Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bobigny
Thématique : Préemption et obligations contractuelles : un cas de cession de bail commercial.
→ RésuméContexte de la préemptionLe conseil municipal de [Localité 3] a instauré, par délibération du 30 juin 2008, un droit de préemption sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux dans un périmètre de sauvegarde. Ce périmètre inclut certains secteurs du territoire municipal. Déclaration de cession du bail commercialLa société KPA Exotiques, locataire d’un local d’alimentation générale situé [Adresse 1] dans ce périmètre, a notifié à la commune sa déclaration de cession de bail commercial le 26 octobre 2021. Décision de préemption par la communeLe 13 décembre 2021, la commune a décidé de préempter le bail commercial pour un montant de 10.000 euros, souhaitant diversifier l’offre commerciale. Cette décision a été notifiée aux parties concernées le 17 décembre 2021. Recours gracieux et rejetLe 31 janvier 2022, KPA Exotiques a formé un recours gracieux contre la décision de préemption, annonçant son renoncement à la cession. Ce recours a été rejeté le 24 février 2022, et la décision de préemption est devenue définitive le 11 mai 2022, faute de recours contentieux. Notification du projet d’acte de cessionLe 23 septembre 2022, la commune a notifié à KPA Exotiques le projet d’acte de cession du bail, demandant des compléments sous quinze jours. Un courrier similaire a été envoyé au propriétaire du local. Demande de report de la préemptionLe 29 octobre 2022, KPA Exotiques a demandé un report de trois ans de la préemption. La commune a refusé cette demande par courrier du 4 janvier 2023, rappelant que la préemption valait contrat de vente. Recours contentieux et décisions judiciairesKPA Exotiques a saisi le tribunal administratif de Montreuil le 21 février 2023, mais sa demande a été rejetée comme tardive le 30 mai 2023. Un recours contre cette décision a également été rejeté par la cour administrative d’appel de Paris le 27 septembre 2023. Assignation en justice par la communeLe 28 novembre 2023, la commune a assigné KPA Exotiques devant le tribunal de Bobigny, demandant la cession du bail, des dommages pour préjudice moral, des frais de justice, et l’exécution provisoire de la décision. Constitution d’avocat et absence de conclusionsKPA Exotiques a constitué avocat le 4 mars 2024 mais n’a pas déposé de conclusions. L’affaire a été examinée à l’audience publique du 12 novembre 2024. Décision du tribunalLe tribunal a condamné KPA Exotiques à céder le bail commercial à la commune, à verser 2.000 euros pour préjudice moral, ainsi qu’une somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et a ordonné l’exécution provisoire de la décision. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 21 JANVIER 2025
Chambre 7/Section 2
AFFAIRE: N° RG 23/11341 – N° Portalis DB3S-W-B7H-YJJC
N° de MINUTE : 25/00067
COMMUNE DE [Localité 3]
Immatriculée sous le SIREN n°219 300 498 00017
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Pierre-henri ROUSSEL,
avocat au barreau de PARIS,
vestiaire : E1939
DEMANDEUR
C/
S.A.R.L. KPA Exotiques
Immatriculée au RCS de Bobigny sous le n°852 931 641
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Florence NGUEYEP NOUMO, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 236
DEFENDEUR
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Christelle HILPERT, Première Vice-Présidente, statuant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l article 812 du code de procédure civile, assistée aux débats de Madame Camille FLAMANT, greffier.
DÉBATS
Audience publique du 12 Novembre 2024, à cette date, l’affaire a été mise en délibéré au 14 Janvier 2025, et elle a été prorogée au 21 Janvier 2025.
JUGEMENT
Rendu publiquement, par mise au disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par Madame Christelle HILPERT, Première Vice-Présidente, assistée de Madame Camille FLAMANT, greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par délibération en date du 30 juin 2008, le conseil municipal de [Localité 3] a institué un droit de préemption sur les fonds de commerce, les fonds artisanaux et les baux commerciaux
dans un périmètre de sauvegarde correspondant à certains secteurs du territoire municipal.
La société KPA Exotiques, locataire à bail commercial d’un local d’alimentation générale situé [Adresse 1], soit dans l’un de ces périmètres de sauvegarde, a adressé à la commune de [Localité 3] un courrier portant déclaration de cession de son bail commercial, qui a été reçu le 26 octobre 2021.
La commune de [Localité 3], souhaitant diversifier l’offre commerciale dans ce secteur, a décidé, suivant arrêté municipal du 13 décembre 2021, de préempter le bail commercial au prix mentionné dans la déclaration, soit 10.000 euros.
La décision de préemption a été notifiée par lettres recommandées avec accusé de réception à la
société KPA Exotiques, au conseil alors en charge de la défense de ses intérêts et aux gérants de la société, Monsieur et Madame [E] [K]. Ces courriers ont été reçus le 17 décembre 2021.
Par courrier en date du 31 janvier 2022, la société KPA Exotiques a formé un recours gracieux
contre la décision de préemption, indiquant renoncer à son projet de cession.
Le recours a été rejeté suivant courrier du 24 février 2022, reçu le 11 mars 2022. En l’absence d’un recours contentieux engagé dans le délai de deux mois à compter du 11 mars 2022, la décision de préemption du bail commercial est devenue définitive le 11 mai 2022.
Par courrier en date du 23 septembre 2022, la commune de [Localité 3] a notifié à la société KPA Exotiques le projet d’acte de cession de bail portant sur le local commercial, lui demandant de le compléter sous quinze jours et de se rapprocher de l’office notarial en charge de l’instrumentation de la cession. Un courrier similaire a concomitamment été adressé au propriétaire du local.
Par courrier en date du 29 octobre 2022, la société KPA Exotiques a, par l’intermédiaire de son
conseil, demandé « à titre gracieux et exceptionnel de pouvoir reporter la préemption de son bail
par la ville de 3 ans ».
Par courrier du 4 janvier 2023, la commune de [Localité 3] a toutefois rappelé que la préemption aux conditions, notamment financières, de la déclaration valait contrat de vente, que toute renonciation à vendre formée par le titulaire du bail était dépourvue de base légale et qu’un acte constatant cette cession devait être conclu sous quinze jours, à défaut de quoi une procédure judiciaire serait engagée.
La société KPA Exotiques a alors saisi le tribunal administratif de Montreuil le 21 février 2023 d’un recours contre la décision de préemption.
Suivant ordonnance du 30 mai 2023, le président de la 2 ème chambre du tribunal administratif
de Montreuil a rejeté la demande comme tardive sur le fondement de l’article R 222-1 alinéa 4 du code de justice administrative. La société KPA Exotiques a formé un recours contre cette décision le 21 juillet 2023.
Suivant ordonnance du 27 septembre 2023, le président de la 1 ère chambre de la cour
administrative d’appel de Paris a confirmé le rejet de la requête de la société KPA Exotiques.
Par acte de commissaire de justice du 28 novembre 2023, la commune de [Localité 3] a assigné la société KPA Exotiques devant le tribunal de Bobigny aux fins de la voir condamner à :
– procéder à la cession du bail commercial,
– lui verser la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral à la suite des recours manifestement abusifs qu’elle a engagés contre la décision de préemption,
– lui verser la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– régler les entiers dépens de la procédure.
Elle a demandé en outre que soit ordonnée l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
La société KPA Exotiques, régulièrement assignée à étude, a constitué avocat le 4 mars 2024 mais n’a pas conclu.
La présente décision sera par conséquent contradictoire.
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, le tribunal renvoie à l’assignation pour l’exposé des moyens.
L’ordonnance de clôture est datée du 24 septembre 2024.
L’affaire a été examinée à l’audience publique du 12 novembre 2024 et mise en délibéré à ce jour.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal judiciaire,
Condamne la société KPA Exotiques à procéder au bénéfice de la commune de [Localité 3], au plus tard dans le mois de la signification du présent jugement, à la cession du bail portant sur le local commercial dont elle est locataire, sis à [Adresse 4], dans les conditions et prix prévus au projet d’acte établi par l’étude notariale en charge de l’instrumentation, soit la somme de 10.000 euros,
Condamne la société KPA Exotiques à verser à la commune de [Localité 3] la somme de 2000 euros en réparation de son préjudice moral,
Condamne la société KPA Exotiques à verser à la commune de [Localité 3] la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société KPA Exotiques aux entiers dépens.
Le présent jugement ayant été signé par le président et le greffier.
Le Greffier Le Président
Camille FLAMANT Christelle HILPERT
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