14 février 2024
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
20/03665
ARRÊT n°
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 14 FEVRIER 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 20/03665 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OVQB
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 28 JUILLET 2020
CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION DE DEPARTAGE DE MONTPELLIER
N° RG F 15/01843
APPELANTE :
Société SIGNAUX GIROD SUD ( anciennement SIGNAUX GIROD SUD EST)
[Adresse 6]
[Localité 5]
Représentée par Me Marie camille PEPRATX NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE CAMILLE PEPRATX NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué par Me Eric NEGRE, avocat au barreau de MONTPELLIER, (postulant),
Représentée par Me Emmanuel BLANC avocat au barreau de VERSAILLES, substitué par Me David DURAND, avocat au barreau de NIMES,(plaidant),
INTIME :
Monsieur [X] [F]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Bénédicte SAUVEBOIS PICON de la SELARL CABINET D’AVOCATS SAUVEBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTERVENANTE :
POLE EMPLOI OCCITANIE,
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Sophie MIRALVES-BOUDET de la SELARL CHATEL BRUN MIRALVES CLAMENS, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me DASILVA,avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 30 Août 2023
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 DECEMBRE 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre
Madame Florence FERRANET, Conseiller
M. Jean-Jacques FRION, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Véronique ATTA-BIANCHIN
ARRET :
– Contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Véronique ATTA-BIANCHIN, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE :
M. [F] a été embauché par la société Romain Chelle, en qualité de représentant de commerce avec le statut de VRP, selon contrat à durée indéterninée à compter du 15 janvier 1987 qui a été transféré à la société Girod Sud-Est en 1992. Par avenant au contrat de travail en date du 19 décembre 2001, il a été promu technico-commercial, statut cadre, puis, à compter du 1er février 2008, il a été directeur commercial régional, position Il, indice 100 moyennant une rémunération mensuelle de 6 293,33 € bruts.
Le 19 octobre 2015, le comité d’entreprise a été consulté sur un projet de réorganisation qui prévoyait la suppression de 7 postes dont celui de M. [F].
Par courrier du 6 novembre 2015, M. [F] a été convoqué à un entretien préalable avant licenciement pour le 13 novembre suivant dans lequel il lui a été notifié une mesure de mise
à pied conservatoire.
Par courrier recommandé avec avis de réception en date du 12 décembre 2015 la société Girod Sud-Est a notifié à M. [F] son licenciement pour faute grave.
Contestant le motif de son licenciement, M. [F] a saisi le conseil de prud’hommes de Montpellier, sollicitant au dernier état de la procédure la condamnation de son employeur à lui remettre les bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la décision sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification du jugement et à lui payer les sommes suivantes :
– 231 115 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif;
– 19 259,64 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 925,96 € de congés payés afférents;
– 88 594,34 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
– 3 846,15 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied (part fixe de la rémunération de novembre et décembre 2015), outre 384,61 € de congés payés afférents;
– 1 771,65 € à titre de rappel de salaire sur mise à pied (part variable de la rémunération de novembre et décembre 2015), outre 177,16 € de congés payés afférents;
– 6 419,88 € à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement;
– 2 500 € représentant une retenue indue sur son solde de tout compte;
– 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Statuant en formation de départage le Conseil de prud’hommes par jugement du 28 juillet 2020 a :
Dit que le licenciement de M. [F] est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamné la société Signaux Girod Sud-Est à payer à M. [F] les sommes suivantes :
– 155 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 19 259,64 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– 1 925,96 € au titre des congés payés afférents à l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 88 594,34 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
– 3 846,15 € brut à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire (part fixe) ;
– 384,61 € brut au titre des congés payés afférents au rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire (part fixe) ;
– 1 771,65 € brut à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire (part variable);
– 177,17 € au titre des congés payés afférents au rappel de salaire sur mise à pied conservatoire (part variable) ;
– 2 500 € au titre de la retenue intitulée «avance permanente ‘ ‘;
– 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelé que les condamnations prononcées au profit de M. [F] bénéficient de l’exécution provisoire de droit dans les conditions prévues aux articles R.l454-14 et R.1454-28 du code du travail ;
Ordonné à la société Signaux Girod Sud-Est de remettre à M. [X] [F] un certificat de travail, une attestation Pôle-Emploi, un reçu pour solde de tout compte et des bulletins de salaire conformes au jugement, et ce sous astreinte de 10 € par jour et par document à compter du 30ème jour après notification du présent jugement ;
Débouté les parties de toute autre demande, plus ample ou contraire ;
Condamné la société Signaux Girod Sud-Est aux dépens.
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La société Signaux Girod Sud Est a interjeté appel de ce jugement le 2 septembre 2020.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 25 mai 2011 elle demande à la cour de :
Réformer ou annuler en totalité le jugement du Conseil de prud’hommes de Montpellier qui a jugé le licenciement de M. [F] dépourvu de cause réelle et sérieuse et a condamné la société Signaux Girod Sud Est à payer à M. [F] diverses sommes ;
Dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [F] est valable et fondé sur une cause réelle et serieuse ;
Par conséquent rejeter l’ensemble des demandes formulées par M. [F] ;
Ordonner la restitution par M. [F] de toutes les sommes perçues en application du jugement du Conseil de prud’hommes ;
Condamner M. [F] à payer à la société Signaux Girod Sud Est, la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile, avec droit de recouvrement direct en application de l’article 699 du code de procédure civile.
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Dans ses conclusions déposées au greffe de la cour le 24 février 2021 M. [F] demande à la cour de :
Confirmer en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de prud’hommes de Montpellier du 28 juillet 2020 en ce qu’il dit le licenciement de M. [F], mais le réformer sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prononcés ;
En conséquence ;
Condamner la société Signaux Girod Sud Est à lui verser la somme de 231 115 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
Condamner la société Signaux Girod Sud Est à lui verser la somme de 6 419,88 € à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement ;
Ordonner la remise des bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la décision, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt ;
Condamner la société Signaux Girod Sud Est à lui verser la somme de la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
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Pôle Emploi Occitanie dans ses conclusions d’intervenant volontaire déposées au greffe le 17 septembre 2021 demande à la cour de condamner la société Signaux Girod Sud Est à payer à Pôle emploi la somme de 22 509 € , et aux entiers dépens.
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Pour l’exposé des moyens il est renvoyé aux conclusions précitées en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 30 août 2023, fixant la date d’audience au 20 septembre 2023, date à laquelle le dossier a été renvoyé au 20 décembre 2023.
MOTIFS :
Sur le licenciement verbal :
M. [F] qui conteste dans les motifs de ses conclusions le rejet de sa demande de reconnaissance d’un licenciement oral, n’évoque à l’appui de cette prétention aucun élément nouveau et ne produit aucune nouvelle pièce. La Cour constate que le litige se présente dans les mêmes termes et sur la base des mêmes pièces que devant les premiers juges. C’est par une exacte appréciation des faits que les premiers juges, ont constaté et estimé que la preuve d’un licenciement oral n’était pas rapportée, dès lors, le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur le licenciement pour faute grave :
– Sur l’irrégularité de la procédure de licenciement :
Aux termes de l’article L.1232-2 du code du travail, l’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la convocation. Le salarié doit disposer de cinq jours pleins pour préparer sa défense de sorte que le jour de la remise de la lettre de convocation ne compte pas dans le délai, non plus que le dimanche, qui n’est pas un jour ouvrable.
En l’espèce la convocation à l’entretien préalable a été remise au salarié le vendredi 6 novembre 2015 pour un entretien fixé au vendredi 13 novembre 2015 à 9 heures. Dans la mesure où dans ce délai il doit être décompté le dimanche 7 novembre ainsi que le 11 novembre, jour férié, le salarié n’a disposé que de 3 jours ouvrables, soit les 8, 10 et 12 novembre 2015, de sorte que la procédure de licenciement est irrégulière, le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les motifs du licenciement :
Aux termes des dispositions de l’article L. 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, de sorte que l’employeur qui prend l’initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer le ou les motifs dans la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige; les motifs avancés doivent être réels, précis, matériellement vérifiables, sans quoi cela équivaut à une absence de motif, et suffisamment importants pour justifier une rupture du contrat de travail.
La faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. La preuve de la faute grave incombe à l’employeur. Dans tous les cas si un doute subsiste, il profite au salarié.
En l’espèce la lettre de licenciement en date du 10 décembre 2015, reproche à M. [F] les faits suivants :
« En date du 4 novembre 2015, le collaborateur de l’entreprise Signaux Girod Sud Est, chargé notamment d’assurer la sauvegarde informatique quotidienne sur supports spéci’ques pour le compte de l’agence de [Localité 5] (34) constate que des ‘chiers de l’entreprise ont massivement disparu et alerte les services de la Direction des systèmes d`information du siège implantée à [Localité 7].
De ce fait et immédiatement à la suite de cette alerte, la Direction des systèmes d’information, ayant constaté que l’effacement de ces fichiers avait été opéré au sein même de l’agence de [Localité 5], a donc procédé au renforcement de la sécurisation du serveur de cette agence en activant la stratégie Windows permettant le traçage des suppressions de ‘chiers, a’n de pouvoir identifier la source de ce constat en cas d’éventuelle récidive.
Le jeudi 5 novembre 2015, vers 16h40, un nouveau constat d’effacement massif de ‘chiers informatiques sur le serveur de [Localité 5] est tracé. L’opération de renforcement de sécurisation du système révèle que vous êtes, sans ambiguïté, l’auteur de ce préjudice, celui-ci portant sur la suppression de 1595 ‘chiers traitant des fonctionnements de l’entreprise portant sur la sauvegarde du support de l’applicatif chantier, de dossier de dessin assisté par ordinateur, de fax ou encore de dossiers relatifs à notre activité de pose tels que AER ou A9.
Au vu de l`extrême gravité des faits constatés, nous sommes contraints de procéder à votre licenciement immédiat pour faute grave.
Aussi, le contexte particulier touchant l’entreprise au sein de laquelle vous ‘uvrez et pour laquelle nous avons été contraint de procéder à une démarche de réorganisation impactant notamment le poste de Directeur Commercial Régional que vous occupez ne saurait vous autoriser à procéder à la suppression massive de ‘chiers informatiques, quelles qu’en soient les raisons, l’objectif et l’utilité et ainsi à lui porter préjudice. Ce constat pourrait s’apparenter à une malveillance induite par une copie de fichiers sur un CD ou sur tout autre support « personnel ». »
Il est donc reproché à M. [F] un premier effacement de fichiers le 4 novembre 2015 puis un second effacement de 1595 fichiers le 5 novembre 2015, effacements que M. [F] nie avoir effectués.
Pour preuve de la faute grave invoquée, l’employeur verse aux débats le procès-verbal de constat dressé par un huissier de justice le 6 novembre 2015 au siège de la S.A. Signaux Girod à [Localité 7] dans le Jura en présence de M. [B] [L], directeur des systèmes d’informations.
Il produit en cause d’appel l’attestation de Mme [I], responsable d’agence de la société Signaux Girod Sud Est, qui déclare le 7 décembre 2020, « qu’elle a constaté personnellement le 4 novembre 2015, alors que M. [F] était à l’agence de [Localité 9] la disparition des dossiers :A9 AER lot 1, A9 AER lot 2, A9 COLAS, A9 [Localité 10] [Localité 11]-[Localité 8], Applicatif chantier, DAO Maquette, Fax, Pose et Situation A9 TOAQCH Ouest, et qu’après la remontée informatique des données archivées, elle a constaté une seconde disparition en date du jeudi 5 novembre 2015. ».
Il produit l’attestation de M. [L], directeur des systèmes d’information de la société Signaux Girod Sud Est au moment des faits qui déclare le 31 mars 2021, « le 04/11/2015, une personne de la filiale nous a alerté après avoir constaté la suppression de plusieurs dossiers sur le serveur de la filiale de [Localité 5]. Nous avons constaté l’ampleur de la disparition en effectuant la comparaison avec le contenu de la dernière sauvegarde. Nous avons procédé à la restitution des fichiers depuis la sauvegarde. Au vu du volume et surtout du nombre de dossiers séparés que cela représentait, j’ai considéré que cela ne pouvait pas être accidentel. Comme la stratégie d’audit sur le serveur de la filiale n’était pas paramétré pour enregistrer les accès aux fichiers, j’ai pris la décision de la faire mettre en place immédiatement sur le serveur de [Localité 5] et ensuite de l’étendre à tous les serveurs du groupe. cette stratégie d’audit permet au systéme d’exploitation du serveur d’enregistrer tous les accès aux fichiers du serveur (création, lecture, modification, suppression).
Le lendemain, 05/11/2015, nous avons été de nouveau contacté par la filiale car les fichiers restitués la veille avaient de nouveau disparu. Nous avons alors lancé l’analyse à l’aide des outils du système d’exploitation du serveur afin de déterminer l’origine de cette suppression en masse de milliers de fichiers dans des dossiers distincts (17726 fichiers). Il s’est avéré que tous ces fichiers avaient été supprimés par le compte Windows de M. [X] [F].
Nous avons à nouveau restitué les fichiers depuis la sauvegarde et alerté la direction générale ainsi que la DRH…. Aucun élément ne permet de remettre en cause notre intégrité. Le constat fait devant huissier retrace très précisément les manipulations effectuées. L’analyse du constat d’huissier par un expert judiciaire montre que les données ont été recueillies dans les règles de l’art. »
L’employeur produit enfin le rapport de l’expertise privée effectuée par M. [R], qui a été mandaté pour démontrer que M. [F] a procédé notamment dans la journée du 05.11.2015 à la suppression de près de 18 000 fichiers sur le serveur S2K3 GRAND SUD de la société Signaux Girod Sud Est. L’expert conclut que les données qui ont été recueillies par l’huissier l’ont été dans les règles de l’art et que ces données sont exploitables à titre de preuve.
Il ressort de ces éléments que le 4 novembre 2015, les dossiers A9 AER lot 1, A9 AER lot 2, A9 COLAS, A9 [Localité 10] [Localité 11]-[Localité 8], Applicatif chantier, DAO Maquette, Fax, Pose et Situation A9 TOAQCH Ouest, ont disparu, sans que l’on sache qui est à l’origine de cette disparition et qu’après restauration des données par les services informatiques le 5 novembre 2015 les fichiers correspondant à ces dossiers ont été à nouveau supprimés sur le serveur S2K3 GRAND SUD de la société Signaux Girod Sud Est et par le compte windows de M. [F], soit à partir du poste informatique de M. [F].
L’employeur affirme que M. [F] était présent à son poste de travail au moment où les fichiers ont été supprimés le 5 novembre 2015 et que lui seul avait accès à son ordinateur pour lequel il disposait d’identifiants confidentiels et de mots de passe personnels.
Le fait que le règlement intérieur dispose que chaque salarié est responsable de la confidentialité de son code d’identification et s’interdit toute diffusion en dehors des cas expressement autorisés par la direction et que la charte d’utilisation des ressources informatiques et réseau mentionne qu’il est interdit à chaque utilisateur d’utiliser le matricule d’une autren ne démontre pas que seul M. [F] peut être l’auteur de ces suppressions.
M. [F] soutient que lorsque son ordinateur est ouvert après qu’il ait lui même renseigné son nom d’utilisateur et son mot de passe, tout le monde avait accès à son compte, et il ressort du compte rendu de l’entretien préalable du vendredi 13 novembre 2015, que M. [F] a reconnu avoir nettoyé sa boite mail saturée et a ensuite a rappelé que dès lors que son ordinateur était ouvert tout le monde pouvait y avoir accès et que M. [O] a confirmé ce fait.
Rien ne permet donc d’affirmer que M. [F] est l’auteur de la suppression des fichiers, qui en tout état de cause ont été immédiatement restaurés ainsi qu’en atteste M. [L], la réalité d’une faute grave ou même d’une cause réelle et sérieuse de licenciement n’est pas établie, le licenciement de M. [F] intervenu le 12 décembre 2015 est donc sans cause réelle et sérieuse, le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les sommes dues au salarié au titre du licenciement :
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Aux termes de l’article L.1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien des avantages acquis, et en cas de refus, le juge octroie une indemnité au salarié à la charge de l`employeur, qui ne peut être inférieur aux salaires des six derniers mois, due sans préjudice de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. l 234-9 de ce code.
Il n`est pas discuté que l’entreprise emploie plus de 11 salariés et que M. [F] a une ancienneté supérieure à deux ans. M. [F] était âgé de 58 ans au moment de son licenciement et avait une ancienneté de plus de 28 ans.
La société Signaux Girod Sud Est fait valoir que M. [F] ne justifie d’aucun préjudice, que son fils [Y], salarié commercial au sein de Signaux Girod sur la région Alpes Maritime et qui a obtenu la signature d’une rupture conventionnelle en 2016, a crée sa propre entreprise le 10 mars 2016, et que M. [F] a rejoint cette entreprise en qualité de salarié en février 2019.
M. [F] produit effectivement aux débats son bulletin de salaire du mois de février 2019 dulequel il ressort en qualité de cadre salarié pour un salaire brut mensuel de 3 000 €. Il a perçu à compter du 29 janvier 2016 des indemnités pôle emploi à hauteur de 125,05 €/jour et ce jusqu’au 27 janvier 2019.
Le préjudice subi par M. [F] sera justement évalué à la somme de 65 000 €, le jugement sera infirmé de ce chef, et M. [F] sera condamné à restituer les sommes trop perçues.
Sur la demande de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement :
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu que le cumul de l’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle pour licenciement irrégulier n’est pas autorisé par les dispositions de l’article L.1235-2 du code du travail applicables à la présente instance et a donc débouté M. [F] de cette demande.
Sur la demande de remise sous astreinte des documents de fin de contrat et bulletins de salaires conformes :
Les premiers juges ont ordonné la délivrance par la société défenderesse, et ce sous astreinte de 10 € par jour et par document à compter du 30ème jour après notification du présent jugement, des documents de fin de contrat et des bulletins de salaire, afin d’assurer la prompte exécution cette obligation.
Il n’est pas nécessaire en cause d’appel d’assortir cette condamnation d’une astreinte, le jugement sera infirmé en ce sens.
Sur les autres demandes :
Il sera fait application des dispositions de l’article L.1235-4 du code du travail dans la limite de la somme de 22 509 €.
La société Signaux Girod Sud Est qui succombe principalement sera tenue aux dépens d’appel et condamnée en équité à verser à M. [F] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour ;
Statuant dans la limite des chefs de jugement critiqués, confirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Montpellier statuant en départage, sauf sur le quantum des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur le prononcé d’une astreinte ;
Statuant à nouveau ;
Condamne la société Signaux Girod Sud Est à verser à M. [F] à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse la somme de 65 000 € ;
Ordonne la restitution par M. [F] de la somme trop perçue en exécution du jugement du Conseil de prud’hommes ;
Dit n’y avoir lieu à assortir d’une astreinte l’obligation de délivrance par la société Signaux Girod Sud Est des documents de fin de contrat et des bulletins de salaire rectifiés ;
Y ajoutant
Ordonne le paiement par la société Signaux Girod Sud Est à Pôle Emploi Occitanie de la somme de 22 509 € et dit qu’une copie certifiée conforme de la présente sera adressée à ces organismes conformément aux dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail ;
Condamne la société Signaux Girod Sud Est à payer à M. [F] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Signaux Girod Sud Est aux dépens d’appel.
La greffière Le président
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