1 février 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG n°
23/08114
MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 23/08114 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3X3Z
AFFAIRE : S.A.S. CYBERMANIA / Association INSTITUT DE MEDECINE DE LA REPRODUCTION
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
LE JUGE DE L’EXECUTION
JUGEMENT DU 01 FEVRIER 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRESIDENT : Mme BENHARKAT, Juge
GREFFIER : Madame KELLER, Greffier
DEMANDERESSE
S.A.S. CYBERMANIA,
dont le siège social est sis [Adresse 1]
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Me Philippe PENSO, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE
Association INSTITUT DE MEDECINE DE LA REPRODUCTION,
dont le siège social est sis [Adresse 2]
prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
représentée par Maître Gilles MARTHA de la SCP BBLM, avocats au barreau de MARSEILLE substituée par Me Agathe PESTEL DEBORD, avocat au barreau de MARSEILLE
NATURE DE LA DECISION : Contradictoire
Le Tribunal après avoir entendu les parties et leurs avocats en leurs conclusions à l’audience du 11 Janvier 2024 a mis l’affaire en délibéré et indiqué que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 01 Février 2024, date à laquelle a été rendu le jugement dont la teneur suit :
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon ordonnance du 27 juin 2023, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de MARSEILLE a autorisé l’association institut de médecine de la reproduction (IMR) à pratiquer une saisie conservatoire sur les comptes bancaires de la société CYBERMANIA, pour garantir une créance évaluée provisoirement à la somme d’un million d’euros.
Selon procès-verbal de saisie conservatoire de créance en date du 10 et 11 juillet 2023, l’association IMR agissant en vertu de la décision susvisée, a procédé à la saisie conservatoire entre les mains de :
– La SA BNP PARIBAS, le 10 juillet 2023 à hauteur de 218 601,69 euros ;
– La SOCIETE GENERALE, le 11 juillet 2023 à hauteur de 151 152,81 euros.
Cette mesure a été dénoncée à la société CYBERMANIA, par actes signifiés les 11 et 13 juillet 2023.
Selon acte d’huissier en date du 8 août 2023, la société CYBERMANIA a fait assigner l’association IMR devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de MARSEILLE, en vue de la mainlevée des saisies conservatoires ainsi pratiquées, la condamnation de l’IMR à payer à la société CYBERMAGNA la somme de 8000 € sur le fondement de l’article L512-2 du code de procédure des voies d’exécution ; outre la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Par conclusions n°3 communiquées par RPVA du 10 janvier 2024, la société CYBERMANIA soutient que l’IMR ne dispose pas d’une créance paraissant fondée en son principe, dans la mesure où le contrat qui les lient ne comprend pas la sauvegarde des données qui a été sous traitée à la société OVH, qu’elle n’est pas engagée contractuellement à garantir des dommages immatériels, qu’elle n’a pas commis de faute lourde pouvant écarter cette clause d’exclusion de responsabilité, que les dommages matériels s’ils existent sont limités à la somme de 31 159 euros. Elle ajoute que l’IMR ne prouve pas de l’existence d’un risque de recouvrement, qu’elle est solvable dans la mesure où elle dispose de cinq agences avec plus de 620 clients, qu’elle est assurée à hauteur de 500 000 euros par la société AXA France. Enfin elle sollicite des dommages et intérêts pour le préjudice lié aux saisies conservatoires qui l’ont privés de la trésorerie nécessaire au paiement des salaires et au paiement de créanciers.
Par conclusions n°3 communiquées par RPVA du 10 janvier 2024, l’IMR maintient que sa créance est fondée en son principe dans la mesure où il resort de conditions particulières du contrat la société CYBERMANIA devait s’assurer de la sauvegarde des données par une duplication de ces dernières, que la clause exclusive de responsabilité sera écartée pour faute lourde et que son dommage total s’élève à la somme d’ 1 071 209,68 euros. Elle fait valoir qu’il existe un risque dans le recouvrement de cette creance car la société CYBERMANIA ne publie pas ses comptes sociaux depuis l’année 2017, qu’elle ne produit aucun bilan, que l’attestation d’assurance n’est pas precise de sorte qu’il n’est pas sûr que cette garantie s’applique dans le cas d’espèce et que les montants saisis ne correspondent qu’à 35 % de sa creance estimée. Elle sollicite le rejet de la demande de dommages et intérêts au motif qu’elle a été autorisée par voie judiciaire a pratiquer ces saisies. Elle requiert la condamnation du demandeur à la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
À l’audience du 11 janvier 2024, les parties ont développé leurs écritures et se sont référées aux moyens et prétentions contenus dans leurs écritures.
Il est expressément référé, en application de l’article 455 du code de procédure civile, à l’exploit introductif d’instance et aux conclusions pour connaître des faits, moyens et prétentions des parties.
L’affaire a été mise en délibéré au 1er février 2024;
MOTIFS
Sur la qualification de la décision :
En l’espèce, toutes les parties ont comparu. La présente décision sera donc contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 467 du code de procédure civile.
Par ailleurs la présente décision est rendue en premier ressort.
Sur la demande de mainlevée de la saisie conservatoire :
En vertu de l’article L511-1 du code des procédures civiles d’exécution toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d’en menacer le recouvrement.
En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que l’IMR a subi un préjudice certain lié à la perte de ses données. Celle-ci est liée par contrat de prestation de service à la société CYBERMANIA et OVH. Malgré une clause excluant la prise en charge des préjudices immatériels, il apparait que les conditions particulières du contrat contraignent la société CYBERMANIA à mettre en œuvre des mesures techniques nécessaires à la conservation des données et à un plan de reprise ou de continuité d’activités, de sorte, qu’il existe une créance apparaissant fondée en son principe.
Par ailleurs, aucune pièce produite ne permet de connaitre l’état de santé financière de la société CYBERMANIA qui certes fait état de nombreux clients mais ne produit aucun de ses bilans ou documents sur sa situation financière, ne permettant pas d’écarter le risque de recouvrement en cas de condamnation.
Dans ces conditions, la demande de mainlevée sera rejetée.
Sur la demande de dommages et intérêts :
En vertu de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Cela suppose donc un fait générateur imputable à la personne dont la responsabilité délictuelle est recherchée, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le dommage.
La société CYBERMANIA sollicite la condamnation de la défenderesse au paiement de dommages et intérêts en raison du préjudice subi par les saisies conservatoires.
Or, il n’est pas établi de faute de cette dernière qui a été autorisée à procéder par voie judiciaire.
Par conséquent, cette demande sera rejetée.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :
La société CYBERMANIA, succombant, supportera les dépens de la procédure, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
La société CYBERMANIA, tenue aux dépens, sera condamnée à payer à l’IRM une somme, qu’il paraît équitable d’évaluer à 2 000 euros, au titre des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer pour la présente procédure.
Sur l’exécution provisoire :
En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.
PAR CES MOTIFS,
Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition du public au greffe,
Constate l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe et un risque dans le recouvrement de cette dernière, au profit de l’association L’INSTITUT DE MEDECINE DE LA REPRODUCTION ;
Rejette la demande de mainlevée des saisies conservatoires pratiquée le 10 juillet 2023 entre les mains de la SA BNP PARIBAS et le 13 juillet 2023 entre les mains de la SOCIETE GENERALE, comptes ouverts au nom de la société CYBERMANIA S.A.S.;
Condamne la société par actions simplifiée CYBERMANIA à payer à l’association L’INSTITUT DE MEDECINE DE LA REPRODUCTION 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société par actions simplifiée CYBERMANIA aux dépens de la procédure ;
Rejette tous autres chefs de demandes ;
Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;
Et le juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.
Le greffier Le juge de l’exécution
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