Sauvegarde informatique : 25 septembre 2023 Cour d’appel de Basse-Terre RG n° 22/00744

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Sauvegarde informatique : 25 septembre 2023 Cour d’appel de Basse-Terre RG n° 22/00744

25 septembre 2023
Cour d’appel de Basse-Terre
RG n°
22/00744

VS/GB

COUR D’APPEL DE BASSE-TERRE

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT N° 188 DU VINGT CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

AFFAIRE N° RG 22/00744 – N° Portalis DBV7-V-B7G-DO6O

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes de POINTE A PITRE du 14 juin 2022 – Section Encadrement –

APPELANTE

S.A.S. SOCIETE D’IMPRESSION MAGNETIQUE ANTILLAISE (SIMA)

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Maître Jean-Marc DERAINE de la SELARL DERAINE & ASSOCIES, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART

(Toque 23)

INTIMÉ

Monsieur [X] [C]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Maître Chrystelle CHULEM, avocat au barreau de GUADELOUPE/ST MARTIN/ST BART (Toque 103)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 juin 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Mme Gaëlle Buseine, conseillère, chargée d’instruire l’affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente,

Madame Gaëlle Buseine, conseillère,

Madame Annabelle Clédat, conseillère,

Les parties ont été avisées à l’issue des débats de ce que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour le 25 septembre 2023.

GREFFIER Lors des débats : Mme Valérie Souriant, greffier.

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées conformément à l’article 450 al 2 du CPC.

Signé par Mme Rozenn Le Goff, conseillère, présidente, et par Mme Valérie Souriant, greffier, à laquelle la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE :

M. [C] [X] a été embauché par la SAS Sima par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 novembre 2019, en qualité de directeur informatique.

Par lettre du 28 mai 2020, l’employeur convoquait M. [C] à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé le 9 juin 2020 et lui notifiait sa mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre du 19 juin 2020, l’employeur notifiait à M. [C] son licenciement pour faute grave.

M. [C] saisissait le 9 octobre 2020 le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre aux fins de voir :

– juger ses demandes recevables,

– fixer son salaire de référence à la somme de 4000 euros,

– juger son licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

– condamner la SAS Sima à lui verser les sommes suivantes :

* 3138,39 euros à titre de rappel de salaire,

* 4000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 12000 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 1200 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 10000 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

* 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Par jugement rendu contradictoirement le 14 juin 2022, le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre a :

– jugé M. [C] [X] recevable et fondé en ses demandes,

– jugé le licenciement de M. [C] [X] dénué de cause réelle et sérieuse,

– condamné la SAS Sima à verser à M. [C] [X] les sommes suivantes :

* 3138,39 euros à titre de rappel de salaire,

* 4000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 12000 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 1200 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 8000 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– dit que la condamnation de l’employeur au paiement des rémunérations et indemnités visées par les articles R. 1454-14 et 15 du code du travail était exécutoire de plein droit dans la limite de neuf mois de salaires calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire dans les conditions prévues par l’article R. 1424-28 du code du travail,

– fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire à la somme de 4000 euros,

– débouté la SAS Sima de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– ordonné l’exécution provisoire de la décision en toutes ses dispositions conformément à l’article 515 du code de procédure civile,

– condamné la SAS Sima aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 11 juillet 2022, la SAS Sima formait appel dudit jugement, qui lui était notifié le 21 juin 2022, en ces termes : ‘Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués, en ce qu’il a :

– jugé le licenciement de M. [C] [X] dénué de cause réelle et sérieuse,

– condamné la SAS Sima à verser à M. [C] [X] les sommes suivantes :

* 3138,39 euros à titre de rappel de salaire,

* 4000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 12000 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 1200 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 8000 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,

– débouté la SAS Sima de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

– condamné la SAS Sima aux entiers dépens de l’instance’.

Par ordonnance du 25 mai 2023, le magistrat chargé de la mise en état a prononcé la clôture de l’instruction et renvoyé la cause à l’audience du lundi 19 juin 2023 à 14h30.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Selon ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique à M. [C] le 24 mai 2023, la SAS Sima demande à la cour de :

– statuer ce que de droit sur la recevabilité de l’appel,

Au fond,

– juger que la déclaration d’appel formalisée par la société Sima énonçant de façon exhaustive les ‘chefs de jugement expressément critiqués’ emporte un plein effet dévolutif et les a déférés à la cour,

– débouter M. [C] de sa demande aux fins qu’il soit ‘relevé d’absence de dévolution de la déclaration d’appel’,

– infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

– Et notamment en qu’il a condamné la SAS Sima à verser à M. [C] [X] les sommes suivantes :

* 3138,39 euros à titre de rappel de salaire,

* 4000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 12000 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

* 1200 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

* 8000 euros de dommages et intérêts au titre de son préjudice moral,

* 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

– juger que le licenciement de M. [C] [X] repose sur un ensemble de faits qui lui sont imputables constituant une violation de ses obligations contractuelles et qui caractérisent la faute grave justifiant la rupture immédiate de son contrat de travail,

– juger que le ‘préjudice moral’ invoqué par M. [C] [X] est inexistant et qu’il est défaillant à en démontrer l’existence,

A titre subsidiaire,

– juger que la durée du préavis de M. [C] [X] ne saurait excéder une durée d’un mois soit la somme de 4000 euros,

En conséquence,

– débouter M. [C] [X] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– eu égard à la mauvaise foi de M. [C] [X], il serait profondément inéquitable que la société supporte les frais irrépétibles de l’instance non compris dans les dépens,

En conséquence,

– condamner M. [C] [X] à lui payer la somme de 4500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La SAS Sima soutient que :

– la déclaration d’appel mentionnant les chefs de jugement expressément critiqués, ceux-ci sont déférés devant le cour d’appel,

– le licenciement repose sur des griefs matériellement vérifiables consistant en un défaut de réalisation des sauvegardes du serveur demandées à plusieurs reprises par l’employeur, entraînant une interruption du service dû contractuellement aux établissements bancaires et en un refus d’effectuer les travaux urgents requis par la panne générée par la négligence du salarié,

– le salarié a également fait preuve de négligence professionnelle dans la gestion de la carte pétrolière du client CAP,

– aucune circonstance vexatoire ayant entouré le licenciement ne saurait être retenue,

– les demandes indemnitaires du salarié ne sont pas justifiées.

Selon ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 2 janvier 2023 à la SAS Sima, M. [C] demande à la cour de :

A titre principal,

– juger que la déclaration d’appel de la SAS Sima n’a pas produit d’effet dévolutif,

En conséquence,

– juger que la cour n’est saisie d’aucune demande,

A titre subsidiaire,

– écarter des débats la pièce adverse n° 16,

– confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

En tout état de cause,

– condamner la SAS Sima à lui verser la somme de 2500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

M. [C] expose que :

– il n’est pas précisé dans la déclaration d’appel si l’appel tend à la réformation ou à l’annulation du jugement,

– la pièce adverse n° 16 est rédigée en langue anglaise,

– il n’a pas été destinataire d’un dossier d’exploitation informatique comportant les informations et l’inventaire des applications et du matériel informatique, alors qu’il avait été embauché récemment,

– l’employeur avait connaissance de l’instabilité du programme Trichec,

– il a procédé aux sauvegardes demandées,

– le grief relatif au refus de déférer aux demande de l’employeur n’est pas établi, ni celui relatif à l’absence de diligences et de solutions apportées aux clients,

– les griefs, qui relèvent de l’insuffisance professionnelle, ne peuvent entrer dans le champ de la faute grave que s’il procèdent d’une volonté délibérée, ce qui n’est pas le cas en l’espèce,

– ses demandes indemnitaires sont justifiées.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

MOTIFS :

Sur l’effet dévolutif de la déclaration d’appel :

En vertu de l’article 901 du code de procédure civile, la déclaration d’appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l’article 57 et à peine de nullité: 4°) Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’ annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

En l’espèce, il convient de constater que la déclaration formalisée par la SAS Sima le 11 juillet 2022 énonce expressément les chefs du jugement critiqués, répondant ainsi aux prescriptions de l’article susvisé. L’objet du litige est donc clairement délimité.

Contrairement à ce que soutient M. [C], aucune disposition du code de procédure civile n’impose d’indiquer, dans la déclaration d’appel, qu’il est réclamé l’infirmation ou la réformation du jugement, la seule exigence étant limitée à la mention des chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité.

Cette précision apparaît en revanche dans le dispositif des conclusions d’appelant, conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.

Il convient, dès lors, de débouter M. [C] de sa demande tendant à dire que la déclaration d’appel de la SAS Sima n’a pas produit d’effet dévolutif et que la cour n’est saisie d’aucune demande.

Sur la recevabilité de la pièce n°16 de la société Sima :

La pièce n° 16 versée aux débats par la société SIMA est composée de deux documents datés du 12 février 2019 et du 19 novembre 2019, émanant de la société GMES Bugbusters.

Si ces documents comportent des mentions en français et en anglais, il n’y a pas lieu de les écarter des débats, le juge appréciant la valeur probante de ces pièces.

Sur le licenciement :

En ce qui concerne le bien fondé du licenciement :

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et il appartient à l’employeur d’en démontrer l’existence.

En l’espèce, la lettre de licenciement du 19 juin 2020, qui fixe les limites du litige, précise : ‘ Nous avons eu à déplorer de votre part des agissements constitutifs de fautes graves.

En effet, vous occupez au sein de notre entreprise les fonctions de directeur informatique en Guadeloupe.

Vous n’ignorez pas que notre clientèle est constituée d’un nombre restreint d’enseignes bancaires exigeant une continuité absolue de service.

Le 05 mai 2020, un incident électrique a entraîné la destruction de deux cartes mères de nos deux serveurs principaux (ESX 350) sur la Guadeloupe.

Or, le lendemain, soit le 06 mai 2020, nous avons constaté avec effarement l’absence de sauvegarde du serveur de ficher TRICHEC Guadeloupe 192.168.10.201 (disque Q), ce qui a rendu impossible l’exécution de tous les traitements TRICHEC sur le département au profit des établissements bancaires clients de notre entreprise.

Il s’agit là d’une très grave négligence professionnelle.

La protection des données de nos clients institutionnels et donc leur sauvegarde relève en effet directement de vos missions essentielles.

En outre, vous ne pouvez ignorer qu’un défaut de sauvegarde engage notre responsabilité contractuelle et menace nos intérêts économiques.

Nous sommes bien évidemment soumis, vis-à-vis des banques, à notre obligation contractuelle d’assurer la continuité de leur service et le redémarrage immédiat de tous les processus en cas de sinistre.

Votre négligence professionnelle est d’autant plus grave que je vous avais alerté à trois reprises dans les semaines qui avaient précédé cet incident sur l’absolue nécessité de procéder à de telles sauvegardes.

Qu’il ait été nécessaire que j’attire votre attention sur l’impératif de sauvegarder les données bancaires de nos clients était déjà en soi anormal.

La sécurité informatique et sa pierre angulaire qui est constituée par la sauvegarde des données relève en effet des fondamentaux d’un directeur informatique.

Le curriculum vitae que vous m’aviez fait parvenir avant votre embauche mentionnait d’ailleurs en bonne place une rubrique ‘sauvegarde et sécurité’ avec mention comme première de vos ‘compétences clés’ la ‘gestion du parc informatique, de la sécurité et du support’.

En l’espèce, je vous ai tout d’abord alerté par courriel du 25 mars 2020 sur la nécessité de ‘réduire les risques’ et donc d’opérer ‘des sauvegardes pour être à même de repartir en cas de blocage’.

Cette instruction était d’une particulière clarté.

Je vous ai à nouveau réclamé l’exécution de ces sauvegardes par un second courriel du 04 avril 2020 (11h30) en insistant sur ‘l’urgence’ de les réaliser si ce n’était pas déjà fait.

Enfin, je vous ai de nouveau réclamé ces sauvegardes par courriel du 17 avril 2020 (17h27) en insistant de nouveau sur l’urgence tout en mentionnant cet objectif en lettres capitales et caractères gras aux fins de souligner son extrême importance.

Or, il apparaît que vous n’avez strictement rien entrepris et ignoré mes demandes successives jusqu’à l’incident que nous avons connu le 05 mai 2020, vos carences entraînant un défaut de notre société vis-à-vis de ses clients.

Nous avons alors été contraints de recourir en catastrophe à un prestataire (DMA) aux fins de trouver une solution consécutivement à l’absence de sauvegarde et notamment de reconfigurer les VM (Machines Virtuelles) à compter du 07 mai 2020.

En conséquence, outre notre incapacité à assurer notre prestation auprès de la BRED, de la BNP, du CREDIT AGRICOLE, de LCL et la Caisse d’Epargne qu’a entraîné votre négligence professionnelle, un surcoût a été engendré pour notre entreprise.

Nous avons été contraints de rendre des comptes à la BRED qui a été nécessairement informée du dysfonctionnement prolongé.

Par votre seule négligence, vous avez paralysé notre activité et donc mis notre entreprise dans une situation de risque inacceptable.

Incidemment, ce comportement se double d’un total désintérêt pour vos fonctions et vous refusez tout lien de subordination.

Ainsi, suite à l’incident du 05 mai 2020, nous avons initié une manoeuvre de substitution dans le but de réparer ce qui pouvait l’être le 07 mai 2020.

Dans ce but, nous vous avons demandé de réaliser avec le reste du personnel les travaux urgents nécessaires pour trouver une solution technique.

Vous désintéressant complètement de la situation catastrophique dont vous étiez pourtant la cause, vous ne vous êtes présenté à votre poste de travail qu’à 10h15 en alléguant ‘un rendez-vous médical’ et ne vous êtes même pas présenté le 08 mai 2020 alors que le temps pressait aux fins de restaurer nos données et de reconfigurer les VM.

Le responsable informatique de Martinique (M. [N] [M]) s’est lui efforcé de nous assister consécutivement à votre total désintérêt pour la situation et est intervenu à plusieurs reprises sur nos serveurs.

Or, vous ne pouviez en aucun cas refuser de réaliser les travaux urgents, même en dehors de vos horaires habituels dès lors que ces tâches ont été rendues nécessaires par un sinistre auquel il nous revient contractuellement de remédier et alors même que ce sont incidemment vos défaillances qui n’ont pas permis de disposer d’une sauvegarde.

Votre négligence professionnelle et votre refus de déférer à nos demandes réitérées même les plus essentielles telles que la réalisation de sauvegardes-alors même que nous devrions nullement être contraints de les exprimer eu égard à vos responsabilités – met en péril la continuité du service et l’avenir même de notre société.

Ainsi, nous avons été parallèlement saisis le 02 avril 2020 d’une plainte du groupe BARBOTTEAU s’alarmant de votre inertie chronique dans l’exercice de votre mission contractuelle et de l’absence de diligences et solutions apportées à leurs difficultés.

Le Directeur Adjoint de la Compagnie Antillaise des Pétroles, M. [P] [E], a mis en cause le respect de nos obligations contractuelles et n’accepte plus vos retards à apporter les solutions qui sont de votre ressort.

Vous vous montrez de fait incapable d’apporter une réponse précise lorsqu’ils vous soulignent une difficulté technique et adoptez une stratégie d’évitement non professionnelle et inacceptable.

Son contrat objectif est accablant.

A l’évidence, vous ne souscrivez plus sciemment à vos obligations contractuelles.

La répétition de vos comportements aussi inacceptables qu’incompréhensibles avec votre niveau de responsabilité porte gravement atteinte au fonctionnement de nos équipes ainsi qu’à notre réputation commerciale et menace nos intérêts économiques les plus essentiels.

En violation des dispositions de l’article L. 1222-1 du Code du Travail, elle atteste de votre mauvaise foi contractuelle.

Ces agissements sont indiscutablement fautifs.

Vous n’avez fourni aucune explication à votre comportement lors de l’entretien préalable en date du 09 juin 2020.

Nous n’avons en conséquence pas pu modifier notre appréciation au sujet de votre comportement.

Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave’.

S’agissant du grief relatif au défaut de sauvegarde du serveur Trichec, il résulte des pièces du dossier que l’employeur a, à trois reprises, demandé au salarié de réaliser des sauvegardes des serveurs :

– par courriel du 25 mars 2020 en précisant : ‘Je sais que c’est une tâche difficile, mais il faut essayer de réduire les risques et veiller au bon déroulement des sauvegardes pour être à même de repartir en cas de blocage’,

– par courriel du 4 avril 2020, en indiquant dans la répartition des actions à mener au quotidien : SAUVEGARDE DES SERVEURS : FM (971 Urgent), JLM (972 ‘) Back up l’un l’autre,

– par courriel du 17 avril 2020 listant les actions suivant la nature de leur priorité : – SAUVEGARDE DES SERVEURS : FM (971 Urgent), JLM (972 ‘) Backup l’un l’autre

Il résulte de ces différents courriels que le salarié, en tant que directeur informatique, s’était vu confier la responsabilité de la sauvegarde des serveurs en Guadeloupe. Il résulte des courriels du directeur général de la société Sima adressés à différents collaborateurs durant le mois de mai 2020, relatifs aux actions menées à la suite de la panne électrique du 5 mai 2020 ayant entraîné la destruction de deux cartes mères en Guadeloupe que l’absence de sauvegarde du serveur de fichier Trichec Guadeloupe 192.168.10.201 (disque Q) a été constatée. Il est également souligné l’impossible exécution de tous les traitements Trichec Guadeloupe. L’incident sur le disque Q est corroboré par le courriel d’un collaborateur de la société du 25 mai 2020, relatif à ses observations sur la reconstruction de l’arborescence des données du disque Q.

En premier lieu, M. [C] souligne qu’il n’est pas justifié qu’il n’aurait pas procédé aux sauvegardes en cause. S’il est établi par des courriels du 28 avril 2020 et du 4 mai 2020 qu’il a effectivement réalisé des sauvegardes des VM971, il ne s’explique toutefois pas sur le défaut de sauvegarde du disque Q en cause, constaté à l’issue de l’incident EDF et ne l’a nullement contesté dans les différents échanges de courriels dont il était destinataire. Il reconnaît d’ailleurs dans ses écritures qu’il n’a pas pu procéder à la sauvegarde de l’ensemble des serveurs, alléguant les raisons qui seront ci-dessous analysées.

En second lieu, si M. [C] se prévaut d’une absence de moyens mis à sa disposition, notamment l’absence de dossier d’exploitation informatique, l’instabilité du programme Trichec, la version ancienne et non fiable du logiciel de sauvegarde qui n’aurait plus été sous garantie, l’organisation interne défaillante, il n’en justifie pas.

D’une part, il appert qu’il a été destinataire le 12 septembre 2019 d’un fichier excel récapitulant la liste des machines sur les sites de Sima et pour lequel il n’est pas démontré que le salarié aurait sollicité un complément d’informations ou aurait informé l’employeur de son caractère insuffisant.

D’autre part, les échanges de courriel des 17 et 18 avril 2020, portant comme objet ‘serveur Trichec 972″, ne permettent pas de justifier ses assertions dès lors qu’ils concernent des points techniques relatifs au Trichec de Martinique et à sa collaboration sollicitée par l’employeur pour soulager les tâches de son collègue, M. [N], positionné sur ce site.

Par ailleurs, il résulte des mentions figurant en français sur les devis de la société Gmes Bugbusters du 12 février 2019 et du 19 novembre 2019 que la société Sima disposait de contrats de support informatiques relatifs à la sauvegarde des fichiers.

De même, s’il affirme avoir informé l’employeur de l’impossibilité de procéder à la sauvegarde de l’ensemble des serveurs, il ne justifie pas de l’alerte dont il se prévaut, ayant seulement demandé le 28 avril 2020 à un collaborateur de vérifier si le disque 3 n’était pas défaillant.

Enfin, si M. [C] se prévaut de tâches à réaliser dans l’urgence et de difficultés pour prendre le relais d’un autre collaborateur qui aurait eu en charge le serveur litigieux, il ressort des pièces précitées que l’employeur lui avait clairement indiqué à plusieurs reprises la priorité et l’urgence de gérer les sauvegardes des serveurs de Guadeloupe.

Il résulte des éléments repris ci-dessus que le grief relatif à la négligence du salarié dans la réalisation de sauvegardes demandées par l’employeur est établi.

Concernant le refus du salarié d’effectuer des travaux les 7 et 8 mai 2020, M. [C] reconnaît dans ses écritures qu’il avait une heure de retard le 7 mai, précisant s’être rendu à un rendez-vous médical, sans toutefois en justifier. L’employeur souligne à juste titre que les équipes étaient mobilisées le 7 mai 2020 à la suite de l’incident EDF nécessitant des travaux urgents, dès lors que les établissements bancaires connaissaient par voie de conséquence une paralysie de leur activité. S’il n’est pas établi que l’employeur aurait demandé à M. [C] de se présenter le 7 mai 2020 à 7h, ni qu’il lui aurait donné l’instruction d’être présent le 8 mai 2019, jour férié, il n’en demeure pas moins que son retard le 7 mai 2020, dans un contexte de travaux urgents visant à restaurer des serveurs, procède d’une négligence professionnelle.

S’agissant de la gestion de la carte pétrolière du client Cap Barbotteau, il résulte d’un courriel du 2 avril 2020, adressé par le directeur adjoint de cette compagnie à M. [C] qu’il manifeste son mécontentement relatif au travail du salarié. Ce courriel précise : ‘Nous prenons note de votre retour et vous en remercions. Par contre, nous ne pouvons nous satisfaire de certaines réponses, car il y a bien longtemps que ces demandes ont été formulées et votre argument de ‘nombreuses actions à gérer en interne’ n’est pas acceptable. En 2 mois, et de notre point de vue, la seule action essentielle que vous ayez mise en place est l’installation sur notre réseau de stations-services des TPE. Je vous fais remarquer que tous ces TPE n’ont pu être opérationnels à cause du problème d’adresse IP que vous avez rencontré par la suite. A la lumière de ces événements, nous ferons remonter à la Direction de la SIMA toutes les anomalies rencontrées sur les 12 derniers mois, et leur demanderons de nous établir un planning précis des actions qui seront mises en place pour mener à bien la prestation qui nous est due’.

Par courriel du 8 avril 2020, le directeur général de la Sima informait ce client de la prise en main personnellement de ce dossier, puis, par mail du 18 septembre 2020, la société CAP manifestait sa satisfaction suite à cette passation de dossier.

Si M. [C] justifie de la satisfaction des interlocuteurs de cette société, dans leur collaboration à différents moments de l’année 2019 et 2020, il n’en demeure pas moins que le directeur adjoint a exprimé au mois d’avril 2020 son mécontentement général relatif à la coopération depuis 12 mois, dont une partie est imputable au salarié, dès lors que le courriel du client, ayant nécessité la prise en main du dossier par le directeur général de la société Sima, vise clairement l’insuffisance des actions menées par le salarié depuis deux mois.

Dans ces conditions, le grief est établi.

L’analyse menée ci-dessus met en évidence que la matérialité du défaut de réalisation de la sauvegarde du fichier Trichec Guadeloupe 192.168.10.201 (disque Q), le retard du salarié le 7 mai 2020 dans un contexte de travaux urgents à réaliser et le mécontentement du client Cap Barbotteau en lien avec les prestations de M. [C], sont matériellement établis par les pièces du dossier.

Il appert également que ces manquements, bien que qualifiés de négligences professionnelles par l’employeur, présentent un caractère fautif et ne relèvent pas de l’insuffisance professionnelle, dès lors que le salarié a méconnu les instructions réitérées de l’employeur au sujet des serveurs et a fait montre d’un désintérêt manifeste dans la gestion des conséquences de ce défaut de sauvegarde, témoignant d’une mauvaise volonté délibérée dans l’accomplissement de ses tâches, qui a entraîné une paralysie de l’activité des banques clientes et a nécessité le recours à une société prestataire en vue de faire redémarrer les chaînes de traitement.

M. [C], dont les responsabilités en tant que directeur informatique étaient principalement de veiller à la sécurité et la sauvegarde des données du réseau, a commis des manquements qui, eu égard à leurs conséquences notables ci-dessus rappelées, sont constitutives d’une faute rendant impossible son maintien dans l’entreprise et justifiant son licenciement pour faute grave.

Le jugement est infirmé sur ce point.

En ce qui concerne les conséquences financières du licenciement :

Le licenciement de M. [C] étant justifié par une faute grave, le salarié devra être débouté de ses demandes à titre de rappel de salaire correspondant à la mise à pied à titre conservatoire, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents.

Sur les dommages et intérêts au titre du préjudice moral :

M. [C] ne justifie pas de circonstances vexatoires en faisant état d’un acte d’huissier pour lui remettre la lettre de convocation à un entretien préalable, qui constitue une modalité de remise de ce document.

Il ne justifie pas davantage de telles circonstances en se prévalant d’un courriel du 14 avril 2020 relatif au mode de management du directeur général, celui-ci étant antérieur de deux mois à la rupture de son contrat de travail.

Il convient d’infirmer le jugement déféré en ce qu’il a alloué à M. [C] des dommages et intérêts à ce titre.

Sur les autres demandes :

Comme il apparaît inéquitable de laisser à la charge de la SARL Sima les frais irrépétibles qu’elle a exposés, il convient d’infirmer le jugement et de lui allouer une somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.

M. [C] sera, par voie de conséquence, débouté de sa demande présentée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.

Les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge de M. [C].

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

Déboute M. [C] [X] de sa demande tendant à constater l’absence d’effet d’évolutif de la déclaration d’appel de la SAS Société d’Impression Magnétique Antillaise (SIMA),

Déboute M. [C] [X] de sa demande tendant à écarter des débats la pièce n°16 de la SAS Société d’Impression Magnétique Antillaise (SIMA),

Infirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 juin 2022 par le conseil de prud’hommes de Pointe-à-Pitre entre M. [C] [X] et la SAS Société d’Impression Magnétique Antillaise (SIMA),

Statuant à nouveau,

Dit que le licenciement de M. [C] [X] repose sur une faute grave,

Déboute M. [C] [X] de ses demandes de versement de sommes à titre de rappel de salaire correspondant à la mise à pied à titre conservatoire, d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d’indemnité compensatrice de préavis, d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents et de dommages et intérêts pour préjudice moral,

Condamne M. [C] [X] à payer à la SAS Société d’Impression Magnétique Antillaise (SIMA) la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,

Condamne M. [C] [X] aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, La présidente,

 


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