L’Essentiel : La sous-location non autorisée sur Airbnb a conduit à des décisions judiciaires favorables aux propriétaires. Ces derniers peuvent réclamer le remboursement des profits réalisés par leurs locataires indélicats et obtenir la condamnation solidaire d’Airbnb pour les commissions perçues. En effet, la plateforme, en tant qu’éditeur, a un rôle actif dans la mise en relation entre hôtes et voyageurs, ce qui l’engage à vérifier la légalité des annonces. Ainsi, en cas de sous-location illicite, Airbnb peut être tenue responsable des préjudices subis par les propriétaires, renforçant leur droit à compensation.
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C’est une nouvelle manne financière pour les propriétaires dont le logement a été loué à leur insu sur Airbnb. Non seulement ces derniers ont droit au remboursement des profits réalisés par leurs locataires indélicats mais ils peuvent également obtenir la condamnation solidaire de Airbnb pour obtenir ce paiement. AIRBNB peut également être condamnée à rembourser ses commissions perçues. Par ailleurs, la société AIRBNB n’exerce pas une simple activité d’hébergement à l’égard des hôtes qui ont recours à son site mais a une activité d’éditeur. Communication des relevés de locationConstatant que son logement était sous-loué sur Airbnb, une propriétaire a saisi le juge des référés lequel a, par ordonnance ordonné à la société AIRBNB IRELAND de communiquer le relevé des transactions relatif aux sous-locations de son appartement effectuées par sa locataire. La société AIRBNB IRELAND s’est exécutée. Condamnation au titre des fruits civilsEn vertu de l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 le locataire ne peut ni céder le contrat de location ni sous-louer le logement sauf avec l ‘accord écrit du bailleur, y compris le prix du loyer. Le prix du loyer au mètre carré de surface habitable des locaux sous-loués ne peut excéder celui payé par le locataire principal. Le locataire transmet au sous-locataire l’autorisation écrite du bailleur et la copie du bail en cours. Cette disposition légale a été reprise dans les clauses du contrat de bail conclu entre les parties interdisant à la locataire de sous-louer sans l’autorisation de la bailleresse y compris sur le prix du loyer. Aux termes des articles 46, 547 et 548 du code civil, la propriété immobilière donne droit sur tout ce qu’elle produit et les fruits civils appartiennent au propriétaire par accession. L’article 549 de ce même code précise que » le simple possesseur ne fait les fruits siens que dans le cas où il possède de bonne foi. Dans le cas contraire, il est tenu de restituer les produits avec la chose au propriétaire qui la revendique… » la bonne foi requise pour l’acquisition des fruits doit revêtir un caractère permanent. Sitôt qu’elle cesse, cesse l’acquisition des fruits (Cass. 3e civ. 2 décembre 2014, n°13-21.127). Sauf, lorsque la sous-location a été autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le preneur constituent les fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire, lequel est en droit de demander le remboursement des sommes perçues à ce titre, (Cass 3e civ. 12 septembre 2019, n°18-20.727), étant précisé que le droit de percevoir ces fruits est totalement indépendant de la démonstration de l ‘existence d’un préjudice, le détournement fautif au détriment du propriétaire de fruits civils produits par la sous-location de la propriété immobilière cause nécessairement un préjudice financier à celui-ci. En l’espèce il était établi par les relevés des transactions transmis par AIRBNB que la locataire avait perçu près de 50000 euros au titre des sous locations illicites. Concernant la demande faite à l’encontre de AIRBNB, les fruits revenaient tous au propriétaire « par accession », celle de l’article 547 du code civil., laquelle s’étend à tout ce que produit une chose ou s’y unit, soit naturellement soit artificiellement. Remboursement des commissions AIRBNBDès lors, que les commissions perçues par AIRBNB sont constituées par un pourcentage des loyers payés par les voyageurs pour la sous-location du bien, la propriétaire et du fait de 1’accession était également bien fondée à demander le remboursement à AIRBNB de la somme de 1.500 euros au titre des commissions perçues. Statut d’éditeur de AIRBNBLa société AIRBNB IRELAND est une société ayant pour objet, par1’intermédiaire d’une plate-forme numérique prenant la forme du site internet www.airbnb.fr qu’elle administre, la mise en relation entre des personnes souhaitant proposer leur logement à la location, « les hôtes » avec d’autres personnes en recherche d’un logement pour une courte durée, « les voyageurs ». L’article 6-I.2 alinéa 1er et 7 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (dite LCEN) dispose que » les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage de signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu cette connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible ». Les personnes mentionnées aux 1 et 2 ne sont pas soumises à une obligation générale de surveiller les informations qu’elles transmettent ou stockent, ni à une obligation générale de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites ». A contrario, lorsqu’elles jouent un rôle actif de nature à lui conférer une connaissance ou un contrôle des données, ces personnes, physiques ou morales, ont le statut d’éditeur. En l’espèce, la plateforme AIRBNB renvoie à des conditions générales lesquelles fixent des règles d’utilisation du site mais également la relation contractuelle des membres entre eux notamment en leur imposant le respect de ce que AIRBNB désigne comme étant ses valeurs et attentes, lesquelles sont pour la plupart des rappels de principes, comme la non-discrimination, ou de législation telle que les règles relatives aux animaux dangereux ou la présence d’armes. Toutefois, outre ce rappel des règles de bon comportement, elle donne des directives à ses hôtes : être réactif, accepter les demandes de réservation, éviter les annulations, maintenir une bonne évaluation globale et fournir des équipements de base, et le non-respect de ces directives peut aboutir à un retrait du contenu et/ou des pénalités. Il est contractuellement prévu que l’hôte, en publiant du contenu sur AIRBNB, accepte de se conformer à ces règles et que AIRBNB se réserve le droit de retirer tout contenu partiellement ou en intégralité qui ne respecte pas ces règles, ses conditions générales, ses valeurs de communauté et sa politique relative aux commentaires ou pour toute autre raison, à son entière discrétion. Il est également prévu que dans le cas de manquements répétés ou particulièrement graves, AIRBNB pourra suspendre ou désactiver définitivement le ou les comptes concernés. AIRBNB a donc un droit de regard et s’arroge le droit de retirer un contenu pour non respect des conditions contractuelles mais également pour toute autre raison à son entière discrétion. Inversement, ceux qui respectent au mieux ces directives peuvent être récompensés par l’attribution du qualificatif de « superhost ». En dehors du contrôle des contenus des hôtes, AIRBNB a prévu des pénalités frappant les membres du contrat d’hébergement, notamment en imposant au voyageur qui quitterait postérieurement à l’heure limite d’occupation, le paiement d’une pénalité en dédommagement du désagrément subi par l’hôte ainsi que des frais accessoires. De même, AIRBNB interdit de demander, faire ou accepter une réservation en dehors de la plate-forme. L’ensemble de ces éléments témoigne du caractère actif de la démarche de la société AIRBNB dans la mise en relation des hôtes et des voyageurs et de son immixtion dans le contenu déposé par les hôtes sur sa plate-forme. Il est dès lors établi que la société AIRBNB n’exerce pas une simple activité d’hébergement à l’égard des hôtes qui ont recours à son site mais a une activité d’éditeur. A ce titre, elle est en capacité de vérifier si l’hôte dispose du droit de proposer à la location un bien ou non. L’article 2.4 de ses conditions de service le confirme puisqu’il stipule : «Par souci de transparence et aux fins de la prévention des fraudes, sous réserve des lois applicables, nous pouvons, sans y être tenus demander aux Membres de nous fournir une pièce d’identité officielle ou autres informations, ou de se soumettre à d’autres contrôles destinés à vérifier l’identité et les antécédents des Membres, consulter des bases de données. tierces ou d’autres sources d’information pour vérifier si des Membres y figurent, et demander des rapports à des prestataires de services et si nous avons suffisamment d’informations pour identifier un Membre, obtenir des extraits de fichiers d’infractions pénales ou sexuelles (ou similaires) auprès des autorités locales». Dès lors que l’hôte exerce une activité illicite par son intermédiaire, compte tenu de son droit de regard sur le contenu des annonces et des activités réalisées par son intermédiaire en qualité d’éditeur, elle commet une faute en s’abstenant de toute vérification, laquelle concourt au préjudice subi par le propriétaire. Sa responsabilité a donc été retenue à ce titre. Télécharger la décision |
Q/R juridiques soulevées :
Quels droits ont les propriétaires dont le logement a été loué à leur insu sur Airbnb ?Les propriétaires dont le logement a été loué à leur insu sur Airbnb ont plusieurs droits. Ils peuvent demander le remboursement des profits réalisés par leurs locataires indélicats. Cela inclut également la possibilité d’obtenir la condamnation solidaire d’Airbnb pour le paiement de ces sommes. En outre, Airbnb peut être condamnée à rembourser les commissions qu’elle a perçues sur ces transactions. Ces droits sont renforcés par le fait qu’Airbnb n’exerce pas seulement une activité d’hébergement, mais agit également en tant qu’éditeur, ce qui lui impose des responsabilités supplémentaires. Comment une propriétaire a-t-elle obtenu des relevés de location de la part d’Airbnb ?Une propriétaire a saisi le juge des référés après avoir constaté que son logement était sous-loué sur Airbnb. Le juge a ordonné à la société Airbnb Ireland de communiquer les relevés des transactions relatives aux sous-locations de son appartement. Airbnb a respecté cette ordonnance et a fourni les informations demandées. Cela montre que les propriétaires ont des recours juridiques pour obtenir des informations sur l’utilisation de leur bien, même sans leur consentement. Quelles sont les implications de la loi du 6 juillet 1989 concernant la sous-location ?La loi du 6 juillet 1989 stipule que le locataire ne peut pas céder son contrat de location ni sous-louer le logement sans l’accord écrit du bailleur. Cela inclut des détails comme le prix du loyer, qui ne peut excéder celui payé par le locataire principal. Cette loi protège les droits des propriétaires en leur permettant de contrôler l’utilisation de leur bien. En cas de non-respect, le propriétaire peut revendiquer les fruits civils générés par la sous-location, ce qui lui donne un droit de restitution des sommes perçues par le locataire. Qu’est-ce que le droit de propriété immobilière implique selon le code civil ?Selon les articles 46, 547 et 548 du code civil, la propriété immobilière confère au propriétaire des droits sur tout ce qu’elle produit, y compris les fruits civils. Ces fruits appartiennent au propriétaire par accession, ce qui signifie qu’ils lui reviennent automatiquement. L’article 549 précise que le simple possesseur ne peut revendiquer les fruits que s’il possède de bonne foi. Si cette bonne foi cesse, il doit restituer les produits au propriétaire. Cela souligne l’importance de la bonne foi dans les relations locatives. Comment les sous-loyers perçus par un locataire sont-ils considérés légalement ?Les sous-loyers perçus par un locataire sans l’autorisation du bailleur sont considérés comme des fruits civils appartenant au propriétaire. En vertu de la loi, le propriétaire a le droit de demander le remboursement des sommes perçues par le locataire à ce titre. Ce droit est indépendant de la démonstration d’un préjudice, car le détournement des fruits civils cause nécessairement un préjudice financier au propriétaire. Dans un cas concret, il a été établi qu’une locataire avait perçu près de 50 000 euros de sous-locations illicites. Quelles sont les conséquences pour Airbnb concernant les commissions perçues ?Les commissions perçues par Airbnb, qui sont un pourcentage des loyers payés par les voyageurs, peuvent également être réclamées par le propriétaire. Dans un cas, une propriétaire a demandé le remboursement de 1 500 euros au titre des commissions perçues par Airbnb. Cela montre que non seulement les profits des sous-locations, mais aussi les commissions d’Airbnb peuvent être considérés comme des fruits civils revenant au propriétaire, renforçant ainsi sa position légale. Quel est le statut d’Airbnb en tant qu’éditeur selon la loi ?Airbnb est considérée comme un éditeur en raison de son rôle actif dans la mise en relation des hôtes et des voyageurs. Selon la loi n°2004-575 du 21 juin 2004, les plateformes qui jouent un rôle actif dans le contrôle des données peuvent être tenues responsables. Airbnb impose des règles d’utilisation et des directives à ses hôtes, ce qui lui confère un statut d’éditeur. Cela signifie qu’elle a la responsabilité de vérifier si les hôtes ont le droit de proposer leur bien à la location. Quelles sont les responsabilités d’Airbnb en tant qu’éditeur ?En tant qu’éditeur, Airbnb a la responsabilité de vérifier le contenu des annonces et de s’assurer que les hôtes respectent les lois et règlements en vigueur. Elle peut retirer des contenus qui ne respectent pas ses conditions générales ou qui sont jugés inappropriés. De plus, Airbnb peut imposer des pénalités aux membres qui ne respectent pas les règles, ce qui témoigne de son rôle actif dans la gestion de la plateforme. Cela signifie qu’elle ne peut pas se décharger de sa responsabilité en cas d’activité illicite de ses hôtes. Comment Airbnb peut-elle être tenue responsable en cas d’activité illicite ?Airbnb peut être tenue responsable si elle ne vérifie pas les activités de ses hôtes et si elle permet la sous-location illicite de biens. Son droit de regard sur le contenu des annonces et son rôle d’éditeur impliquent qu’elle doit agir pour prévenir les abus. Si elle s’abstient de toute vérification, cela peut contribuer au préjudice subi par le propriétaire, ce qui peut entraîner sa responsabilité légale. Dans un cas, sa responsabilité a été retenue pour ne pas avoir vérifié les activités illicites de l’hôte. |
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