L’Essentiel : Dans une affaire récente, une salariée a été licenciée pour avoir utilisé Skype à des fins personnelles pendant ses heures de travail. L’employeur a justifié son action en produisant des conversations Skype, considérées comme professionnelles. Les juges ont confirmé le droit de contrôle de l’employeur, mais ont noté qu’aucune désorganisation du service n’avait été établie. En l’absence de preuves démontrant que le comportement de la salariée avait affecté l’organisation du travail, celle-ci a été rétablie dans ses droits, le licenciement étant jugé sans cause réelle et sérieuse.
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Skype, un outil de contrôle comme les autresUne salariée, attachée commerciale en CDI, a été licenciée en raison de nombreuses connexions internet à des fins personnelles durant ses heures de travail. L’employeur a également reproché à la salariée d’avoir tenu des conversations sur Skype, outil mis à sa disposition à titre professionnel, avec d’autres collègues de travail, au cours desquelles étaient abordés des sujets sans lien avec son activité. Droit de contrôle de l’employeurLes juges ont conforté le droit de contrôle de l’employeur sur Skype, mais ont exclu toute perturbation / désorganisation du service. La production des conversations Skype du salarié ne constituent pas une preuve illicite obtenue sans autorisation en l’absence de déclaration auprès de la CNIL. L’absence de déclaration simplifiée d’un système de messagerie électronique professionnelle non pourvu d’un contrôle individuel de l’activité des salariés, qui n’est dès lors pas susceptible de porter atteinte à la vie privée ou aux libertés au sens de l’article 24 de la loi informatique et libertés, ne rend pas illicite la production en justice des courriels adressés par l’employeur ou par le salarié dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés et conservés par le système informatique. En l’espèce, les conversations ont été produites depuis l’ordinateur de la salariée après que ses collègues ont attiré l’attention de l’employeur sur le comportement de celle-ci, et dès lors elles étaient réputées professionnelles. Rien n’indiquant dans leur objet qu’elles aient pu être d’ordre personnel, l’employeur était donc fondé à les consulter. L’employeur a pu ainsi établir et la nature non professionnelle des conversations Skype et la réalité des connexions internet en fournissant le relevé des sites sur lesquels s’était connectée la salariée durant ses heures de travail (cette fois par constat d’huissier). Désorganisation du travail non établie
Il résulte des dispositions des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail que tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, en cas de litige sur les motifs du licenciement d’un salarié, il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur et de former sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Or, il ne ressortait pas des pièces produites par l’employeur que le comportement de la salariée bien qu’établi, ait eu une influence sur l’organisation du travail au sein du service dans lequel celle-ci exerçait ses fonctions ou avait entraîné une désorganisation du service. Par ailleurs, la circonstance que les autres salariés ayant pris part aux conversations Skype n’aient fait l’objet d’aucune sanction, démontrait l’absence de gravité de ces faits pour l’employeur lui-même. Partant, la salariée qui durant toute la période d’exécution de son contrat de travail n’a jamais été sanctionnée et qu’y s’est vu reprocher des faits s’étant déroulés sur une courte période et qui n’ont eu aucune conséquence préjudiciable sur la qualité de son travail, a obtenu la condamnation de son employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. |
Q/R juridiques soulevées :
Pourquoi la salariée a-t-elle été licenciée ?La salariée, attachée commerciale en CDI, a été licenciée en raison de ses nombreuses connexions à Internet à des fins personnelles durant ses heures de travail. L’employeur a également reproché à la salariée d’avoir utilisé Skype, un outil professionnel, pour tenir des conversations avec d’autres collègues sur des sujets sans lien avec son activité. Ces comportements ont été jugés inappropriés et contraires aux attentes de l’employeur concernant l’utilisation des outils de communication au travail. Quel est le droit de contrôle de l’employeur sur les outils de communication ?Les juges ont confirmé le droit de contrôle de l’employeur sur l’utilisation de Skype par ses salariés. Cependant, ce droit est limité par la nécessité de ne pas perturber ou désorganiser le service. La production des conversations Skype de la salariée a été considérée comme légale, car il n’y avait pas de déclaration auprès de la CNIL, mais cela ne rendait pas la preuve illicite. L’absence de déclaration simplifiée pour un système de messagerie électronique professionnelle, qui ne contrôle pas individuellement l’activité des salariés, ne porte pas atteinte à leur vie privée. Comment l’employeur a-t-il justifié son licenciement ?L’employeur a pu établir la nature non professionnelle des conversations Skype et la réalité des connexions Internet de la salariée. Il a fourni un relevé des sites sur lesquels la salariée s’était connectée durant ses heures de travail, ce qui a été corroboré par un constat d’huissier. Les conversations, produites depuis l’ordinateur de la salariée, étaient considérées comme professionnelles, car ses collègues avaient signalé son comportement à l’employeur. Il n’y avait rien dans l’objet des conversations qui indiquait qu’elles étaient d’ordre personnel. Quelles sont les conditions de validité d’un licenciement ?Selon les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. En cas de litige, il appartient au juge d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur. Le juge doit former sa conviction en se basant sur les éléments fournis par les parties et peut ordonner des mesures d’instruction si nécessaire. Si un doute subsiste, il profite au salarié, ce qui signifie que la présomption d’innocence est en faveur de ce dernier. Pourquoi le licenciement de la salariée a-t-il été jugé sans cause réelle et sérieuse ?Le tribunal a constaté que, bien que le comportement de la salariée ait été établi, il n’avait pas eu d’influence sur l’organisation du travail dans son service. Aucune désorganisation du service n’a été prouvée par l’employeur. De plus, le fait que d’autres salariés ayant participé aux conversations Skype n’aient pas été sanctionnés démontre l’absence de gravité des faits. La salariée, qui n’avait jamais été sanctionnée auparavant, a donc obtenu gain de cause, et son licenciement a été jugé sans cause réelle et sérieuse. |
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