Saisie de données informatiques : la volatilité des pièces – Questions / Réponses juridiques

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Saisie de données informatiques : la volatilité des pièces – Questions / Réponses juridiques

La société Charvet Industries, spécialisée dans les panneaux d’affichages lumineux, et la société Prismaflex International, fabricant de panneaux LED, sont concurrentes sur le marché français. En juin 2020, elles ont signé un accord de confidentialité en vue d’une éventuelle acquisition de Charvet par Prismaflex, qui incluait une clause de non-débauchage jusqu’en septembre 2022. En décembre 2022, Charvet a mis en demeure Prismaflex de cesser les sollicitations auprès de ses employés et a saisi le tribunal de commerce de Lyon pour obtenir la désignation d’un huissier de justice, invoquant des recrutements de ses salariés par Prismaflex. Le 6 mars 2023, le tribunal a autorisé certaines mesures d’instruction, qui ont été partiellement rétractées par une ordonnance du 18 juillet 2023. Prismaflex a interjeté appel, demandant la nullité des mesures ordonnées, tandis que Charvet a demandé la confirmation de l’ordonnance du 18 juillet. La cour d’appel a confirmé la compétence du tribunal de commerce de Lyon, mais a rétracté l’ordonnance du 6 mars 2023, déclarant nulle la saisie effectuée le 28 mars 2023 et ordonnant la restitution des documents saisis à Prismaflex. Charvet a été condamnée à payer des dommages et intérêts à Prismaflex et à supporter les dépens de la procédure.. Consulter la source documentaire.

Quelle est la compétence juridictionnelle applicable dans ce litige ?

La compétence juridictionnelle dans ce litige est régie par plusieurs articles du Code de la propriété intellectuelle et du Code de l’organisation judiciaire.

Selon l’article L. 521-3-1 du Code de la propriété intellectuelle, « les actions civiles et les demandes relatives aux dessins et modèles, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux judiciaires déterminés par voie réglementaire. »

De plus, l’article D. 211-6-1 du Code de l’organisation judiciaire précise que le tribunal judiciaire de Lyon est compétent pour connaître des actions en matière de modèle pour les procédures du ressort des cours d’appel de Chambéry, Grenoble, Riom et Lyon.

En revanche, l’article R. 211-17 du même code stipule que le tribunal judiciaire compétent pour connaître des actions en matière de marques de l’Union Européenne, dessins et modèles communautaires, est celui de Paris.

Dans ce cas, la société Prismaflex International soutient que la compétence exclusive revient au tribunal judiciaire de Paris, tandis que la société Charvet Industries fait valoir que le tribunal de commerce de Lyon est compétent en raison de la nature des demandes formulées, qui relèvent de la responsabilité contractuelle et délictuelle, sans lien direct avec la propriété intellectuelle.

Quelles sont les conséquences de la rétractation de l’ordonnance sur requête ?

La rétractation de l’ordonnance sur requête a des conséquences significatives sur la validité des mesures d’instruction ordonnées.

L’article 493 du Code de procédure civile stipule que « l’ordonnance sur requête est une décision provisoire rendue non contradictoirement dans le cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse. »

En l’espèce, la cour a constaté que la mesure de constat ordonnée le 6 mars 2023 était disproportionnée et ne justifiait pas la dérogation au principe du contradictoire.

Ainsi, la cour a rétracté l’ordonnance, déclarant que la saisie opérée le 28 mars 2023 était de nul effet, ce qui entraîne la nullité de tous les actes réalisés dans le cadre de cette mesure, y compris le procès-verbal de constat établi par l’huissier de justice.

La société Charvet Industries est donc tenue de restituer à la Selarl Chezeaubernard, Commissaire de justice, l’intégralité des pièces saisies, sous peine d’astreinte.

Quels sont les fondements de la responsabilité contractuelle et délictuelle invoqués par Charvet Industries ?

La société Charvet Industries invoque à la fois la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle dans le cadre de son litige avec Prismaflex International.

Concernant la responsabilité contractuelle, l’article 1231-1 du Code civil stipule que « le débiteur est tenu de réparer le préjudice causé par l’inexécution de son obligation, sauf s’il prouve que cette inexécution est due à une cause étrangère qui ne peut lui être imputée. »

Charvet Industries fait valoir que Prismaflex a violé l’accord de non-débauchage en recrutant plusieurs de ses salariés, ce qui constitue une inexécution de l’obligation contractuelle.

En ce qui concerne la responsabilité délictuelle, l’article 1240 du Code civil énonce que « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Charvet Industries soutient que Prismaflex a engagé sa responsabilité délictuelle par des actes de concurrence déloyale, notamment en s’appropriant des informations confidentielles et en débauchant des salariés stratégiques, causant ainsi un préjudice économique à Charvet.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet à la cour d’accorder une indemnité à la partie qui a gagné le procès pour couvrir les frais non compris dans les dépens.

Cet article stipule que « la partie qui perd doit payer à l’autre partie une somme qui peut être fixée par le juge, en tenant compte de la situation de chacune des parties. »

Dans le cadre de ce litige, la cour a condamné la société Charvet Industries à payer à la société Prismaflex International une somme de 10 000 € sur le fondement de cet article, en raison de la nature abusive de la procédure engagée par Charvet.

En revanche, la demande de Charvet Industries pour obtenir une indemnité au titre de l’article 700 a été rejetée, car la cour a considéré que la société n’avait pas démontré un comportement fautif de la part de Prismaflex.

Comment la cour a-t-elle évalué la nécessité de la dérogation au principe du contradictoire ?

La cour a évalué la nécessité de déroger au principe du contradictoire en se basant sur les éléments présentés par la société Charvet Industries dans sa requête.

Selon la jurisprudence, la nécessité de déroger au principe du contradictoire doit être justifiée de manière précise et circonstanciée.

La cour a constaté que Charvet Industries avait invoqué un risque de dépérissement de preuve, en raison de l’attitude de Prismaflex, qui aurait violé l’accord de non-sollicitation et aurait agi de manière déloyale.

Cependant, la cour a également noté que les éléments présentés ne justifiaient pas à eux seuls la dérogation au contradictoire, car il n’y avait pas d’effet de surprise à attendre de l’ordonnance sur requête.

Ainsi, la cour a conclu que la mesure d’instruction ordonnée était inappropriée et a rétracté l’ordonnance, soulignant que la nécessité de la dérogation n’était pas suffisamment étayée.


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