Suspension de la procédure en attente d’une clarification sur le délai de prescription

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Suspension de la procédure en attente d’une clarification sur le délai de prescription

L’Essentiel : Le tribunal a jugé, le 27 novembre 2020, que la contamination de Madame [O] [N] par le virus de l’hépatite C résultait des actes médicaux des Docteurs [J] [W] et [Z] [I] entre 1975 et 1990. Après le décès de Madame [O] [N] en 2023, son époux et son fils ont repris l’instance. Le 23 octobre 2024, ils ont demandé un sursis à statuer concernant les préjudices de Madame [K] [N]. Les consorts [W] ont accepté cette demande pour éviter des recours multiples. Le juge a finalement décidé de surseoir à statuer lors de l’audience du 20 novembre 2024.

Contexte de l’affaire

Le tribunal a rendu un jugement le 27 novembre 2020, établissant que la contamination de Madame [O] [N] par le virus de l’hépatite C était due aux actes médicaux réalisés par les Docteurs [J] [W] et [Z] [I] veuve [W] entre 1975 et 1990. Les médecins ont été déclarés responsables des dommages causés à Madame [O] [N], et une expertise médicale a été ordonnée pour évaluer ses préjudices.

Évolution de la procédure

L’expert, le Docteur [X], a soumis son rapport définitif le 30 novembre 2022. Madame [O] [N] est décédée en 2023, et son époux et son fils ont repris l’instance en cours le 10 juin 2024. La cour d’appel de [Localité 8] a confirmé le jugement initial le 20 février 2024.

Demandes des consorts [N]

Le 23 octobre 2024, les consorts [N] ont demandé au juge de surseoir à statuer sur les préjudices subis par Madame [K] [N], en lien avec les manquements des Consorts [W], tout en précisant que le terme du sursis serait fixé à l’issue de la procédure initiée par Madame [U] [B] devant la Cour de cassation.

Réponse des consorts [W]

Le 29 octobre 2024, les consorts [W] et leur assureur ont indiqué qu’ils ne s’opposaient pas à la demande de sursis à statuer, souhaitant éviter la multiplication des recours. Ils ont également demandé que les dépens de l’incident soient réservés.

Décision du juge de la mise en état

Lors de l’audience d’incident du 20 novembre 2024, le juge a décidé de surseoir à statuer, en raison d’un recours en cassation concernant le délai de prescription applicable à la responsabilité des docteurs dans un autre dossier. Les dépens ont été réservés, et l’affaire a été renvoyée à l’audience de mise en état du 17 juin 2025.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 110 du Code de procédure civile concernant la suspension de l’instance ?

L’article 110 du Code de procédure civile stipule que « le juge peut suspendre l’instance lorsque l’une des parties invoque une décision frappée de tierce-opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation ».

Cette disposition permet au juge de mettre en pause une procédure en cours si une partie soulève une question de droit qui pourrait affecter l’issue de l’affaire.

Dans le cas présent, les consorts [N] ont demandé un sursis à statuer en raison d’un recours en cassation concernant une décision antérieure relative à la prescription de l’action en réparation.

Le juge a donc jugé pertinent de suspendre l’instance jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue sur cette question de prescription, afin d’éviter des décisions contradictoires.

Comment la question de la prescription est-elle abordée dans cette affaire ?

La question de la prescription est cruciale dans les affaires de responsabilité civile, notamment en matière de préjudice corporel.

Les consorts [N] soutiennent que la cour d’appel de Bordeaux a appliqué un délai de prescription de 5 ans à compter de la découverte de la contamination, ce qui est contesté.

Ils affirment que la prescription applicable devrait être de 10 ans à compter de la consolidation de l’état de la victime, conformément à l’article 2226 du Code civil, qui précise que « l’action en réparation d’un dommage corporel se prescrit par dix ans à compter de la date à laquelle la victime a connu ou aurait dû connaître les faits permettant d’exercer son action ».

Cette divergence sur le délai de prescription est d’autant plus significative que l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux fait l’objet d’un pourvoi en cassation, ce qui justifie le sursis à statuer.

Quelles sont les implications de la décision de surseoir à statuer sur les préjudices subis par Madame [N] ?

La décision de surseoir à statuer a des implications importantes pour les préjudices subis par Madame [N].

En suspendant l’instance, le juge permet d’attendre une clarification sur le délai de prescription applicable, ce qui pourrait influencer la possibilité pour les consorts [N] de faire valoir leurs droits à réparation.

Cela signifie que les préjudices ne seront pas examinés tant que la question de la prescription n’est pas résolue, ce qui pourrait retarder le processus de réparation.

Cette approche vise à éviter des décisions qui pourraient être remises en question par la suite, garantissant ainsi une meilleure sécurité juridique pour toutes les parties impliquées.

Quelles sont les conséquences de l’absence de conclusions écrites de la CPAM sur l’incident ?

L’absence de conclusions écrites de la CPAM (Caisse Primaire d’Assurance Maladie) sur l’incident peut avoir plusieurs conséquences.

Tout d’abord, cela peut être interprété comme un manque d’opposition à la demande de sursis à statuer, ce qui pourrait renforcer la position des consorts [N] et faciliter l’acceptation de leur demande par le juge.

En effet, l’article 16 du Code de procédure civile impose aux parties de collaborer à la manifestation de la vérité, et l’absence de prise de position de la CPAM pourrait être perçue comme une forme de désintérêt ou d’acceptation tacite des arguments présentés par les consorts [N].

Cela pourrait également signifier que la CPAM ne souhaite pas s’engager dans une procédure qui pourrait être prolongée par le recours en cassation, préférant attendre une décision définitive avant de prendre position sur les préjudices en question.

INCIDENT
SURSIS A STATUER

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
6EME CHAMBRE CIVILE

63A

N° de Rôle : N° RG 18/02293 – N° Portalis DBX6-W-B7C-R7BJ

N° de Minute :

AFFAIRE :

[R] [N], [M] [N],
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE, S.A. LA MEDICALE DE FRANCE, [A] [W], [S] [W], [Z] [G] VEUVE [W]

Grosse Délivrée
le :
à
Avocats : la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE
la SELARL COUBRIS ET ASSOCIES
Me Cécile FROUTE
l’ASSOCIATION LECLERE & ASSOCIÉS

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT

Le VINGT DEUX JANVIER DEUX MIL VINGT CINQ

Nous, Madame Louise LAGOUTTE, vice-président,
juge de la mise en état de la 6EME CHAMBRE CIVILE,
ede Madame Elisabeth LAPORTE, greffier présente lors des débats et de la mise à disposition.

Vu la procédure entre :

DEMANDEURS A L’INCIDENT

Monsieur [R] [N]
né le [Date naissance 1] 1939 à [Localité 18]
[Adresse 14]
[Adresse 16]
[Localité 10]

Monsieur [M] [N]
né le [Date naissance 6] 1970 à [Localité 15]
[Adresse 3]
[Localité 10]

Messieurs [N] intervenant tant en leurs noms propres qu’es qualités d’ayants droits de Madame [N] [O], né ele 09/01/1945 à [Localité 17] et décédée en cours de procédure le 13/08/2023 à [Localité 8]

représentés par Maître Jean-christophe COUBRIS de la SELARL COUBRIS ET ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX

Madame [O] [N]
née le [Date naissance 2] 1945 à [Localité 17]
de nationalité Française
décédée en cours de procédure le 13/08/2023 à [Localité 8]

DEFENDEURS A L’INCIDENT

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 19]
[Localité 8]

représentée par Maître Bénédicte DE BOUSSAC DI PACE de la SELARL BENEDICTE DE BOUSSAC DI PACE, avocats au barreau de BORDEAUX

S.A. LA MEDICALE DE FRANCE prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualités audit siège
[Adresse 7]
[Localité 13]

représentée par Maître Olivier LECLERE de l’ASSOCIATION LECLERE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Cécile FROUTE, avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur [A] [W]
de nationalité Française
[Adresse 12]
[Localité 9]

représenté par Maître Olivier LECLERE de l’ASSOCIATION LECLERE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Cécile FROUTE, avocat au barreau de BORDEAUX

Monsieur [S] [W]
de nationalité Française
[Adresse 11]
[Localité 8]

représenté par Maître Olivier LECLERE de l’ASSOCIATION LECLERE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Cécile FROUTE, avocat au barreau de BORDEAUX

Madame [Z] [G] VEUVE [W]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Localité 8]

représentée par Maître Olivier LECLERE de l’ASSOCIATION LECLERE & ASSOCIÉS, avocats au barreau de PARIS, Me Cécile FROUTE, avocat au barreau de BORDEAUX

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par jugement en date du 27 novembre 2020, le présent tribunal a :
– dit que la contamination de Madame [O] [N] par le virus de l’hépatite C était imputable aux actes de sclérose de varices pratiqués par les Docteurs [J] [W] et [Z] [I] veuve [W] entre le 19 décembre 1975 et le 27 mars 1990 ;
– déclarer les Docteurs [J] [W] et [Z] [I] veuve [W] responsables des conséquences dommageables imputables à la contamination de Madame [O] [N]
– ordonné une expertise médicale pour l’évaluation de ses préjudices.

L’expert désigné, le Docteur [X], a déposé son rapport d’expertise définitif le 30 novembre 2022.

Madame [O] [N] est décédée le [Date décès 5] 2023. Par conclusions notifiées le 10 juin 2024, son époux et son fils, Monsieur [R] [N] et Monsieur [M] [N], ont repris l’instance en cours devant la présente juridiction.

Par arrêt du 20 février 2024, la cour d’appel de [Localité 8] a confirmé le jugement du 27 novembre 2020.

Par conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 23 octobre 2024, les consorts [N] demandent au juge de la mise en état de :
Vu les articles 110 et 378 à 380-1 du Code de procédure civile,
– Sursoir à statuer sur les préjudices subis par Madame [K] [N] découlant des manquements imputables aux Consorts [W], sous la garantie de la société d’assurance LA MEDICALE ;
– Dire et juger que le terme du sursis est fixé à l’issue de la procédure initiée par Madame [U] [B] par devant la Cour de cassation ;
– Déclarer l’ordonnance à intervenir commun à l’organisme social ;
– Débouter les défendeurs de toutes demandes contraires.

Au terme de leurs conclusions notifiées par voie électronique le 29 octobre 2024, les consorts [W] et leur assureur demandent au juge de la mise en état de :
– Donner acte à LA MEDICALE et à Messieurs [W] du fait qu’ils ne s’opposent pas à la demande de sursis à statuer sur les préjudices subis par Madame [N] jusqu’au terme de la procédure initiée par Madame [B] devant la Cour de Cassation.
– Réserver les dépens de l’incident.

La CPAM n’a pas pris de conclusions écrites sur cet incident.

L’affaire est venue à l’audience d’incident du 20 novembre 2024 où elle a été retenue et mise en délibéré à la date du présent jugement.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte des dispositions de l’article 110 du code de procédure civile que “le juge peut suspendre l’instance lorsque l’une des parties invoque une décision frappée de tierce-opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation”.

Les requérants font valoir que dans le cadre de leur défense, les consorts [W] invoquent une prescription courte de l’action en réparation des victimes d’un préjudice de contamination retenue par la cour d’appel de [Localité 8] dans une des décisions reconnaissant la responsabilité des docteurs [W] pour un préjudice de contamination sur une autre victime, Madame [B]. Les requérants soutiennent que l’application d’un délai de prescription de 5 ans de droit commun à compter de la découverte de la contamination par la cour d’appel de Bordeaux dans cette décision du 14 novembre 2023 est critiquable et soutiennent que la prescription applicable est de 10 ans à compter de la consolidation de l’état de la victime. Ils ajoutent que l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux dans ce dossier fait l’objet d’un recours en cassation de Madame [B].

Les défendeurs ne s’opposent pas à la demande de sursis à statuer pour éviter la multiplication des recours.

Dans ces circonstances, il y a lieu de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision définitive statuant sur le délai de prescription suite au recours en cassation formé à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 14 novembre 2023 dans le dossier concernant Madame [B].

Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état de la 6ème chambre du tribunal judiciaire de Bordeaux, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par décision mise à disposition au greffe, les parties avisées selon l’article 450 al2 du code de procédure civile, et susceptible d’appel selon les modalités prévues à l’article 795 du code de procédure civile, par décision contradictoire ;

Sursoit à statuer dans l’attente d’une décision définitive sur la prescription (arrêt de la Cour de cassation ou arrêt de la cour d’appel de renvoi) suite au pourvoi en cassation formé par Madame [B] contre l’arrêt de la cour d’appel de Bordeaux du 14 novembre 2023;

Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 17 juin 2025

Joint les dépens de l’incident aux dépens du fond

Rejette toute demande plus ample au contraire

Ainsi fait et jugé les an, mois et jour susdits.

La présente ordonnance a été signée par Louise LAGOUTTE, juge de la mise en état, et Elisabeth LAPORTE, greffier.

LE GREFFIER LE JUGE DE LA MISE EN ÉTAT


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