L’Essentiel : M. et Mme [O] ont déposé une demande de traitement de surendettement, acceptée par la commission le 12 novembre 2020. Contestant les mesures imposées, ils ont vu leur recours rejeté par un jugement du 20 juillet 2021. Ils ont contesté l’obligation de vendre leur bien immobilier au prix du marché, arguant que le juge n’avait pas respecté le principe de la contradiction. La Cour a rappelé que les observations d’une partie doivent être communiquées à l’autre avant l’audience. L’arrêt a confirmé le jugement, mais a violé les droits des débiteurs en ne s’assurant pas de leur connaissance des observations.
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Demande de traitement de surendettementM. [O] et Mme [U] ont déposé une demande de traitement de leur situation financière le 27 février 2020. Une commission de surendettement a déclaré leur dossier recevable et, par décision du 12 novembre 2020, a imposé des mesures de désendettement. Contestation des mesuresLe 17 novembre 2020, M. et Mme [O] ont contesté les mesures imposées par la commission. Par la suite, un jugement rendu le 20 juillet 2021 par le juge des contentieux de la protection a confirmé ces mesures. Grief concernant la vente du bien immobilierM. et Mme [O] ont fait grief à l’arrêt de confirmer l’obligation de vendre leur bien immobilier au prix du marché, soit 220 000 euros. Ils ont soutenu que le juge devait respecter le principe de la contradiction et s’assurer que les observations écrites d’un créancier avaient été portées à leur connaissance avant d’être prises en compte. Réponse de la CourLa Cour a rappelé que le juge doit faire respecter le principe de la contradiction et que les parties doivent pouvoir débattre des éléments présentés. Elle a également précisé que les observations d’une partie doivent être communiquées à l’autre avant l’audience. Violation des droits des débiteursL’arrêt a confirmé le jugement en se basant sur un courrier d’un créancier, sans s’assurer que M. et Mme [O] avaient eu connaissance de ces observations. La cour d’appel a ainsi violé les dispositions légales relatives à la procédure contradictoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le principe de la contradiction en matière de procédure civile ?Le principe de la contradiction est un fondement essentiel du droit procédural, stipulé à l’article 16 du code de procédure civile. Cet article dispose que : « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement. » Ce principe garantit que chaque partie a la possibilité de connaître et de répondre aux arguments et aux preuves présentés par l’autre partie. Ainsi, toute décision rendue sans que les parties aient pu débattre des éléments présentés est susceptible d’être annulée pour violation de ce principe. Quelles sont les obligations du juge en matière de communication des observations des parties ?L’article R. 713-4 du code de la consommation précise les obligations du juge concernant la communication des observations des parties. Il énonce que : « Dans les cas où il statue par jugement, le juge convoque les parties intéressées ou les invite à produire leurs observations, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Lorsque les parties sont convoquées, la procédure est orale. En cours d’instance, toute partie peut aussi exposer ses moyens par lettre adressée au juge à condition de justifier que l’adversaire en a eu connaissance avant l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. » Cela signifie que le juge doit s’assurer que toutes les parties ont eu connaissance des observations et des documents échangés avant de rendre sa décision. Le non-respect de cette obligation peut entraîner une violation des droits de la défense et, par conséquent, l’annulation de la décision rendue. Comment la cour d’appel a-t-elle violé les articles cités dans son arrêt ?Dans l’affaire examinée, la cour d’appel a confirmé les mesures imposées par la commission de surendettement sans s’assurer que les observations d’un créancier avaient été portées à la connaissance de M. et Mme [O]. En effet, l’arrêt mentionne que : « Il ne résulte pas de la procédure que les observations et les pièces de ce créancier, qui n’était pas présent lors de l’audience, avaient été portées à la connaissance de M. et Mme [O]. » Cette omission constitue une violation des articles 16 du code de procédure civile et R. 713-4 du code de la consommation, car les débiteurs n’ont pas eu l’opportunité de débattre des éléments présentés par le créancier. Ainsi, la cour d’appel a agi en méconnaissant le principe de la contradiction, ce qui a conduit à une décision potentiellement injuste. |
FD
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 novembre 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 1086 F-B
Pourvoi n° C 22-20.560
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
1°/ M. [Y] [O],
2°/ Mme [J] [U], épouse [O],
tous deux domiciliés [Adresse 4],
ont formé le pourvoi n° C 22-20.560 contre l’arrêt rendu le 23 juin 2022 par la cour d’appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à la société [9], dont le siège est [Adresse 13],
2°/ à la société [10], dont le siège est chez [14], [Adresse 2],
3°/ au SIP de [Localité 8], dont le siège est [Adresse 7],
4°/ à la société [5], dont le siège est chez [12], [Adresse 3],
5°/ à la trésorerie de [Localité 11], dont le siège est [Adresse 7],
6°/ à la société [6], société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. et Mme [O], et l’avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l’audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 23 juin 2022), M. [O] et Mme [U], son épouse, ont déposé, le 27 février 2020, une demande de traitement de leur situation financière.
2. Une commission de surendettement a déclaré leur dossier recevable et, par décision du 12 novembre 2020, les a orientés vers des mesures imposées.
3. Le 17 novembre 2020, M. et Mme [O] ont contesté ces mesures.
4. Par un jugement du 20 juillet 2021, le juge des contentieux de la protection d’un tribunal judiciaire a confirmé les mesures imposées par la commission de surendettement.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. et Mme [O] font grief à l’arrêt, statuant sur les mesures imposées par la commission de surendettement de la Savoie le 12 novembre 2020, de confirmer l’obligation de mettre en vente leur bien immobilier au prix du marché, soit à la somme de 220 000 euros, alors : « que lorsqu’il statue sur une demande de traitement d’une situation de surendettement, le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, s’il peut tenir compte des observations écrites qu’il a autorisées une partie à produire, c’est à la condition de s’assurer que ces observations ont été portées à la connaissance de l’autre partie ; qu’en confirmant les mesures de désendettement imposées par la commission de surendettement de la Savoie le 12 novembre 2020, et notamment celle imposant à M. et Mme [O] de procéder à la vente de leur bien immobilier au prix du marché, soit la somme de 220.000 euros, après avoir tenu compte des observations écrites du [9] figurant dans un courrier reçu au greffe de la Cour le 28 avril 2022, sans s’être assurée que ces observations avaient été portées préalablement à la connaissance de M. et Mme [O], la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile. »
Vu l’article 16 du code de procédure civile et l’article R. 713-4 du code de la consommation :
6. Aux termes du premier de ces textes, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement.
7. Selon le second, dans les cas où il statue par jugement, le juge convoque les parties intéressées ou les invite à produire leurs observations, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Lorsque les parties sont convoquées, la procédure est orale. En cours d’instance, toute partie peut aussi exposer ses moyens par lettre adressée au juge à condition de justifier que l’adversaire en a eu connaissance avant l’audience par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La partie qui use de cette faculté peut ne pas se présenter à l’audience, conformément au second alinéa de l’article 446-1 du code de procédure civile.
8. Pour confirmer le jugement, l’arrêt, après avoir mentionné que les créanciers ne sont pas présents ou représentés, retient qu’il résulte d’un courrier du 27 avril 2022, adressé par le [9], et dont les termes ne sont pas contestés par les débiteurs, que la déchéance du terme du crédit immobilier a été prononcée le 5 novembre 2020, soit avant que le dossier de surendettement déposé le 27 février 2020 ait été déclaré recevable.
9. En statuant ainsi, alors qu’il ne résulte pas de la procédure que les observations et les pièces de ce créancier, qui n’était pas présent lors de l’audience, avaient été portées à la connaissance de M. et Mme [O], la cour d’appel a violé les textes susvisés.
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