L’Essentiel : La S.A.S. Tôlerie de la Loire a engagé un litige avec la S.A.S. Haas + Sohn France suite à des retards de livraison et des problèmes de qualité des poêles à bois. Après avoir assigné Haas + Sohn France en mai 2022, la société a été placée en liquidation judiciaire en mai 2024, entraînant des condamnations financières pour Tôlerie de la Loire. Cette dernière a interjeté appel, arguant de conséquences excessives et de manquements contractuels. Cependant, le tribunal a jugé que Tôlerie de la Loire n’avait pas prouvé ses allégations, rendant sa demande d’arrêt d’exécution irrecevable.
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Contexte du litigeLa S.A.S. Tôlerie de la Loire a conclu un contrat de distribution avec la S.A.S. Haas + Sohn France le 8 juin 2018, lui permettant de vendre des poêles à bois et accessoires en France. Ce contrat concernait des produits importés d’Autriche, fabriqués par Haas + Sohn Ofnentechnik GMBH. Les relations commerciales se sont détériorées en raison de retards de livraison et de problèmes de qualité signalés par les clients. Procédures judiciairesLe 19 mai 2022, la société Tôlerie de la Loire a assigné Haas + Sohn France devant le tribunal de commerce de Lyon. Le 28 mai 2024, la société Haas + Sohn France a été placée en liquidation judiciaire, et le tribunal a condamné Tôlerie de la Loire à payer des sommes importantes pour des factures impayées. Tôlerie de la Loire a interjeté appel le 31 juillet 2024 et a demandé l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement. Arguments de Tôlerie de la LoireDans son assignation, Tôlerie de la Loire a évoqué un risque de conséquences manifestement excessives suite à la liquidation judiciaire de Haas + Sohn France. Elle a soulevé des manquements concernant la qualité des poêles, notamment des bruits anormaux, et a critiqué le non-respect des délais de livraison. Elle a également fait valoir que le tribunal n’avait pas pris en compte ses arguments sur les préjudices subis. Réponse de Koch & AssociésLa société Koch & Associés, liquidateur de Haas + Sohn France, a demandé la déclaration d’irrecevabilité de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire. Elle a soutenu que Tôlerie de la Loire avait reconnu devoir les sommes en question et n’avait pas prouvé les conséquences excessives de l’exécution. Koch & Associés a également souligné que Tôlerie de la Loire n’avait pas respecté ses obligations contractuelles. Décision du tribunalLe tribunal a statué que Tôlerie de la Loire n’avait pas démontré des conséquences manifestement excessives révélées après la première instance. Il a noté que la situation financière précaire de Tôlerie de la Loire était antérieure à la condamnation et que la demande d’arrêt de l’exécution provisoire était irrecevable. Tôlerie de la Loire a été condamnée aux dépens et à verser une indemnité à Koch & Associés. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions pour obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire selon l’article 514-3 du Code de procédure civile ?L’article 514-3 du Code de procédure civile précise les conditions dans lesquelles un appelant peut demander l’arrêt de l’exécution provisoire d’une décision. Selon l’alinéa 1er, « En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives. » Il est donc nécessaire de démontrer deux éléments : 1. L’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision. 2. Que l’exécution de cette décision pourrait entraîner des conséquences manifestement excessives. L’alinéa 2 précise que si la partie a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire, sa demande d’arrêt n’est recevable que si les conséquences excessives se sont révélées après la décision de première instance. Ainsi, la société Tôlerie de la Loire devait prouver que des conséquences manifestement excessives avaient été révélées après le jugement du tribunal de commerce pour que sa demande soit recevable. Comment la société Tôlerie de la Loire a-t-elle justifié sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire ?La société Tôlerie de la Loire a justifié sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire en invoquant l’existence d’un risque de conséquences manifestement excessives, révélées postérieurement au jugement. Elle a fait valoir que la liquidation judiciaire de la société Haas + Sohn France, intervenue le 28 mai 2024, a créé un risque de non-paiement de sa créance en cas d’infirmation du jugement. Elle a soutenu que, si elle devait payer les sommes dues, cela entraînerait une cessation de paiement de sa part, ce qui pourrait conduire à sa propre liquidation judiciaire, affectant ainsi ses 53 salariés. Cependant, le tribunal a noté que la société Tôlerie de la Loire n’a pas démontré que ces conséquences étaient manifestement excessives, car elle n’a pas apporté de preuves suffisantes concernant l’évolution de sa situation financière depuis le jugement. Quels sont les effets de la liquidation judiciaire sur la demande d’arrêt de l’exécution provisoire ?La liquidation judiciaire a des effets significatifs sur les créances et les obligations des parties. Selon l’article L. 622-22 du Code de commerce, le débiteur doit informer ses créanciers de l’ouverture de la procédure de liquidation dans un délai de dix jours. Dans le cas présent, la société Tôlerie de la Loire a soutenu qu’elle n’avait pas été informée de la liquidation judiciaire dans ce délai, ce qui aurait pu lui permettre de solliciter la réouverture des débats. Cependant, le tribunal a considéré que l’existence d’une procédure de liquidation judiciaire ne constitue pas nécessairement une conséquence manifestement excessive. Il a également rappelé que, en cas de créance litigieuse, le liquidateur doit consigner les sommes sur la Caisse des dépôts et des consignations, ce qui réduit le risque de non-restitution des sommes en cas d’infirmation du jugement. Quels arguments la société Koch & Associés a-t-elle avancés pour contester la demande d’arrêt de l’exécution provisoire ?La société Koch & Associés a avancé plusieurs arguments pour contester la demande d’arrêt de l’exécution provisoire de la société Tôlerie de la Loire. Tout d’abord, elle a soutenu que la société Tôlerie de la Loire n’avait pas présenté d’observations sur l’exécution provisoire lors de la première instance, ce qui rendait sa demande irrecevable. Elle a également fait valoir que la société Tôlerie de la Loire avait reconnu devoir les sommes au paiement desquelles elle avait été condamnée, ce qui affaiblissait sa position. Concernant les allégations de défaut de conformité des poêles, la société Koch & Associés a argué qu’aucune preuve n’avait été apportée concernant les bruits émis par les poêles, et que les conditions générales de vente ne garantissaient pas la qualité sonore. Enfin, elle a souligné que la situation financière précaire de la société Tôlerie de la Loire ne résultait pas uniquement de la condamnation à payer, mais aussi de son propre comportement en ne réglant pas les factures dues à Haas + Sohn France. |
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DE REFERE
DU 20 Janvier 2025
DEMANDERESSE :
S.A.S. TOLERIE DE LA LOIRE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés
en cette qualité au siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Lamia SEBAOUI de la SELARL LX LYON, avocat au barreau de LYON (TOQUE 938)
DEFENDERESSES :
S.A.S. HAAS + SOHN FRANCE prise en la personne de son représentant légal, domicilié es qualités audit siège
[Adresse 2]
[Localité 6]
avocat postulant : Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 1102)
avocat plaidant : Me Oliver WIESIKE de la SELAS VALORIS AVOCATS, avocat au barreau de LYON
(toque 2846)
S.A.S. KOCH & ASSOCIES es qualité de liquidateur judiciaire de la société HAAS + SOHN France, prise en la personne de son représentant légal, domicilié es qualités audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 5]
avocat postulant : Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON (toque 1102)
avocat plaidant : Me Oliver WIESIKE de la SELAS VALORIS AVOCATS, avocat au barreau de LYON
(toque 2846)
Audience de plaidoiries du 06 Janvier 2025
DEBATS : audience publique du 06 Janvier 2025 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée le 20 Janvier 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
La S.A.S. Tôlerie de la Loire et la S.A.S. Haas + Sohn France ont signé, le 8 juin 2018, un contrat de distribution de poêles à bois et accessoires, permettant ainsi à la société Tôlerie de la Loire de vendre sur le marché français des produits importés par la société Haas + Sohn France fabriqués par la société Haas + Sohn Ofnentechnik GMBH en Autriche.
Les relations se sont tendues quand les délais de livraison se sont allongés et que des désordres sur les poêles ont été signalés par des clients.
Par acte du 19 mai 2022, la société Tôlerie de la Loire a assigné la société Haas + Sohn France devant le tribunal de commerce de Lyon.
La S.A.S. Koch & Associés a été désignée liquidateur judiciaire de la société Haas + Sohn France par jugement de liquidation judiciaire du 28 mai 2024.
Par jugement contradictoire du 10 juillet 2024, le tribunal de commerce de Lyon a notamment condamné la société Tôlerie de la Loire à payer à la société Haas + Sohn France la somme de 412 712,80 € au titre des factures de produits livrés restées impayées, la somme de 40 € au titre de l’indemnité forfaitaire de recouvrement, et la somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
La société Tôlerie de la Loire a interjeté appel de la décision le 31 juillet 2024.
Par acte du 3 octobre 2024, la société Tôlerie de la Loire a assigné en référé devant le premier président la société Haas + Sohn France et la société Koch & Associés afin d’obtenir l’arrêt de l’exécution provisoire et la condamnation des deux sociétés aux dépens et à lui payer la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
A l’audience du 6 janvier 2025 devant le délégué du premier président, les parties, comparantes et régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures qu’elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, la société Tôlerie de la Loire soutient au visa de l’article 514-3 l’existence d’un risque de conséquences manifestement excessives révélées postérieurement au jugement. Elle fait valoir que le risque de conséquences manifestement excessives résultant de la liquidation judiciaire de la société Haas + Sohn France s’est révélé postérieurement à l’audience du 18 décembre 2023 puisque le jugement de liquidation judiciaire est intervenu le 28 mai 2024 et qu’en cas d’infirmation du jugement critiqué, elle n’aura d’autre choix que de déclarer sa créance qui a peu de chance d’être payée au regard du caractère chirographaire de sa créance.
Elle soulève deux moyens sérieux de réformation du jugement, l’un relatif aux manquements de la société Haas + Sohn France et l’autre relatif au non-respect des délais de livraison par la société Haas + Sohn France.
D’une part, elle fait état d’un défaut de conformité des poêles de la société Haas + Sohn France en raison des bruits particulièrement désagréables observés par certains clients alors que ces poêles sont définis comme étant « parmi les plus silencieux du marché ». Elle relève que leur qualité sonore rentre dans le champ contractuel car elle a été déterminante pour son consentement. Elle reproche au tribunal de ne pas avoir pris en compte les diverses plaintes des clients et d’avoir indiqué dans le jugement qu’elle a refusé la tenue d’une expertise judiciaire alors qu’aucune demande n’a été formulée par la société Haas + Sohn France en ce sens.
Elle fait état ensuite du non-respect de l’obligation de garantie de la société Haas + Sohn France, bien que le contrat de distribution stipule que cette dernière garantit le fonctionnement de l’objet livré pendant deux ans. Elle explique que 41 commandes défectueuses restent dans l’attente d’une prise en charge par la société Haas + Sohn France. Elle reproche au tribunal de commerce d’avoir limité l’obligation de garantie de la société Haas + Sohn France à la seule qualité de chauffage des appareils, et ce sans aucun fondement légal, contractuel ou jurisprudentiel.
D’autre part, elle invoque le non-respect des délais de livraison par la société Haas + Sohn France puisque, si l’annexe 3 attaché au contrat précise que les délais de livraison sont en règle générale de 7 à 10 jours ouvrables, au regard de l’historique des relations commerciales entre les sociétés, les délais de livraison se sont étalés plutôt entre 1 mois et demi à 4 mois, certaines commandes n’ayant même jamais été livrées depuis décembre 2021. Elle critique le jugement du tribunal de commerce qui n’a même pas répondu à ses arguments concernant le préjudice subi à cause des retards de la société Haas + Sohn France au mépris de l’article 455 du Code de procédure civile.
Dans ses conclusions envoyées au greffe par RPVA le 22 octobre 2024, la société Koch & Associés, liquidateur de la société Haas + Sohn France, demande au délégué du premier président de :
– à titre principal, déclarer irrecevable la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement du tribunal de commerce de Lyon du 10 juillet 2024 formée par la société Tôlerie de la Loire,
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la société Tôlerie de la Loire,
– à titre subsidiaire, débouter la société Tôlerie de la Loire de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 10 juillet 2024,
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions de la société Tôlerie de la Loire,
– à titre infiniment subsidiaire, subordonner l’exécution provisoire au placement sous séquestre des sommes à verser auprès du compte CARPA du bâtonnier de l’Ordre des avocats de Lyon au plus tard dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la décision,
– en tout état de cause, condamner la société Tôlerie de la Loire au paiement d’une somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
La société Koch & Associés soulève à titre principal l’irrecevabilité de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire en indiquant que la société Tôlerie de la Loire a rappelé l’exécution provisoire de droit en première instance et que la procédure de liquidation a été prononcée le 28 mai 2024 soit avant la décision de première instance rendue le 10 juillet 2024. Selon elle, retenir la date de l’audience de plaidoiries serait dénaturer la formulation claire de l’article 514-3 du Code de procédure civile.
A titre subsidiaire, elle souhaite le rejet de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire car la société Tôlerie de la Loire a reconnu devoir les sommes au paiement desquelles elle a été condamnée.
Elle relève que non seulement la société Tôlerie de la Loire ne s’est jamais engagée contractuellement à livrer des poêles silencieux mais qu’en plus elle n’a apporté aucune preuve concernant le bruit que feraient les poêles, sachant qu’aucune expertise indépendante au contradictoire des parties n’a été menée. Elle considère également qu’il n’y a pas lieu de mobiliser la garantie, les poêles accomplissant bien leur fonction de réchauffer un espace et les notices de montage et d’utilisation des poêles excluant de manière claire toute garantie de la défenderesse au titre des bruits qui pourraient être émis par les poêles livrés.
S’agissant des délais de livraison, elle argue ne s’être jamais engagée à respecter des délais de livraison définis et que ses conditions générales de vente l’autorisent à cesser les livraisons dans le cas où la société Tôlerie de la Loire n’exécuterait pas ses obligations contractuelles à son égard.
S’agissant des conséquences manifestement excessives soulevées par la partie adverse, la société Koch & Associés souligne que non seulement les sommes ne sont pas contestées par la société Tôlerie de la Loire mais que cette dernière ayant précipité les difficultés financières de la société Haas + Sohn France en ne procédant pas au règlement des poêles livrés, elle ne peut s’en prévaloir aujourd’hui.
Enfin, la société Koch & Associés demande à titre infiniment subsidiaire la consignation des sommes dues dans la mesure où il n’est pas garanti qu’à l’issue de la procédure d’appel, la société Tôlerie de la Loire puisse verser ces sommes car la crise du marché des poêles ayant fortement contribué à la déconfiture du groupe Haas + Sohn France l’affecte très certainement aussi en tant que distributeur spécialisé de ce type de produits, ce que semble confirmer l’absence de publication de ses comptes annuels de l’exercice 2023.
Dans ses conclusions envoyées au greffe le 3 janvier 2025, la société Tôlerie de la Loire maintient les demandes contenues dans son assignation.
Elle indique que la société Haas + Sohn France avait l’obligation de l’informer de l’ouverture de sa liquidation judiciaire dans les dix jours suivant celle-ci, soit au plus tard le 8 juin 2024, ce qu’elle n’a pas fait et que cette information lui aurait permis d’avoir connaissance de la procédure collective et de solliciter éventuellement la réouverture des débats afin de formuler des observations sur l’exécution provisoire qui pourrait lui être préjudiciable en raison de la liquidation judiciaire.
Elle estime que les conséquences manifestement excessives liées au prononcé de la liquidation judiciaire se sont nécessairement révélées après le jugement du tribunal de commerce de Lyon, au plus tôt au moment de la déclaration d’appel effectuée le 31 juillet 2024 et que sa demande est recevable même en l’absence de formulation d’observations sur l’exécution provisoire.
Elle ajoute ne pas disposer de liquidités suffisantes pour s’acquitter immédiatement des sommes mises à sa charge par le jugement du tribunal de commerce et sera contrainte dans pareil cas à solliciter l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire impliquant notamment le licenciement de ses 53 salariés.
Dans ses conclusions envoyées au greffe le 6 janvier 2025, la société Koch & Associés, maintient ses demandes contenues dans ses précédentes conclusions.
Elle fait valoir que le dirigeant de la société Tôlerie de la Loire a bien été informé de la procédure collective par courriel du 6 juin 2024.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
Attendu que l’article 514-3 du Code de procédure civile dispose dans son alinéa 1er que «En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.» ;
Attendu qu’aux termes de l’alinéa 2 de ce texte, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d’observations sur l’exécution provisoire n’est recevable que si, outre l’existence d’un moyen sérieux d’annulation ou de réformation, l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance ;
Attendu que la société Koch & Associés relève que la société Tôlerie de la Loire, qui n’a pas présenté d’observations sur l’exécution provisoire devant le tribunal de commerce, défaille à établir des conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à sa décision ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire n’a pas contesté être demeurée silencieuse sur l’exécution provisoire devant le tribunal de commerce de Lyon et il ne ressort pas de sa décision que de telles observations auraient été présentées ;
Attendu que pour être recevable en sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire, il lui appartient de rapporter la preuve de conséquences manifestement excessives révélées depuis la première instance ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire rappelle que si le jugement a été rendu le 10 juillet 2024, l’audience devant le tribunal de commerce de Lyon s’est tenue en date du 18 décembre 2023 et qu’elle ne pouvait faire valoir ses observations sur l’exécution provisoire qu’au regard des éléments connus à cette date ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire relève que la société Haas + Sohn France a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 28 mai 2024, soit après l’audience devant le tribunal de commerce de Lyon ;
Qu’elle soutient n’avoir également pas été informée de l’ouverture de la procédure collective dans les dix jours de celle-ci comme le prescrit l’article L. 622-22 du Code de commerce, ce qui aurait pu lui permettre de solliciter la réouverture des débats afin de formuler des observations sur l’exécution provisoire qui pourrait lui être préjudiciable en raison de cette liquidation judiciaire ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire indique qu’elle n’a été informée de l’existence de la liquidation judiciaire qu’au moment de la déclaration d’appel effectuée le 31 juillet 2024 et qu’il n’est donc pas contestable que l’existence de la liquidation judiciaire lui ait été révélée postérieurement au jour de l’audience ;
Attendu que la charge procédurale de la société Tôlerie de la Loire ayant été de saisir le premier juge d’observations sur les conséquences d’une exécution provisoire, cette dernière est bien fondée à soutenir que les conséquences manifestement excessives dont elle peut faire état pour appuyer la recevabilité de sa demande sont celles qui lui ont été révélées postérieurement à l’audience de plaidoiries devant le tribunal de commerce ; qu’en effet, elle ne pouvait faire valoir ses observations sur cette question qu’au regard des éléments connus au jour de l’audience ;
Attendu qu’en tout état de cause l’existence d’une procédure de liquidation judiciaire ne constitue pas nécessairement une conséquence manifestement excessive pour la partie adverse ;
Attendu que s’agissant de l’existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu’il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l’intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;
Que ce caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent ou d’une décision autorisant l’expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire soutient qu’en cas d’infirmation du jugement dont appel, les sommes payées par elle ne seront pas restituées par la société Haas + Sohn France ;
Attendu cependant qu’il doit être rappelé qu’en cas de créance litigieuse, le liquidateur doit consigner les sommes sur la Caisse des dépôts et des consignations, qu’ainsi le risque de non-restitution des sommes n’est pas avéré ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire produit une attestation de son expert-comptable indiquant que si elle «était dans l’obligation de payer ses 432 753 €, elle n’aurait pas les capacités financières de supporter cette sortie de trésorerie et de faire face à ses autres dettes» et qu’ainsi, «la mise en liquidation judiciaire de la société pourrait être la conséquence immédiate du fait de l’état de cessation de paiement et du risque majeur de ne pas pouvoir voir la société être en mesure de présenter un plan de développement suffisant pour assurer le maintien de son activité» ;
Que surtout, cette seule attestation est bien insuffisante à faire état d’une évolution péjorative des capacités financières de la société défenderesse depuis la fin de l’année 2023 et en tout état de cause que cette situation lui été révélée depuis que le tribunal de commerce a statué ; qu’ils étaient connus d’elle lors de l’audience devant cette juridiction le 18 décembre 2023 moment où elle savait être en difficulté pour faire face à ses difficultés de trésorerie ;
Attendu que, comme l’a souligné la société Haas + Sohn France, il apparaît que la situation financière précaire de la société Tôlerie de la Loire ne provient pas uniquement de la condamnation à payer la somme de 432 753 € mais qu’au contraire le fait de ne pas avoir payé les factures de Haas + Sohn France lui a permis d’éviter l’état de cessation des paiements à un stade antérieur ;
Attendu qu’à raison de la carence de la société Tôlerie de la Loire à démontrer les conséquences manifestement excessives révélées depuis la première instance, il convient en conséquence de déclarer irrecevable sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire ;
Attendu qu’il n’est pas besoin d’examiner la demande infiniment subsidiaire de consignation présentée par la société Koch & Associés, car au surplus la demanderesse affirme son incapacité à couvrir les condamnations assorties de l’exécution provisoire ;
Attendu que la société Tôlerie de la Loire succombe et doit supporter les dépens comme indemniser son adversaire des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,
Vu la déclaration d’appel du 31 juillet 2024,
Déclarons la S.A.S. Tôlerie de la Loire irrecevable en sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire,
Condamnons la S.A.S. Tôlerie de la Loire aux dépens de ce référé et à verser à la S.A.S. Koch & Associés, liquidateur judiciaire de la société Haas + Sohn France une indemnité de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
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