En matière de transaction sur une contrefaçon de marque, il convient de ne pas confondre retrait pur et simple d’un biffage.
Lorsqu’en application des articles 1565 et suivants du code de procédure civile, les parties demandent l’homologation d’un accord, le juge ne peut alors pas modifier les termes de la transaction. Il ne peut qu’ordonner les mesures qui découlent de sa pure exécution. En la cause, la transaction emploie le terme retirer purement et simplement (des publications) ce qui signifie enlever ou extraire les mentions litigieuses ce qui n’est l’équivalent du remplacement du nom de la maison d’édition par des astérisques. Le retrait total a donc été ordonné, sous astreinte provisoire de 100 E par jour de retard passé un délai d’un mois partant de la signification de la décision. |
L’Essentiel : L’affaire oppose l’AGIC à la SARL LUFTHUNGER concernant le retrait d’une publication jugée préjudiciable. Un accord signé le 8 février 2023 stipule que LUFTHUNGER doit retirer toute mention de l’AGIC et de sa marque MAIA, en échange d’une indemnité de 1 200 euros. Cependant, l’AGIC a constaté que les mentions avaient été simplement barrées, ce qui ne respectait pas l’accord. Le tribunal a ordonné à LUFTHUNGER de retirer totalement ces mentions, sous astreinte, tout en rejetant certaines demandes de l’AGIC. Finalement, l’AGIC devra verser l’indemnité après le respect des engagements par LUFTHUNGER.
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Résumé de l’affaire :
Contexte de l’affaireL’affaire oppose l’Association Généraliste Indépendante et Culturelle (AGIC) à la SARL LUFTHUNGER. L’AGIC a assigné LUFTHUNGER pour obtenir le retrait d’une publication sur son site internet, considérée comme préjudiciable. Un accord a été conclu entre les parties, stipulant que LUFTHUNGER devait retirer toute mention de l’AGIC et de sa marque MAIA. Accord entre les partiesLe 8 février 2023, un accord de cinq pages a été signé, précisant que LUFTHUNGER s’engageait à retirer toutes les mentions de l’AGIC et à ne plus publier d’articles la concernant. En contrepartie, l’AGIC se désistait de son action et versait une indemnité de 1 200 euros. LUFTHUNGER devait également transformer une page web spécifique. Exécution de l’accordMalgré l’accord, l’AGIC a constaté que les mentions de son nom et de MAIA avaient été simplement barrées ou remplacées par des astérisques, ce qui, selon elle, ne respectait pas les termes de l’accord. LUFTHUNGER a soutenu avoir respecté ses engagements en modifiant la publication. Décision du tribunalLe tribunal a homologué l’accord et a ordonné à LUFTHUNGER de retirer totalement les mentions de MAIA dans les publications concernées, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. En revanche, les demandes de l’AGIC concernant le retrait des courriers électroniques et la suppression de la page web ont été rejetées, car ces mesures n’étaient pas prévues dans l’accord. Conclusion et conséquencesLe tribunal a statué que l’AGIC devait verser la somme de 1 200 euros à LUFTHUNGER, mais seulement après que cette dernière ait respecté ses engagements. Les dépens de la procédure seront partagés entre les parties. |
Q/R juridiques soulevées : En matière de transaction sur une contrefaçon de marque, il convient de ne pas confondre retrait pur et simple d’un biffage.
Lorsqu’en application des articles 1565 et suivants du code de procédure civile, les parties demandent l’homologation d’un accord, le juge ne peut alors pas modifier les termes de la transaction. Il ne peut qu’ordonner les mesures qui découlent de sa pure exécution. En la cause, la transaction emploie le terme retirer purement et simplement (des publications) ce qui signifie enlever ou extraire les mentions litigieuses ce qui n’est l’équivalent du remplacement du nom de la maison d’édition par des astérisques. Le retrait total a donc été ordonné, sous astreinte provisoire de 100 E par jour de retard passé un délai d’un mois partant de la signification de la décision. |
JUGEMENT DU : 25 Novembre 2024
DOSSIER : N° RG 22/04416 – N° Portalis DBX4-W-B7G-RJNC
NAC : 64B
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOULOUSE
POLE CIVIL – Fil 8
JUGEMENT DU 25 Novembre 2024
PRESIDENT
Monsieur GUICHARD, Vice-Président
Statuant à juge unique conformément aux dispositions des
articles R 212-9 et 213-7 du Code de l’Organisation judiciaire
GREFFIER lors du prononcé
DEBATS
à l’audience publique du 23 Septembre 2024, les débats étant clos, le jugement a été mis en délibéré à l’audience de ce jour.
JUGEMENT
Contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe.
Copie revêtue de la formule
exécutoire délivrée
le
à
DEMANDERESSE
Association ASSOCIATION GENERALISTE INDEPENDANTE ET CULTURELLE, N° W751230144, prise en la personne de son Président, dont le siège social est sis [Adresse 2]
représentée par Me Marie ROSSI-LEFEVRE, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat postulant, vestiaire : 24, et Me Julien TAMPE, avocat plaidant au barreau de PARIS
DEFENDERESSE
S.A.R.L. LUFTHUNGER, RCS Toulouse 894 822 840, dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Maylis VINCENT, avocat au barreau de TOULOUSE, avocat plaidant, vestiaire : 444
Par acte de commissaire de justice du 20 octobre 2022, l’Association Généraliste Indépendante et Culturelle (AGIC) a fait assigner la SARL LUFTHUNGER pour que soit ordonné sous astreinte le retrait d’une publication de son site internet.
En cours de procédure les parties sont parvenus à un accord selon lequel les passages incriminés devaient être retirés.
Dans le dernier état de leurs écritures :
L’association demanderesse conclut :
Elle fait valoir que contrairement aux termes de l’accord les mentions ont été simplement rayées et que la page de l’URL n’a pas été transformée.
La société défenderesse conclut également à l’homologation de l’accord et au débouté des demandes de l’association avec sa condamnation à payer la somme de 1 200 E avec un partage des dépens.
Elle fait valoir qu’elle a parfaitement exécuté l’accord.
L’ordonnance de clôture a été prise le 11 mars 2024.
Les parties, le 8 février 2023 ont conclu un accord qui comporte 5 pages ; à cet accord sont annexées 18 pages.
Cet accord rappelle que la demanderesse est propriétaire de la marque MAIA sous laquelle sont édités des livres ; que la société a publié sur son site internet le 5 août 2022 une étude qui comparait les prestations de plusieurs maisons d’édition dont MAIA ; que selon l’accord en contrepartie du désistement de l’action introduite le 20 octobre 2022 et du paiement de la somme de 1 200 E, la société devait retirer purement et simplement toute mention de l’AGIC de manière directe ou indirecte, (en ce compris noms des salariés pouvant apparaître sur les mails) de la publication litigieuse ci-après reproduite en annexe de la présente transaction ; elle s’engageait ne outre à ne plus publier d’articles faisant référence à l’association AGIC et aux éditions MAIA notamment et à transformer la page avec URL en supprimant la mention MAIA.
Il est ainsi rédigé :
» Article 2 : Concessions réciproques
Sans renoncer à se prévaloir du bien-fondé de ses prétentions, l’Association (AGIC) accepte, en contrepartie des engagements pris par la SARL LUFHUNGER dans le cadre de la présente Transaction, de se désister de l’instance engagée sous le numéro de RG 22/04416 près le Tribunal Judiciaire de TOULOUSE et de lui verser, une indemnité transactionnelle globale et forfaitaire de 1200 euros. La somme nette correspondante sera versée par virement à l’ordre de la CARPA dans les 10 jours suivants la signature du présent protocole.
En contrepartie, la SARL LUFHUNGER, ainsi que toute société affiliée, s’engage à retirer purement et simplement toute mention de L’Association Généraliste Indépendante et Culturelle (A.G.I.C.), de manière directe ou indirecte, (en ce compris noms des salariés pouvant apparaître sur les mails) de la publication litigieuse ci-après reproduite en annexe de la présente transaction.
La SARL LUFTHUNGER s’engage à ne plus publier d’articles faisant référence à l’Association AGIC, aux Editions MAIA ou à toute société affiliée et notamment à la marque « Simply Crowd » (https://www.simply-crowd.com/).
Il s’engage à transformer la page avec l’URL transformer la page avec l’URL :
https://lufthunger-club.com/enquete-avis-sur-les-editions-maia-du-lys-bleu-sydney-laurent-et-dautres
et à la transformer en :
https://lufthunger-club.com/enquete-avis-sur-les-editions-du-lys-bleu-sydney-laurent-et-dautres. »
Le 30 mai 2023 à 10 h 58, l’association a fait dresser un constat par Maître [O] [U] [Z], commissaire de justice à [Localité 3] qui montre que le nom de l’association et celui de MAIA ont été remplacés par des astérisques ou barrés en noir gras.
Selon la demanderesse, il ne s’agit pas d’un retrait et elle demeure facile à identifier puisque la recherche « avis Maia Lufthunger » permet d’accéder à la nouvelle page, en sorte que MAIA demeure facile à identifier puisqu’elle est la seule maison d’édition dont le nom anonymisé.
Selon la défenderesse, les corrections apportées respectent les termes de l’accord.
Sur ce :
Vu les articles 1565 et suivants du code de procédure civile.
Les deux parties demandent l’homologation de l’accord et il sera fait droit.
Le juge ne peut alors pas modifier les termes de la transaction.
Il ne peut qu’ordonner les mesures qui découlent de sa pure exécution.
La transaction emploie le terme retirer purement et simplement ce qui signifie enlever ou extraire les mentions litigieuses ce qui n’est l’équivalent du remplacement du nom de la maison d’édition par des astérisques ne serait- ce que parce que cette méthode laisse subsister le fait que l’article à venir a concerné non pas 6 mais 7 maisons d’édition.
Le retrait total doit donc être ordonné.
Ce sous une astreinte provisoire de 100 E par jour de retard passé un délai d’un mois partant de la signification du présent.
En revanche, ce serait ajouter à la transaction de prévoir le retrait total des courriers électroniques que la transaction ne prévoit pas; elle envisage même le maintien de ces courriels en visant le retrait « en ce compris (des) noms des salariés pouvant apparaître sur les mails ».
L’association sera donc déboutée de cette demande.
Enfin pour ce qui est de la suppression de la page de l’URL qui porte la mention des éditions MAIA , la transaction dispose que la société s’engage à transformer la page ce qui a bien été fait et aucune référence n’est faite par la transaction à une suppression de cette page.
L’association sera donc déboutée de cette demande.
Pour ce qui est de la demande en paiement de la somme de 1 200 E, il ne saurait intervenir avant que la société ait respectée ses engagements.
Les dépens seront partagés.
Le tribunal statuant à juge unique, publiquement, contradictoirement, en premier ressort et par décision mise à disposition au greffe.
HOMOLOGUE la transaction intervenue entre les parties le 8 février 2023.
ORDONNE à la SARL LUFTHUNGER le retrait total de la mention des Editions MAIA dans les paragraphes suivants :
1° » Dans cet article, on ne montrera pas que telle ou telle maison est dirigée par un(e) escroc. On ne serait pas en mesure de montrer une telle chose. Ce serait de la diffamation que de dire que telle maison, parce qu’elle accepte n’importe quoi et vous relance toutes les semaines pour vous publier (sous réserve que vous achetiez tant d’exemplaires ou que vous payiez vous-même le correcteur) est une machine à pomper le pognon de jeunes auteurs malheureusement crédules. Tout ce que nous allons faire dans cet article, c’est déterminer le niveau des critères de sélection des maisons suivantes :
Les éditions **** (mention à retirer en totalité)
Le Lys Bleu
Les éditions Sydney Laurent
Les éditions de l’Onde
Les éditions Vérone
Les éditions Persée
Les éditions Spinelle »
2° » Les éditions **** (mention à retirer en totalité)
J’ai un peu du mal avec une maison qui n’est pas une maison d’édition, mais une marque possédée par une asso dont on ne connaît rien des dirigeants. J’ai encore plus de mal quand cette asso informe les auteurs qu’ils ne toucheront aucun droit d’auteur sur les exemplaires vendus lors de la campagne de financement participatif, sous prétexte qu’il faut bien payer le prestataire [i.e la plateforme de financement qui prend une marge] alors que la plateforme de financement participatif, c’est eux qui la possèdent. Et ils l’ont tellement aimé qu’ils me relancent en plus ! Dingue, je pensais pas que ce roman aurait autant de succès. Mais tous mes griefs sont oubliés parce qu’ils ont beaucoup aimé mon roman ! »
Et ce sous une astreinte provisoire de 100 E par jour de retard passé un délai de 2 mois de la signification du jugement.
DEBOUTE l’association AGIC de ses demandes tendant à :
– ORDONNER à la SARL LUFTHUNGER le retrait total des courriers électroniques échangées et publiés en annexe du texte précité.
– ORDONNER à la SARL LUFTHUNGER la suppression de la page
avec l’URL :
https://lufthunger-club.com/enquete-avis-sur-les-editions-maia-du-lys-bleu-sydney-laurent-et-dautres
DIT que moyennant l’exécution du présent, l’association AGIC devra verser la somme de 1 200 E.
DIT que les dépens seront partagés.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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