Suspension de l’exécution en raison d’une contestation d’injonction de paiement

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Suspension de l’exécution en raison d’une contestation d’injonction de paiement

L’Essentiel : La SA COFIDIS a engagé une saisie-attribution sur les comptes de Monsieur [E] en se fondant sur une ordonnance d’injonction de payer de 1997. Contestant cette saisie, Monsieur [E], assisté de son curateur, a saisi le juge de l’exécution le 7 août 2024, demandant un sursis à statuer et la caducité de l’ordonnance. Il a soutenu que celle-ci n’avait pas été signifiée dans le délai légal. Le juge a jugé la contestation recevable, ordonnant un sursis à statuer jusqu’à la décision du tribunal de Nantes, avec une audience prévue pour le 17 décembre 2024.

Contexte de la Saisie-Attribution

La SA COFIDIS a initié une saisie-attribution sur les comptes bancaires de Monsieur [B] [E] en se basant sur une ordonnance d’injonction de payer datée du 26 août 1997, qui a été revêtue de la formule exécutoire le 30 septembre 1997. Cette saisie a été réalisée par acte en date du 2 juillet 2024 et dénoncée le 8 juillet 2024.

Contestation de la Saisie par Monsieur [E]

Monsieur [E], assisté de son curateur, a contesté la saisie en assignant la SA COFIDIS devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux le 7 août 2024. Lors de l’audience du 8 octobre 2024, il a demandé un sursis à statuer en attendant la décision du tribunal judiciaire de Nantes, ainsi que la caducité de l’ordonnance d’injonction de payer et la mainlevée de la saisie-attribution.

Arguments de Monsieur [E]

Monsieur [E] a soutenu que l’ordonnance d’injonction de payer n’ayant pas été signifiée dans le délai de six mois, elle devait être déclarée non avenue. Il a également affirmé avoir formé opposition à cette ordonnance le 30 juillet 2024, ce qui justifiait le sursis à statuer.

Position de la SA COFIDIS

La SA COFIDIS a également demandé un sursis à statuer, arguant que l’opposition de Monsieur [E] nécessitait que la décision soit suspendue jusqu’à ce que la juridiction du fond se prononce.

Décision du Juge de l’Exécution

Le juge a déclaré la contestation de la saisie-attribution recevable, ordonnant un sursis à statuer jusqu’à la décision du juge des contentieux de la protection de Nantes concernant l’opposition formée par Monsieur [E]. L’affaire a été renvoyée à l’audience du 17 décembre 2024.

Conséquences des Demandes

Le juge a réservé les dépens et a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer l’article 700 du Code de procédure civile, soulignant que la décision était exécutoire de droit à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de la contestation de la saisie-attribution par Monsieur [E] ?

La recevabilité de la contestation de la saisie-attribution est régie par les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution.

Ces articles stipulent que :

« Toute contestation relative à la saisie est formée dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat. En l’absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée par l’acte de saisie.

Toutefois, le débiteur saisi qui n’aurait pas élevé de contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l’indu devant le juge du fond compétent. »

L’article R211-11 précise également que :

« A peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur.

Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.

L’auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l’assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l’exécution au plus tard le jour de l’audience. »

Dans le cas présent, Monsieur [E] a contesté la saisie-attribution par une assignation délivrée le 7 août 2024, alors que la dénonciation de la saisie a eu lieu le 8 juillet 2024.

La contestation était donc recevable jusqu’au 9 août 2024.

Monsieur [E] a également justifié l’envoi du courrier recommandé à l’huissier le 7 août 2024, ce qui confirme la recevabilité de sa contestation.

Quelles sont les implications du sursis à statuer dans cette affaire ?

Le sursis à statuer est régi par l’article 378 du Code de procédure civile, qui dispose que :

« La décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

Dans cette affaire, l’opposition formée par Monsieur [E] à l’ordonnance d’injonction de payer empêche la mainlevée immédiate de la saisie-attribution.

Cela signifie que tant que la juridiction compétente n’a pas statué sur l’opposition, le créancier ne peut pas obtenir le paiement des sommes rendues indisponibles.

Ainsi, le juge a ordonné un sursis à statuer jusqu’à ce que le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes ait statué sur l’opposition formée le 30 juillet 2024.

Cette décision permet de préserver les droits de Monsieur [E] en attendant la décision de la juridiction compétente, évitant ainsi des conséquences financières immédiates pour lui.

Quelles sont les conséquences des demandes de dépens et d’indemnisation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ?

Les demandes de dépens et d’indemnisation sont régies par l’article 696 et l’article 700 du Code de procédure civile.

L’article 696 précise que :

« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie. »

Cela signifie que, en principe, la partie qui perd le procès doit supporter les frais de justice, sauf décision contraire du juge.

L’article 700, quant à lui, prévoit que :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Dans cette affaire, le juge a décidé de réserver les dépens et de ne pas appliquer l’article 700, considérant que l’équité ne commandait pas une telle condamnation.

Cela signifie que, même si une partie pourrait théoriquement être condamnée à payer des frais, le juge a estimé qu’il n’y avait pas lieu de le faire dans ce cas particulier.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BORDEAUX

LE JUGE DE L’EXECUTION

JUGEMENT DU 19 Novembre 2024

DOSSIER N° RG 24/06975 – N° Portalis DBX6-W-B7I-ZNUA
Minute n° 24/ 431

DEMANDEURS

Monsieur [B] [E]
né le [Date naissance 4] 1955 à [Localité 7] (CONGO)
demeurant [Adresse 1]
[Localité 2]

Monsieur [H] [V], mandataire judiciaire à la protection des majeurs, es qualité de curateur renforcé de Monsieur [B] [E]
demeurant [Adresse 6]

représentés par Maître Julia BODIN, avocat au barreau de BORDEAUX

DEFENDEUR

SA COFIDIS, enregistrée au RCS de Lille Métropole sous le n° 325 307 106, prise en la personne de son représentant légal
dont le siège social est [Adresse 5]
[Localité 3]

représentée par Maître Caroline FABBRI, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

JUGE DE L’EXECUTION : Marie BOUGNOUX, Vice-présidente
GREFFIER : Géraldine BORDERIE, Greffier

A l’audience publique tenue le 08 Octobre 2024 en conformité au Code des Procédures Civiles d’Exécution et des articles L 311-12 et L 311-12-1 du Code de l’organisation judiciaire, les parties présentes ou régulièrement représentées ont été entendues et l’affaire a été mise en délibéré au 19 Novembre 2024, et le jugement prononcé par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
Le 19 novembre 2024
Copies Certifiées Conformes
avocats + dossier
par LRAR + LS aux parties

EXPOSE DU LITIGE

Se prévalant d’une ordonnance portant injonction de payer en date du 26 août 1997 revêtue de la formule exécutoire le 30 septembre 1997, la SA COFIDIS a fait diligenter une saisie-attribution sur les comptes bancaires de Monsieur [B] [E] par acte en date du 2 juillet 2024, dénoncée par acte du 8 juillet 2024.

Par acte de commissaire de justice en date du 7 août 2024, Monsieur [E] assisté par Monsieur [H] [V] son curateur, a fait assigner la SA COFIDIS devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bordeaux afin de contester cette saisie.

A l’audience du 8 octobre 2024 et dans ses dernières conclusions, Monsieur [E] sollicite à titre principal in limine litis le prononcé d’un sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal judiciaire de Nantes. Subsidiairement, il sollicite que la caducité de l’ordonnance soit prononcée, que la mainlevée de la saisie-attribution soit ordonnée outre la restitution de la somme de 996,74 euros. Il sollicite de ne pas être tenu aux frais d’exécution forcée et qu’en toute hypothèque l’exécution provisoire de la décision soit ordonnée, que la SA COFIDIS soit condamnée aux dépens et au paiement d’une somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Au soutien de ses prétentions, le demandeur fait valoir qu’il a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer le 30 juillet 2024 et que le sursis à statuer doit donc être prononcé dans l’attente de la décision du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes. Subsidiairement, il fait valoir que l’ordonnance servant de titre exécutoire n’ayant pas été signifiée dans le délai de 6 mois, elle doit être déclarée non avenue. Il en déduit que la mainlevée de la saisie-attribution doit être ordonnée.

A l’audience du 8 octobre 2024 et dans ses dernières écritures, la SA COFIDIS conclut au prononcé d’un sursis à statuer et à ce que les dépens soient réservés. La défenderesse fait valoir que l’opposition formée par Monsieur [E] impose que le sursis à statuer soit ordonné dans la présente instance jusqu’à ce que la juridiction du fond ait statué.

L’affaire a été mise en délibéré au 19 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur les demandes principales

– Sur la recevabilité

Les articles L211-4 et R211-11 du Code des procédures civiles d’exécution relatifs à la saisie-attribution disposent : « Toute contestation relative à la saisie est formée dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat.
En l’absence de contestation, le créancier requiert le paiement de la créance qui lui a été attribuée par l’acte de saisie.
Toutefois, le débiteur saisi qui n’aurait pas élevé de contestation dans le délai prescrit peut agir à ses frais en répétition de l’indu devant le juge du fond compétent. »
« A peine d’irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie sont formées dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L’auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. Il remet une copie de l’assignation, à peine de caducité de celle-ci, au greffe du juge de l’exécution au plus tard le jour de l’audience. »

L’article R232-7 du Code des procédures civiles d’exécution relatif à la saisie de droits d’associés prévoit quant à lui : « A peine d’irrecevabilité, la contestation est dénoncée le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie.
L’auteur de la contestation en informe le tiers saisi par lettre simple. »

Monsieur [E] a contesté la saisie-attribution pratiquée par une assignation délivrée le 7 août 2024 alors que le procès-verbal de saisie date du 2 juillet 2024 avec une dénonciation effectuée le 8 juillet 2024. La contestation de la saisie-attribution était donc recevable jusqu’au 9 août 2024.

Il justifie par ailleurs de l’envoi du courrier recommandé faisant état de la contestation portée adressé à l’huissier ayant réalisé la saisie-attribution en date du 7 août 2024.
Le demandeur doit donc être déclaré recevable en sa contestation de la saisie-attribution.

– Sur le sursis à statuer

L’article 378 du Code de procédure civile dispose :
« La décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

Par ailleurs il est constant que l’opposition formée à l’ordonnance d’injonction de payer fondant la saisie-attribution ne peut conduire à sa mainlevée immédiate mais fait obstacle, jusqu’à ce qu’il ait été statué sur l’opposition par la juridiction compétente, au paiement au créancier des sommes rendues indisponibles.

Il y a donc lieu d’ordonner le sursis à statuer au regard de l’opposition formée par Monsieur [E] le 30 juillet 2024, jusqu’à ce que le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes ait statué. L’affaire sera rappelée à l’audience du 17 décembre 2024.

Sur les autres demandes
Il résulte des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge de l’autre partie.

En outre l’article 700 du même code prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
Les dépens seront réservés. L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il sera rappelé que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

PAR CES MOTIFS
Le Juge de l’exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par décision avant dire droit et en premier ressort,
DECLARE la contestation de la saisie-attribution pratiquée sur les comptes bancaires de Monsieur [B] [E] à la diligence de la SA COFIDIS par acte en date du 2 juillet 2024, dénoncée par acte du 8 juillet 2024 recevable ;
ORDONNE un sursis à statuer dans l’attente de la décision du juge des contentieux de la protection de Nantes statuant sur l’opposition formée le 30 juillet 2024 à l’ordonnance portant injonction de payer rendue le 26 août 1997 à l’encontre de Monsieur [B] [E] ;
RENVOIE à l’audience du 17 décembre 2024 à 9h ;
DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
RESERVE les dépens ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire en application de l’article R 121-21 du code des procédures civiles d’exécution.

La présente décision a été signée par le Juge de l’exécution et par le Greffier présent lors de sa mise à disposition.

LE GREFFIER, LE JUGE DE L’EXECUTION,


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