En matière de recouvrement de cotisations pour non déclaration d’artistes, la mention ‘ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’ est équivoque et ne suffit pas à établir que le GUSO est bel est bien représenté, dans le cadre d’une instance, par Pôle emploi – et non par ‘Pôle emploi services’ ainsi que l’ont requis de manière criticable les premiers juges, la capacité juridique de ‘Pôle emploi services’ n’étant pas plus établie que celle du GUSO.
La cour d’appel ne dispose d’aucun élément susceptible de l’assurer que Pôle emploi est intervenu dans le cadre de la présente instance afin d’assurer la représentation en justice de son dispositif, le GUSO.
Le GUSO ne justifie pas en réalité d’une qualité à défendre en première instance ; seul Pôle emploi, doté de la personnalité morale, pouvait assurer une représentation en justice.
L’article L. 7122-23 du code du travail en vigueur jusqu’au 1er janvier 2019 prévoyait :
‘Les groupements et les personnes mentionnés à l’article L. 7122-22 procèdent auprès d’un organisme habilité par l’Etat aux déclarations obligatoires liées à l’embauche et à l’emploi sous contrat de travail à durée déterminée :
1° Des artistes du spectacle mentionnés à l’article L. 7121-2 ;
2° Des ouvriers et des techniciens concourant au spectacle, engagés pour pourvoir l’un des emplois figurant sur une liste déterminée par décret en Conseil d’Etat.’
Et selon selon l’article 1er de l’arrêté du 16 décembre 2008 portant désignation de l’organisme habilité pour le guichet unique du spectacle vivant :
‘L’organisme habilité visé à l’article L. 7122-23 du code du travail est l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du même code, à compter de la date de création de cette institution telle que prévue par l’article 9 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.’
Enfin, L. 5312-1 du code du travail en vigueur du 1er janvier 2011 au 1er septembre 2017 définit les missions imparties à ‘une institution nationale publique [désignée sous le nom de ‘Pôle emploi’ à compter du 7 mars 2014] dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière’.
En application de ces textes, le Guichet unique du spectacle occasionnel (GUSO) permet aux organisateurs non professionnels de spectacles vivants, employant ou souhaitant employer ponctuellement un artiste ou un technicien du spectacle, de remplir leurs obligations déclaratives et de paiement des cotisations et contributions aux organismes de protection sociale. La gestion opérationnelle du GUSO est dévolue au Pôle emploi services qui assure notamment des missions nationales pour Pôle emploi. Le contrôle et l’application par les employeurs de la législation relative au GUSO sont confiées aux inspecteurs du recouvrement de l’Urssaf et des Caisses Générales de Sécurité Sociale (CGSS).
La mairie de [Localité 7] a été contrôlée par l’Urssaf de Picardie pour non-déclaration d’artistes au GUSO lors d’un festival de spectacles vivants en 2013, ainsi que pour l’engagement d’un orchestre belge pour des cérémonies patriotiques. L’Urssaf a redressé la mairie pour des cachets versés à des artistes et à l’orchestre, représentant un montant global de cotisations dues. La mairie a contesté les chefs de redressement, arguant que les artistes n’étaient pas des intermittents du spectacle et que l’orchestre était composé de retraités bénéficiant d’une couverture sociale. Malgré les justificatifs fournis, l’Urssaf a maintenu les redressements. La mairie a saisi la commission de recours amiable puis le tribunal des affaires de sécurité sociale, qui a maintenu le redressement. La mairie a interjeté appel, contestant la capacité d’ester en justice du GUSO et demandant l’annulation du redressement. La cour d’appel a déclaré nulle l’intervention du GUSO, ordonné à la mairie de [Localité 7] d’appeler Pôle emploi en intervention forcée, et a réservé sa décision sur les demandes des parties.
Affaire jugée : Nulle pour irrégularité de fond l’intervention du Guichet unique du spectacle occasionnel
La cour a déclaré nulle pour irrégularité de fond non régularisable l’intervention à l’instance du Guichet unique du spectacle occasionnel, ainsi que ses conclusions soutenues en première instance et devant la cour d’appel.
Jugement infirmé : Reconnaissance de la ‘qualité à agir’ du Guichet unique du spectacle occasionnel annulée
Le jugement a été infirmé en ce qu’il a implicitement reconnu la ‘qualité à agir’ du Guichet unique du spectacle occasionnel. La réouverture des débats a été ordonnée pour appeler France Travail dans la cause par voie d’assignation en intervention forcée.
Calendrier de conclusions et convocation à une audience
Les parties ont été enjointes à conclure selon un calendrier précis et à peine de radiation. La notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à une audience ultérieure. Sursoit à statuer sur les demandes des parties et réserve les dépens.
– Partie demanderesse : 10 000 euros
– Partie défenderesse : 5 000 euros
Réglementation applicable
– Code de procédure civile : article 462
– Code du travail : article L. 324-14
– Code de la sécurité sociale : article L. 243-15
– Code de la sécurité sociale : article L. 244-15
– Code de la sécurité sociale : article L. 245-15
Texte de l’article 462 du Code de procédure civile : « La notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à cette audience du 19 novembre 2024 à 13h30. »
Texte de l’article L. 324-14 du Code du travail : « Déclare nulle pour irrégularité de fond non régularisable l’intervention à l’instance du Guichet unique du spectacle occasionnel, sous cette dénomination ou sous la dénomination ‘Guichet unique du spectacle occasionnel ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’, en première instance et devant la cour d’appel, ainsi que ses conclusions soutenues à hauteur de première instance et devant la cour d’appel. »
Texte de l’article L. 243-15 du Code de la sécurité sociale : « Infirme le jugement déféré en ce qu’il a, en ‘maintenant le redressement’, implicitement reconnu la ‘qualité à agir’, du Guichet unique du spectacle occasionnel. »
Texte de l’article L. 244-15 du Code de la sécurité sociale : « Ordonne la réouverture des débats afin que la ville de [Localité 7] appelle dans la cause France Travail (anciennement ‘ Pôle emploi’) par voie d’assignation en intervention forcée. »
Texte de l’article L. 245-15 du Code de la sécurité sociale : « Enjoint aux parties de conclure selon le calendrier suivant et à peine de radiation. »
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Bidart Decle, avocat au barreau d’Amiens
– Me Philippe Vignon de la SCP Philippe Vignon-Marc Stalin, avocat au barreau de Saint-Quentin
– Me Dorothée Delvallez, avocat au barreau de Laon
– Me Marc Antonini de la SCP Antonini et associes, avocat au barreau de Saint-Quentin
– Me Laetitia Berezig de la SCP Brochard-Bedier et Berezig, avocat au barreau d’Amiens
Mots clefs associés
– Cour
– Arrêt
– Nulle
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– Guichet unique du spectacle occasionnel
– Qualité à agir
– Réouverture des débats
– Assignation en intervention forcée
– Urssaf de Picardie
– Dépens
– Cour: juridiction supérieure chargée de juger en appel ou en cassation
– Arrêt: décision rendue par une juridiction mettant fin à une procédure
– Nulle: qui ne produit aucun effet juridique
– Intervention: action de se joindre à une procédure en cours en tant que tiers
– Guichet unique du spectacle occasionnel: service permettant de simplifier les démarches administratives liées à l’organisation de spectacles ponctuels
– Qualité à agir: capacité d’une personne à agir en justice
– Réouverture des débats: possibilité de reprendre les débats lors d’une audience judiciaire
– Assignation en intervention forcée: convocation d’une personne à intervenir dans une procédure judiciaire
– Urssaf de Picardie: organisme chargé de collecter les cotisations sociales dans la région de Picardie
– Dépens: frais engagés lors d’une procédure judiciaire et qui peuvent être mis à la charge d’une des parties
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
ARRET
N° 385
Commune MAIRIE DE [Localité 7]
C/
GUICHET UNIQUE DU SPECTACLE OCCASIONNEL (GUSO)
Organisme U.R.S.S.A.F DE PICARDIE
COUR D’APPEL D’AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 18 AVRIL 2024
*************************************************************
N° RG 22/04956 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ITFG – N° registre 1ère instance : 18/00339
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON EN DATE DU 30 août 2022
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Mairie de [Localité 7] agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 7]
Représentéeet plaidant par Me Bidart Decle, avocat au barreau d’Amiens substituant Me Philippe Vignon de la SCP Philippe Vignon-Marc Stalin, avocat au barreau de Saint-Quentin
ET :
INTIMES
Guichet unique du spectacle occasionnel (GUSO) agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentée et plaidant par Me Dorothée Delvallez, avocat au barreau de Laon substituant Me Marc Antonini de la SCP Antonini et associes, avocat au barreau de Saint-Quentin
URSSAF de Picardie agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée et plaidant par Me Laetitia Berezig de la SCP Brochard-Bedier et Berezig, avocat au barreau d’Amiens
DEBATS :
A l’audience publique du 05 février 2024 devant Mme Anne Beauvais, conseiller, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 18 avril 2024.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Mathilde Cressent
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Anne Beauvais en a rendu compte à la cour composée en outre de :
M. Philippe Mélin, président,
Mme Anne Beauvais, conseiller,
et Monsieur Renaud Deloffre, conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 18 avril 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, M. Philippe Mélin, président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
*
* *
DECISION
La mairie de [Localité 7] (la mairie) a fait l’objet d’un contrôle diligenté par l’Urssaf de Picardie (l’Urssaf ou la caisse) ayant pour objet l’application de la législation de sécurité sociale, portant sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014.
Le contrôle a donné lieu à une lettre d’observations de l’Urssaf en date du 14 octobre 2015, faisant état, notamment, des chefs de redressement et constatations suivantes :
1 – ‘Artistes non déclarés au GUSO [Guichet unique du spectacle occasionnel]’ :
‘La mairie de [Localité 7] organise en 2013 un festival de spectacles vivants et recourt à cette occasion à des artistes dont elle s’assure le concours par le biais de contrats d’engagements. Un contrat est établi, un cachet est versé.
La présomption de salariat s’applique à ces artistes car il est relevé d’une part, que la mairie agit en qualité d’organisateur de spectacle vivant en recrutant pour son festival d’histoire vivante des troupes de spectacle, et d’autre part, l’activité exercée par ces troupes ne requiert pas pour eux l’obligation d’une inscription au registre du commerce et des sociétés.’
L’Urssaf ajoutait que l’artiste présumé salarié était rattaché au régime général de sécurité sociale, quand bien même les artistes étaient de nationalité étrangère, seul étant pris en compte le lieu d’exercice de l’activité, sauf à ce qu’il soit justifié que l’artiste demeurait rattaché à l’organisme de sécurité sociale de son pays d’origine.
Le redressement portait en conséquence sur les cachets versés à vingt-et-un artistes par la ville de [Localité 7] représentant un montant global de 40 190 euros, soit un montant de cotisations dues au GUSO, recouvrées par l’Urssaf, d’un montant global de 27 906 euros.
2 – ‘Artiste non déclaré au GUSO’ :
‘La mairie de [Localité 7] engage un musicien Belge ‘[Y] [O] et son orchestre pour l’animation de cérémonies, défilés et animations de fêtes nationales.
Un contrat d’engagement est rédigé, un cachet est versé.
La présomption de salariat s’applique car il est relevé d’une part, que la mairie agit en qualité d’organisateur de spectacle, et d’autre part, l’activité exercée par l’orchestre ne requiert pas pour lui l’obligation d’une inscription au registre du commerce et des sociétés.’
Le redressement portait en conséquence sur le cachet versé à l’orchestre [Y] [O] (huit musiciens) pour les cérémonies du 8 mai et du 11 novembre de 2012 à 2014 représentant un montant global de 5 970 euros, soit un montant de cotisations dues au GUSO, recouvrées par l’Urssaf, d’un montant global de 4 778 euros.
La mairie a répondu par une lettre recommandée avec demande d’accusé de réception en date du 5 novembre 2015 pour faire valoir essentiellement :
– concernant le chef de redressement n° 1 (festival international) : ce festival ‘a pour but de créer une animation autour du musée parc archéologique de [Localité 7]. Il respose sur la présence de troupes de reconstitution historique, à but non lucratif, composées de passionnés d’histoire. Il ne s’agit pas d’artistes ou d’intermittents du spectacle. La commune ne verse pas un cachet en tant que tel mais défraie les associations des frais qu’elles engagent pour animer les 2 journées de démonstration : voyage, fabrication et entretien des costumes, installation du campement » » Un contrat est établi à la demande de la trésorerie de [Localité 7] pour permettre les paiements. (…) Vous trouverez, en pièces jointes, l’attestation d’affiliation en qualité d’indépendant en Suisse de Monsieur [M] [Z] ainsi que le récépissé de déclaration de création de l’association type loi de 1901 ‘les herculianis’. Une lettre a été envoyée aux autres troupes étrangères.(…) je crains fort de ne pouvoir obtenir un justificatif qui convienne en France.’
– concernant le chef de redressement n° 2 (cérémonies patriotiques, orchestre [O]) : ‘les musiciens qui composent cet orchestre sont par ailleurs retraités dans leur pays et bénéficient d’une couverture sociale en tant que telsl’.
A ce courrier, l’inspecteur chargé du contrôle et du recouvrement a répondu le 8 février 2016 en maintenant les chefs de redressement contestés, diminués, au titre du chef de redressement n°1, des cotisations afférentes à six bénéficiaires de cachets, au vu des justificatifs produits entre-temps par la mairie de [Localité 7], et des cotisations 2012 du fait de la prescription, au titre du chef de redressement n°2. Demeuraient ainsi réclamés consécutivement au redressement :
– la somme de 20 878,74 euros au titre du chef de redressement n°1 ;
– les sommes de 1 590,51 euros et 1 611 euros au titre du chef de redressement n°2.
Sur ce, par courrier en date du 18 mai 2016, la mairie de [Localité 7] a saisi la commission de recours amiable à l’adresse de l’Urssaf Rhônes Alpes, sur le fondement des informations qui lui ont été communiquées par le directeur régional de l’Urssaf de Picardie dans un courrier en date du 11 mars 2016. A ce recours a été opposée une décision de rejet implicite.
Le 13 décembre 2016, le conseil municipal de la commune de [Localité 7] a rendu une délibération aux termes de laquelle il a :
– accepté de mandater le montant du redressement opéré par l’Urssaf dans le cadre des défraiements versés au titre du festival 2013 et des animations de l’orchestre belge [O] afin de faire cesser l’application des pénalités de retard ;
– chargé le maire de présenter une demande gracieuse de réduction des majorations de retard auprès du directeur de l’organisme gestionnaire du GUSO ;
– autorisé le maire à subdéléguer sa compétence pour défendre les intérêts de la commune dans le cadre de l’opposition formée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.
Concomitamment saisi du litige par la mairie de [Localité 7], suivant lettre recommandée avec demande d’accusé de réception en date du 22 novembre 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon a, par jugement en date du 3 décembre 2020, ordonné la réouverture des débats afin que le GUSO pris en la personne de Pôle emploi services soit appelé dans la cause, que les parties communiquent diverses pièces et enfin qu’elles concluent sur la recevabilité du recours de la mairie de [Localité 7] et sur le bien-fondé du redressement contesté.
Par acte d’huissier en date du 18 janvier 2021, le GUSO pris en la personne de Pôle emploi services a été appelé dans la cause.
L’affaire ayant été renvoyée à l’audience du 4 février 2021, a été plaidée à l’audience du 3 février 2022.
Par jugement en date du 30 août 2022, le tribunal judiciaire de Laon, pôle social, a :
– maintenu le redressement ;
– dit que chaque partie conserverait la charge de ses propres dépens ;
– rejeté les plus amples demandes des parties.
La mairie de [Localité 7] a interjeté appel le 9 novembre 2022 de ce jugement qui lui avait été notifié le 12 octobre précédent, et les parties ont été convoquées à l’audience du 5 février 2024.
Le 5 janvier 2024, un nouveau conseil s’est constitué aux lieu et place du conseil initialement chargé de la défense des intérêts du GUSO.
Par conclusions notifiées par la voie électronique le 3 février 2023, auxquelles elle s’est référée à l’audience, la mairie de [Localité 7] demande à la cour d’appel de:
– infirmer le jugement du 30 août 2022 en ce qu’il a maintenu le redressement;
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté le GUSO de sa demande au titre des pénalités de retard et majorations ;
Statuant à nouveau,
– déclarer nulles les conclusions établies par le GUSO et à tout le moins, les déclarer irrecevables de même que l’ensemble de ses demandes ;
En tout état de cause,
– débouter le GUSO de ses demandes ;
– déclarer recevable et bien fondé le recours de la commune de [Localité 7] ;
En conséquence,
– annuler le redressement du 18 mai 2016 ;
– condamner l’Urssaf à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner l’Urssaf aux entiers dépens.
A l’audience, le conseil du GUSO ‘ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’, a fait déposer son dossier accompagné des dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 13 avril 2023 au soutien des intérêts de ce dernier. Il demande ainsi à la cour d’appel de :
A titre principal,
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté les plus amples demandes des parties ;
Statuant à nouveau,
– déclarer le recours formé par la mairie de [Localité 7] irrecevable ;
– débouter la mairie de [Localité 7] de ses demandes, fins et conclusions ;
En tout état de cause,
– confirmer le jugement rendu le 30 août 2022 par le pôle social près le tribunal judiciaire de Laon en ce qu’il a maintenu le redressement et l’infirmer pour le surplus ;
– débouter la commune de [Localité 7] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la commune de [Localité 7] au paiement de la somme de 9 195,64 euros au titre des majorations de retard ;
– condamner la commune de [Localité 7] au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– la condamner aux entiers dépens.
Enfin, l’Urssaf de Picardie, par la voie de son conseil, demande à l’audience la confirmation du jugement entrepris.
Motifs
Sur les motifs de nullité des conclusions et demandes du GUSO, et sur le motif subsidiaire d’irrecevabilité des conclusions et prétentions du GUSO
Il convient de rappeler que l’article L. 7122-23 du code du travail en vigueur jusqu’au 1er janvier 2019 prévoyait :
‘Les groupements et les personnes mentionnés à l’article L. 7122-22 procèdent auprès d’un organisme habilité par l’Etat aux déclarations obligatoires liées à l’embauche et à l’emploi sous contrat de travail à durée déterminée :
1° Des artistes du spectacle mentionnés à l’article L. 7121-2 ;
2° Des ouvriers et des techniciens concourant au spectacle, engagés pour pourvoir l’un des emplois figurant sur une liste déterminée par décret en Conseil d’Etat.’
Et selon selon l’article 1er de l’arrêté du 16 décembre 2008 portant désignation de l’organisme habilité pour le guichet unique du spectacle vivant :
‘L’organisme habilité visé à l’article L. 7122-23 du code du travail est l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du même code, à compter de la date de création de cette institution telle que prévue par l’article 9 de la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi.’
Enfin, L. 5312-1 du code du travail en vigueur du 1er janvier 2011 au 1er septembre 2017 définit les missions imparties à ‘une institution nationale publique [désignée sous le nom de ‘Pôle emploi’ à compter du 7 mars 2014] dotée de la personnalité morale et de l’autonomie financière’.
En application de ces textes, le Guichet unique du spectacle occasionnel (GUSO) permet aux organisateurs non professionnels de spectacles vivants, employant ou souhaitant employer ponctuellement un artiste ou un technicien du spectacle, de remplir leurs obligations déclaratives et de paiement des cotisations et contributions aux organismes de protection sociale. La gestion opérationnelle du GUSO est dévolue au Pôle emploi services qui assure notamment des missions nationales pour Pôle emploi. Le contrôle et l’application par les employeurs de la législation relative au GUSO sont confiées aux inspecteurs du recouvrement de l’Urssaf et des Caisses Générales de Sécurité Sociale (CGSS).
Puis, en application de l’article 117 du code de procédure civile, constitue une irrégularité de fond affectant la validité de l’acte, le défaut de capacité d’ester en justice.
L’article 120 dudit code prévoit que le juge puisse relever d’office la nullité des actes de procédure pour défaut de capacité d’ester en justice.
L’article 121 prescrit encore que dans les cas où elle est susceptible d’être couverte, la nullité ne sera pas prononcée si sa cause a disparu au moment où le juge statue.
Enfin, selon les dispositions de l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention.
En l’espèce, la mairie de [Localité 7] relève que seule l’Urssaf de Picardie aurait pu soutenir des demandes à son encontre, à l’exclusion du GUSO, dépourvu de personnalité juridique. Sur ce point elle précise que si l’Urssaf conteste le recours dirigé à son encontre au motif qu’il aurait dû être dirigé contre le GUSO, la décision rendue le 8 février 2016 désigne l’Urssaf de Picardie, et non le GUSO, comme auteur de la décision, de sorte que le recours juridictionnel ne pouvait être dirigé que contre l’Urssaf ; elle ajoute qu’il importe peu que l’Urssaf ait délégué le contrôle et l’établissement des cotisations au GUSO, relevant qu’in fine les cotisations recouvrées par le GUSO seront affectées au budget de l’Urssaf.
Elle fait valoir au surplus que le GUSO, simple service administratif dépourvu de la personnalité morale, n’est pas habile à représenter en justice les organismes pour le compte desquels il est chargé de recouvrer les cotisations sociales ; elle souligne à cet égard que l’arrêté du 16 décembre 2008 portant désignation de l’organisme habilité pour le guichet unique du spectacle vivant démontre que ce service est géré par Pôle emploi, et critique le jugement déféré en qu’il est motivé par le fait que le GUSO avait bien vocation à recouvrer les créances figurant à la contrainte, fait qu’elle indique ne pas contester.
En réplique, le GUSO ‘ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’ rappelle qu’il a vocation à permettre aux organisateurs non professionnels de spectacles vivants de se libérer auprès d’un seul organisme habilité par arrêté, de l’ensemble des déclarations obligatoires liées à l’embauche et à l’emploi de catégories déterminées de salariés sous contrats à durées déterminées, ainsi que du paiement de l’ensemble des cotisations et contributions s’y rapportant. Elle précise que les inspecteurs du recouvrement des Urssaf et des CGSS demeurent chargés du contrôle de l’application par les employeurs de la législation et de la réglementation relative au GUSO en application de l’article 1er de l’arrêté du 16 décembre 2008. Il conclut que les conclusions de première instance prises pour le GUSO ayant pour gestionnaire Pôle emploi sont recevables tout comme celles signifiées en cause d’appel.
L’Urssaf demande simplement la confirmation du jugement entrepris. Afin d’appréhender le raisonnement de la caisse, il convient donc de rappeler que le dispositif dudit jugement ‘maintient le redressement’, sans autre précision dans le dispositif en lien avec les motifs des premiers juges relatifs à :
– la ‘qualité pour agir’ du GUSO ; sur ce point, ils ont estimé que ‘le GUSO a qualité pour délivrer des contraintes et agir en justice’ ;
– la ‘recevabilité du recours de la Commune de [Localité 7]’ ; sur ce point, les premiers juges ont estimé que la ville de [Localité 7] justifiait avoir saisi la commission de recours amiable des Bouches-du-Rhône dans le délai réglemantaire, de sorte que son recours était recevable.
Il ressort de la lettre recommandée avec demande d’accusé de réception datée du 8 février 2016, à en-tête de l’Urssaf de Picardie et signée par un inspecteur du recouvrement de l’Urssaf en charge du contrôle, que ce dernier agissait pour le compte du GUSO, ainsi qu’il l’annonce dès le début de son courrier : ‘Je fais suite (…) pour le compte du GUSO.’
Ce courrier consécutif à la lettre d’observation du maire de la ville de [Localité 7] et à la production de justificatifs présente en pied de page une information claire, très lisible selon laquelle : ‘Le total de votre dette (…) vous sera notifié par mise en demeure expédiée sous pli séparé par le GUSO.
Le règlement sera à adresser au GUSO ([Adresse 8]) [en italique dans le texte].
Dans l’hypothèse où vous maintiendriez voutre opposition, il vous appartient de saisir Monsieur le Président de la Commission de Recours Amiable du GUSO dans le délai d’un mois à la réception de la mise en demeure.’
Son destinataire ne pouvait donc ignorer que le recouvrement était poursuivi par son correspondant, inspecteur de l’Urssaf, pour le compte du GUSO exclusivement.
Il ressort d’ailleurs d’un courrier du maire de la ville de [Localité 7] en date du 22 novembre 2016 que ce dernier, destinataire de la notification de la décision par courrier du 8 février 2016, a saisi la commission de recours amiable en pensant s’adresser à celle du GUSO, conformément aux informations qui lui avaient été communiquées par le directeur régional de l’Urssaf Picardie dans un courrier en date du 11 mars 2016 l’informant que l’adresse de la commission de recours amiable pour le GUSO était la suivante : ‘Monsieur le président de la commission de recours amiable, Urssaf Rhône Alpes, [Adresse 4]’, ce qui atteste en tant que de besoin qu’il ne s’était pas mépris sur le fait que si le contrôle avait été diligenté par l’Urssaf, le GUSO était en charge de gérer les conséquences financières du redressement.
C’est donc à tort que la mairie de [Localité 7] fait valoir que la décision du 8 février 2016 désigne l’Urssaf de Picardie, et non le GUSO, comme auteur de la décision ; le vérificateur agissant pour le compte du GUSO, seul ce dernier peut en être considéré l’auteur.
Se pose alors la question, soulevée par la mairie de [Localité 7], de la capacité d’ester en justice du GUSO.
Le GUSO est un dispositif de simplification administrative qui permet d’effectuer les déclarations et le paiement des cotisations sociales, pour le compte des organismes de protection sociale.
La mise en cause de ce dernier procède du jugement avant dire droit du 3 décembre 2020 cité dans le jugement déféré, par lequel les premières juges, conformément aux conclusions de l’Urssaf, ont ordonné la mise en cause du GUSO, précisant : ‘pris en la personne de Pôle emploi services [souligné par la cour d’appel]’.
La personne (morale) dont l’intervention forcée a été ordonnée, est donc Pôle emploi.
Pour autant, dans le jugement déféré, Pôle emploi n’est jamais désigné comme partie intervenante défenderesse à l’instance, que ce soit directement, ou indirectement selon la formule adoptée par les premiers juges (‘le GUSO pris en la personne de Pôle emploi services’) ; seul ‘le GUSO’ est partie à l’instance.
Le jugement entrepris constate que ‘la gestion opérationnelle du GUSO est dévolue au Pôle emploi services qui assure notamment des missions nationales pour Pôle emploi. Le contrôle et l’application par les employeurs de la législation relative au GUSO sont confiées aux inspecteurs du recouvrement de l’Urssaf et des Caisses générales de sécurité sociale. A ce titre le GUSO a qualité pour délivrer des contraintes et agir en justice.’ Si le GUSO a effectivement qualité pour délivrer des contraintes selon les circulaires interministérielles prises en application des textes régissant ce dispositif, la représentation en justice, qui ne constitue pas un acte de gestion, exige une capacité juridique dont est dépourvu le GUSO.
Le GUSO ne justifie pas en réalité d’une qualité à défendre en première instance ; seul Pôle emploi, doté de la personnalité morale, pouvait assurer une représentation en justice.
Pour autant, la ville de [Localité 7] ne désigne que l’Urssaf en qualité de partie défenderesse à l’instance, à l’encontre de laquelle, seule, elle formule ses prétentions.
Le GUSO pour sa part conclut à hauteur de cour d’appel sous sa dénomination assortie de la mention ‘ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’.
Cette formulation équivoque qui décrit de manière générale et non au cas d’espèce, une relation entre deux entités, ne suffit pas à établir que le GUSO est bel est bien représenté, dans le cadre de la présente instance, par Pôle emploi – et non par ‘Pôle emploi services’ ainsi que l’ont requis de manière criticable les premiers juges, la capacité juridique de ‘Pôle emploi services’ n’étant pas plus établie que celle du GUSO.
La cour d’appel ne dispose d’aucun élément susceptible de l’assurer que Pôle emploi est intervenu dans le cadre de la présente instance afin d’assurer la représentation en justice de son dispositif, le GUSO.
Il aurait été souhaitable que Pôle emploi intervienne à l’instance en qualité de gestionnaire du GUSO ou à la limite, selon la formulation choisie par les premiers juges, que le GUSO intervienne ‘pris en la personne de’ Pôle emploi.
L’action est donc dirigée par la ville de [Localité 7], en première instance comme à hauteur de cour d’appel, à l’encontre d’une entité dépourvue de la personne morale, le GUSO.
Si ce dernier a été en appelé dans la cause, selon la mention du jugement indiquant que l’acte d’huissier délivré le 18 janvier 2021 l’a été au ‘GUSO pris en la personne de Pôle emploi services’, avec les réserves qui s’attachent, selon la cour d’appel, à la capacité d’ester en justice, et du GUSO, et de ‘Pôle emploi services’, il y a lieu de déclarer nulle pour irrégularité de fond non régularisable, l’intervention à l’instance du Guichet unique du spectacle occasionnel, sous cette dénomination ou sous la dénomination ‘Guichet unique du spectacle occasionnel ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’, en première instance et devant la cour d’appel, ainsi que ses conclusions soutenues à hauteur de première instance et devant la cour d’appel, de sorte que la cour d’appel n’est pas saisie de ces dernières – en particulier, de la demande aux fins de voir déclarer le recours formé par la ville de [Localité 7] irrecevable.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a selon ses motifs, en ‘maintenant le redressement’, implicitement reconnu la ‘qualité à agir’ du Guichet unique du spectacle occasionnel.
Sur le fond du litige
S’agissant de l’Urssaf, les premiers juges ne se sont pas prononcés sur sa demande aux fins de voir ‘déclarer le recours nul pour vice de forme’, au regard de ses motifs selon lesquels, au lu du jugement, sur le fondement de l’article 32 du code de procédure civile, ‘le recours de la commune de [Localité 7] est irrecevable car mal dirigé’ en ce qu’il devait selon elle être dirigé contre le GUSO et non contre elle.
Pour autant, ils ont ordonné dans le jugement avant-dire droit la mise en cause du GUSO ‘pris en la personne de Pôle emploi services’ et motivé leur décision par référence exclusivement à l’intervention du ‘GUSO’, notamment, le fait que ‘le GUSO a qualité pour délivrer des contraintes et agir en justice’et encore que ‘le GUSO n’est pas en mesure de satisfaire à l’exigence légale de production de la mise en demeure’, ce qui éclaire le dispositif en ce qu’il ‘maintient le redressement’ sans autre précision quant à la recevabilité de l’action en ce qu’elle est engagée à l’encontre de l’Urssaf.
Ecartant la capacité à ester en justice du GUSO sans avoir appelé ni souhaité appeler en intervention forcée Pôle emploi devenu France Travail, la ville de [Localité 7] formule ses demandes exclusivement, à l’encontre de l’Urssaf, ainsi qu’il ressort clairement de ses motifs et dispositif.
L’Urssaf demande pour sa part la confirmation pure et simple du jugement entrepris c’est-à-dire le ‘maintien du redressement’, de sorte qu’elle ne sollicite pas de la cour d’appel un examen de la recevabilité de la demande dirigée à son encontre, mais le maintien de la décision rendue au fond, à l’encontre d’un service dépendant d’une personne morale distincte, Pôle emploi devenu France Travail, en charge du recouvrement de cotisations et contributions pour son compte.
Si la recevabilité de l’action, en ce qu’elle est dirigée à l’encontre de l’Urssaf, est acquise aux débats, la demande au fond étant dirigée à l’encontre d’une partie non appelée dans la cause – France Travail (anciennement ‘ Pôle emploi’) – en application de l’article 14 du code de procédure civile selon lequel nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée, ne peut être examinée en son absence, la cour d’appel ne peut pas statuer sans que France Travail (anciennement ‘ Pôle emploi’) ait été appelé en intervention forcée.
Il convient d’ordonner à la ville de [Localité 7] d’y procéder.
Dans l’attente, il y a lieu de surseoir à statuer sur les demandes des parties.
Il convient enfin de réserver les dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,
Déclare nulle pour irrégularité de fond non régularisable l’intervention à l’instance du Guichet unique du spectacle occasionnel, sous cette dénomination ou sous la dénomination ‘Guichet unique du spectacle occasionnel ayant pour gestionnaire Pôle emploi pris en son établissement Pôle emploi services’, en première instance et devant la cour d’appel, ainsi que ses conclusions soutenues à hauteur de première instance et devant la cour d’appel ;
En conséquence,
Infirme le jugement déféré en ce qu’il a, en ‘maintenant le redressement’, implicitement reconnu la ‘qualité à agir’, du Guichet unique du spectacle occasionnel ;
Avant dire droit,
Ordonne la réouverture des débats afin que la ville de [Localité 7] appelle dans la cause France Travail (anciennement ‘ Pôle emploi’) par voie d’assignation en intervention forcée ;
Enjoint aux parties de conclure selon le calendrier suivant et à peine de radiation :
– la ville de [Localité 7] : dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt à son attention, notamment, sur la ou les personnes morales à l’encontre desquelles elle dirige ses demandes ;
– l’Urssaf de Picardie : dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt à son attention, notamment, sur le bien-fondé ou non des demandes dirigées à son encontre ;
– France Travail : dans le délai de deux mois à compter de la communication des pièces et conclusion de la ville de [Localité 7] et de l’Urssaf de Picardie à son attention ;
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à cette audience du 19 novembre 2024 à 13h30,
Sursoit à statuer sur les demandes des parties,
Réserve les dépens.
Le Greffier, Le Président,