Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bobigny
Thématique : Remise des pénalités fiscales pour héritiers en raison de circonstances exceptionnelles
→ RésuméContexte de l’affaireMessieurs [T] et [R] [J] ont assigné le Directeur Général des Finances Publiques devant le tribunal judiciaire de Bobigny le 19 août 2021. Ils cherchent à prouver leur impossibilité de régler les droits de succession de Monsieur [V] [J] avant le 31 janvier 2019, à obtenir la remise des pénalités de 16.457 euros et à faire condamner le Trésor public aux dépens. Détails de la successionLes consorts [J] sont les héritiers de Monsieur [V] [J], décédé à 30 ans dans un accident de la circulation au Laos en 2016. L’acte de décès, enregistré à l’ambassade de France, contenait une erreur sur la résidence du défunt, ce qui a retardé le dépôt de son testament. Ce testament a finalement été accepté par le tribunal d’instance en mai 2017, permettant l’établissement de l’acte de notoriété par le notaire Maître [H]. Retard dans le règlement des droits de successionLa succession ne comportait qu’une assurance décès souscrite par l’employeur de Monsieur [V] [J]. En raison de difficultés pour débloquer les fonds au Laos, l’assurance n’a été versée qu’en novembre 2018, et les consorts [J] ont pu déclarer la succession et payer les droits d’enregistrement en janvier 2019. Ils ont été informés en décembre 2020 que ce dépôt tardif entraînerait des pénalités. Arguments de l’administration fiscaleL’administration fiscale a soutenu que les héritiers devaient déclarer la succession dans les douze mois suivant le décès, soit avant le 2 décembre 2017. Elle a affirmé que le dépôt tardif de la déclaration de succession justifiait les pénalités, tout en précisant que la majoration de 10% relevait du tribunal judiciaire. Réponse des consorts [J]Les consorts [J] ont contesté le rejet de leur recours gracieux, affirmant que l’acte de notoriété n’avait pu être établi qu’en juin 2017 en raison de l’erreur sur l’acte de décès. Ils ont également souligné qu’ils n’avaient pas eu les liquidités nécessaires pour régler les droits de succession avant de recevoir les fonds de l’assurance-vie. Décision du tribunalLe tribunal a constaté que les consorts [J] avaient effectivement versé les droits de succession en février 2019, après avoir reçu les fonds de l’assurance. Il a noté que les héritiers avaient rencontré des difficultés pour respecter les délais en raison de l’erreur sur l’acte de décès et du manque de liquidités. En conséquence, le tribunal a annulé la décision de rejet de l’administration fiscale et a prononcé la remise totale des pénalités de 16.457 euros. ConclusionLe tribunal a condamné le Trésor public aux dépens, reconnaissant la bonne foi des consorts [J] dans leurs démarches pour régulariser leur situation fiscale. |
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
de BOBIGNY
JUGEMENT CONTENTIEUX DU 16 JANVIER 2025
AFFAIRE N° RG 21/07953 – N° Portalis DB3S-W-B7F-VQA4
Chambre 9/Section 1
Numéro de minute : 25/02
Monsieur [T] [J]
[Adresse 3]
[Localité 9]
représenté par Me Virginie MARQUES, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB 172
Monsieur [R] [J]
[Adresse 4]
[Localité 6]
représenté par Me Virginie MARQUES, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : PB 172
C/
M. DIRECTEUR GÉNÉRAL DES FINANCES PUBLIQUES
Pôle contrôle fiscal – pôle juridictionnel judiciaire
[Adresse 1]
[Localité 5]
Dispensé du ministère d’avocat
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Président : Monsieur Bernard AUGONNET, Premier Vice-Président, statuant à juge unique, conformément aux dispositions des articles 801 et suivants du code de procédure civile.
Assisté de Madame Anyse MARIO, Greffière
DÉBATS
Audience publique du 22 Février 2024
Délibéré fixé le 25 avril 2024, prorogé au 16 janvier 2025
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte d’huissier en date du 19 août 2021, Messieurs [T] et [R] [J] ont fait assigner Monsieur Directeur Général des Finances Publiques devant le tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de faire juger qu’ils apportent la preuve de leur impossibilité de régler les droits relatifs à la succession d’[V] [J] avant le 31 janvier 2019 ; de faire prononcer la remise totale des pénalités et majorations de 16.457 euros prononcées à leur encontre. De faire condamner le Trésor public en tous les dépens.
Ils exposent qu’ils sont les héritiers de Monsieur [V] [J] , lequel est décédé à l’âge de 30 ans, dans un accident de la circulation, le [Date décès 2] 2016 à [Localité 10] (Laos), en leurs qualités respectives de père et de frère du défunt. Que la transcription de l’acte de décès a été faite dans les registres de l’ambassade de France mais a été entachée d’une erreur matérielle mentionnant par erreur sur l’acte qu’[V] [J] résidait au Laos au moment du décès. Que par ailleurs, il est apparu qu’[V] [J] avait rédigé un testament olographe, déposé au rang des minutes de Maître [H], notaire à [Localité 7]. Que la mention erronée dans l’acte de décès a entraîné le refus du dépôt de ce testament par le tribunal d’instance de Metz, pourtant territorialement compétent, en raison de la domiciliation erronée du défunt à l’étranger sur l’acte de décès. Que le tribunal d’instance a finalement accepté le dépôt le 24 mai 2017 ce qui a permis à Maître [H] d’établir l’acte de notoriété. Que la succession avait pour seul actif l’assurance décès souscrite par l’employeur de Monsieur [V] [J] au profit de ses employés auprès de la société Allianz LAOS.Qu’ en raison de difficultés pour obtenir le déblocage des fonds au Laos, ce n’est que le 29 novembre 2018, soit près de trois ans après le décès que l’assurance vie a été versée entre les mains de Maître [H]. Qu’après une enquête de la DGFIP, ce n’est que le 31 janvier 2019, qu’ils ont reçu les fonds et ont pu procédé à la déclaration de succession et versé la somme totale de 101 589 € au titre des droits d’enregistrement relatifs à la succession. Qu’ils ont été informés selon courrier du 11 décembre 2020 que le dépôt tardif de la déclaration de succession allait entraîner le versement de la somme de 16 457 € de majorations et intérêts de retard et qu’un avis de mise en recouvrement leur a été adressé le 22 avril 2021. Que ce n’est que le 23 juin 2021 qu’ils ont reçu par courriel copie de la décision de rejet du recours gracieux datée du 11 mai 2021 d’où la présente demande en justice.
Par conclusions en réponse signifiées le 07 septembre 2022 et déposées à l’audience du 25 avril 2024, l’administration fiscale expose qu’aux termes d’un testament olographe du 5 octobre 2015, Monsieur [V] [J] a désigné pour légataires universels, Monsieur [R] [J], son père et M. [T] [J] son frère. Qu’en application des dispositions des articles 641 et 800 du code général des Impôts, les héritiers sont tenus de souscrire une déclaration de succession dans les douze mois à compter du décès à l’Etranger soit au plus tard le [Date décès 2] 2017 dans le cas présent. Elle fait valoir que l’application des délais de retard relève de la matière gracieuse et échappe donc au tribunal judiciaire. En revanche, si l’application de la majoration de 10% relève bien du tribunal judiciaire, l’administration fiscale soutient que le dépôt de la déclaration est intervenue le 31 janvier 2019 soit plus de 24 mois après le délai fixé par l’article 641 du CGI. Elle fait valoir que les motifs invoqués par les consorts [J] à l’appui de leur demande de remise gracieuse des pénalités reposent sur des allégations qui ne sont pas établies et doivent être rejetées.
Par conclusions en répliques signifiées le 14 septembre 2023 et déposées à l’audience du 25 avril 2024, les consorts [J] exposent que leur recours est recevable car le rejet de leur recours gracieux ne leur a jamais été adressé. Ils font valoir que l’acte de notoriété n’a pu être établi que le 30 juin 2017 compte tenu d’une erreur sur l’acte de décès et qu’ils n’ont pu verser les droits de succession qu’au mois de février 2019, près de trois ans après le décès d’[V] [J] au moment précis où ils ont touché les fonds de l’assurance-vie soit courant janvier 2019. Ils font valoir qu’ils ne disposaient pas des liquidités suffisantes pour régler le montant des droits de 101.589 euros avant d’avoir touché les fonds de l’assurance-vie. Il rappelle que le notaire dans son courrier du 30 janvier 2019 avait pris la peine d’expliquer que le paiement des droits de succession n’avait pas été fait dans les délais car l’actif successoral n’était constitué que de biens immobiliers dont la vente était nécessaire pour acquitter les droits.
PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par mise à disposition au greffe,
DIT que Monsieur [T] [J] et Monsieur [R] [J] apportent la preuve de l’impossibilité de régler les droits relatifs à la succession de Monsieur [V] [J] avant le 31 janvier 2019,
ANNULE la décision de rejet du 11 mai 2021 par laquelle la DGFIP a refusé d’annuler les pénalités et majorations de 16.457 euros prononcées à l’encontre des consorts [J].
PRONONCE la remise totale des pénalités et majorations de 16 457 € prononcées à l’encontre de Monsieur [T] [J] et de Monsieur [R] [J].
CONDAMNE le Trésor Public aux dépens qui lui incombent.
La minute a été signée par Monsieur Bernard AUGONNET, Premier Vice-Président et Madame Anyse MARIO, greffière présente lors de la mise à disposition.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
Anyse MARIO Bernard AUGONNET
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