Tribunal judiciaire de Bobigny, 17 janvier 2025, RG n° 23/07745
Tribunal judiciaire de Bobigny, 17 janvier 2025, RG n° 23/07745

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Bobigny

Thématique : Responsabilité professionnelle d’un avocat : enjeux et conséquences d’une négligence procédurale

Résumé

Contexte des travaux de rénovation

La Sarl [6], anciennement Mdp Vitry, a réalisé en 2016 des travaux de rénovation pour les époux [H] à [Localité 8]. Ces travaux comprenaient la pose de faux plafonds, de parquets, de plinthes, ainsi que des travaux de peinture sur les murs, plafonds et fenêtres.

Litige et expertise judiciaire

Un différend est survenu concernant des inexécutions contractuelles et la facturation de travaux supplémentaires, poussant les époux [H] à demander la désignation d’un expert judiciaire. Le juge des référés a désigné Monsieur [Y] [G] comme expert, qui a rendu son rapport en septembre 2018.

Jugement du tribunal judiciaire de Melun

Le tribunal judiciaire de Melun a rendu un jugement le 16 juillet 2020, condamnant la Sarl [6] à verser des indemnités aux époux [H] pour divers préjudices, tout en condamnant ces derniers à payer une somme pour des travaux complémentaires impayés. Le jugement a également ordonné l’exécution provisoire.

Appel et caducité de la déclaration

La Sarl [6] a interjeté appel le 22 juillet 2020, mais n’a pas remis ses conclusions dans le délai imparti, entraînant la caducité de la déclaration d’appel par ordonnance du 19 janvier 2021.

Assignation de l’avocat

En juillet 2023, la Sarl [6] a assigné Me [N] [I] devant le tribunal judiciaire de Bobigny, lui reprochant une faute professionnelle pour avoir laissé périmer la déclaration d’appel. La Sarl [6] a demandé des réparations pour divers préjudices subis.

Réponse de Me [N] [I]

Me [N] [I] a contesté les demandes de la Sarl [6], arguant que cette dernière n’avait pas prouvé qu’elle aurait pu obtenir gain de cause en appel. Elle a également demandé à être indemnisée pour ses frais.

Motivation du tribunal sur la responsabilité

Le tribunal a examiné la responsabilité de Me [I] et a constaté qu’elle avait manqué à son obligation de diligence en ne remettant pas les conclusions dans le délai imparti, ce qui a conduit à la caducité de l’appel.

Analyse des préjudices

La Sarl [6] a allégué plusieurs préjudices, notamment des sommes versées aux époux [H] et des frais liés à la procédure. Le tribunal a évalué la perte de chance de succès en appel et a déterminé que certains préjudices n’étaient pas justifiés.

Indemnisation et décision finale

Le tribunal a condamné Me [N] [I] à verser 3 346,50 euros à la Sarl [6] pour dommages et intérêts, ainsi qu’à payer les dépens et une somme pour les frais irrépétibles. La demande d’exécution provisoire a été rejetée.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de BOBIGNY

JUGEMENT CONTENTIEUX DU 17 JANVIER 2025

Chambre 7/Section 2
AFFAIRE: N° RG 23/07745 – N° Portalis DB3S-W-B7H-XZJU
N° de MINUTE : 25/00059

S.A.R.L. [6]
Immatriculée au RCS d’EVRY sous le n°B [N° SIREN/SIRET 1]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Cyril RAVASSARD,
avocat au barreau d’ESSONNE,

DEMANDEUR

C/

Madame [N] [I]
CAUSAM AVOCATS
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Maître Matthieu PATRIMONIO
de la SCP RAFFIN & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS,
vestiaire : P0133

DEFENDEUR

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats et du délibéré :

Président : Madame Christelle HILPERT, première vice-présidente, Juge ayant fait le rapport à l’audience
Assesseurs : Monsieur Michaël MARTINEZ, juge
Madame Mechtilde CARLIER, juge

Assistés aux débats de : Madame Camille FLAMANT, greffier.

DEBATS

L’affaire a été examinée à l’audience publique du 15 Novembre 2024 du tribunal judiciaire de Bobigny, tenue par Madame Christelle HILPERT, présidente de la formation de jugement, et Monsieur Michaël MARTINEZ et Madame Mechtilde CARLIER, juges, assistés de Madame Camille FLAMANT, greffier.

Madame HILPERT a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries. Elle a rédigé le jugement rendu.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 17 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe de la juridiction.

JUGEMENT
La présente décision est prononcée publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement Contradictoire et en premier ressort, par Madame Christelle HILPERT, première vice-présidente, assistée de Madame Camille FLAMANT, greffier.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La Sarl [6] (précédemment dénommée Mdp Vitry [7]) a entrepris en 2016 des travaux de rénovation dans le bien immobilier des époux [H] à [Localité 8]. Ces travaux incluaient la pose de faux plafonds, de parquets et de plinthes, ainsi que des travaux de peinture des murs, des plafonds et de certaines fenêtres.

Suite à un différend relatif à l’existence d’inexécutions contractuelles et à la facturation de travaux complémentaires, les époux [H] ont saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Melun afin d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire. Par ordonnance rendue le 22 septembre 2017, le juge des référés a désigné Monsieur [Y] [G]. L’expert a rendu son rapport le 15 septembre 2018.

Par jugement rendu le 16 juillet 2020, le tribunal judiciaire de Melun a, sur le fondement de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à l’espèce compte tenu de la date du contrat :

– condamné la Sarl [6] à payer à Monsieur [Y] [H] et Madame [Z] [H], au titre des désordres constatés par l’expert, les sommes de :
o 10.165 euros au titre de leur préjudice matériel,
o 750 euros au titre de leur préjudice de jouissance,
o 240 euros au titre des frais de repas.

– condamné Monsieur [Y] [H] et Madame [Z] [H] à payer à la Sarl [6] la somme de 1.385,85 euros au titre de travaux complémentaires impayés,

– condamné la Sarl [6] à payer à Monsieur [Y] [H] et Madame [Z] [H] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la Sarl [6] aux dépens, en ceux compris les frais d’expertise judiciaire,

– ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Le 22 juillet 2020, la Sarl [6], par l’intermédiaire de son conseil Me [N] [I], a interjeté appel de cette décision.

Aucune conclusion n’ayant été remise au greffe de la cour d’appel de Paris dans le délai de trois mois imparti par l’article 908 du code de procédure civile, le conseiller de la mise en état a déclaré la déclaration d’appel caduque par ordonnance du 19 janvier 2021.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par acte de commissaire de justice du 28 juillet 2023, la Sarl [6] a fait assigner Me [N] [I] devant le tribunal judiciaire de Bobigny afin d’engager sa responsabilité contractuelle.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 10 septembre 2024, la Sarl [6] demande au tribunal de :

– rejeter toutes les demandes de Maître [N] [I],
– juger que Maître [N] [I] a commis une faute dans l’exercice de sa profession d’avocat en laissant périmer la déclaration d’appel de la Sarl [6] et en ne produisant pas dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile les conclusions de l’appelante,
– juger que Maître [N] [I] a engagé sa responsabilité professionnelle en sa qualité d’avocat,

En conséquence :

– condamner Maître [N] [I] à verser à Sarl [6] les sommes suivantes, en réparation de ses préjudices :
°18 979,79 euros en réparation des sommes totales versées aux époux [H],
°1 385,85 euros en réparation de la somme due par les époux [H] et non récupérée,
°2 500,00 euros en réparation du préjudice causé par les mesures d’exécution forcée, à savoir les saisies-attribution pratiquées sur les comptes bancaires de l’entreprise,
°1 198,00 euros en réparation du préjudice financier lié à l’inutile procédure devant la cour d’appel de Paris.
outre les intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 28 juillet 2023,

– ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

– condamner Maître [N] [I] à verser à la Sarl [6] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Maître [N] [I] aux entiers dépens de l’instance.

Dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 16 septembre 2024, Maître [N] [I] demande au tribunal de débouter la Sarl [6] de ses demandes, d’écarter l’exécution provisoire et de la condamner à lui payer la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Elle estime que la Sarl [6] ne rapporte pas la preuve, à supposer que la cour d’appel de Paris ait eu à connaître de ses demandes, qu’elle aurait pu obtenir gain de cause devant cette juridiction, le jugement du tribunal judiciaire de Melun étant parfaitement motivé et conforme aux conclusions de l’expertise judiciaire.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures, dans les conditions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 17 septembre 2024.

L’affaire a été plaidée à l’audience du 15 novembre 2024 et mise en délibéré au 17 janvier 2025.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal,

– CONDAMNE Maître [N] [I] à payer à la Sarl [6] la somme de 3 346,50 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement ;

– ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,

– CONDAMNE Maître [N] [I] aux entiers dépens de l’instance,

– CONDAMNE Maître [N] [I] à verser à la Sarl [6] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– REJETTE le surplus des demandes.

Le présent jugement ayant été signé par le Président et le Greffier.

Le Greffier Le Président
Camille FLAMANT Christelle HILPERT

 


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