Type de juridiction : Tribunal de commerce
Juridiction : Tribunal de commerce de Paris
Thématique : Spamming : le blocage d’adresse IP sanctionné
→ RésuméLe spamming, défini comme l’envoi massif d’emails non sollicités, peut entraîner le blocage d’adresses IP par les fournisseurs d’accès internet. Cette mesure est considérée comme une sanction contractuelle. Dans une affaire récente, l’opérateur Free a justifié son action par la nécessité de protéger ses serveurs et de respecter le principe de l’opt-in. Cependant, le Tribunal a souligné que Free ne pouvait pas agir unilatéralement, car il n’est pas mandaté pour déterminer ce qui constitue du spam. Les opérateurs doivent garantir la neutralité de leurs services et le respect du secret des correspondances.
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Une sanction contractuelle unilatérale
Il est acquis que les fournisseurs d’accès internet ont la possibilité technique de bloquer les adresses IP (serveurs de messagerie) de leurs clients à l’origine d’envois massifs d’emails non sollicités (spamming). Ce blocage s’analyse en une sanction contractuelle et a été sanctionné dans l’affaire soumise.
Injonction de déblocage à Free
En l’espèce, l’opérateur Free justifiait le bien fondée de sa mesure par la protection de ses serveurs de messagerie et le non-respect du principe de l’opt-in / opt-out qui doit être assuré aux abonnés.
L’article L34-5 du code des postes et télécommunications électroniques (CPCE) stipule « qu’est interdite la prospection directe, au moyen d’un automate d’appel, d’un télécopieur ou d’un courrier électronique, utilisant sous quelque forme que ce soit les coordonnées d’une personne physique qui n’a pas exprimé son consentement préalable à recevoir des prospections directes par ce moyen ». Le respect du secret des correspondances par l’opérateur ne fait pas obstacle au traitement automatisé de détection de contenus non sollicités, du contenu de la correspondance en ligne et de l’identité des correspondants.
Au titre du CPCE, l’opérateur a l’obligation de prendre les dispositions nécessaires pour assurer de manière permanente et continue l’exploitation du réseau et des services de communications électroniques et doit mettre en œuvre les protections et redondances nécessaires pour garantir une qualité et une disponibilité de service satisfaisantes.
Appréciation du spamming au stade du référé
Les juges consulaires ont considéré qu’il avait une contestation sérieuse entre les parties sur le caractère de Spam ou non des messages envoyés par le client. Contestation nécessite une appréciation au fond des types de messages envoyés qui ne saurait ressortir de la compétence du juge des référés.
Spamming : un fait juridique
En matière de spamming, il appartient à la CNIL de veiller (éventuellement en association avec la DGCCRF), pour ce qui concerne la prospection directe utilisant les coordonnées d’une personne physique, au respect de l’opt-in en utilisant les compétences qui lui sont reconnues par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978. A celle fin elle peut recevoir, par tous moyens, les plaintes relatives aux infractions.
Obligation de neutralité des opérateurs
Le Tribunal a souligné que l’association Signal Spam n’était aucunement mandatée par les pouvoirs publics pour lutter contre le Spamming. Toutes les associations, organismes ou spécialistes cités par Free comme luttant contre les Spam, étaient toutes des organismes privés, qui ne disposaient d’aucun mandat des pouvoirs publics pour déclarer que certains messages sont ou non des Spam et respectent ou non l’article L34-5 du CPCE.
Les opérateurs de communication électronique ne sont pas non plus chargés de veiller au respect de l’article L 34-5 du CPCE et doivent garantir la neutralité de leurs services vis-à-vis du contenu des messages transmis sur leur réseau ainsi que le secret des correspondances.
Le Tribunal a conclu que le Free ne pouvait pas prendre de mesures unilatérales de blocage de trafic de messagerie électronique au motif qu’elle estimerait, avec des moyens et critères qui lui sont propres, que certains trafics de messagerie sont de la prospection publicitaire faite sans le consentement de la personne destinataire des messages. Toute prolongation de tels blocages est de nature â créer un trouble manifestement illicite.
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