Rupture de contrat et exécution des obligations salariales : enjeux financiers en question

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Rupture de contrat et exécution des obligations salariales : enjeux financiers en question

L’Essentiel : M. [J] [N] a été embauché par Tangram Finance en juin 2020 et a été transféré à la S.A.S. Editions Messignac en février 2023. Après des négociations infructueuses sur sa rémunération variable, il a pris acte de la rupture de son contrat en mars 2023, considérant cela comme un licenciement sans cause réelle. Le conseil de prud’hommes a condamné Editions Messignac à lui verser des sommes pour rappel de rémunération et congés payés. En appel, M. [N] a contesté certaines condamnations, tandis qu’Editions Messignac a demandé l’arrêt de l’exécution provisoire, arguant de conséquences financières excessives.

Exposé du litige

M. [J] [N] a été embauché par la société Tangram Finance en tant que rédacteur spécialisé à partir du 1er juin 2020. Le 1er février 2023, l’ensemble du personnel a été transféré à la S.A.S. Editions Messignac, spécialisée dans la conception et l’édition de magazines. Après des discussions infructueuses sur sa rémunération variable, M. [N] a décidé, par courriel du 29 mars 2023, de prendre acte de la rupture de son contrat de travail, imputant la responsabilité à la société Editions Messignac. Le 19 juillet 2023, il a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon pour faire reconnaître que cette prise d’acte équivalait à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Jugement du conseil de prud’hommes

Le 11 juillet 2024, le conseil de prud’hommes a rendu un jugement condamnant la société Editions Messignac à verser plusieurs sommes à M. [N], incluant 16 500 € pour rappel de rémunération variable de 2022, 11 156,25 € pour 2023, ainsi que des congés payés afférents. Le salaire moyen des douze derniers mois a été fixé à 3 235 € bruts, et les sommes dues ont été majorées des intérêts légaux à partir de la convocation de la société devant le bureau de jugement.

Appel de M. [N]

M. [N] a interjeté appel le 8 août 2024, se limitant à contester les condamnations relatives aux sommes de 16 500 € et 1 650 € de congés payés pour 2022. Le 21 novembre 2024, la société Editions Messignac a assigné M. [N] en référé pour demander l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement, tout en sollicitant que chaque partie conserve la charge de ses dépens.

Arguments de la société Editions Messignac

Lors de l’audience du 6 janvier 2025, la société Editions Messignac a soutenu qu’il existait un moyen sérieux de réformation, arguant que le conseil de prud’hommes n’avait pas pris en compte un paiement de 12 659,60 € effectué le 5 mars 2024 pour la rémunération variable de 2022. Elle a également évoqué des conséquences manifestement excessives sur sa situation financière, affirmant que l’exécution provisoire risquait d’aggraver ses difficultés économiques.

Réponse de M. [N]

M. [N] a contesté les demandes de la société, demandant le remboursement de 128,74 € pour ses dépens et 1 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Il a soutenu que la société avait reconnu sa créance pour les sommes allouées et qu’il n’avait pas l’intention de mettre à exécution la décision sur le montant déjà couvert. Il a également contesté l’existence de conséquences manifestement excessives, arguant que les preuves fournies par la société étaient insuffisantes.

Décision du délégué du premier président

Le délégué a relevé que l’exécution provisoire ne pouvait être arrêtée que si un moyen sérieux de réformation était établi et si l’exécution risquait d’entraîner des conséquences manifestement excessives. Il a noté que la société Editions Messignac n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour démontrer un risque de conséquences excessives, et que ses attestations étaient trop générales et manquaient de détails chiffrés.

Conclusion sur les demandes

En conséquence, la demande d’arrêt de l’exécution provisoire a été rejetée, et la demande reconventionnelle de M. [N] pour le remboursement de frais a été déclarée irrecevable. La société Editions Messignac a été condamnée aux dépens de la procédure et à verser une indemnité à M. [N] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’exécution provisoire des décisions du conseil de prud’hommes ?

L’article R. 1454-28 du Code du travail précise que, sauf disposition contraire, les décisions du conseil de prud’hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire.

Le conseil de prud’hommes peut toutefois ordonner l’exécution provisoire de ses décisions.

Les jugements qui sont de droit exécutoires à titre provisoire incluent notamment :

1° Le jugement qui n’est susceptible d’appel que par suite d’une demande reconventionnelle ;

2° Le jugement qui ordonne la remise d’un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;

3° Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.

Il est donc essentiel de vérifier si la décision en question remplit ces critères pour être considérée comme exécutoire de droit.

Quels sont les critères pour arrêter l’exécution provisoire selon l’article 514-3 du Code de procédure civile ?

L’article 514-3 du Code de procédure civile stipule que l’exécution provisoire ne peut être arrêtée que si deux conditions sont remplies :

1. Il doit exister un moyen sérieux d’annulation ou de réformation de la décision ;

2. L’exécution doit risquer d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Ces deux conditions sont cumulatives, ce qui signifie que l’absence de l’une d’elles suffit à rejeter la demande d’arrêt de l’exécution provisoire.

Dans le cas présent, la société Editions Messignac a tenté de prouver l’existence de conséquences manifestement excessives, mais n’a pas réussi à établir de manière convaincante que l’exécution de la décision entraînerait des difficultés financières disproportionnées.

Comment se justifie la demande de remboursement des frais d’huissier par M. [N] ?

M. [N] a demandé le remboursement de la somme de 128,74 € au titre des frais retenus par le commissaire de justice dans le cadre d’une tentative de saisie.

Cependant, le premier président a relevé d’office que cette demande était irrecevable. En effet, il n’a pas le pouvoir juridictionnel pour statuer sur les dépens de première instance ou sur la prise en charge par l’une ou l’autre des parties des frais de recouvrement forcé.

Ainsi, la demande de M. [N] a été déclarée irrecevable, ce qui souligne l’importance de la compétence juridictionnelle dans le traitement des demandes de remboursement de frais.

Quelles sont les implications des articles 700 et 514-3 du Code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge d’allouer une somme à titre de frais irrépétibles, c’est-à-dire des frais engagés par une partie pour sa défense qui ne peuvent pas être récupérés.

Dans cette affaire, la société Editions Messignac a été condamnée à verser à M. [N] une indemnité de 800 € au titre de l’article 700, ce qui reflète la reconnaissance des frais engagés par M. [N] pour sa défense.

Par ailleurs, l’article 514-3 a été central dans l’évaluation de la demande d’arrêt de l’exécution provisoire. La société Editions Messignac a tenté de prouver des conséquences manifestement excessives, mais n’a pas réussi à fournir des éléments probants, ce qui a conduit à la décision de maintenir l’exécution provisoire.

Ces articles illustrent l’équilibre entre la protection des droits des créanciers et la nécessité de ne pas imposer des charges excessives aux débiteurs.

N° R.G. Cour : N° RG 24/00240 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QB4E

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 20 Janvier 2025

DEMANDERESSE :

S.A.S. LES EDITIONS MESSIGNAC représentée par son président en exercice M. [B]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Loïc DUCHANOY de la SCP LDH AVOCATS, avocat au barreau de DIJON

DEFENDEUR :

M. [J] [N]

[Adresse 2]

[Localité 1]

avocat postulant : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocats au barreau de LYON (toque 475)

avocat plaidant : Me Philippe GROS (cabinet ORATIO AVOCATS), avocat au barreau de LYON (toque 660)

Audience de plaidoiries du 06 Janvier 2025

DEBATS : audience publique du 06 Janvier 2025 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée le 20 Janvier 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 » »

EXPOSE DU LITIGE

M. [J] [N] a été embauché initialement par la société Tangram Finance à compter du 1er juin 2020 en qualité de rédacteur spécialisé.

L’ensemble du personnel a été transféré en application de l’article L. 1224-1 du Code du travail à compter du 1er février 2023 au sein de la S.A.S. Editions Messignac qui a pour activité principale la conception et l’édition de magazines.

Suite à des échanges infructueux concernant sa rémunération et notamment la partie variable, M. [N] a, par courriel du 29 mars 2023, entendu prendre acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de la société Editions Messignac.

Par acte du 19 juillet 2023, M. [N] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon afin de voir juger que la prise d’acte de la rupture ait les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement contradictoire du 11 juillet 2024, cette juridiction a notamment :

– condamné la société Editions Messignac à payer les sommes suivantes à M. [N] :

16 500 € outre 1 650 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2022,

11 156,25 € outre 1 115,62 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2023,

2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– fixé le salaire moyen des douze derniers mois à 3 235 € bruts,

– dit que les sommes attribuées à M. [N] au titre des rappels de salaires seront majorés des intérêts légaux à compter de la date de réception de la convocation de la société Editions Messignac devant le bureau de jugement du 9 novembre 2023.

M. [N] a interjeté appel de la décision le 8 août 2024 en limitant sa portée, concernant les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes, à celle qui lui alloué les sommes de 16 500 € et de 1 650 € de congés payés afférents au titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2022.

Par acte du 21 novembre 2024, la société Editions Messignac a assigné en référé M. [N] devant le premier président aux fins d’arrêt de l’exécution provisoire en sollicitant que chaque partie conserve la charge de ses dépens.

A l’audience du 6 janvier 2025 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures, qu’elles ont soutenues oralement.

Dans son assignation, la société Editions Messignac soutient au visa de l’article 514 »3 du Code de procédure civile l’existence d’un moyen sérieux de réformation en ce que le conseil de prud’hommes n’a pas pris en compte le règlement de la somme de 12 659,60 € qu’elle a effectué le 5 mars 2024 au titre de la rémunération variable pour l’année 2022 ainsi que des congés payés afférents qu’elle estimait devoir.

S’agissant des conséquences manifestement excessives, la société Editions Messignac relève que sa situation financière est particulièrement préoccupante puisque ses disponibilités ne lui permettent pas de régler les condamnations prononcées à son encontre au profit de M. [N]. Elle explique que l’exécution provisoire risquerait d’entraîner des conséquences manifestement excessives au sens de l’article 514-3 du Code de procédure civile : dégradation supplémentaire de la trésorerie de la société, accroissement significatif de ses dettes sociales.

Dans ses conclusions déposées au greffe par RPVA le 23 décembre 2024, M. [N] s’oppose aux demandes de la société Editions Messignac et demande au délégué du premier président de condamner cette dernière à lui rembourser la somme de 128,74 € au titre de ses dépens et à lui payer la somme de 1 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il soutient l’absence de moyens sérieux de réformation concernant uniquement les sommes allouées par le conseil de prud’hommes au titre de la rémunération variable pour l’année 2022 et les congés payés afférents, qui sont seules discutées en appel, car la société Edtions Messignac avait reconnu par aveu judiciaire sa créance à ce titre à hauteur des condamnations prononcées, aveu suivi d’un versement de 12 659,60 € le 5 mars 2024. Il indique n’avoir pas l’intention de mettre à exécution la décision prud’homale sur le montant d’ores et déjà couvert par son employeur.

Il estime que l’erreur du conseil de prud’hommes qui n’a pas déduit le montant versé est sans conséquence sur l’exécution.

Il conteste l’existence de conséquences manifestement excessives au regard de l’insuffisance des pièces produites par la société Editions Messignac en relevant que l’attestation dressée par son expert-comptable utilise le conditionnel et est insuffisant à prouver la réalité de ses prétendues difficultés.

Elle réclame le paiement par la société Editions Messignac du montant des frais retenus par le commissaire de justice soit la somme de 128,74 €.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe par RPVA le 3 janvier 2024, la société Editions Messignac maintient les demandes contenues dans son assignation et sollicite le rejet de celles présentées par M. [N].

Le délégué du premier président a relevé d’office la question de son absence de pouvoir juridictionnel pour statuer sur les dépens de première instance ou sur l’affectation à l’une ou l’autre des parties des frais inhérents à l’exécution forcée de la décision de première instance.

Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Sur la demande principale d’arrêt de l’exécution provisoire

Attendu que l’article R.1454-28 du Code de travail dispose : « A moins que la loi ou le règlement n’en dispose autrement, les décisions du conseil de prud’hommes ne sont pas exécutoires de droit à titre provisoire. Le conseil de prud’hommes peut ordonner l’exécution provisoire de ses décisions.

Sont de droit exécutoires à titre provisoire, notamment :

1° Le jugement qui n’est susceptible d’appel que par suite d’une demande reconventionnelle ;

2° Le jugement qui ordonne la remise d’un certificat de travail, de bulletins de paie ou de toute pièce que l’employeur est tenu de délivrer ;

3° Le jugement qui ordonne le paiement de sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées au 2° de l’article R. 1454-14, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Cette moyenne est mentionnée dans le jugement. »

Que l’article R. 1454-14 du Code du travail prévoit énumère les condamnations qui sont assorties de cette exécution provisoire de droit :

«a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions ;

b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement ;

c) Le versement de l’indemnité compensatrice et de l’indemnité spéciale de licenciement en cas d’inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l’article L. 1226-14 ;

e) Le versement de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 et de l’indemnité de fin de mission mentionnée à l’article L. 1251-32 ;»

Attendu qu’en l’espèce, cette exécution provisoire de droit correspond à la somme maximale de 29 115 € équivalente à 9 mois de salaires et ne couvre pas l’intégralité des condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes susceptibles d’être exécutoire de droit soit 30 421,87 € ;

Que les parties ne sont pas contraires sur le fait que la somme de 12 659,60 € a été versée par la société Editions Messignac le 5 mars 2024 au titre de la rémunération variable pour l’année 2022, ce qui permet de retenir comme assortie de l’exécution provisoire de droit le solde des condamnations restant en litige soit 17 762,27 €, montant inférieur aux 9 mois de salaire moyen ; que l’engagement pris par M. [N] concernant la prise en compte de ce paiement est ainsi acté ;

Attendu que cette exécution provisoire de droit attachée au jugement rendu le le 11 juillet 2024 par le conseil de prud’hommes de Lyon ne peut être arrêtée, conformément aux dispositions de l’article 514-3 du Code de procédure civile, que lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu que contrairement à ce qui a été relevé par M. [N], la société Editions Messignac fait état dans ses dernières conclusions de référé d’une discussion du montant de la somme allouée par le conseil de prud’hommes au titre de la rémunération variable pour l’année 2023 en discutant ses modalités de calcul ; que la demanderesse est par ailleurs bien mal fondée à tenter de se référer dans le cadre de la présente instance à ses dernières conclusions de première instance «pour un plus ample exposé de son argumentation», ces écritures ne pouvant par nature contenir des moyens de réformation de la décision dont appel qui doivent être précisés dans le cadre de la présente instance ;

Qu’il ne ressort pas de son assignation et de ses conclusions déposées dans le cadre de la présente instance qu’elle entende former un appel incident de la décision du conseil de prud’hommes concernant la rémunération variable pour l’année 2023, mais il n’est pas discuté que la société Editions Messignac dispose encore d’un délai pour y procéder dans le cadre de l’appel devant la cour ;

Attendu que s’agissant de l’existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu’il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue en fonction des facultés de remboursement de l’intimé si la décision était infirmée, mais également de la situation personnelle et financière du débiteur ;

Qu’en outre, le caractère manifestement excessif des conséquences de la décision rendue ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d’une condamnation au paiement d’une somme d’argent ou d’une décision autorisant l’expulsion, mais ces conséquences doivent présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu qu’il appartient à la société Editions Messignac de rapporter la preuve de ces risques occasionnés par l’exécution provisoire ;

Attendu qu’elle produit à cet effet deux attestations de son expert-comptable :

– celle datée du 29 octobre 2024 qui procède par généralités et ne fournit aucun élément chiffré appuyant l’opinion de ce professionnel du chiffre qui relate l’existence de «difficultés de trésorerie», des «fonds disponibles insuffisants pour faire face aux indemnités demandées par le tribunal» et qui comme l’a relevé M. [N] utilise le conditionnel en indiquant que «l’exécution provisoire pourrait avoir des conséquences désastreuses sur la viabilité de l’entreprise, mettant en péril non seulement son activité, mais également l’emploi de ses salariés»,

– celle du 3 janvier 2025 retraçant l’évolution des soldes de comptes bancaires, notamment avec des soldes débiteurs de 3 427,84 € et de 3 357,44 € en novembre et en décembre 2024 et l’évolution des chiffres d’affaires passés de 619 504 € en 2023 à 521 775 € en 2024 comme faisant état d’une avance de la société Tamgram Finances de 25 908 € sur le deuxième semestre 2024 ;

Que comme l’a souligné M. [N], ces éléments sont bien insuffisants à retracer les véritables capacités financières de la société Editions Messignac et en particulier à établir que le maintien de l’exécution provisoire pour des montants oscillant entre 5 490,40 €, si elle ne forme pas appel incident sur la rémunération variable 2023 et 17 762,27 €, montant prenant en compte l’exécution déjà acquise de la décision du conseil de prud’hommes concernant la rémunération variable 2022 l’expose à des difficultés financières.

Attendu qu’ils sont d’autant plus parcellaires et inopérants à appuyer utilement la perspective alléguée d’un état de cessation des paiements présentée dans ses dernières écritures ;

Attendu que la société demanderesse défaille particulièrement à établir un risque de conséquences manifestement excessives en ce qu’elle ne produit pas ses bilans d’ores et déjà établis et ne tente pas de fournir des relevés de compte comportant un solde daté précisément ; qu’elle fait d’ailleurs état dans ses dernières écritures que d’une «dégradation supplémentaire de la trésorerie» et d’un «accroissement significatif des dettes sociales», expressions qui ne peuvent tenter de démontrer l’existence de conséquences disproportionnées ou irréversibles du maintien de l’exécution provisoire ;

Attendu qu’il convient en conséquence de cette carence probatoire de rejeter la demande d’arrêt de l’exécution provisoire de la société Editions Messignac sans qu’il soit besoin d’apprécier le sérieux des moyens de réformation qu’elle articule ;

Sur la demande reconventionnelle portant sur des frais d’huissier

Attendu que M. [N] réclame la condamnation de la société Editions Messignac à lui rembourser la somme de 128,74 € au titre de frais retenus par le commissaire de justice dans le cadre d’une tentative de saisie ;

Que cela a été relevé d’office sans que les parties n’entendent présenter d’observations sur ce point, le premier président est dépourvu de pouvoir juridictionnel pour statuer sur les dépens de première instance ou sur la prise en charge par l’une ou l’autre des parties des frais de recouvrement forcé ;

Que cette demande reconventionnelle présentée par M. [N] est irrecevable ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que la société Editions Messignac succombe et doit supporter les dépens de la présente instance en référé comme indemniser son adversaire des frais irrépétibles engagés pour assurer sa défense ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d’appel du 8 août 2024,

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire présentée par la S.A.S. Editions Messignac,

Déclarons M. [J] [N] irrecevable en sa demande en paiement de la somme de 128,74 €,

Condamnons la S.A.S. Editions Messignac aux dépens de ce référé et à verser à M. [J] [N] une indemnité de 800 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


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