoire et à la SOREQA d’y répliquer.
Par mémoire en défense du 18 novembre 2024, reçu le jour même au greffe de la juridiction, M. [D] [R] demande de voir fixer le montant de l’indemnité d’éviction personnelle à la somme de 6 000 € et celui de l’indemnité de déménagement à la somme de 3 426 €, ainsi qu’une indemnité de 3 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par mémoire récapitulatif du 19 novembre, reçu le jour même au greffe de la juridiction, la SOREQA maintient l’ensemble de son offre initiale et souligne qu’au soutien de sa demande indemnitaire au titre du déménagement, [D] [R] communique un devis réalisé pour une superficie de 75 m² alors que le logement a fait l’objet d’un métrage de 48,76 m² et que la visite des lieux a permis de constater que le lot litigieux était d’une superficie bien moindre que 75 m².
Par un nouveau mémoire en défense déposé avant l’audience, [D] [R] demande :
– 6 000 € au titre de l’indemnité d’éviction,
– 2 525 € au titre de l’indemnité de déménagement,
– 3 000 € au titre des frais irrépétibles.
et la condamnation de la SOREQA aux dépens.
En vertu de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures transmises pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
A l’audience de renvoi du 20 novembre 2024, les parties comparantes ont développé les éléments de leurs mémoires, en application des dispositions du 1er alinéa de l’article R. 311-20 du code de l’expropriation.
En particulier, [D] [R], par la voix de son avocat, se réfère à ses dernières écritures et entend rectifier le montant de l’indemnité de déménagement. Il explique avoir produit un nouveau devis réalisé le 19 novembre 2024 pour une superficie de 48,76 m². Il soutient enfin qu’au titre de l’indemnité d’éviction il convient de prendre en considération plus de 20 années d’occupation du logement avec son épouse et ses enfants, la situation géographique particulière, puisque l’immeuble est à proximité de [Localité 6], desservi par la ligne 9 du métro et que le logement est en bon état.
La SOREQA a reconnu avoir globalisé le total de l’indemnité et l’a ainsi détaillée :
– une indemnité d’éviction personnelle de 567 € par occupant, soit 2 835 € au total,
– une indemnité de déménagement de 819 €, ajoutant que le logement est peu meublé.
Elle rappelle enfin qu’elle assurera le relogement de [D] [R] et de sa famille.
L’affaire a été mise en délibéré au 22 janvier 2024 par mise à disposition au greffe de la juridiction, ce qui a été précisé à l’audience.
PAR CES MOTIFS
Statuant par décision contradictoire, mise à disposition au greffe, rendue en premier ressort ;
Annexe à la présente décision le procès-verbal du transport judiciaire sur les lieux du 4 juin 2024 ;
Dit que la SOREQA a, à l’égard de M. [D] [R], une obligation de relogement qui sera mise en œuvre du relogement dans le respect des dispositions des articles L. 314-2 du code de l’urbanisme, L. 423-2 du code de l’expropriation, L. 322-1 du code de la construction et de l’habitation et 13 bis de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 ;
Fixe l’indemnité de perte de jouissance due par la SOREQA à M. [D] [R] à la somme de 2 835 euros (deux mille huit cent trente-cinq euros) ;
Déboute M. [D] [R] du surplus de sa demande ;
Fixe l’indemnité de déménagement due par la SOREQA à M. [D] [R] à la somme de 2 525 suros (deux mille cinq cent vingt-cinq euros) ;
Condamne la SOREQA à payer à M. [D] [R] la somme de 3 000 euros (trois mille euros) au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Dit que les dépens de la présente procédure sont à la charge de la SOREQA et, au besoin, l’y condamne.
Maxime-Aurélien JOURDE
Greffier
Anne-Claire GATTO-DUBOS
Vice-Présidente, Jugede l’expropriation
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