L’Essentiel : M. [W] [J], représenté par le cabinet LR Gestion, a signé un bail commercial avec la société Optique [M] pour neuf ans, à compter du 1er avril 2020, avec un loyer trimestriel de 2.000,96 euros. En septembre 2020, des désordres tels que des affaissements et des fissures ont été signalés. Une expertise en août 2021 a révélé que ces problèmes résultaient de la vétusté et d’un manque d’entretien. Malgré les recommandations de sécurité, M. [J] a délivré un commandement pour loyers dus, entraînant une procédure judiciaire. Le 20 avril 2023, l’appel de M. [J] a été déclaré irrecevable.
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Constitution du bail commercialM. [W] [J], représenté par le cabinet LR Gestion, a signé un bail commercial avec la société Optique [M] pour une durée de neuf ans à partir du 1er avril 2020, concernant des locaux à usage de commerce d’opticien, avec un loyer trimestriel de 2.000,96 euros. Désordres signalésEn septembre 2020, M. [H], gérant de la société Optique [M], a signalé des problèmes d’affaissement du sol et de fissures dans les parties communes de l’immeuble au cabinet LR Gestion. M. [J] a alors déclaré un sinistre à son assureur, la société BPCE Iard, en raison de ces désordres. Expertises et constatationsUne expertise réalisée en août 2021 a conclu que les désordres étaient dus à la vétusté et au manque d’entretien de l’ouvrage. Un autre expert, M. [V], a recommandé des mesures de sécurité urgentes après avoir constaté des affaissements et une fragilité structurelle. Constatations judiciairesLe 5 novembre 2021, un huissier a constaté des fissures et des décollements dans les parties communes. Un rapport d’architecte a également recommandé des travaux d’étaiement pour sécuriser les locaux. Arrêtés de mise en sécuritéLa mairie de [Localité 5] a pris un arrêté de mise en sécurité ordinaire le 31 décembre 2021, suivi d’un arrêté de mise en sécurité urgente le 27 juin 2022. Un arrêté du 9 janvier 2023 a ensuite ramené la situation à un état de mise en sécurité ordinaire. Commandement et assignationLe 26 avril 2022, M. [J] a délivré un commandement à la société Optique [M] pour le paiement des loyers dus. Il a ensuite assigné la société devant le tribunal judiciaire de Versailles pour résiliation du bail. Décisions judiciairesLe 20 avril 2023, le juge de la mise en état a suspendu le paiement des loyers dus par la société Optique [M] et a rejeté d’autres demandes. M. [J] a interjeté appel de cette ordonnance le 24 avril 2023. Irrecevabilité de l’appelLe magistrat a déclaré irrecevables les conclusions de la société Optique [M] et a soulevé d’office l’irrecevabilité de l’appel de M. [J], en raison de la nature de l’ordonnance du juge de la mise en état, qui ne peut faire l’objet d’un appel immédiat. Conclusion de la courLa cour a déclaré l’appel de M. [J] irrecevable et l’a condamné aux dépens, statuant ainsi sur la légalité des décisions prises par le juge de la mise en état. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de l’appel interjeté par M. [J] ?L’appel interjeté par M. [J] est déclaré irrecevable en vertu de l’article 795 du code de procédure civile. Cet article stipule que « les ordonnances du juge de la mise en état ne sont pas susceptibles d’opposition. Elles ne peuvent être frappées d’appel ou de pourvoi en cassation qu’avec le jugement statuant sur le fond. Toutefois, elles sont susceptibles d’appel dans les cas et conditions prévus en matière d’expertise ou de sursis à statuer. Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque : 1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l’instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l’extinction ; 2° Elles statuent sur une exception de procédure ou une fin de non-recevoir ; 3° Elles ont trait aux mesures provisoires ordonnées en matière de divorce ou de séparation de corps ; 4° Dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. » Dans le cas présent, le juge de la mise en état a ordonné la suspension du paiement des loyers et charges dus par la société Optique [M] à M. [J] à compter, rétroactivement, du 1er janvier 2022. Cette décision ne constitue pas une provision accordée au créancier, ce qui exclut la possibilité d’un appel immédiat selon les dispositions de l’article 795. Ainsi, l’appel interjeté par M. [J] est irrecevable. Quelles sont les conséquences de la décision du juge de la mise en état ?La décision du juge de la mise en état a des conséquences significatives sur la relation contractuelle entre M. [J] et la société Optique [M]. En effet, la suspension du paiement des loyers et charges a été ordonnée rétroactivement à compter du 1er janvier 2022, ce qui implique que la société Optique [M] n’est pas tenue de payer les loyers pour cette période. L’article 789 du code de procédure civile précise que « le juge peut accorder des provisions ad litem, c’est-à-dire des sommes d’argent destinées à faire face aux frais de justice, ou des provisions qui peuvent être accordées au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. » Dans ce cas, le juge a estimé que l’existence de l’obligation de paiement des loyers était sérieusement contestable, ce qui a conduit au rejet des demandes de provision. De plus, le juge a également rejeté les autres demandes formées par les parties, ce qui signifie que les litiges relatifs aux indemnités d’éviction et d’occupation sans droit ni titre n’ont pas été tranchés. Ainsi, la décision du juge de la mise en état a pour effet de maintenir un flou juridique sur les obligations respectives des parties jusqu’à ce qu’une décision sur le fond soit rendue. Comment le principe de séparation des pouvoirs est-il respecté dans cette affaire ?Le principe de séparation des pouvoirs est un fondement du droit français, garantissant que les différentes branches du gouvernement (exécutif, législatif, judiciaire) exercent leurs fonctions sans empiéter sur celles des autres. Dans cette affaire, M. [J] soutient que le juge de la mise en état a commis un excès de pouvoir en ne respectant pas ce principe. Il fait valoir que le juge a outrepassé ses compétences en accordant la suspension des loyers, contredisant ainsi une décision administrative définitive émise par la mairie de [Localité 5]. Cependant, le juge de la mise en état a justifié sa décision en se basant sur les circonstances de fait et de droit qui lui étaient soumises, affirmant que les locaux présentaient toujours un risque d’effondrement et ne pouvaient être exploités conformément à leur destination contractuelle. Il a donc agi dans le cadre de ses compétences judiciaires, sans empiéter sur les prérogatives de l’autorité administrative. Ainsi, même si M. [J] conteste cette décision, le juge n’a pas violé le principe de séparation des pouvoirs, car il a exercé son pouvoir d’appréciation en fonction des éléments de preuve présentés. En conséquence, l’argument de M. [J] sur ce point ne peut être retenu. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 51G
Chambre commerciale 3-1
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 JANVIER 2025
N° RG 23/02799 – N° Portalis DBV3-V-B7H-V2LT
AFFAIRE :
[W] [J]
C/
S.A.R.L.U. OPTIQUE [M]
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 20 Avril 2023 par le Juge de la mise en état du tribunal judiciaire de VERSAILLES
N° Chambre : 3
N° RG : 22/03820
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Dan ZERHAT
Me Antoine DE LA FERTE
TJ VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [W] [J] venant aux droits de Monsieur [O] [J]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d’Avocats, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 et Me DE GAUDRIC de la SELARL DE GAUDRIC, Plaidant, avocat au barreau des Hauts de Seine
APPELANT
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S.A.R.L.U. OPTIQUE [M]
RCS Versailles n° 478 214 687
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Aurélie GOUAZOU & Me Antoine DE LA FERTE de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocats au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 283
INTIMEE
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Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 07 Novembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente,
Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseillère,
Madame Bérangère MEURANT, Conseillère,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
Suivant acte sous seing privé du 18 mai 2020, M. [W] [J], représenté par le cabinet LR Gestion, a consenti à la société Optique [M], représentée par son gérant, M. [M] [H], un bail commercial en renouvellement d’une durée de neuf années à compter du 1er avril 2020, portant sur des locaux situés [Adresse 1] à [Localité 5] (78), à usage de commerce d’opticien, moyennant un loyer trimestriel de 2.000,96 euros.
Au mois de septembre 2020, M. [H] s’est plaint auprès du cabinet LR Gestion de l’affaissement du sol du couloir situé dans les parties communes de l’immeuble, mais également de la présence de nombreuses fissures.
Considérant que ces désordres pouvaient provenir de mouvements de terrain différentiels et relever de la garantie catastrophes naturelles de son contrat d’assurance habitation, M. [J] a déclaré le sinistre auprès de son assureur, la société BPCE Iard. La mesure d’expertise diligentée, confiée à M. [Z] [F] de la société Texa Expertises, a conclu, au mois d’août 2021, que les désordres constatés avaient pour origine la vétusté de l’ouvrage et son absence d’entretien.
M. [H] a alors saisi M. [L] [V], expert en techniques de bâtiment qui, après s’être rendu sur les lieux le 7 octobre 2021, a constaté un affaissement progressif et vivant, une perte de résistance, un tassement des solives des rez-de-chaussée et R+1 ainsi qu’une importante fragilité de l’ensemble vertical. M. [V] a préconisé une mise en sécurité urgente des lieux, avec l’installation d’une charpente provisoire, d’un étaiement de l’ensemble de la partie couloir du rez-de-chaussée et d’une reprise d’étayage de la voûte de la cave.
En parallèle, la société Optique [M] et M. [H] ont fait établir, le 5 novembre 2021, un procès-verbal de constat aux termes duquel l’huissier de justice a relevé, au niveau des parties communes du rez-de-chaussée, côté rue, l’existence de multiples fissures, de plusieurs décollements et d’un phénomène d’affaissement en direction de l’un des murs.
Dans un rapport technique établi le 24 novembre 2021 à la demande de M. [J], M. [K], architecte, lui a conseillé, à titre conservatoire et de façon urgente, de procéder à l’étaiement des locaux reprenant tous les efforts au sous-sol et déchargeant les planchers.
Le 31 décembre 2021, la mairie de [Localité 5] a pris un arrêté de mise en sécurité ordinaire concernant l’immeuble situé [Adresse 1]. Elle a notamment demandé à M. [J] de mettre en place des étais verticaux et horizontaux dans le couloir de rez-de-chaussée.
En raison de la réalisation des travaux d’étaiement préconisés, un arrêté du 20 avril 2022 a ordonné la mainlevée de l’état de mise en sécurité ordinaire.
Par acte du 26 avril 2022, M. [J] a fait délivrer à la société Optique [M] un commandement visant la clause résolutoire d’avoir à s’acquitter des échéances des deux premiers trimestres 2022, pour un montant total, déduction faite du coût de l’acte, de 4.001,92 euros. Il a également mis en demeure la société Optique [M] d’avoir à respecter les articles 6, 7 et 14 de la clause « charges et conditions » du contrat de bail relatifs à la destination des lieux loués et aux travaux effectués.
Par acte du 22 juin 2022, M. [J] a fait assigner la société Optique [M] devant le tribunal judiciaire de Versailles en résiliation de plein droit ou, à défaut, résiliation judiciaire du contrat de bail.
Le 27 juin 2022, la mairie de [Localité 5] a pris un arrêté de mise en sécurité urgente affectant le bâtiment situé [Adresse 1], dont dépendent les locaux loués.
Puis, aux termes d’un arrêté du 9 janvier 2023, la mairie de [Localité 5] a ordonné la mainlevée de l’état de mise en sécurité urgente affectant le bâtiment et l’a ramené à un état de mise en sécurité ordinaire.
Par ordonnance du 20 avril 2023, le juge de la mise en état a :
– ordonné la suspension du paiement des loyers et charges dus par la société Optique [M] à M. [J] pour les locaux situés [Adresse 1] à [Localité 5] (78) à compter, rétroactivement, du 1er janvier 2022 et jusqu’au premier jour du mois suivant l’envoi de la notification ou l’affichage de l’arrêté de mainlevée de l’arrêté de mise en sécurité, la suspension se poursuivant tant qu’un arrêté de mise en sécurité ordinaire ou urgente affectera l’immeuble dont dépendent les locaux loués ;
– rejeté les autres demandes formées par la société Optique [M] et M. [J] ;
– condamné M. [J] à payer à la société Optique [M] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés pour l’incident ;
– condamné M. [J] aux dépens de l’incident ;
– renvoyé les parties à l’audience de mise en état du 13 juin 2023.
Par déclaration du 24 avril 2023, M. [J] a interjeté appel de cette ordonnance.
Par ordonnance d’incident du 23 mai 2024, le magistrat délégué par le premier président a déclaré irrecevables les conclusions d’intimée et l’appel incident de la société Optique [M] ainsi que les pièces communiquées au soutien desdites conclusions. Il s’est déclaré incompétent pour statuer sur les autres demandes de M. [J].
Par dernières conclusions n°5 remises au greffe et notifiées par RPVA le 9 février 2024, M. [J] demande à la cour de :
– le déclarer recevable en ses demandes ;
– rejeter l’ensemble des demandes de la société Optique [M] ;
– infirmer ou annuler l’ordonnance du 20 avril 2023 ;
in limine litis :
– juger son appel recevable ;
– juger caduc et irrecevable l’appel incident et irrecevables les conclusions d’appel de la société Optique [M] ;
– condamner la société Optique [M] à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens incluant les commandements dont distraction au profit de Me Dan Zerhat, avocat au barreau de Versailles ;
y ajoutant,
– confirmer partiellement l’ordonnance du juge de la mise en état en ce qu’elle a rejeté les demandes de la société Optique [M] ;
– infirmer partiellement l’ordonnance du juge de la mise en état en ce qu’elle a :
– méconnu le principe de séparation des pouvoirs entre les juridictions administratives et judiciaire ;
– préjugé du non-respect d’une obligation de délivrance de la part de M. [J] ;
– préjugé de la non automaticité de l’acquisition de la clause résolutoire du bail en l’absence d’une assignation en opposition au commandement et de demande de délais de paiement, dans le délai d’un mois à compter de la notification dudit commandement ;
– condamné M. [J] à payer 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
et, statuant à nouveau,
– constater l’acquisition de la clause résolutoire du contrat de bail ;
– condamner la société Optique [M] à payer par provision la somme de 2.667,97 euros au titre des loyers commerciaux de janvier à avril 2022, la boutique étant restée ouverte du 1er janvier 2022 au 27 juin 2022 ;
– condamner la société Optique [M] à payer la somme de 56.115 euros à titre provisionnel au titre de l’indemnité d’occupation sans droit ni titre consentie par elle à la famille de son gérant ;
– condamner la société Optique [M] à lui payer la somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens incluant les commandements dont distraction au profit de Me Dan Zerhat, avocat au barreau de Versailles.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 3 octobre 2024.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément à l’ordonnance déférée et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l’article 455 du code de procédure civile.
Les conclusions de la société Optique [M] ont été déclarées irrecevables par le magistrat délégué par le premier président de sorte que la société Optique [M] est réputée s’approprier les motifs de l’ordonnance du juge de la mise en état.
En application de l’article 125 du code de procédure civile, la cour soulève d’office l’irrecevabilité de l’appel interjeté par M. [J] tirée de ce que l’ordonnance du juge de la mise en état ne peut faire l’objet d’un appel immédiat en vertu de l’article 795 du code de procédure civile. Dès lors que dans ses dernières conclusions n°5 notifiées le 9 février 2024, M. [J] développe plusieurs moyens sur la recevabilité de son appel, il n’y a pas lieu de rouvrir les débats.
Sur la recevabilité de l’appel-réformation :
M. [J] soutient que son appel est recevable. Il souligne que le juge de la mise en état a fait droit à la demande de la société Optique [M] de suspension des loyers à compter du 1er janvier 2022, ce qui impliquait le remboursement par le bailleur des loyers déjà payés pour mai et juin 2022, qui n’étaient donc plus dus. Il en déduit qu’une condamnation par provision a bien été prononcée. Il ajoute avoir formé devant le juge de la mise en état une demande provisionnelle concernant des indemnités d’occupation dues par les sous-locataires non autorisés de la société Optique [M].
Selon l’article 795 du code de procédure civile, « Les ordonnances du juge de la mise en état ne sont pas susceptibles d’opposition.
Elles ne peuvent être frappées d’appel ou de pourvoi en cassation qu’avec le jugement statuant sur le fond.
Toutefois, elles sont susceptibles d’appel dans les cas et conditions prévus en matière d’expertise ou de sursis à statuer.
Elles le sont également, dans les quinze jours à compter de leur signification, lorsque :
1° Elles statuent sur un incident mettant fin à l’instance, elles ont pour effet de mettre fin à celle-ci ou elles en constatent l’extinction ;
2° Elles statuent sur une exception de procédure ou une fin de non-recevoir ;
3° Elles ont trait aux mesures provisoires ordonnées en matière de divorce ou de séparation de corps;
4° Dans le cas où le montant de la demande est supérieur au taux de compétence en dernier ressort, elles ont trait aux provisions qui peuvent être accordées au créancier au cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. »
L’article 789 du code de procédure civile distingue les provisions ad litem des provisions qui peuvent être accordées au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Or, il résulte des dispositions combinées de l’article 789 et de l’article 795 du code de procédure civile que seules les décisions du juge de la mise en état accordant une provision au créancier lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable peuvent faire l’objet d’un appel immédiat pour autant que le montant de la demande soit supérieur au taux de ressort.
En l’espèce, le juge de la mise en état a ordonné la suspension du paiement des loyers et charges dus par la société Optique [M] à M. [J] à compter, rétroactivement, du 1er janvier 2022. Il ne résulte pas de cette décision que la société Optique [M] s’est vue accorder une provision, contrairement à ce que soutient M. [J].
En vertu de l’article 795 précité une telle décision de suspension du paiement par le preneur des loyers et charges n’est pas susceptible d’appel immédiat.
Le juge de la mise en état a en outre rejeté les autres demandes formées par la société Optique [M] et M. [J], la première ayant sollicité une provision à valoir sur l’indemnité d’éviction demandée au fond et le second une provision afférente à une indemnité d’occupation sans droit ni titre consentie à la famille du gérant de la société Optique [M].
En considérant que la décision sur la demande en paiement d’une indemnité d’éviction supposait de trancher au préalable par le juge du fond la question de la résiliation du bail, le juge de la mise en état a constaté que l’existence de l’obligation était sérieusement contestable.
Quant à la demande de provision formée par M. [J], le juge de la mise en état a énoncé clairement qu’elle se heurtait à une contestation sérieuse de sorte que son rejet ne peut faire l’objet d’un appel immédiat.
La décision entreprise n’est donc pas susceptible d’appel immédiat.
Sur l’appel-nullité :
Dans sa déclaration d’appel, M. [J] a formé un appel en annulation ou réformation sans mentionner d’appel-nullité. Dès lors toutefois qu’il invoque dans ses écritures un excès de pouvoir du juge de la mise en état, il y a lieu de considérer qu’il a également entendu former un appel-nullité.
M. [J] soutient que le juge de la mise en état n’a pas respecté le principe de la séparation des pouvoirs entre les autorités judiciaires et administratives et qu’il a ainsi commis un excès de pouvoir.
Il fait valoir qu’en passant outre la mainlevée d’arrêté de péril émise par le maire de [Localité 5] le 20 avril 2022 et en accordant rétroactivement la suspension des loyers, le premier juge est venu contredire une décision administrative définitive, non frappée d’appel par la société Optique [M].
Il considère que le juge de la mise en état ne pouvait estimer, alors que le preneur a payé spontanément les loyers de mai et juin 2022 et que sa boutique est restée ouverte entre le mois de janvier et le 27 juin 2022, que le péril aurait dû s’inscrire dans le cadre d’un arrêté de péril urgent.
Si pour accorder une suspension des loyers à la société Optique [M], le juge de la mise en état a considéré que les mesures provisoires de sécurisation initialement prescrites permettant d’écarter tout danger « auraient dû s’inscrire dans le cadre d’un arrêté de mise en sécurité urgente et que leur réalisation aurait dû conduire la mairie de [Localité 5] à ramener l’état de mise en sécurité urgente initial de l’immeuble à un état de mise en sécurité ordinaire », il n’a, à l’évidence, pas statué sur les arrêtés administratifs successifs dans le dispositif de son ordonnance critiquée par M. [J] et, ajoutant, qu’ « en toute hypothèse, et indépendamment des qualifications retenues sur le plan administratif, les rapports versés aux débats établissent qu’entre le 20 avril 2022 et le 27 juin 2022, les locaux présentaient toujours un sérieux risque d’effondrement et ne pouvaient être exploités conformément à leur destination contractuelle, les mesures conservatoires entreprises pour la sécurisation des lieux étant insuffisantes si ce n’est inexistantes » il s’est borné à apprécier les circonstances de fait et de droit qui lui étaient soumises pour en déduire que la suspension du paiement des loyers et charges était justifiée, même rétroactivement, son appréciation étant indépendante des arrêtés administratifs.
A supposer que la méconnaissance par le juge judiciaire des limitations de sa compétence constitue un excès de pouvoir, en statuant comme il l’a fait après avoir motivé ainsi sa décision, le juge de la mise en état n’a pas outrepassé la compétence du juge judiciaire et n’a donc pas porté atteinte au principe de séparation des juridictions administratives et judiciaires.
Il y a donc lieu de déclarer irrecevable l’appel interjeté par M. [J] le 24 avril 2023 à l’encontre de l’ordonnance du juge de la mise en état du 20 avril 2023.
M. [J] sera condamné aux dépens d’appel.
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Déclare irrecevable l’appel interjeté par M. [W] [J] le 24 avril 2023 à l’encontre de l’ordonnance rendue le 20 avril 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Versailles ;
Condamne M. [W] [J] aux dépens.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Florence DUBOIS-STEVANT, Présidente, et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier La Présidente
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